L'approche interculturelle en Prevention Specialisée( Télécharger le fichier original )par Yassine Jelouali Université Paris 13 - IRTS - DEES-Licence 2003 |
CHAPITRE II : OBSERVATIONS DE TERRAINS ET INTERVENTIONS EDUCATIVESL'objectif de ce chapitre est d'exposer des situations rencontrées notamment durant mon stage de 8 mois dans un club de prévention. Mais auparavant, je me propose de vous présenter le terrain des situations observées : la prévention spécialisé et ses spécificités I/ Présentation du terrain d'étudeo La prévention spécialisée Historique, C'est à la fin de la seconde guerre mondiale, qu'on vit apparaître pour la première fois sous le nom de Clubs d'Enfants, la première génération d'expériences, reconnues comme fondatrices de la prévention. Des initiatives individuelles et locales se font jour, essayant de répondre aux désarrois et aux difficultés de tous ordres nés des bouleversements de l'après-guerre (déracinements - reconstructions). Ces derniers amènent un changement dans les mentalités, en même temps qu'apparaissent les premiers effets d'un développement urbain plus ou moins anarchique (phénomène des bandes d'adolescents, des « blousons noirs » au cours de l'été 1959). L'idée d'un nouveau type d'action face aux difficultés rencontrés par les jeunes, a été lancée par quelques personnalités, notamment Fernand Deligny, H. Flavigny à Paris, Robert Chazal (juge des enfants à Paris), P. Martaguet (juge des enfants à bordeaux), qui aspirent à trouver des réponses autre que judiciaires et répressives aux délits causés par les jeunes. On peut ainsi considérer que la Prévention Spécialisée est née d'une critique interne de la prise en charge institutionnelle. Un peu plus tard l'Ordonnance du 23/12/1958 marque une étape importante, dans la mesure où elle regroupe en un texte unique, l'ensemble des dispositions concernant les mineurs en danger, non délinquants. C'est dans le cadre de leur pouvoir d'assistance éducative que des juges des enfants ont été amenés à s'intéressée et à soutenir le développement des clubs et équipe de prévention. Cela à amener à la prise d'un arrêté le 13/05/1963. Le Haut-commissariat à la jeunesse et aux sports crée un « Comité National des Clubs de Equipes de Prévention «contre l'inadaptation sociale de la jeunesse ». Mais finalement, la prévention quitte, peu de temps après (1970), le giron de la jeunesse et des Sports pour être rattachée au Ministère de la Santé et plus particulièrement au secteur de l'Aide Sociale à l'Enfance. En 1972, l'arrêté du 4 juillet (ainsi que ces circulaires d'application) marquent la reconnaissance officielle de ce mode d'intervention, de ses principes et de ses méthodes, sous le vocable de « Prévention Spécialisée ». En 1972, les associations de prévention spécialisée sont au nombre de 98, en 1996 on en dénombre 350 environ. Le 1er janvier 1984 entre en vigueur la loi du 22 juillet 1983, réalisant les transferts de compétences dans le domaine sanitaire et social entre l'Etat et les collectivités locales. La Prévention Spécialisée entre dans les compétences transférées aux départements. Enfin, la loi du 6 janvier 1986 adapte la législation sanitaire et sociale au transfert de compétences en matière d'Aide Sociale. La Prévention Spécialisée est rattachée au dispositif administratif départemental de l'Aide Sociale à l'Enfance (article 45 du Code de la famille et de l'aide sociale). La prévention spécialisée peut se décliné à trois niveaux :
Finalités et principes de la prévention spécialisée La finalité première est « d'agir sur les phénomènes d'inadaptation et les états de souffrance d'origine sociale, source d'actes de délinquance, de violence parallèlement au dévellopement d'insécurité de la population ».7(*) Les grands qui en découlent : - mener des actions éducatives visant à aider les jeunes à se prendre en charge dans le domaine de leur vie personnelle, de leur travail et de leurs loisirs. - Participer au dévellopement de la vie sociale d'un quartier, d'une ville - Etablir un partenariat actif La prévention spécialisée s'inscrit dans le travail social selon six principes d'intervention : - L'absence de mandat, - la libre adhésion, - respect de l'anonymat, - le partenariat et le support associatif, - Non-institutionnalisation des activités supports ? Absence de mandat nominatif C'est de ce principe que vont découler les autres. Ce ne sont pas des personnes qui sont désignées, mais une population. C'est aussi une différence fondamentale avec une approche administrative ou judiciaire. Ainsi, la personne n'est pas stigmatisée par une problématique ? La libre adhésion L'absence de mandat implique toute une démarche "pour aller vers", "à la rencontre de l'autre". Toute liberté doit être laissée à la personne d'adhérer ou non à nos propositions, d'élaborer, de maintenir ou de rompre une relation. Cela permet au jeune d'être acteur. ? Respect de l'anonymat Il exige discrétion et confidentialité de la part de l'éducateur. Celui-ci