Le plateau continental et la gestion de ressources pétrolières: cas de la république démocratique du Congo et de l' Angola( Télécharger le fichier original )par Denise SADY MBOMBO Université de Kisangani, Congo - Licence en droit public 2008 |
Section IV. Plateau continentalA l'origine, le plateau continental n'est qu'un terme géographique. Il désigne la plate-forme bordant sous la mer, le continent, s'inclinant en pente douce et s'arrêtant à l'endroit où l'eau qui la recouvre atteint une profondeur de 200 mètres en moyenne. Au-delà de cette limite, elle tombe en chute rapide vers les grandes profondeurs.28(*) L'expression « plateau continental » est utilisée pour désigner : le lit de la mer et le sous-sol des régions sous-marines adjacentes aux côtes, mais situées en dehors de la mer territoriale, jusqu'à une profondeur de 200 mètres ou au-delà de cette limite, jusqu'à une profondeur des eaux sur jacentes permet l'exploitation des ressources naturelles desdites régions ; et le lit de la mer et le sous-sol des régions sous-marines analogue qui sont adjacentes aux côtes des îles.29(*) Le plateau continental est sans doute l'espace le plus convoité par les Etats car son sous-sol renferme des ressources précieuse charbon, fer, étain, pétrole, etc. Et qui, en conséquence, fait l'objet du plus grand nombre de contentieux compte tenu des ressources qu'il révèle. En effet, entant que prolongement du territoire étatique sous la mer, il est considéré par les Etats comme lieu potentiel de ressources minérales. Son appropriation et son exploitation ont toujours été une revendication prioritaire des Etats. Selon la convention de 1982 le plateau continental comprend les fonds marins et leur sous-sol au-delà de la mer territoriale, sur toute l'étendue du prolongement naturel du territoire terrestre de cet Etat jusqu'au rebord de la marge continentale, ou jusqu'à 200 milles marins des lignes de base à partir desquelles est mesurée la mer territoriale (article 76 de la convention de 1982). Ainsi la définition n'est pas juridique, mais géologique, l'exclusivité leur est conférée par la convention.30(*) Comme nous l'avons signalé ci-haut que le plateau continental fait l'objet de nombreux contentieux, depuis 1964, le Danemark, les Pays-Bas et l'Allemagne cherchent une solution diplomatique au conflit qui les oppose. Il s'agit de délimiter le plateau continental qui prolonge leur territoire. Les manoeuvres diplomatiques n'aboutiront qu'à des délimitations partielles. Le Danemark et les Pays-Bas invoquent la convention de Genève dont l'article 6 rend applicable le principe de l'équidistance. Cette proposition est inacceptable pour l'Allemagne, qui exige une délimitation par voie conventionnelle qui instaurerait une ligne de délimitation tenant compte de circonstances spéciales et historiques. Les parties saisissent alors, par compris, la cour internationale de justice, en lui demandant d'indiquer lesquels des principes et des règles du droit international sont applicables à la délimitation entre les parties des zones du plateau continental de la mer du Nord. Le débat devant la cour va être marqué par la question de l'opposabilité ou non du principe de l'équidistance (article 6 de la convention de Genève) à l'Allemagne. La cour constate que l'Allemagne a signé la convention de Genève, mais ne l'a pas ratifiée. Le Danemark et les Pays-Bas soutenaient que la convention était néanmoins devenue obligatoire pour la République Fédérale d'Allemagne du fait que celle-ci aurait assumé unilatéralement les obligations prévues en raisons de son comportement et de ses déclarations publiques. La cour fait une mise au point remarquable : « En principe, lorsque plusieurs Etats (...) ont conclu une convention où il est spécifié que l'intention d'être lié par le régime conventionnel doit se manifester d'une manière déterminée, c'est-à-dire par l'accomplissement de certaines formalités prescrites (ratification, adhésion), on ne saurait présumer à la légère qu'un Etat n'ayant pas accompli ces formalités, alors qu'il était à tout moment en mesure et en droit de le faire, n'en est pas moins tenu d'une autre façon. Cela constitue une contribution utile à la conclusion des traités. En définitive, sur la base de principes qu'elle indique, la cour invite les parties à négocier un accord. Celui-ci sera conclu en 1970 (Cour internationale de justice, 20 février 1969).31(*)
