2,5- Un projet incapable de s'imposer à long
terme : la chute de Nasser et l'irruption de la Résistance
palestinienne
La chute de Nasser en 1967, et sa défaite contre
Israël ont fait vaciller le support arabe du chéhabisme et du Pacte
National de1943. La disparition de l'ombre de Nasser qui consacrait le statu
quo dans le monde arabe a fait sombrer le Moyen-Orient dans ses querelles
historiques et intestines.
De plus, l'irruption de la Résistance palestinien
représentait un double défi pour le Liban par sa
présence au sein même du pays et surtout après 1970,
après avoir été chassé de Jordanie et par
l'attraction que les palestiniens représentaient pour la gauche
libanaise qui sortait à peine du nassérisme. C'est ainsi que le
nationalisme arabe libanais se teinta de marxisme, second défi dans le
cadre d'un Liban démocratique.
La gauche libanaise et les palestiniens ont travaillé
la base, la masse musulmane libanaise, pour les retourner contre leurs leaders.
Après 1958, le système électoral libanais était
construit de telle manière que ne pouvaient être élus que
ceux qui avaient les moyens : c'est-à-dire l'argent et la
clientèle. Une fois élus, les leaders musulmans se sentaient
obligés d'aller dans ce sens, ne fût-ce que pour justifier leur
élection.
Les Etats arabes entrent en guerre le 15 mai 1948, à la
proclamation de l'Etat d'Israël. Tout le monde pénètre en
Palestine pour la libérer et battre les Israéliens. Après
les défaites, ils signent des armistices et se donnent ainsi un temps de
réflexion. Mais ce temps de réflexion est rempli par un vide et
la poursuite des querelles intestines interarabes. Les arabes ont signés
l'armistice en attendant « de régler le sort de la
Palestine. » L'armistice n'était en effet qu'un arrêt
des hostilités en attendant le règlement de la question
palestinienne. Or, non seulement aucun règlement n'avait lieu, mais on
n'essayait même pas de s'occuper des réfugiés
entassés dans des camps miséreux, et complètement
marginalisés.
A partir de 1967, le conflit arabo-palestinien élut le
Liban comme champs de bataille, les partis et mouvements politiques, allant de
l'extrême droite chrétienne à l'extrême gauche
s'entendirent , tout en se combattant entre eux contre les chéhabistes,
et plus précisément contre l'autorité du
« Deuxième Bureau ».
Certes, les réformes et les réalisations
administratives et sociales que le chéhabisme apporta, ont
demeuré, mais sa stratégie, en vue de bâtir un État
moderne et une nouvelle conception de l'unité nationale fut
interrompue.
Les Accords du Caire de novembre 1969, en consacrant
l'extraterritorialité des camps palestiniens et la
légitimité de l'action guerrière de la Résistance
palestinienne contre Israël depuis le Sud Liban, devaient
précipiter la décomposition de la scène politique
libanaise au point que l'intérieur de sa scène et
l'extérieur des scènes régionale et mondiale devaient
désormais se confondre toute frontière estompée. C'est
ainsi que s'est constitué, par exemple, le « Fath
land » : un « territoire palestinien »
établi au sein du « territoire » libanais, avec
le consentement d'une bonne partie de la population libanaise. Le Liban perdit
alors tout semblant de souveraineté et s'ouvrit définitivement
aux grands vents des turbulences de la géopolitique.
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