garantit l'efficacité et la crédibilité d'un travail fondé sur la confiance. La personne peut venir vers lui librement sans se sentir jugée par un passé ou par un dossier. ? Le Partenariat et le support associatif En prévention spécialisé la souplesse, la proximité, une réaction rapide ainsi qu'une relative autonomie sont à la base de ses méthodes ou le cadre associatif paraît le mieux adapté. L'objectif est d'éviter d'être semblable aux institutions (enfermé dans un cadre rigide) que les jeunes rejettent. IL est nécessaire car l'éducateur ne peut agir seul. Il doit être en contact avec les "institutions" (associations, mairie, foyer d'hébergement, etc...) afin de faciliter l'accès des jeunes aux équipements de loisirs, formation et au monde du travail Un des objectifs étant de permettre l'intégration des jeunes dans les structures de droit commun, l'action s'exerce à deux niveaux : * Action auprès des jeunes pour aider cette intégration * Action auprès des structures pour faciliter leur adaptation L'action éducative des équipes nécessite que soient fédérées les compétences des différents partenaires de manière à prévenir la marginalisation, faciliter la promotion et l'insertion sociale des jeunes et des familles. Le partenariat s'exerce avec les responsables politiques des Villes et du Département, d'une part en tant qu'observateurs privilégiés des besoins de terrain, et d'autre part en tant que participants à la réflexion et à la mise en place de réponses adéquates. Après avoir exposer succinctement les principes de la prévention spécialisée, je me propose de vous présenter maintenant le lieu de mes observations : le club de prévention. ? Non-institutionnalisation des activités Cela suppose de la part des éducateurs une volonté de ne pas faire perdurer les activités mises en place. Ces outils doivent servir à atteindre des objectifs, cela ne doit pas devenir des finalités en soi. o Le club de prévention En 1985, le CCPD (Conseil communal de la Prévention de la Délinquance) prend l'initiative de créer un club de prévention régie par la loi 1901. Le club est né officiellement en 1985 mais ne commencera son travail qu'en 1986.
L'accompagnement éducatif En l'accompagnant dans son cheminement personnel, l'éducateur veille à développer chez l'usager les motivations susceptibles d'inspirer une projection dans le temps et de favoriser la formulation, la concrétisation et enfin la réalisation de ses projets (famille, travail, formation, comportement). Cela passe par : - entretien individuel avec l'usager - accueil et démarches au local - accompagnement dans les démarches - contact avec les travailleurs sociaux concernés par les suivis éducatifs - travail avec les familles, etc La présence sociale Il s'agit de tendre vers une présence fréquente et régulière, aux moments où les jeunes ont l'habitude de se retrouver quels que soient le jour et l'heure. L'éducateur dans le club de prévention s'efforce de cerner les moments à privilégier en réalisant à échéance régulière une observation d'amplitude maximale : journées, soirées, week-ends, jours de fête. L'éducateur fait ainsi comprendre par son comportement, et non à partir d'une annonce verbale ou formelle, sa disponibilité aux moments les plus favorables au développement des relations. Les saisons ont une influence sur les moments de travail de rue pour assurer cette présence sociale. Les espaces non institutionnels constituent les itinéraires des éducateurs de Prévention Spécialisée. La rue, les squares, les porches d'immeubles, les cages d'escaliers, mais aussi les espaces commerciaux ou publics, les cafés, les salles de jeu, les cafétérias, les gares, les équipements socioculturels qui disposent d'un lieu d'accueil ouvert (nous utilisons fréquemment la maison des ados de la ville comme lieu de présence sociale). Travailler dans la rue c'est être disponible pour écouter, observer sans insistance et avec discrétion. Sans intention autre que d'aller à la rencontre. Proposer trop vite des solutions aux problèmes énoncés, sans connaissance des personnes et du milieu, se révèle souvent être une erreur. Il faut arriver à faire partie du paysage et avoir intégré les codes, les rituels autour desquels s'organise la vie des jeunes sur le quartier. Le club de prévention où j'ai effectué mon observation présente un avantage non négligeable qui est son installation dans la ville depuis de nombreuses années. De plus, l'équipe présente dans club possède une éducatrice et un éducateur qui sont en place depuis environ 8 ans ce qui permet d'une part au reste de l'équipe de bénéficier de leur connaissance sur ce territoire et d'autre part d'être accepté par la population de la ville. C'est donc dans cette structure que j'ai pu observer certaines situations qui m'ont parus intéressante au vu de mon mémoire et dont je vais vous retranscrire le contenu. * 7 Chartre du CNLAPS (comité national de liaison des associations de prévention spécialisée, 1997 |
|