L' arrêt de la Cour
Internationale de Justice du 10 octobre 2002 portant règlement de
différend frontalier sur la péninsule de Bakassi
BISSOHONG Albert
Analyste juridique
KISANGANI/R.D.CONGO
INTRODUCTION
Il est indéniable que bien des recherches ont
déjà été menées, sur la Cour Internationale
de Justice. Dans son étude SCHWEBEL S.M.(1) s'est fortement
préoccupé de mener des recherches sur la Cour Internationale de
Justice en établissant un rapport direct existant entre cette
dernière et les Nations Unies.
Au terme de sa recherche, il a abouti au résultat
selon lequel la C.I.J est et demeure étroitement liée aux Nations
Unies d'autant plus que l'établissement d'une juridiction internationale
permanente exige une organisation politique de la société
internationale.
Un autre auteur, Monsieur KEBA M'BAYE (2) s'est
grandement préoccupé de connaître l'intérêt
qui entoure toute action devant la Cour Internationale de Justice.
D'après son analyse, plusieurs requêtes sont jugées
irrecevables par la C.I.J pour défaut d'intérêt à
agir. Plusieurs saisines poursuivaient surtout un but politique et n'avaient
aucune chance d'être accueillies. Au terme de sa recherche, il a abouti
au résultat selon lequel pour agir devant la Cour Internationale de
Justice, l'intérêt doit être juridique. Il faut qu'il y ait
existence d'un différend juridique actuel et de caractère
international.
« ... Il est plus que difficile de vaincre la
répugnance des Etats à consentir à de sérieuses
limitations de souveraineté ... La vraie justice internationale n'existe
pas »(3)
Notre étude se démarque des travaux
antérieurs en ce sens qu'elle se propose d'étudier
l'« arrêt de la C.I.J. du 10 Octobre 2002 portant
règlement de différend frontalier sur la péninsule de
Bakassi ».
On ne s'étonnera pas que le Droit International soit
défini et accepté par des Etats eux-mêmes quant au
règlement de leur différend. La presqu'île de Bakassi a
été depuis une quinzaine d'années au centre de conflit
entre ces deux Etats, chacun réclamant la rétrocession de ladite
presqu'île à son profit étant donné la richesse
pétrolière potentielle. Eu égard à ce qui
précède, notre préoccupation est la suivante : La
Cour internationale de Justice a-t-elle effectivement joué un rôle
primordial dans le règlement de différend opposant le Cameroun au
Nigeria au sujet de la Presqu'île de Bakassi ?
Dans l'affirmative, par quels mécanismes juridiques
ladite Cour a-t-elle procédé ?
L'hypothèse du travail est à concevoir comme
l'affirmation permettant la vérification empirique(4). Et
QUETELET de poursuivre : « l'hypothèse de recherche est
l'affirmation possible présentant une relation entre deux ou plusieurs
variables. Ainsi, elle peut être une invention de l'esprit ou une
conception perpétuelle d'une réalité(1)
(1) SCHWEBEL, S.M., « Relations
between the I.C.J. and the U.N », Mel. Virally, 1991,
pp. 431-443.
(2) M'BAYE K,
« L'intérêt pour agir devant la
C.I.J », R.C.A.D.I, 1988-II, vol. 209, pp. 225-345
(3) WILFRID Jeandidier, Droit
pénal général, 2e éd.,
Montchrestien, Paris, 1991, pp. 210-212
(4) CAPLOW Théodore,
Enquête sociologique, Armand Collin, Paris,
1970, p.149.
En réponse aux questions susmentionnées, nous
relevons que : Plus la Cour Internationale de Justice intervient
effectivement dans le règlement de différend interétatique
plus elle contribuerait à restaurer un climat de bonne
coopération internationale, de bon voisinage et à ramener ces
Etats au respect scrupuleux du droit International d'autant plus qu'ils sont
eux-mêmes à l'origine dudit Droit.
L'objectif principal de cette étude consiste à
démontrer le rôle de la Cour Internationale de Justice dans le
règlement de différend frontalier opposant le Nigeria au
Cameroun.
Quelle meilleure référence que cette citation de
Henri Capitant, dans sa préface au premier ouvrage de
méthodologie qui a guidé des générations de
« thésards » : « Avoir de la
méthode, tout est là. Faute de ce fil conducteur, on perd un
temps précieux, on disperse ses efforts, on n'arrive pas à
dominer son sujet. »(2)
La fidélité au texte légal est la
première règle à devoir suivre. C'est pourquoi tout
juriste devant appliquer le droit écrit est tenu d'aller consulter en
premier lieu le texte pour comprendre et le confronter avec la situation
juridique qui lui est soumise ...(3) Et comme si cela ne suffisait
pas, Madeleine Grawitz complète en disant que « la
méthode, moyen de parvenir à un aspect de la vérité
de répondre plus particulièrement à la question
« comment », est liée au problème de
l'explication » (4)
Ainsi, nous avons utilisé la méthode juridique
d'interprétation vérifiant la conformité du fait social au
texte légal en vue de vérifier nos hypothèses. Pour y
arriver, outre la consultation des données sur le site Internet, nous
avons fait recours à la technique documentaire qui nous a
permis de consulter les écrits de certains auteurs qui ont fait
autorité dans ce domaine pour l'augmentation nécessaire des
idées relatives à la production de ce travail. D'après
BOULANGER, la lecture des travaux antérieurs nous permet de
pénétrer les pensées de leurs auteurs, d'apprécier
les difficultés qu'ils ont rencontrées et les moyens
utilisés pour les surmonter, de saisir l'originalité de leur
contribution et les lacunes qu'une autre recherche devront combler
(5).
Outre l'introduction, ce travail comprend deux points
essentiels à savoir : Le fondement juridique des activités
de la Cour Internationale de Justice (1) ; la procédure de la Cour
Internationale de Justice dans l'affaire de la frontière maritime et
terrestre entre Cameroun et le Nigeria (2). Une conclusion condensera notre
travail.
(1) QUETELET A., Processus de
recherche sur une approche systémique, Presse
Universitaire de Québec, Québec, 1981, p. 30.
(2) Henri CAPITANT, La Thèse de
doctorat en Droit, 4e éd., Dalloz, Paris, 1991.
(3) LAMY E., Droit privé
Zaïrois, P.U.Z, Kinshasa, 1975, p. 228.
(4) GRAWITZ M., Méthodes des
sciences sociales, 11e éd, Dalloz, Paris, p.
419.
(5) BOULANGER G.B., La recherche en
sciences humaines, Ed. Universitaires, Paris, 1970, p. 22.
1. Fondement juridique des activités
de la Cour Internationale de Justice
Dans cette section, nous portons notre réflexion
herméneutique sur le Droit applicable devant la Cour Internationale de
Justice et la fonction contentieuse de la Cour.
1.1. Droit applicable devant
la Cour Internationale de Justice
Quid de la Cour Internationale de Justice ? Contrairement
à un Tribunal arbitral, une juridiction internationale est un organe
permanent, qui est relié à une organisation internationale ... La
principale juridiction internationale, aussi bien par l'importance de ses
décisions que par l'étendue de ses compétences, est
aujourd'hui la Cour Internationale de Justice (C.I.J).(1) La Cour
Internationale de Justice a été créée dans le cadre
des Nations Unies, en tant qu'« organe judiciaire
principal ».(2) Elle succède donc en 1945 à
la Cour Permanente de Justice Internationale qui avait été
créée par la Société des Nations (S.d.N).