Le plateau continental s'étend jusqu'à 200 milles marins des lignes de base à partir desquelles est mesurée la largeur de la mer territoriale, lorsque le rebord externe de la marge continentale se trouve à une distance inférieure.32(*) Si le rebord externe de la marge continental se trouve à une distance supérieure ou lorsque celle-ci s'étend au-delà de 200 milles marins des lignes de base à partir desquelles est mesurée la largeur de la mer territoriale, l'Etat côtier fixe la limite extérieure de son plateau continental en reliant par des droites d'une longueur n'excédant pas 60 milles marins des points fixes définies par des coordonnées en longitude et en latitude, (article 76 paragraphe 7 de la convention des Nations Unies sur le droit de la mer). Cette limite extérieure ne dépassera par une ligne tracée à 350 milles marins des lignes de base à partir desquelles est mesurée la largeur de la mer territoriale. Après avoir fixé les limites, l'Etat côtier communique des informations sur les limites de son plateau continental, lorsque celui-ci s'étend au-delà de 200 milles marins des lignes de base à partir desquelles est mesurée la largeur de la mer territoriale, à la commission des limites du plateau continental. La commission adresse aux Etats côtiers des recommandations sur les questions concernant la fixation des limites extérieures de leur plateau continental. Les limites fixées par un Etat côtier sur la base de ces recommandations sont définitives et de caractère obligatoire. L'Etat côtier remet au Secrétaire Général de l'organisation des Nations Unies les cartes et renseignements pertinents, y compris les données géographiques, qui indiquent de façon permanente la limite extérieure de son plateau continental. Le Secrétaire Général donne à ces documents la publicité voulue (article 76 paragraphe 7 et 8 de la convention de 1982). Conformément aux prescrits de l'article 76 paragraphe 8 et de l'article 4 de l'annexe 2 de la convention des Nations Unies sur le droit de la mer, en vue de déterminer la limite extérieur du plateau continental au-delà de 200 milles marins de la ligne de base à partir de laquelle est mesurée la largeur de la mer territoriale, une commission nationale de l'Etude sur le plateau continental de la République Démocratique du Congo a été mise en place par l'arrêté interministériel n°025/2009 du 6 avril 2009 signé par le ministre de l'intérieur et sécurité, le ministre des Affaires étrangères et le ministre des Hydrocarbures. Cette commission travaille sous l'autorité directe du ministre de l'intérieur et sécurité qui a les matières de souveraineté et des frontières dans ses attributions. Il ressort de cette information préliminaire que la limite extérieure du plateau continental de la République Démocratique du Congo au-delà de 200 milles marins a été décrite par des points fixes où l'épaisseur des sédiments est de 1 % de leurs distances au pied du talus, reliés par une ligne géodésique. Le plateau continental de la République Démocratique du Congo s'étend de la limite extérieure de la zone économique exclusive à 101,58 milles marins sur la limite latérale Sud et, à 104,28 milles marins sur la limite latérale Nord. Les limites extérieures contenues dans cette information sont fondées sur les dispositions de l'article 76 paragraphe 1,3,4a (ii), 4b, 5 et 6 de la convention des Nations Unies sur le droit de la mer. La République Démocratique du Congo a bénéficié des conseils de Monsieur Emmanuel KALNGUI, membre de la commission des limites du plateau continental. Conformément du paragraphe 2a de l'annexe 1 du règlement intérieur de la commission des limites du plateau continental, la République Démocratique du Congo porte à la connaissance de cette dernière que la zone du plateau continental concerné par la présente information fait l'objet d'une occupation de fait par l'Angola, pays voisin au Nord et au Sud. Au regard des données préliminaires existantes, la limite extérieure du plateau continental de la République Démocratique du Congo au-delà de 200 milles marins de sa ligne de base englobe une zone de 6.614,05 km².33(*) Il sied de signaler aussi que la délimitation du plateau continental entre Etats dont les côtes sont adjacentes ou se font face est effectuée par voie d'accord conformément au droit international tel qu'il est visé à l'article 38 du statut de la cour international de justice, afin d'aboutir à une solution équitable. Aux termes de l'article 6, paragraphe 2 et 3 de la convention de Genève de 1958, dans le cas où le plateau continental est adjacent aux territoires de deux Etats limitrophes, la délimitation du plateau continental est déterminée par accord entre ces Etats. A défaut d'accord, et à moins que des circonstances spéciales ne justifient une autre délimitation, celle-ci s'opère par application du principe de l'équidistance des points les plus proches des lignes de base à partir desquelles est mesurée la largeur de la mer territoriale de chacun de ces Etats. Lors de la délimitation du plateau continental, toute ligne de démarcation établie conformément mentionnée devrait être définie