Envoyé Spécial : une approche de l'environnement à la télévision française (1990-2000).( Télécharger le fichier original )par Yannick Sellier Université Paris 1 Panthéon Sorbonne - Master 2 Histoire et Audiovisuel 2007 |
b- Paul Nahon et Bernard Benyamin, journalistes, présentateurs et coordinateurs.Envoyé spécial, 22-10-1992, 20h50, Deuxième image du générique. Lorsque l'idée de mettre en place un « magazine d'information » est lancée, Paul Nahon est directeur adjoint de l'information chargé des magazines. Paul Nahon a une formation universitaire en sciences économiques et sociales et suit un parcours parallèle à celui de Bernard Benyamin, quant à lui formé à l'école de journalistes de Lille. Tous deux font leurs premières expériences du journalisme à France Inter au début des années 1970, puis comme reporter à la télévision, après l'éclatement de l'ORTF en 1974 et jusque dans les années 1980. Surpris de se voir confier si rapidement la responsabilité d'un magazine d'information, ils s'engagent avec un réel enthousiasme dans la préparation de la première émission (prévue pour le 18 janvier 1990). Comme Paul Nahon et Bernard Benyamin le répètent à plusieurs reprises, ils ne souhaitent pas devenir des vedettes. Lorsqu'au milieu des années 1990, on leur décernera un « Sept d'or » pour leur rôle en tant qu'animateur d'Envoyé spécial, ils le dédiront à leurs confrères et au peuple algériens. Par la force des choses, leur personnalité est en fait très vite associée à l'image de l'émission. Ils ne sont peut être pas devenu des vedettes, mais leur style a fortement marqué les téléspectateurs. En effet, ils incarnent le sérieux des propos tenus, par leur apparence (code vestimentaire strict, costume et cravate sobres) et par le ton de leur voix (à la fois grave et concerné) ou leur manière de présenter (en peu de mots, de façon claire et concise). On peut lire en 1997 dans l'introduction d'un entretien avec Paul Nahon et Bernard Benyamin, au titre déjà évocateur - « Envoyé spécial, entre rigueur et austérité » - « [...] Envoyé Spécial se distingue par la rigueur de sa ligne éditoriale, reconnaissable au ton que le magazine a choisi pour identifier l'événement et lui donner un sens » 34(*). 1991 - Paul Nahon et Bernard Benyamin posant dans le décor d'Envoyé spécial. L'enregistrement de l'émission s'effectue en général en fin d'après-midi, le jeudi, quelques heures avant la diffusion. Paul Nahon et Bernard Benyamin se partagent l'animation du magazine et n'apparaissent que rarement en même temps à l'écran. Lorsque l'un apparaît pour introduire les reportages, l'autre commente en voix-off le sommaire en images des sujets traités au cours de l'émission. Leur présence (de même que le dispositif dans lequel ils évoluent) engage le téléspectateur à se laisser convaincre. Derrière l'écran et en tant que coordinateurs de l'émission, Paul Nahon et Bernard Benyamin consacrent beaucoup de temps à la préparation de leur magazine. Leur première tâche est de vérifier le contenu des reportages qu'ils diffusent. D'abord, selon eux, parce que toute hypothèse avancée par un journaliste doit être prouvée par l'image, si l'on souhaite susciter l'intérêt du téléspectateur et ne pas s'attirer les foudres de ceux qui, mis en cause, pourraient leur intenter des procès. C'est pourquoi, lorsque cela s'avère nécessaire, les reportages peuvent prendre la forme d'enquêtes et de démonstrations. D'autre part, en tant que responsables et prestataires d'un service destiné à un large public, ils se doivent de fournir un propos compréhensible par chacun. Ainsi Paul Nahon rappelle une anecdote : un reporter ayant mis en avant le discours d'un tunisien immigré en France disant « Si mon fils part combattre au côté des irakiens, je le tue ! », on a préféré nuancer le propos en insérant plus loin le discours dans le reportage afin que le téléspectateur ne s'imagine pas « Comment, ils tuent leurs enfants, ces gens là ! »35(*). Il ne faut pas se méprendre, leur rôle n'est pas de contrôler le contenu informatif, mais bien d'accompagner le journaliste en charge du reportage. Ainsi, ils organisent aussi à l'attention des journalistes, des réunions avec des spécialistes, afin de leur permettre de mieux préparer leur investigation et leur prise de contacts sur le terrain. Cette pratique qui pourrait paraître normale ou évidente, ne l'était que parce que le service public en avait les moyens et donc leur laissait le temps de préparer consciencieusement les reportages. Enfin, ils programment et choisissent les sujets diffusés. La ligne éditoriale de leur magazine correspond d'abord à celle du service public, ensuite aux aspirations de Paul Nahon et Bernard Benyamin, que ces quelques mots résument : « tolérance, ouverture, découverte de l'autre, solidarité »36(*). Autant de références apparemment abstraites qui trouveront leur traduction pratique dans la manière de traiter l'écologie et renvoient finalement à une conception humaniste de l'information. * 34 Introduction à l'entretien « Envoyé Spécial : rigueur et austérité », Cinémaction, Paris, 1997, p 70. * 35 Cf. notre entretien avec Paul Nahon et Bernard Benyamin en annexe. * 36 Doussot Michel, « Aux commandes d'Envoyé Spécial », Télé Scope, n°131, Paris, 18-24 mai 1996, p. 12 |
|