Le statut de la Cour Internationale de Justice est
calqué sur celui de la Cour Permanente de Justice Internationale
(C.P.J.I). Il lui donne les instruments nécessaires pour appliquer le
droit international, même si l'activité juridictionnelle de la
Cour Internationale de Justice reste tributaire du consentement des Etats. La
Cour Internationale de Justice est l'un des six organes principaux de l'O.N.U.
Elle est son seul organe judiciaire, ce qui la rend souveraine dans son ordre
juridique. Elle a compétence universelle puisque tous les membres des
Nations Unies sont de ce fait parties à son statut. Les Etats
n'appartenant pas à l'organisation des Nations Unies (O.N.U) peuvent
devenir parties au statut sous certaines conditions. La mission de la Cour
Internationale de Justice est « de régler conformément
au droit international les différends qui lui sont
soumis »(3) Le droit applicable pour cela est :
· Les conventions internationales, soit
générales, soit spéciales, établissant des
règles expressément reconnues par les Etats en litige.
· La coutume internationale comme preuve d'une pratique
générale, acceptée comme étant le droit.
· Les principes généraux de droit reconnus
par les nations civilisées.
· Sous réserve de la disposition de l'Article 59,
les décisions judiciaires et la doctrine des publicistes les plus
qualifiés des différentes nations, comme moyen auxiliaire de
détermination des règles de droit.
Elle peut également statuer ex aequo et bono (en
équité) si elle y est autorisée par les deux parties
(l'article 38, al. 2 du statut de la C.I.J.). Elle a néanmoins
utilisé d'elle-même la notion d'équité en tant que
(1) Catherine ROCHE, L'essentiel du
Droit International Public et du droit des relations
internationales, 2e éd., Gualino, Paris, 2003,
p. 100.
(2) Art. 92 de la charte des Nations
Unies.
(3) L'article 38 al. 1 du statut de la
Cour Internationale de Justice.
partie intégrante de l'interprétation de la norme
juridique, c'est ce qu'on appelle la « suppléance
normative ». En effet, comme elle l'affirme dans son
arrêt Cameroun septentrional
(1963) : « sa fonction est de dire le droit mais elle ne
peut rendre des arrêts qu'à l'occasion de cas concrets dans
lesquels il existe, au moment du jugement, un litige impliquant un conflit
d'intérêts juridiques entre les Etats. »
Que ce soit par ses arrêts ou par ses avis consultatifs,
la Cour Internationale de Justice a contribué au développement
progressif du droit international public imposant une conception plus flexible
et insistant sur l'importance de la coutume (pratique générale et
opinio juris des Etats). Pour elle, la coutume peut s'exprimer dans les
conventions et traités internationaux par effet
déclaratoire (la coutume préexiste à la
convention), effet de cristallisation
(règle en voie de formation) ou effet
constitutif (une disposition conventionnelle devient une
coutume).
La fonction de la Cour est de dire le droit, bien entendu le
droit international. Mais elle ne peut rendre des arrêts qu'à
l'occasion des cas concrets dans lesquels il existe au moment du jugement, un
litige réel impliquant un conflit d'intérêts juridiques
entre les parties. L'arrêt de la Cour doit avoir des conséquences
pratiques en ce sens qu'il doit pouvoir affecter les droits et obligations
juridiques existants des parties, dissipant ainsi toute incertitude dans leurs
relations juridiques.
1.2. Fonction contentieuse
de la Cour Internationale de Justice
Seuls les Etats ont qualité pour agir dans le cadre de
la compétence contentieuse. L'article 34, §1 du statut est
catégorique : « seuls les Etats ont qualité pour
se présenter devant la Cour ».
En principe, la Cour n'est ouverte qu'aux Etats qui sont
parties au statut. Il s'agit, en premier lieu, de tous les membres de
l'organisation des Nations Unies, qui sont automatiquement parties au statut
puisque celui-ci est annexé à la charte. Ce sont en outre les
Etats non membres qui, conformément à l'article 93, §2 de la
charte des Nations Unies sont devenus parties au statut en acceptant les
conditions fixées cas par cas par l'Assemblée
Générale bien entendu sur recommandation du conseil de
sécurité.
Mais l'article 35, §2 dispose : « Les
conditions auxquelles elle est ouverte aux autres Etats sont sous
réserve des dispositions particulières des traités en
vigueur, réglées par le Conseil de Sécurité et,
dans tous les cas, sans qu'il puisse en résulter pour les parties aucune
inégalité devant la Cour. Que remarque-t-on ? L'article 35,
§2 du statut prévoit par dérogation au principe
précédent la possibilité pour les autres Etats qui ne sont
pas parties au statut d'accéder à la Cour aux conditions
fixées par le conseil de sécurité ; ce dernier doit
veiller à ce que l'égalité des parties au litige soit
assurée(1). Il convient de savoir que l'exclusion des
personnes
(1) Voir sa résolution du 15
octobre 1946 dans l'affaire du Détroit de Corfou.
privées ne signifie pas que les litiges portés
devant la Cour ne concernent jamais les particuliers. Par contre, de nombreuses
affaires jugées par la Cour Permanente de Justice Internationale puis
par la Cour Internationale de Justice, en matière de
responsabilité internationale résultent de la mise en oeuvre de
la protection diplomatique par des Etats qui ont pris fait et cause pour leurs
ressortissants et ont défendu leurs intérêts.
En effet, l'article 34, §1 du statut de la Cour interdit
aux organisations internationales d'apparaître en position de demandeur
ou de défendeur devant la Cour Internationale de Justice. Cependant, les
paragraphes 2 et 3 de cet article prévoient la possibilité d'une
collaboration entre elle et la Cour. La Cour peut, notamment, leur demander des
renseignements relatifs aux affaires qu'elle examine. Les organisations peuvent
même de leur propre initiative, adresser des informations à la
cour. Si l'instruction d'une affaire contentieuse conduit la Cour à
interpréter l'acte constitutif d'une organisation ou d'une convention
conclue en vertu de cet acte, le greffier de la Cour Internationale de Justice
doit en aviser l'organisation concernée et lui communiquer la
procédure écrite pour lui permettre de prendre
position.(1) Ni en 1921 ni en 1945, les Etats n'ont voulu limiter
leur souveraineté en créant une juridiction obligatoire de
règlement des conflits. La Cour Internationale de justice n'est
compétente que lorsque les parties se soumettent à sa
juridiction. Il y a trois moyens d'y parvenir :
- Les deux parties concluent un compromis, convenant de
soumettre leur différend à la Cour. Ce mode de saisine se
rapproche assez du compromis d'arbitrage.
- Certains traités ou conventions comportent des
clauses compromissoires énonçant que les litiges concernant
l'interprétation ou l'application du traité devront être
soumis à la Cour Internationale de Justice. Exemple : le
traité liant les Etats-Unis et le Nicaragua, ce qui a donné la
célèbre décision Nicaragua contre Etats-Unis de 1986
(Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre
celui-ci).
- Un Etat peut souscrire à une déclaration
facultative de juridiction obligatoire (Article 36-2 du statut de la Cour
Internationale de Justice).
Cette déclaration peut se faire purement et simplement
sous condition de réciprocité ou pour un délai de
réciprocité. Des réserves (excluant certains domaines de
litiges) sont également possibles.
