le souci comme être du Dasein chez Heidegger Martin( Télécharger le fichier original )par Serge MUTUMBO Institut saint Jean Bosco kansebula - Graduat en philosophie et sciences de l'éducation 2003 |
CHAPITRE II. LE SOUCI COMME ETRE DU DASEIN2. 0 IntroductionDans le premier chapitre nous avons parlé de l'être-au-monde comme être-avec-autrui et être-soi et aussi du «on». Et dans ce deuxième chapitre, il sera question de parler du Dasein que nous avons défini dans le chapitre précédent comme étant l'étant que je suis moi-même. Nous allons parlé du Dasein comme souci parce que ce dernier le caractérise. Le souci dont nous parlerons est celui de l'autre, de l'être. Mais ce souci ne peut être consistant que lorsqu'il y a le souci de l'être qui rend le souci de l'autre authentique. Nous devons aller à l'Etre pour une connaissance authentique de l'homme et son rapport avec l'homme. Nous parlerons du souci de l'être, car c'est lui qui fait que l'homme se connaisse lui-même et aussi sa mission puisque s'il ne se connaît pas ontologiquement, force est de voir qu'il va se considérer comme un étant quelconque qu'on pourrait à peine distinguer des autres étants. L'angoisse qui révèle le Dasein et le souci comme fondement du Dasein seront le noeud de ce chapitre, sans omettre les autres. 2. 1 L'angoisse comme mode fondamental du sentiment de la situation et comme révélation privilégiée du DaseinL'angoisse est le mode d'être du Dasein qui satisfait mieux dans l'étude de l'unité de l'être qui se révèle comme souci. Elle ne peut être comprise comme la peur même s'il y a quelques points communs. Une question se pose : « Qu'est ce qui fait que l'angoisse soit un sentiment privilégié de la situation ? » Le Dasein qui vit dans le on et dans le monde de la préoccupation fait la fuite face à lui-même et son savoir-être-authentique. Cette fuite du Dasein face à lui-même le mène l'a-version. L'authenticité de l'être-soi est dissimulée et refoulée existentiellement par la déchéance. Et cette dissimulation révèle la fuite du Dasein devant lui-même. Il est ontologiquement et ontiquement soi-même dans une révélation qu'il ne peut se séparer. Ce caractère fait qu'il puisse fuir devant soi. L'a-version ne saisit pas ce fait que le Dasein est placé devant soi. Il détourne le Dasein du fait qu'il est placé devant lui car il est « là ». L'a-version est ce phénomène existentiel et ontique qui aide à comprendre existentialement et ontologiquement ce qui est fui. Nous avions dit que quand le Dasein tombe dans le on et dans le monde de la préoccupation, il fuit devant soi-même. Il n'est plus authentique. Nous savons que toute a-version n'est pas une fuite. Dans la peur, il y a un caractère de fuite, mais dans l'angoisse, la fuite n'est pas fondée sur quelque chose comme dans la peur. « Ce qui angoisse l'angoisse est l'être-au-monde »33(*). Ce qui angoisse le Dasein est vraiment indéterminé car aucun étant intramondain ne peut l'angoisser. Aucune chose du monde ne peut angoisser l'être-là. Elle n'a pas d'importance puisque « l'angoisse ne sait pas ce dont elle s'angoisse »34(*). Ce qui l'angoisse est déjà là, mais il n'est nulle part. « Il est si proche qu'il serre la gorge et coupe le souffle et pourtant il n'est pas nulle part »35(*). L'angoisse de l'angoisse vient du rien qui n'est nulle part, que nous pouvons appeler le monde en tant que tel (le rien-et-nulle part). C'est ce qui fait qu'après l'angoisse, l'angoissé puisse dire : « Au fond ce n'était rien du tout !»36(*). Le rien appartient ontologiquement et existentialement à l'être du Dasein en tant qu'être-au-monde. Nous pouvons dire avec Martin Heidegger : « Ce qui angoisse l'angoisse est l'être-au-monde lui-même »37(*). L'angoisse est le sentiment de la situation qui révèle mieux le monde comme monde. Elle n'est pas seulement face à quelqu'un mais surtout pour...on s'angoisse toujours pour quelque chose : « L'angoisse singularise et isole l'être-là sur son être-au-monde inaliénable, être-au-monde qui se comprend essentiellement par le projet de ses possibilités. Le pour-quoi de l'angoisse révèle donc l'être-là comme un être possible et dans un