La Loi SRU : une loi en péril ? Controverses et difficultés d'application( Télécharger le fichier original )par Caroline Levron Université Paris X-Nanterre - Science sociale, sociologie-économie 2007 |
2.3.3.2. Accentuer la ségrégationAccentuer la ségrégation sociale est l'un des effets pervers le plus mis en avant car la législation s'arrête à un objectif comptable. Les communes doivent avoir 20 % de d'habitations sociales sur leur territoire aucun texte ne précise pas la manière dont elles doivent être édifiées. Et aucun moyen n'a été mis en oeuvre afin de vérifier que la construction de ces logements est uniforme sur le territoire. Or au sein même des villes, la ségrégation peut se constater à différentes échelles : des quartiers aux immeubles, en passant par des pans du territoire. Le risque de créer de nouvelles poches regroupant les individus modestes et sans interaction avec le reste du territoire est alors envisageable. De plus, les critiques portent sur l'uniformité du quota de 20 % quelque soit le profil de la commune. Ainsi la loi ne prend pas en compte les spécificités territoriales, et en particulier celles liées à l'aspect foncier du terrain. De cette façon, les communes « huppées » bâtissent des HLM pour des coûts de construction plus élevés que dans les autres communes. Ce genre de politique est à l'origine d'une hausse du loyer correspondant et de manière générale une augmentation du coût de la vie locale. Les ménages les moins fortunés ne pouvant en supporter les frais se retrouvent automatiquement exclus dans l'attribution de ces logements ou sont amenés à les quitter rapidement. Le risque est de voir les habitations sociales occupées par les classes moyennes beaucoup plus en mesure de faire face à ces coûts, voir occupées par des classes aisées qui résidaient initialement dans des communes plus pauvres. La distribution spatiale selon les classes ne s'en retrouverait pas forcément modifiée, d'autant qu'un constat précise que « quatre cinquième des ménages vivant en HLM ne sont pas pauvres et plus des deux tiers des ménages pauvres ne vivent pas en HLM »74(*). Toujours d'un point de vue économique, Harris Selod75(*) s'interroge sur l'efficacité même d'une amende attribuée aux communes fortunées refusant de construire les logements sociaux manquants. Celle-ci étant uniforme et ne prenant pas en compte la base fiscale de la ville, le coût supporté par les localités riches est moins important, au cas où celles-ci ne construisent pas. Au final, payer une amende reviendrait à être plus avantageux, l'image controversée des logements sociaux étant un motif valable pour en supporter des coûts financiers. Dans ces différents cas de figure, l'application de la mixité sociale aurait des effets relatifs. * 74 BEHAR Daniel, « Vieilles lunes dans les HLM ». Libération, lundi 13 mars 2000. * 75 SELOD Harris, La Mixité sociale et économique in MAUREL François (dir.), Villes et économie. Paris : La Documentation française, 2004. |
|