La France, après avoir accepté la juridiction
obligatoire en 1966 (assortie d'une réserve concernant la défense
nationale, en particulier le nucléaire), a abrogé sa
déclaration en 1973. La Cour Internationale de Justice a la
compétence de sa compétence : si un Etat
(1) DAILLIER P., PELLET A., NGUYEN QUOC
DINH, Droit International Public, 7e éd.,
L.G.D.J., Paris, 2002, pp. 894-895.
soulève une exception préliminaire à
l'examen du litige par la Cour, il appartient à celle-ci de juger si
elle est compétente ou non.
C'est ce qu'elle a fait dans une série d'arrêts
de décembre 2004 opposant la Serbie Monténégro aux
puissances qui l'avaient bombardée en 1999 : confirmant un premier
arrêt rendu à cette date par lequel la République
Fédérale de Yougoslavie demandait que des mesures conservatoires
soient prises pour interrompre les bombardements contre son territoire, la Cour
a estimé qu'elle n'était pas compétente pour se prononcer
sur la question de la licéité de l'usage de la force contre la
Serbie-Monténégro au motif principal que ce pays n'était
pas membre de l'organisation des Nations Unies à la date où il a
formé le recours. Une fois rendue, la décision est obligatoire
pour les parties (Article 59 du statut, Article 94 de la charte des Nations
Unies). En cas de non-exécution par l'une des parties, le conseil de
sécurité peut être saisi par l'autre partie. La Cour
Internationale de Justice est l'organe judiciaire principal des Nations Unies
(article 92 de la charte des Nations Unies). C'est une juridiction permanente
siégeant à la Haye.
La fonction de la cour est de dire le droit quand un litige
réel et concret se pose (affaire du Cameroun septentrional). La C.I.J.
est juge de sa propre compétence (article 36 du statut). Elle se
prononce sur les exceptions préliminaires. Elle indique les mesures
conservatoires qui doivent être prises en cas d'imminence d'un
préjudice irréparable ou d'un risque d'aggravation du
différend. Elle peut rejeter la demande de mesures conservatoires.
L'arrêt est rendu à la majorité des membres et la voix du
président est prépondérante en cas d'égalité
(article 55 du statut de la C.I.J). Il est obligatoire et a donc
l'autorité de la chose jugée pour les parties au litige. Il est
définitif et insusceptible de recours. La révision n'est possible
qu'en cas de découverte d'un fait de nature à exercer une
influence décisive sur le jugement, fait inconnu au moment du premier
jugement par la partie qui demande la révision. Quant aux règles
de fonds, la demande n'est recevable que si :
- Les recours internes sont épuisés dans le cas
de la protection diplomatique.
- Il existe un différend justiciable.
- Il y a qualité et intérêt à agir
des parties.
Le jugement se fait en fonction du droit International mais
l'appel au droit interne est possible.
Le principe qui fonde la compétence de la Cour c'est le
consentement de l'Etat. Seuls les Etats ont la qualité de se
présenter devant la Cour Internationale de Justice : les
organisations internationales et les particuliers sont donc exclus (article 34
du statut de la C.I.J). Que dès lors comprendre du principe de
juridiction facultative ? On entend par
là que, à la différence de la situation des particuliers
devant les tribunaux internes, les Etats ne sont soumis à la juridiction
de la Cour pour un litige donné que pour autant qu'ils y consentent.
Dès lors que les Etats y consentent, la C.I.J. est
compétente. L'expression du consentement doit être claire et la
C.I.J. examine les actes et comportements qui expriment ce consentement. La
compétence de la C.I.J. s'étend à toutes les questions que
les parties lui soumettent (article 36 du statut de la C.I.J.).
La nécessité d'un consentement des Etats parties
pour que la Cour puisse exercer sa compétence contentieuse est
rappelée systématiquement en termes catégoriques par les
deux Cours : « La juridiction de la Cour dépend de la
volonté des parties »(1). « La Cour ne
peut exercer sa juridiction à l'égard d'un Etat si ce n'est avec
le consentement de ce dernier »(2). En principe, il n'y a
pas de difficulté lorsque la Cour est saisie par une initiative commune
des parties. Par contre, la Cour doit procéder à un examen plus
attentif si le fondement de la saisine réside dans une série
d'actes et de comportements, c'est-à-dire lorsque l'une des parties
s'abstient de comparaître ou de faire valoir ses moyens (affaire du
plateau continental de la mer Egée, compétence, Rec. 1978,
p.9 ; arrêt du 30 juin 1995, Timor oriental, Portugal contre
Australie, §26).Dans le cadre de la juridiction facultative, la Cour est
saisie en règle générale par voie de compromis, document
où s'exprime le consentement des parties. Puisque la C.I.J. est une
institution permanente, le compromis n'a pas à fixer la composition du
tribunal ni sa procédure. La différence avec les compromis
arbitraux est en principe très nette sous cet angle.(3)
Cependant, la faculté offerte aux parties, par les
articles 26 et 31 du statut de la Cour de participer à la
détermination des membres d'une chambre spécialisée, ainsi
que de suggérer à cette chambre certains éléments
de la procédure rapproche à cet effet égard le compromis
juridictionnel du compromis arbitral (voir le compromis du 29 Mars 1979 entre
les Etats-Unis et le Canada dans l'affaire de la délitation de la
frontière maritime dans la région du Golfe du Maine, Rec. 1984,
p.252 et S., celui du 16 septembre 1983 entre la Haute-volta et le Mali dans
l'affaire du différend frontalier, Rec. 1986, p. 558, ou encore celui du
24 Mai 1986 entre El Salvador et le Honduras dans l'affaire du différend
frontalier terrestre, insulaire et maritime, Rec. 1992, p. 356 ; voir
aussi L. Marion(4).
L'article 36, §1 du statut prévoit en effet que
« la compétence de la Cour s'étend à toutes les
affaires que les parties lui soumettront, ainsi qu'à tous les cas
spécialement prévus dans la charte des Nations Unies ou dans les
traités et conventions en vigueur. » Et la Cour Permanente de
Justice Internationale a confirmé qu' «il n'y a aucun
différend que les Etats admis à ester devant la Cour ne puissent
lui soumettre »(5). La compétence de la cour
est liée par ces indications à condition qu'elles ne contredisent
pas les limites naturelles de la fonction
(1) C.P.J.I., affaire des Droits des
minorités en Haute-silésie, série A,
n°15, p. 22 ; usine de chorzow, arrêt sur le fond, série
A, n°17, pp. 37-38
(2) C.I.J., affaire de l'or
monétaire pris à Rome en 1943, Rec. 1954, p. 32.
(3) DAILLIER P., PELLET A., NGUYEN QUOC DINH,
op.cit, p. 895.
(4) MARION L., « La saisine
de la C.I.J. par voie de compromis », R.G.D.P., 1995,
pp. 257-300
(5) Arrêt du 26 Avril 1928, affaire
des Droits des minorités en Haute-silésie (écoles
minoritaires).
juridictionnelle. Les parties peuvent-elles également
apporter des précisions quant au droit applicable, au risque de
contredire les directives du statut de la cour ? La cour l'admet tout en
se réservant d'assurer la compatibilité sur ce point entre le
compromis et l'article 38 de son statut (C.I.J, affaire du plateau continental,
Tunisie-Libye, Rec. 1982, p. 37).
