CHAPITRE CINQUIEME
DISCUSSION
La nature et le nombre des textes juridiques qui ont
régi l'organisation et le fonctionnement de l'HPGRK sont
impressionnants. Ces textes ont fait de cet hôpital tantôt un
service public, tantôt une entreprise publique, tantôt un
établissement public. Ces textes ont eu comme objectif la
résolution des nombreux problèmes qui ont émaillé
la vie de cette importante institution hospitalière dont la taille est
hors du commun : 2.000 lits, 2.240 agents.
Le texte qui a confié cet hôpital à FOMECO
était excellent tant que la gestion était confiée à
un Médecin Gestionnaire américain qui ne dépendait que du
Chef de l'Etat. Il a permis de recruter un corps médical multinational,
multidisciplinaire et compétent qui a réalisé des
véritables miracles dans la gestion médicale, technique,
administrative et financière.
La dotation du Chef de l'Etat à cet hôpital
couvrait les 100% de ses besoins. Dès que cette gestion a
été confiée à un médecin gestionnaire
congolais (Zaïrois) quoique ne relevant que du Chef de l'Etat, la
mégestion s'est installée dans tous les domaines et les crises
sont apparues au sein du personnel. Et lorsque la tutelle a été
rétrocédée au Département de la Santé
publique, en 1986, l'hôpital a sombré dans l'instabilité
des mandataires et les subsides de l'Etat n'ont fait que s'amenuiser.
La multiplicité des tutelles sur cet hôpital a
été également un facteur de déstabilisation de cet
hôpital : Présidence, primature, département
(Ministères), FOMECO, Hôtel de Ville, Services de renseignement.
Tout cela a engendré le népotisme, l'impunité et le trafic
d'influence.
Pour y mettre fin, les Médecins ont
réclamé et obtenu le statut d'entreprise publique à
caractère social. Mais cette expérience a échoué
pour quatre raisons :
· la dotation budgétaire promise n'a jamais
été débloquée par le Gouvernement pour des raisons
inconnues ;
· la mise en place des mandataires a été
trop politique ;
· la charge des différents organes, notamment
celle du Conseil d'administration et celle du Comité de gestion,
était exorbitante ;
· les résultas des différents audits
n'ont jamais été suivis de sanctions.
Pourtant, cette formule aurait pu résoudre les
problèmes de la maîtrise de gestion administrative et
financière de cet hôpital et lui donner suffisamment d'autonomie
dans sa gestion.
Le décret n° 054 du 29 Décembre 1996 a
accordé beaucoup d'autonomie dans la gestion des Départements.
Le département disposait ainsi d'une large latitude
dans l'accomplissement des tâches et l'exercice des fonctions qui lui
sont délégués. Raison pour laquelle le Département
a été défini comme étant une unité
fonctionnelle dotée d'un budget ayant une autonomie limitée en
matière de gestion des ressources humaines, financières et
matérielles, bref de la gestion quotidienne et de la coordination de
toutes les activités du Département.
Dans le cadre d'une gestion décentralisée, la
direction Générale s'est limitée à
l'exécution des décisions des organes statutaires et de la
tutelle, à préparer les états financiers et comptables,
à la gestion de la coopération et de la sécurité,
et à conduire l'ensemble des services à la réalisation des
objectifs de l'hôpital.
Malheureusement, la rupture de la coopération avec la
Banque Mondiale et la nomination des mandataires d'entreprise publique dans un
établissement public qui ont rétablit la gestion
centralisée ont plongé l'hôpital dans un chaos
indescriptible qui a conduit à la révocation desdits
mandataires.
L'Arrêté n° 1250 du 29 Août 2006
pêche par son caractère illégal, car un arrêté
ne peut créer un établissement public. Il a pu néanmoins
soustraire cet hôpital du très néfaste statut de service
public.
Le problème majeur de l'HPGRK demeure l'absence des
subsides et l'énormité du manque à gagner dû
à l'insolvabilité des FARDC, de la Police nationale, des services
de la Présidence, de l'Hôtel de ville et de la Fonction publique
dans un contexte à l'assurance maladie n'est pas organisée.
La défaillance majeure de ce système de gestion
décentralisée est l'absence d'un système de
péréquation entre les différents départements qui
fonctionnent chacun à sa propre vitesse. L'on se retrouve dans une
institution où chaque Département fonctionne de manière
trop autonome par rapport aux autres même s'ils relèvent tous de
la Direction Générale qui nomme les Comités de
Départements.
L'application des textes sur la tarification des prestations
sanitaires pose un sérieux problème dans l'harmonie entre les 3
corporations médicales, paramédicale, administrative et
technique. Alors que le corps médical repartit les honoraires selon le
principe du pool, départements, les autres corporations ont
adopté chacune le principe de pool commun, ce qui exacerbe
l'écart entre les honoraires des membres du corps médical et ceux
des membres des autres corporations.
La véritable révolution du système de
gestion décentralisée est certainement l'oeuvre gigantesque du
Conseil Supérieur du Portefeuille qui a réparti les charges
relevant de la Direction générale et celles relevant des
Départements.
Mais il est vrai que sans la mise en oeuvre des
systèmes de péréquation, la gestion
décentralisée ne peut pas produire les effets qui peuvent
permettre à tous les départements un fonctionnement optimal.
Les lacunes qu'on relève dans la structure de cet
hôpital, c'est l'absence d'un texte juridique qui répond aux
normes actuelles qui régissent un établissement public. Le nombre
d'organes doit être adapté en conséquence.
Par ailleurs, il est indispensable de réhabiliter la
Direction technique, compte tenu de la taille de cette institution qui compte
une quarantaine des pavillons.
Mais l'autre plus grande carence est l'absence totale de
subsides de fonctionnement depuis plus de 16 ans. Ceci ôte à cet
hôpital ce caractère social auquel MOBUTU et le peuple de Kinshasa
ont toujours aspiré, car « le petit peuple naît et meurt
à l'Hôpital Marna Yemo ». Pire encore, le refus
obstiné du Gouvernement et de l'Hôtel de Ville d'honorer ses
créances l'empêche d'équilibrer son budget,
d'améliorer les infrastructures et de rétablir la motivation du
personnel de l'ère FOMECO.
La satisfaction la plus profonde est l'augmentation
considérable du nombre des Médecins spécialistes qui est
passé de 8 à 50 sur 150 médecins en 30 ans. Ceci a
considérablement amélioré la qualité des soins.
Enfin, le fonctionnement et la gestion autonome de la morgue
privent cet hôpital d'un outil précieux.
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