par référence aux cartes et aux caractéristiques géographiques existant à une date donnée, et il devrait être fait mention de points de repère fixes et permanents à terre. En attendant la conclusion de l'accord visé, les Etats concernés, dans un esprit de compréhension et de la coopération, font tout leur possible pour conclure des arrangements provisoires de caractères pratique et pour ne pas compromettre ou entraver pendant cette période de transition la conclusion de l'accord définitif. Lorsqu'un accord est en vigueur entre les Etats concernés, les questions relatives à la délimitation du plateau continental sont réglées conformément à cet accord, article 83 paragraphes 1, 3, 4 de la convention de 1982. Souvent la délimitation du plateau continental pose de problème et, est à la base de nombreux différends. Tel est le cas aussi de la France et le Royaume-Uni. En effet, dès février 1964, le Royaume-Uni proposait à la France de négocier une frontière dans le secteur de la manche et de l'Atlantique (mer d'Iroise). Pour le Royaume-Uni, le principe de l'équidistance devait s'appliquer, contrairement à la France qui estimait qu'il y avait dans la région des circonstances spéciales. Il y eut dix ans de négociations infructueuses, avant que les parties n'aboutissent à un compromis d'arbitrage le 1e juillet 1975. Si l'arbitrage du 30 juin 1977 fut accueilli avec satisfaction par la France, le Royaume-Uni lui réserve un accueil plutôt mitigé. Le 19 septembre, Londres demandait à la France une renégociation. Une sentence interprétative fut rendue le 14 mars 1978. Les intérêts de la France étaient, cette fois-ci, défendus. Pour cette affaire, il se pose la question de la détermination du plateau continental et du droit applicable. Le tribunal s'est d'abord demandé si les parties étaient liées par la convention de Genève sur le plateau continental du 29 avril 1958, notamment par son article 6, relatif au plateau continental. Pour la France, la convention dans son ensemble n'était pas pertinente entre les parties, et il devait en être de même pour son article 6. En effet, la France avait formulé une réserve (déclaration du 14 juin 1965) indiquant à propos de cet article 6 que « le Gouvernement de la République Française n'acceptera pas qui lui soit opposées sans accord exprès, une délimitation de plateau continental appliquant le principe de l'équidistance (...) si elle se situe dans les zones où il considère qu'il existe des circonstances spéciales... » Le Royaume-Uni soutenait que cette réserve ne devrait pas être prise en considération puisqu'elle portait en fait sur l'article 1er, insusceptible de réserve. Le tribunal réfute ce point de vue en affirmant que la réserve porte bien sur la méthode de délimitation, donc l'article 6. Ce contentieux présente une particularité : les parties avaient prié le tribunal non seulement de définir le droit applicable, mais de tracer la délimitation, ce qui distinguait cette affaire de celle du plateau continental de la mer du Nord (20 février 1969), où la cour n'avait en qu'à dire le droit. Certains ont même considéré que les principes dégagés par la cour pour aider les parties à effectuer la délimitation étaient « ultra petita ». Pour le tribunal, il est essentiel en matière de délimitation, quel que soit le fondement juridique employé, que la situation géographique dicte la méthode. De ce fait, dans le secteur de la Manche, où les parties sont d'accord pour considérer qu'elles se font face, l'équidistance va être généralement applicable. Par contre, dans le secteur atlantique, les deux parties sont en désaccord sur la situation géographique, et donc sur le méthode de délimitation. Selon la France, les deux Etats ne sont pas limitrophes. Ils ne se font face non plus. Pour le tribunal, l'application de la méthode de l'équidistance ou de toute autre méthode dans le but de parvenir à une délimitation équitable dépend des circonstances pertinentes, géographiques et autres du cas d'espèce. De plus, pour établir si la méthode de l'équidistance permet d'aboutir à une solution équitable, il faut tenir compte de la différence qui existe entre une limite latérale entre Etats limitrophes et une limite médiane entre Etats se faisant face.34(*)