La compétence de la Cour Internationale de Justice est
obligatoire quand elle est prévue par un traité ou un acte
unilatéral d'un Etat qui reconnaît sa compétence
facultative (article 36 du statut de la C.I.J.) ; par des clauses
conventionnelles spéciales de juridiction obligatoire (Exemple :
C.I.J., affaire de Téhéran, Etats-Unis contre Iran, 1980 :
Les Etats-Unis soumettent le litige à la C.I.J. sur le fondement de la
convention de Vienne (1961 et 1963) ; par des Traités
généraux relatifs au règlement des différends
(Exemple : convention européenne de règlement pacifique des
différends de 1957). La juridiction obligatoire de la C.I.J est de plein
droit sans convention spéciale sur tout différend d'ordre
juridique international dès lors que les Etats en litige ont
adressé leur déclaration d'acceptation au secrétaire
général des Nations Unies qui l'envoie aux autres Etats. Cette
déclaration peut être retirée à tout moment
(Exemples : La France retire cette clause en 1974 pour éviter la
juridiction de la C.I.J sur les essais nucléaires ; les Etats-Unis
de même en 1985 après l'affaire du Nicaragua).
Exceptions qui limitent sa compétence :
· Réserves : Les
déclarations d'acceptation sont souvent accompagnées de
réserves. Elles limitent le champ d'application de la C.I.J soit dans la
durée, soit sur des catégories de différends, soit un
retrait avec un court préavis (Exemple : avec la déclaration
américaine du 14 Août 1946, le sénateur CONNELI
énonçait une réserve automatique dans certains conflits
déterminés où les Etats-Unis exercent leur
compétence nationale).
·
Réciprocité : L'Etat défendeur peut
émettre des réserves supplémentaires de même nature
que le plaignant qui émet certaines réserves (Exemple :
C.I.J, Affaire des emprunts Norvégiens, 6 juillet 1957, Norvège
C/France : Norvège est fondée dans les mêmes
conditions que la France à exclure la compétence de la C.I.J.).
Juridiction
« obligatoire » : il s'agit en
réalité d'un cas particulier du consentement des Etats au
règlement juridictionnel des différends. Ce consentement reste
nécessaire, mais il ne porte plus sur un différend né.
L'engagement de se soumettre à la juridiction de la cour porte sur des
différends éventuels, plus ou moins définis à
l'avance. La juridiction de la cour est « obligatoire »
parce que l'accord des parties est contenu, à l'avance, dans un acte
juridique contraignant. Cette obligation résulte, selon le cas, soit
d'un consentement conventionnel, donc mutuel, soit de la rencontre de deux
consentements unilatéraux. « Dans le cadre de sa fonction
contentieuse, seuls les Etats pouvant se présenter devant la cour, ni
les particuliers, ni les organisations internationales ne pouvant agir
directement. Mais une fois encore, les Etats ne sont soumis à cette
juridiction que s'ils l'ont accepté. L'acceptation a lieu soit
après la naissance du différend par le biais d'un compromis
juridictionnel, soit avant si l'Etat a signé la clause facultative de
juridiction obligatoire (article 36, §2) : clause à laquelle
l'Etat est libre d'adhérer, mais qui le soumet obligatoirement à
la juridiction de la cour s'il l'a fait. Comme dans le cas de l'arbitrage, la
cour a la compétence de sa compétence, en revanche la
procédure n'est pas définie par les Etats, mais par le statut de
la cour. Elle se déroule en deux phases : la première phase
est écrite avec l'envoi de mémoires et contre-mémoires,
puis la seconde est orale avec audition des experts, avocats, ... La cour ne
peut statuer ex aequo et bono c'est-à-dire en équité que
sur accord des parties, et si elle l'estime nécessaire, elle peut
édicter des mesures conservatoires. L'arrêt rendu par la cour a
l'effet relatif de la chose jugée et il est obligatoire et
définitif pour les parties. »(1). La clause
d'option ou la clause facultative de juridiction obligatoire de la Cour est
offerte aux Etats par l'article 36, §2 de son statut, reproduction
fidèle de la clause correspondante du statut de la Cour Permanente de
Justice Internationale qui dispose : « Les Etats parties au
présent statut pourront, à n'importe quel moment, déclarer
reconnaître comme obligatoire de plein droit et sans convention
spéciale à l'égard de tout autre Etat acceptant la
même obligation, la juridiction de la Cour sur tous les différends
d'ordre juridique ayant pour objet :
a) l'interprétation d'un traité ; b) tout
point de droit international ; c) la réalité de tout fait
qui, s'il était établi, constituerait la violation d'un
engagement international ; d) la nature ou l'étendue de la
réparation due pour la rupture d'un engagement
international ».
Pour souscrire à la « clause facultative de
juridiction obligatoire », il suffit que l'Etat soit partie au statut
de la Cour et adresse une déclaration d'acceptation, comme nous l'avions
dit précédemment, au secrétaire général des
Nations Unies qui en transmettra copie aux autres parties au statut et au
greffier de la Cour(2).
Dans l'affaire des « Activités militaires,
contre le Nicaragua », la C.I.J. a estimé qu'il ne convenait
pas de faire preuve d'un formalisme excessif sur l'expression du consentement.
En l'espèce, l'instrument de ratification du statut de la C.P.J.I. par
le Nicaragua, condition nécessaire à la prise d'effet d'une
déclaration d'acceptation de la juridiction datant de 1929, n'avait pas
été reçu. La C.I.J. a considéré que le
consentement à être lié par cette déclaration
résultait d'un certain nombre d'indices formels non contredits par des
objections de l'Etat concerné (Rec. 1984, p. 413). Il est vrai que
certains de ces indices émanaient des services de la Cour ou du
secrétariat de l'O.N.U. Il convient de savoir que les
déclarations d'acceptation de la juridiction de la C.PJ.I., peuvent en
vertu de l'article 36, §5 du statut de la C.I.J., s'appliquer à
celle-ci lorsque leur durée l'autorise et que l'Etat auteur de la
déclaration est devenu immédiatement
(1) Catherine ROCHE,
op.cit, p. 101.
(2) Article 36, §4 du statut de la
C.I.J.
partie au statut de la C.I.J.(1) « A la
veille de la seconde guerre mondiale, cinquante-quatre des cinquante-neuf Etats
parties au statut de la C.P.J.I. avaient accepté la clause d'option. En
1993, 56 sur les 185 Etats parties avaient fait cette déclaration. Aucun
Etat n'avait jamais souscrit à cette clause ; depuis 1991,
l'attitude de plusieurs Etats d'Europe centrale s'est inversée.
Après les dénonciations de la France en 1974 (après
l'ordonnance du 22 juin 1973 dans l'affaire des essais nucléaires), des
Etats-Unis en 1985 (après l'arrêt du 26 novembre 1984 dans
l'affaire des activités militaires au Nicaragua), seul, parmi les
membres permanents du conseil de sécurité, le Royaume-Uni demeure
lié par l'article 36, §2. »(2)
Cependant, en vertu du principe de réciprocité,
lorsque la Cour est saisie par une requête unilatérale
fondée sur l'article 36, §2, la juridiction de la Cour n'est
établie que si les deux Etats sont également liés par leur
déclaration d'acceptation. Toute défection réduit donc de
façon très sensible le champ de la juridiction obligatoire. De
très nombreux Etats ont accompagné leur déclaration
d'acceptation de « réserves ». Ces dernières
tendent à limiter le champ d'application de l'engagement dans le temps
et d'un point de vue matériel. Dans la pratique, l'effet limitatif des
réserves est multiplié par le jeu du principe de
réciprocité, qui autorisera l'Etat défendeur à
invoquer à son profit les réserves contenues dans la
déclaration d'acceptation de l'Etat demandeur.