être qu'il ne saurait que seul, de lui-même et dans l'isolement »38(*). L'angoisse fait comprendre au Dasein son être-libre pour l'authenticité de son être comme possibilité pour lui, qu'il est déjà et depuis toujours dans son être-au-monde où il est livré39(*). L'angoisse est toujours pour...et non seulement face à ...et ce qui fait que l'angoisse s'angoisse c'est le monde comme tel. Elle est un mode fondamental de l'être-au-monde qui implique l'être-avec-autrui puisque dans l'angoisse, il y a l'angoisse face à ...et l'angoisse pour... L'angoisse qui habite l'être-là l'isole et le révèle comme un solus ipse. Il y a une forme de solipsisme dans l'angoisse. Cette forme ne le soustrait pas du monde, mais elle le place face au monde et face à lui-même comme être-au-monde. Ainsi « l'angoisse rend étranger »,40(*) puisque le Dasein qui vit dans l'angoisse fait l'expérience du rien et du nulle part. Le Dasein dans l'angoisse sent qu'il est étranger puisqu'il ne sent pas chez lui, dans son monde, dans son être. Le Dasein s'isole mais malgré cet isolement, il est toujours un être-au-monde. Il ne peut s'en défaire de cette condition liée à son être, C'est un existential. En effet, le Dasein ne fuit pas devant des choses du monde ambiant mais plutôt il fuit vers lui puisque dans cette fuite vers l'étant intramondain, il trouvera une familiarité paisible. «la fuite déchue vers la patrie de l'existence publique est une fuite devant l'étrangeté, c'est-à-dire devant le dépaysement que l'être-là recèle en tant qu'il est au monde, jeté et livré à lui-même, dans son être »41(*). Le Dasein peut être angoissé même dans les situations les plus innocentes. Ce dépaysement qui frappe le Dasein n'a pas besoin de la soi-disant obscurité où l'on se sent vraiment dépaysé car même dans l'obscurité nous faisons l'expérience de l'existence du monde, qu'il est là et même d'une manière la plus insistante. L'angoisse manifeste la constitution du Dasein comme être-au-monde qui n'est pas comme une substance simplement donnée mais existant comme un être-« là ». Il est au monde pour dévoiler l'Etre dans sa vérité. « Cette étrangeté qui, sur le plan existential et ontologique, doit être comprise comme le phénomène le plus originel »42(*). Il ne faut pas confondre l'angoisse avec la peur, car cette dernière est une angoisse inauthentique déchue au monde. Mais l'angoisse authentique est une denrée rare dans la déchéance et dans le public. L'angoisse est conditionnée psychologiquement et le déclenchement physiologique de l'angoisse n'est possible que puisque l'être-là s'angoisse dans le tréfonds même de son être.43(*) En plus du fait qu'elle révèle la totalité de l'être-au-monde comme tout sentiment de la situation, l'angoisse apporte la possibilité d'une révélation privilégiée parce qu'elle a en elle un caractère d'isolement: « Cet isolement retire l'être-là de sa déchéance et lui rend manifeste l'authenticité et l'inauthenticité en tant que celles-ci sont des possibilités de son être. Ces possibilités fondamentales de l'être-là, qui est toujours mien, se montrent dans l'angoisse telles qu'elles sont elles-mêmes, sans que vienne les recouvrir l'étant intramondain auquel l'être-là est, de prime abord et le plus souvent, cramponné »44(*). On ne peut comprendre l'ontologie existentiale qu'en partant de l'existence quotidienne pour arriver à saisir la structure unitaire du Dasein. Ce denier veut comprendre l'Etre. Et ce besoin qu'il a de comprendre l'Etre est le souci qui est sa caractéristique. Le souci nous aide à comprendre l'être du Dasein qui est marqué de finitude. Et on ne peut étudier le Dasein comme souci sans faire allusion à l'angoisse qui est la disposition fondamentale qui aide l'homme à se mettre face au néant. De même, on ne peut comprendre le Dasein que parce qu'il se tient dans le néant de par sa nature même45(*). * 33 Ibid., 228. * 34 Ibid., 229. * 35 Ibid. * 36 Ibid. * 37 Ibid., 230. * 38 Ibid. * 39 Ibid. * 40Ibid, 231. * 41 Ibid., 232. * 42 Ibid. * 43 Ibid. * 44 Ibid. * 45Cf. M. HEIDEGGER, Kant et le problème de la métaphysique, 291-293. |
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