Les droits de l'Etat côtier sur le plateau continental sont consacrés à la partie VI article 77 et suivants de la convention des Nations Unies sur le droit de la mer de 1982 et aux articles 2 et 3 de la convention de Genève de 1958. Ainsi, l'Etat côtier exerce des droits souverains sur le plateau continental aux fins de son exploration et de l'exploitation de ses ressources naturelles. Ces droits sont souverains, exclusifs du fait que les ressources naturelles du plateau continental n'étant pas renouvelable. Ils s'exercent sur le plateau lui-même et non pas seulement sur les ressources qu'il contient.35(*) Les droits de l'Etat côtier sont exclusifs en ce sens que si l'Etat côtier n'explore pas le plateau continental ou n'en exploite pas les ressources naturelles, nul ne peut entreprendre de telles activités sans son consentement exprès (article 77 paragraphe 2 de la convention de 1982 et article 2 paragraphe 2 de celle de 1958). Ces droits sont indépendants de l'occupation effective ou fictive, aussi bien que de toute proclamation. Tel n'est pas le cas pour le plateau continental de la République Démocratique du Congo, parce que la Zone de son plateau continental avait fait l'objet d'une occupation de fait par l'Angola, (l'information préliminaire à la commission des limites du plateau continental). Les ressources naturelles visées dans la présente partie comprennent les ressources minérales et autres ressources non biologique des fonds marins et de leur sous-sol, ainsi que les organismes vivant qui appartiennent aux espèces sédentaires c'est-à-dire les organismes qui au stade ils peuvent être pêchés, sont soit immobiles sur le fond ou au-dessous du fond, soit incapables de se déplacer autrement qu'en restant constamment en contact avec le fond ou le sous-sol (article 77, paragraphe 4 de la convention de 1982). Quant à ce qui concerne le régime juridique des eaux et de l'espace aérien sur jacents, et droits et libertés des autres Etats, les droits de l'Etat côtier sur son plateau continental n'affectent pas le régime juridique des eaux sur jacents ou de l'espace aérien situé au-dessus de ces eaux. L'exercice par l'Etat côtier de ses droits sur le plateau continental ne doit pas porter atteinte à la navigation ou aux droits et libertés reconnus aux autres Etats par la convention, ni gêner l'exercice de manière injustifiable (article 78 convention de 1982) et ces Etats ont le droit de poser des câbles et des pipe-lines sous-marins sur le plateau continental. L'Etat côtier a le droit exclusif d'autoriser et de règlementer les forages sur le plateau continental, quelles qu'en soient les fins. Conformément aux prescrit de l'article 5 paragraphe 2, 3, 4 et 6 de la convention de 1958, l'Etat riverain a le droit de construire et d'entretenir ou de faire fonctionner sur le plateau continental les installations et autres dispositifs nécessaires pour l'exploration de celui-ci et l'exploitation de ses ressources naturelles, et d'établir des zones de sécurité autours de ces installations et ou dispositifs et de prendre dans ces zones les mesures nécessaires à leur protection. Ces zones de sécurité peuvent s'étendre à une distance de 500 mètres autour des installations ou autres dispositifs qui ont été aménagés, mesurés à partir de chaque point de leur bord extérieur. Les navires de toutes nationalités sont tenus de respecter ces zones de sécurité.
Tout celui qui est titulaire d'un droit, est aussi titulaire d'une obligation ; car dit-on il n y a pas de droits sans obligations. En effet, l'Etat côtier est tenu de prendre dans les zones de sécurité toutes les mesures propres à protéger les ressources biologiques de la mer contre les agents nuisibles (article 5, paragraphe 7, de la convention de 1958). Par ailleurs, les Etats qui disposent d'un plateau continental s'étendant au-delà de 200 milles marins ont l'obligation de verser une partie de recette qu'ils tirent à son exploitation à l'autorité internationale des fonds marins. Ces contributions peuvent être en espèces ou en nature. Les contributions sont acquittées chaque année pour l'ensemble de la production d'un site d'exploitation donné, après les cinq premières années d'exploitation de ce site. Tout Etat en développement qui est importateur d'un minéral est dispensé de ces contributions en ce qui concerne ce minéral. Les contributions s'effectuent par le canal de l'autorité, qui les répartit entre les Etats parties selon des critères de partage équitable, compte tenu des intérêts et besoins des Etats en développement, en particulier les Etats en développement les moins avancés ou sans littoral. * 28 DALLIER, P. et PELLE, M., Droit international public, 7e éd., 2002, LGDJ, p.1184. * 29 Article 1 de la convention de Genève de 1958. * 30 Tabrizi ben Salen, Op. Cit., p. 12. * 31 B. TCHIKAYA, Memento de la jurisprudence du droit international public, 4e éd. Hachette supérieur, 2007 p. 81-82. * 32 Article 76 paragraphes 1 de la convention de 1982. * 33 République Démocratique du Congo, rapport sur l'information préliminaire à la commission des limites du plateau continental, Kinshasa, le 07 mai 2009, p. 7-10. * 34 B. TCHIKAYA, Op. Cit. p. 115 - 116. * 35 Daillier P. et Pellet, A., Op. Cit., p. 1192. |
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