Les réserves sont des actes unilatéraux
émanant des Etats qui indiquent par là le degré et la
portée de leur engagement, c'est-à-dire qu'il interprète
ou au besoin indique de ne pas admettre telle ou telle disposition d'un
traité. « Un Etat peut estimer au cours du processus de
conclusion d'un traité que certaines dispositions du texte ne lui
conviennent pas, bien qu'il approuve la plupart du dispositif de l'accord. Il
peut alors, soit ne pas devenir partie au traité dans son ensemble, soit
faire une déclaration unilatérale en vue d'exclure de son
engagement ces dispositions. On dit alors que l'Etat, tout en devenant partie
au Traité, formule des réserves ».(3) Le
consentement à être lié à un Traité
multilatéral peut être limité par des réserves.
· Limites de l'action de la Cour Internationale
de Justice :
· Confinement aux conflits limités et
marginaux
Depuis 1945, la C.I.J. est restée impuissante en ce qui
concerne les conflits majeurs entre Etats et par conséquent
politiquement plus sensibles, faute de saisine volontaire par les Etats. Son
action a donc été limitée aux conflits marginaux.
· Concurrence d'autres modes de
règlement pacifique des différends : La
C.I.J. n'est pas le seul moyen de règlement
(1) C.I.J, affaire précitée
des activités militaires au Nicaragua, Rec. 1984, p. 408.
(2) DAILLIER P., PELLET A., NGUYEN QUOC DINH,
Op.Cit, p. 899.
(3) Catherine ROCHE,
op.cit, p. 20.
pacifique des différends mis à la disposition
des Etats. L'article 33 de la charte de Nations Unies en précise un
certain nombre : « Les parties à tout différend
dont la prolongation est susceptible de menacer le maintien de la paix et de la
sécurité internationales doivent en rechercher la solution, avant
tout, par voie de négociation, d'enquête, de médiation, de
conciliation, d'arbitrage, de règlement judiciaire, de recours aux
organismes ou accords régionaux, ou par d'autres moyens pacifiques de
leur choix ». La multiplication des instances judiciaires
internationales vient également limiter le champ d'action de la C.I.J.
On peut citer le Tribunal International du Droit de la Mer, né de la
convention de Montego Bay de 1982, qui empiète directement sur les
compétences de la C.I.J. en matière de délimitation
maritime.
2. PROCEDURE DE LA C.I.J. DANS L'AFFAIRE DE LA
FRONTIERE MARITIME ET TERRESTRE ENTRE LE CAMEROUN ET LE NIGERIA
2.1. La saisine de la C.I.J.
Les relations bilatérales Camerouno-nigérianes
retracent dans leur complexité les difficultés de la cohabitation
entre un pays au territoire très étendu et régi par une
structure fédérale et un autre aux dimensions plus modestes avec
un régime unitaire décentralisé et un pouvoir central plus
effectif. Afin de mieux situer la problématique des incertitudes
frontalières, il y a intérêt à retracer la situation
à partir des accords entre les puissances colonisatrices. En effet, la
délimitation des frontières entre le Cameroun et le Nigeria fait
l'objet des instruments juridiques couvrant la période allant du
congrès de Berlin (1884) à la fin de la colonisation (1960) d'une
part et de l'indépendance des deux pays à nos jours d'autre part.
· Accord germano-britannique (Avril-Juin
1885)
Il définit au lendemain du partage de l'Afrique les
sphères d'influence de l'Allemagne et de la Grande Bretagne à
partir de la côte du Golfe de Guinée. Par cet accord, la
séparation des sphères des deux puissances est
délimitée sur la côte par la rive droite du Rio del Rey qui
se jette dans la Mer.
· Accord anglo-allemand (11 Mars 1913)
Il concerne le tracé de la frontière entre le
Cameroun et le Nigeria de Yola à la Mer et la Réglementation de
la navigation sur la Cross-River. Cet accord résout toutes les
ambiguïtés probables et sert de document de référence
grâce à sa clarté sur le tracé de la
frontière entre le Cameroun et le Nigeria. Il est important de savoir
qu'un « accord » est une forme de traité
bilatéral non soumis à la ratification et qui entre en vigueur
dès sa signature. On l'a souvent taxé de traité de moindre
importance. Cependant, cet accord en forme simplifiée connaît un
important développement à l'époque contemporaine et n'est
nullement un traité d'importance secondaire.
· Déclaration de Maroua
(1er juin 1975)
Les Chefs d'Etat camerounais et Nigérian conviennent de
prolonger le tracé de la frontière maritime du point 12 au Point
G.
«La déclaration » est une
résolution adoptée par l'assemblée générale
des Nations Unies dans le but d'énoncer et de créer un
« modus vivendi » au sein de la communauté
internationale. On la considère à juste titre comme un code
d'éthique entre les Etats. Sa valeur juridique est souvent
controversée, car elle n'est assortie d'aucun mécanisme de
garantie(1). En titre d'exemple, la déclaration universelle
des droits de l'homme. Par contre, la déclaration de
paix est un simple discours tenu par un (des) Chef(s) d'Etat ou
de Gouvernement ou encore, par le ministre des affaires
étrangères pour réclamer un cessez-le-feu de la partie
adverse. La déclaration de Maroua fait partie d'une déclaration
de paix.
· Rencontre d'Abuja (10 Août 1991)
Le Chef de l'Etat Camerounais Paul BIYA se rend à Abuja
pour relancer les négociations sur les questions des frontières
suite à la menace d'occupation des zones lacustres du Cameroun par les
forces de l'ordre du Nigeria, sous prétexte de protéger les
pêcheurs Nigérians du lac tchad.
· Invasion nigériane à Bakassi
(21 Décembre 1993)
Au mépris de la Charte de l'Organisation de
l'Unité Africaine (O.U.A), notamment des principes du respect des
frontières héritées de la colonisation et du
règlement pacifique des différends et au mépris de tous
les accords conclus entre les deux pays depuis 1961, les forces armées
nigérianes franchissent la frontière et s'installent dans la
péninsule de Bakassi, précisément dans les
localités de Jabane et Diamond.
Eu égard à tout ce qui précède, le
Cameroun finit par procéder à la saisine de la C.I.J. Le 29 Mars
1994, ce fut la saisine de la C.I.J. : requête introductive du
Cameroun contre le Nigeria auprès de la C.I.J demandant de
reconnaître la souveraineté Camerounaise sur la presqu'île
de Bakassi. Le gouvernement de la République du Cameroun dépose
au Greffe de la Cour une requête introductive d'instance contre le
gouvernement de la République fédérale du Nigeria au sujet
d'un différend présenté comme « portant
essentiellement sur la question de la souveraineté sur la
péninsule de Bakassi ». Le Cameroun expose en outre dans sa
requête que la « délimitation de la frontière
maritime entre les deux Etats demeure partielle et que les deux parties ne
peuvent malgré de nombreuses tentatives, se mettre d'accord pour la
compléter ». Il prie en conséquence la Cour,
« afin d'éviter de nouveaux incidents entre les deux pays ...,
de bien vouloir déterminer le tracé de la frontière
maritime entre les deux Etats au-delà de celui qui est fixé en
1975 ». La requête invoque, pour fonder la compétence de
la Cour, les déclarations par lesquelles les deux parties acceptent la
juridiction de la Cour au titre du paragraphe 2 de l'article 36 du statut de la
C.I.J. Et conformément au paragraphe 2 de l'article 40 du statut de la
Cour, la requête est immédiatement communiquée au
gouvernement du Nigeria par le Greffier.
(1) HUMPREY, J., « La nature juridique
de la déclaration universelle des droits de l'homme », 12,
R.G.D.P., 1981, p. 397.
Le 06 Juin 1994, comme si la première requête ne
suffisait pas, le Cameroun dépose au Greffe une requête
additionnelle « aux fins d'élargissement de l'objet du
différend » à un autre différend décrit
dans cette requête additionnelle comme « portant
essentiellement sur la question de la souveraineté sur une partie du
territoire Camerounais dans la zone du lac Tchad ». Le Cameroun
demande également à la Cour, dans sa requête additionnelle,
de « préciser définitivement » la
frontière entre les deux Etats, du lac Tchad à la Mer, et la prie
de joindre les deux requêtes et « d'examiner l'ensemble en une
seule et même instance ». La requête additionnelle se
réfère, pour fonder la compétence de la Cour, à la
base de compétence déjà indiquée » dans
la requête introductive d'instance du 29 Mars 1994. Le greffier
communique, le 07 Juin 1994, la requête additionnelle au gouvernement du
Nigeria. La péninsule de Bakassi est une région d'un millier de
Km2 qui permet d'accéder au port Nigérian de Calabar.
Elle détermine la maîtrise exclusive des eaux territoriales et de
la zone économique d'une région riche en ressources
minières et en pétrole. Le Nigeria, du fait de sa population,
fait quelque peu pression sur son voisin Camerounais notamment sur les 1.800 Km
de frontière. Cette situation a atteint son apogée avec l'affaire
de la Presqu'île de Bakassi(1). La faiblesse de
l'armée Camerounaise, comparée à celle de son voisin,
explique le choix de ce pays pour une solution diplomatique. C'est du moins ce
que suggère un annexe du procès-verbal de la séance du 07
Avril 1998 du sénat français. Le Cameroun accuse, en effet le
Nigeria d'avoir au travers de son attaque violé son territoire, dont les
tracés ont été hérités de la colonisation.
Ceci alors que le Droit International Public est immuable sur la question des
limites territoriales puisque « le territoire est l'un des
éléments constitutifs d'un Etat. »(2)
Retenons que le 22 Mars 1994, le Cameroun soumet à la
Cour, organe judiciaire principal des Nations Unies, par son Excellence
Isabelle Bassong, ambassadeur du Cameroun au BENELUX, une requête
introductive d'instance contre la République Fédérale du
Nigeria. Selon le document original :
- Le différend porte essentiellement sur la question de
la souveraineté sur la presqu'île de Bakassi, un territoire
d'environ 665 Km2 entre la Cross River et le Rio del Rey dont la
République Fédérale du Nigeria conteste l'appartenance
à la République du Cameroun.
- Cette contestation a pris la forme, depuis la fin de
l'année 1993, d'une agression de la part de la République
Fédérale du Nigeria dont les troupes occupent plusieurs
localités Camerounaises dans la presqu'île de Bakassi. Il en
résulte de graves préjudices pour la République du
Cameroun dont il est demandé respectueusement à la Cour de bien
vouloir ordonner la réparation.
- Afin d'éviter de nouveaux incidents entre les deux
pays, la République du Cameroun prie la Cour de bien vouloir
déterminer le
(1) Disponible sur http :
//www.afrik.com
(2) Catherine ROCHE,
op.cit, pp. 51-52.
tracé de la frontière maritime entre les deux
Etats au-delà de celui qui avait été fixé en
1975.
En dernière analyse, comme nous l'avions
déjà dit, le 06 juin 1994, le Cameroun introduit une
requête additionnelle dont l'objet du différend porte
essentiellement sur la question de la souveraineté sur une partie du
territoire Camerounais dans la Zone du lac Tchad située entre les
frontières Cameroun-Nigeria et Cameroun-Tchad jusque vers le milieu des
eaux restantes dont la république Fédérale du Nigeria
conteste l'appartenance à la république du Cameroun et sur le
tracé de la frontière entre République du Cameroun et la
République Fédérale du Nigeria du lac Tchad à la
mer.
2.2. Les exceptions
préliminaires
Il est évident que « procéduralement
les objections adressées par l'Etat défendeur à la
juridiction de la Cour s'expriment par voie « d'exceptions
préliminaires » portant sur l'incompétence du juge, et
sur l'irrecevabilité de la requête(1). Le 13
Décembre 1995, le Nigeria soulève des exceptions
préliminaires (au nombre de 8) à la compétence de la Cour
et à la recevabilité de la requête du Cameroun. La
procédure sur le fond est alors suspendue et le président de la
Cour prescrit le dépôt par le Cameroun, le 15 Mai 1996 au plus
tard, d'un exposé écrit contenant ses observations et conclusions
sur ces exceptions préliminaires. Cet exposé écrit est
déposé dans le délai ainsi fixé. Le Cameroun, dans
ses observations écrites sur les exceptions préliminaires du
Nigeria et à l'audience publique du 11 Mars 1998, a prié la Cour
de rejeter les exceptions préliminaires (soulevées par le
Nigeria), ou à titre subsidiaire, de les joindre au fond, et de dire
qu'elle a compétence pour traiter de l'affaire et que la requête
est recevable. Par l'arrêt de la C.I.J. du 11 Juin 1998, la Cour rejette
les sept des huit exceptions soulevées par la République
Fédérale du Nigeria dans l'affaire de la frontière
maritime et terrestre entre le Nigeria et le Cameroun.
Dans la première exception, le Nigeria expose que la
Cour n'a pas compétence pour connaître de la requête du
Cameroun. La Cour par son arrêt, soutient qu'en tout état de cause
elle est compétente pour connaître de la requête du
Cameroun. Dans la deuxième exception, le Nigeria soutient que les
parties au litige ont accepté de régler leur différend
frontalier au moyen des mécanismes bilatéraux existants. Et la
Cour par son arrêt, rejette dans sa totalité la deuxième
exception. Dans la troisième exception, la république
Fédérale du Nigeria soutient que le règlement des
différends frontaliers dans la région du Lac Tchad relève
de la compétence exclusive de la commission du bassin du lac
Tchad. Par son arrêt du 11 Juin 1998, la Cour rejette cette
troisième exception. Dans la quatrième exception, le Nigeria
expose que la Cour ne devrait pas déterminer en l'espèce
l'emplacement de la frontière dans le Lac Tchad, dans la mesure
où cette frontière constitue un tripoint dans le lac ou est
constituée par celui-ci. Par son arrêt, la Cour rejette cette
exception. Dans
(1) DAILLIER P., PELLET A., NGUYEN QUOC DINH,
Op.Cit, p. 903.
la cinquième exception, le Nigeria expose qu'il
n'existe pas de différend concernant la « délimitation
de la frontière en tant que telle ». La Cour par son
arrêt rejette cette exception. Au niveau de la sixième exception,
le Nigeria soutient qu'aucun élément ne permet au juge de
décider que la responsabilité internationale du Nigeria est
engagée à raison de prétendues incursions
frontalières. La Cour, par son arrêt de 1998, procède au
rejet de cette exception. Enfin, dans la septième exception, la
République Fédérale du Nigeria soutient qu'il n'existe pas
de différend juridique concernant la délimitation de la
frontière maritime entre les deux parties, qui se prêterait
actuellement à une décision de la Cour. La Cour, par son
arrêt, rejette la septième exception tout en soutenant que la
huitième exception n'a pas dans les circonstances de l'espèce, un
caractère exclusivement préliminaire.
L'on peut remarquer que la République du Cameroun,
très fidèle à la Cour, la prie dans sa requête, de
dire et juger : que la souveraineté sur la
presqu'île de Bakassi est camerounaise, en vertu du droit international,
et que cette presqu'île fait partie intégrante du territoire de la
République du Cameroun ; que le Nigeria a
violé et viole le principe fondamental du respect des frontières
héritées de la colonisation (Uti possidetis juris) ; qu'en
utilisant la force contre la République du Cameroun, le Nigeria a
violé et viole ses obligations en vertu du droit international
conventionnel et coutumier ; que la responsabilité du Nigeria est
engagée par les faits internationalement illicites ci-dessus ;
qu'en conséquence, une réparation d'un montant à
déterminer par la Cour est due par le Nigeria à la
République du Cameroun pour les préjudices moraux,
matériels subis par celle-ci ; qu'afin d'éviter la
survenance de tout différend entre les deux Etats relativement à
leur frontière maritime, la République du Cameroun prie la Cour
de procéder au prolongement du tracé de sa frontière
maritime avec le Nigeria jusqu'à la limite des zones maritimes que le
Droit International a placé sous leur juridiction respective. Cependant,
le Nigeria conteste les arguments du Cameroun contenus dans sa requête
introductive d'instance et prie la Cour de rejeter purement et simplement la
requête camerounaise et de se déclarer incompétente. La
Cour, par son premier arrêt, se déclare compétente et juge
la requête du Cameroun recevable.
2.3. La recevabilité par la Cour Internationale
de Justice
Pour justifier son
arrêt, la C.I.J. a notamment considéré que le fait que les
deux Etats aient tenté de résoudre leur différend de
façon bilatérale n'impliquait pas que l'un ou l'autre ait exclu
la possibilité de porter celui-ci devant la Cour. Et le 11 Juin 1998, la C.I.J. rejette par un
arrêt, sept de huit exceptions soulevées par le Nigeria. Elle
affirme sa compétence pour traiter le différend et juge les
requêtes introductives et additionnelles du Cameroun recevables. Le fait pour la C.I.J. d'avoir reçu les
requêtes du Cameroun a été un grand ouf de soulagement pour
ledit pays.
En sus, la recevabilité par la C.I.J. de la requête
du Cameroun marque l'ouverture de la procédure sur le fond de l'affaire
de la frontière maritime et terrestre opposant le Cameroun au Nigeria.
Il est d'une importance capitale que toutes les « nations
civilisées »(1) redonnent leur confiance en la
C.I.J. pour autant qu'elle est l'un des organes des Nations Unies à qui
incombe l'obligation de résoudre sur le plan du Droit bien entendu le
Droit International, les conflits internationaux lui soumis. Retenons
qu'en plus des sources du Droit International mentionnées par le statut
de la C.I.J.en son article 38, Paragraphe 1, il existe aussi les
« actes unilatéraux des organisations
internationales et des Etats ». Il n'existe pas de
hiérarchie entre ces différentes sources du droit international.
En revanche, les normes qui en sont issues sont subordonnées entre elles
à partir de deux principes d'interprétation classiques : les
normes spéciales dérogent aux normes générales et
la règle la plus récente prime sur la règle la plus
ancienne(2).
En effet, l'opinion juridique a généralement
admis que les juges internationaux recourent aux principes
généraux de droit pour
combler les lacunes du droit international. Considéré comme
l'épine dorsale du corps juridique international, Paul GUGGENEIM note
que « le recours aux principes généraux de droit permet
souvent de présumer l'existence d'un devoir juridique au lieu et place
d'un pouvoir discrétionnaire »(3).
2.4. L'arrêt du 10 0ctobre
2002
Par son arrêt du 10
Octobre 2002, la Cour attribue la
souveraineté de la péninsule de Bakassi à la
République du Cameroun. Cette nouvelle ne sera pas bien accueillie au
Nigeria. Mais, le Cameroun trouvera satisfaction intense dans cet arrêt
rendu à la Haye. L'arrêt rendu par la Cour est définitif
et obligatoire. Mais puisque les Etats en litige sont les Etats souverains, il
faudra procéder par d'autres mécanismes pacifiques pour une mise
en oeuvre efficace et efficiente dudit arrêt. Rendre un arrêt est
une chose, l'exécuter est une autre. Ce dernier dépend de la
volonté des Etats parties en litige. Il n'est pas aussi impossible pour
la C.I.J. de contraindre un Etat à mettre en oeuvre une décision
de la Cour. Cette procédure est peu appliquée par la Cour.
(1) Par cette formule archaïque de
« nations civilisées », il faut entendre
« l'ensemble des nations » ;
MULAMBA MBUYI, Le Statut International des
réfugiés, Presse de l'Université Libre des
pays des Grands Lacs, Goma, 2005, p. 25.
(2) PERRIN E.R., Les grands
problèmes internationaux, Masson, Paris, 1994, p. 164.
(3) GUGGENHEIM P., Traité de
droit international public, 2e éd., T.1, Presse
de l'Université Georges et Cie, S.A, 1967, pp. 296-297 ;
SIORAT L., Le problème des lacunes en droit
international, L.G.D.J., Paris, 1958, p.9.
2.5. L'APPLICABILITE DE L'ARRET DU 10 OCTOBRE 2002 :
RETROCESSION DE LA PENINSULE DE BAKASSI.
La question qui nous vient à l'esprit est celle de
savoir si l'arrêt rendu par la C.I.J. devrait automatiquement être
mis en application sans qu'un quelconque mécanisme pacifique de mise en
oeuvre ne soit appliqué. Rendre un arrêt est une chose, le mettre
en pratique est une autre chose. Les parties au litige ont-elles positivement
reçu cet arrêt rendu par la C.I.J. ? Nous osons croire si
l'une l'a reçu avec jouissance, ce n'était pas le cas pour
l'autre partie. D'où, le mécanisme de coopération bi et
multilatérale devrait entrer en jeu pour procéder à
l'applicabilité dudit arrêt. Du 15 au 16 Novembre 2002, c'est la
« rencontre de Genève ». Les deux présidents
(OBASANJO et BIYA) renouvellent leur engagement à renoncer à
l'usage de la force et à rechercher des moyens pacifiques de
régler leurs différends frontaliers ; Création d'une
commission mixte dirigée par un représentant de l'Organisation
des Nations Unies et composée de 12 membres, six Camerounais et six
Nigérians, et destinée à se réunir,
alternativement, à Yaoundé et Abuja. Le représentant
spécial de Kofi ANNAN (ex Secrétaire Général des
Nations Unies) pour l'Afrique de l'Ouest basé à Dakar, M. Ahmadou
OULD-ABDALLAH est désigné comme représentant de
l'Organisation des Nations Unies.
Cette deuxième tripartie intervient un peu plus d'un
mois après le verdict de la C.I.J., le 10 Octobre 2002 :
Objectif : ouvrir la voie à la mise en oeuvre des dispositions
pertinentes du verdict de la Cour.
GENEVE, 31 Janvier 2004 :
Constat : Les deux Chefs d'Etat et l'ex Secrétaire
Général de Nations Unies notent avec satisfaction les
progrès significatifs réalisés :
- Adoption d'un programme de travail détaillé
jusqu'à l'horizon 2005 ;
- Retrait sans heurts de l'administration civile de
l'armée et des forces de police de la région du Lac Tchad ;
- Transfert d'autorité à la partie Camerounaise.
Perspectives : Les deux Chefs d'Etats
conviennent de :
- Renforcer les mesures de confiance, par l'échange
d'Ambassadeurs et ouverture des Consulats le long de la frontière
commune ;
- Mettre en place des patrouilles mixtes de forces de
sécurité ;
- Examiner la conclusion d'un traité d'amitié et
de non-agression.
GENEVE, 11 Mai 2005 :
Constat : Les deux Chefs d'Etats et l'ex
Secrétaire Général de l'Organisation des Nations Unies
notent avec satisfaction que :
- Les visites sur le terrain, visant à préparer
la démarcation poursuivent ;
- Les retraits et transferts d'autorité se sont
effectués sans heurts le long de la frontière terrestre en
Juillet 2004 ;
- Le personnel d'observation de la Commission Mixte poursuit
son travail dans d'excellentes conditions.
Perspectives :
- Un nouveau programme de retrait des troupes
nigérianes sera mis au point ;
- Les deux Chefs d'Etat se disent résolus à
prendre toutes les mesures voulues pour garantir le bien-être et
préserver les intérêts des populations concernées.
GREENTREE 12 Juin 2006 :
signature de l'accord entre la République du Cameroun et la
République Fédérale du Nigeria concernant les
modalités de retrait et de transfert d'autorité dans
la péninsule de Bakassi. Le Nigeria reconnaît que
la souveraineté sur la presqu'île de
Bakassi est camerounaise
conformément à l'arrêt de la C.I.J. du 10 Octobre 2002 dans
« l'affaire de la frontière terrestre et maritime entre le
Cameroun et le Nigeria ». Le Cameroun et le Nigeria reconnaissent la
frontière terrestre et maritime entre les deux pays telle qu'elle est
délimitée par l'arrêt et s'engagent à poursuivre le
processus de mise en oeuvre déjà entamé. Le Nigeria
s'engage à retirer l'ensemble de ses forces armées de la
presqu'île de Bakassi dans les 60 jours à compter de la date de la
signature du présent accord. Si des circonstances exceptionnelles
l'exigent, le Secrétaire Général des Nations Unies peut
prolonger ce délai, mais pour une durée totale n'excédant
pas 30 jours.
AKWA (BAKASSI), le 14 /08/
2006 : Retrait effectif des forces armées
nigérianes de la péninsule de Bakassi et transfert
d'autorité à la République du Cameroun. Ce, en application
de l'arrêt du 10 Octobre 2002 de la C.I.J. et en conformité avec
l'accord de Greentree du 12 Juin 2006.
CALABAR (NIGERIA), le 14 Août
2008 : Cérémonie officielle de transfert
définitif d'autorité dans la presqu'île de Bakassi au
Cameroun par le Nigeria conformément à l'accord de Greentree en
présence des représentants des quatre Etats témoins
(Etats-Unis, France, Allemagne et Grande Bretagne) et du représentant
spécial du Secrétaire Général de l'Organisation des
Nations Unies, Président de la commission mixte Cameroun-Nigeria, SAID
DJINNIT. Quinze années environ après le déclenchement du
différend, huit années après une logue et très
coûteuse procédure judiciaire ayant débouché sur
l'arrêt de la C.I.J. de la Haye du 10 Octobre 2002, reconnaissant la
souveraineté du Cameroun sur la Péninsule de Bakassi, le
processus de rétrocession de Bakassi arrive à son terme le 14
Août 2008. « Le Nigeria a estimé, Jeudi 14 Août
2008 que la rétrocession au Cameroun de la péninsule de Bakassi
est une soumission au Droit International et au bon
voisinage. Cependant, le Cameroun qui a remporté la
bataille juridique va devoir maintenant s'attaquer à
l'insécurité qui règne dans cette région difficile
d'accès »(1). « Les conflits frontaliers
sont nombreux et réglés soit par voie juridictionnelle ou
d'arbitrage, soit font objet d'un affrontement
armé »(2). Bref, retenons que la
péninsule de Bakassi, l'extension de
la péninsule de Calabar dans l'océan Atlantique,
précédemment administrée par la République
Fédérale du Nigeria, un jugement de la C.I.J., rendu le 10
Octobre 2002, attribue la souveraineté de ce territoire au Cameroun. Et
le 14 Août 2008, c'est la fin de ce très long processus
judiciaire.
(1) Disponible sur http : // fr.
allafrica. Com
(2) ROCHE, C., op.cit, p.
52.
CONCLUSION
Nous voici au terme de notre étude
axée sur l' « arrêt de la Cour Internationale de
Justice du 10 octobre 2002 portant règlement de différend
frontalier sur la péninsule de Bakassi ». Cette étude
nous a permis de comprendre la racine de la crise frontalière
camerouno-nigériane, le problème de droit posé et la
solution juridique retenue conformément au Droit international.
En effet, nous nous sommes posé un certain nombre
de questions dont la teneur est la suivante : la C.I.J. a-t-elle
joué un rôle primordial dans la résolution de
différend frontalier opposant le Cameroun au Nigeria ? Dans
l'affirmative, par quels mécanismes juridiques a-t- elle
réglé ce litige ?
En réponse aux questions susmentionnées,
nous avons émis l'hypothèse suivante : plus la C.I.J.
intervient dans un différend interétatique, plus elle
contribuerait à restaurer un climat de bon voisinage, au respect
scrupuleux du Droit international public qui est l'émanation des
volontés des Etats.
A l'issue de notre travail, nous avons abouti au
résultat selon lequel la C.I.J. a indubitablement joué un
rôle primordial dans le règlement de la crise frontalière
sur la péninsule de Bakassi.
Du point de vue de la procédure, nous sommes parti
de la saisine par le Cameroun de la C.I.J., ensuite des exceptions
préliminaires soulevées par le Nigeria, enfin de la
recevabilité de la requête introductive d'instance et
additionnelle du Cameroun par ladite Cour suivie de l'arrêt du 10 octobre
2002, prélude à la rétrocession de la péninsule de
Bakassi.
Conformément audit arrêt, la
souveraineté qui s'exerce sur la presqu' île de Bakassi est
désormais camerounaise. La République Fédérale du
Nigeria, en application dudit arrêt, l'a rétrocédée
le 14 août 2008 prouvant ainsi son respect des règles de droit. En
définitive, nous pouvons croire en l'action de la C.I.J., organe
judiciaire principal des Nations Unies en ce sens que grâce à son
intervention dans l' affaire de différend frontalier entre le Cameroun
et le Nigeria, ce contentieux a pris fin le 14 août 2008 à
Calabar. La souveraineté de l'Etat camerounais s'étend sur
Bakassi, qu'ils s'agissent des eaux, de l'espace aérien situé au
dessus ou du fond et du sous-sol de cette péninsule. Le Cameroun y
exerce donc sa souveraineté tout entière, comme sur son
territoire.
A titre des suggestions, nous souhaitons que les Etats en cas
de conflit de nature juridique, portent leur affaire devant la C.I.J. en vue
d'une résolution pacifique et qu'une certaine marge de l'action
judiciaire internationale en terme de saisine soit accordée à
ladite Cour pour qu'elle joue pleinement son rôle. Nous proposons que le
Cameroun exerce sa souveraineté avec une limitation découlant du
droit de passage inoffensif qui est reconnu aux navires étrangers en
conformité avec la Convention des Nations Unies sur le Droit de mer
(Convention de Montego Bay de 1982).
BIBLIOGRAPHIE SOMMAIRE
BOULANGER G.B., La recherche en sciences
humaines, Ed. Universitaires,
Paris, 1970
CAPITANT Henri, La Thèse de doctorat en
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