chapitre 1
![](maintenance-amenagements-hydroagricoles-delta-fleuve-senegal-boundoum4.png)
Le Delta se situe à l'extrême Nord-Ouest du
Sénégal (cf.fig 1). Il couvre une superficie de 5 000
km2 de Richard-Toll à l'ancienne embouchure naturelle du
fleuve Sénégal. L'originalité du milieu naturel a fait
que cette zone ait fait l'objet de grands programmes
d'aménagements en vue de sa mise en valeur agricole. Ces derniers ont
fortement bouleversé les systèmes de production traditionnels
à tel enseigne qu'ils aient fortement artificialisé le Delta.
Pour une bonne compréhension de la situation qui
prévaut actuellement dans le Delta, nous consacrons cette partie
à l'analyse des différentes évolutions qui se sont
opérées au niveau écologique, économique,
démographique, politique voire institutionnel.
A- Le milieu naturel
1-Unités géomorphologiques, sols et
végétation 1-1) Les unités
géomorphologiques
Dans le Delta s'opposent deux grandes catégories
d'unité paysagères : une zone régulièrement
inondée par les crues du fleuve appelée walo et une
autre non inondable à cause de sa topographie un peu plus haute qu'on
appelle diéri.
Dans cet ensemble se distinguent trois ensembles
morpho-pédologiques qui sont spatialement imbriqués. Il s'agit
des cuvettes de décantation, des levées- fluvio deltaïques
et des dunes du diéri.
a) Les cuvettes de décantation (appelées
walo)
Les cuvettes de décantation forment des dépressions
topographiques où
l'alluvionnement était moindre et assurent la transition
entre les versants et les levées (J. Tricart, 1961). Ce sont des
unités postnouakchottiennes c'est-à-dire qu'elles ont
été édifiées
après le retrait de la mer. Les sols sont localement
appelés hollaldé, avec une grande
proportion d'argile (environ 55%). Ces sols ont une très
bonne capacité de rétention et sont très
indiqués pour la riziculture irriguée. Les
périmètres qui ont été les premiers à
être réalisés
ont été dans leur plus grande majorité
installés sur ces cuvettes. Nous avons le cas par exemple du casier
rizicole de Richard-Toll dans le haut delta, le périmètre de
Boudoum dans
le moyen delta, etc.
b) Les levées fluviodeltaïques
Les levées sont des bourrelets de berge construits par
le fleuve lui-même à partir de piégeage de
sédiments. Fluviodeltaïque vient de la combinaison de deux mots :
fluvio qui veut dire la charge solide du cours d'eau et de deltaïque qui
renvoie à une nappe d'eau. Cette unité a été mise
en place pour l'essentiel durant la période golfe (transgression marine)
qui a duré
de 12 000 jusqu'à 2 000 ans Bp. Du point de vue
granulométrique, les dépôts fluvio
deltaïques sont constitués de sables fins, de
limons et d'argiles. Localement, les sols de cette unité sont
désignés sous le nom de fondé. Ces
dépôts sont aujourd'hui le support des aménagements
hydro agricoles de type PIP, le long de l'axe Gorom-Lampsar
plus précisément dans le moyen delta (SY.B, 1995).
c) Les dunes du diéri
Les dunes du diéri se présentent sous
la forme de grands alignements longitudinaux de direction est/sud-ouest
à la bordure méridionale du Delta. D'autres alignements
s'étendent depuis Gorom-aval jusqu'à l'île de Ntieng. Elles
se sont mises en place durant une période d'aridité très
marquée (22 000-1 2000 ans Bp) que l'on appelle ogolien. Les sols qu'on
trouve sur ces dunes sont de type bruns subarides grâce aux phases de
stabilité (pluvial tchadien et pluvial néolithique) qu'a connues
le système ogolien. Ces dunes supportaient des cultures
pluviales et constituaient des champs de parcours pour le
bétail.
Aujourd'hui les alignements sont très discontinus à
cause des sapements et
recoupements par les différents bras. Une perte
progressive du profil pédologique par dénudation et/ou
remaniement caractérise la dynamique actuelle de ce système
dunaire.
Sur l'ensemble des unités présentées se
sont développés des sols déterminés en grande
partie par l'hydromorphie ou la salure.
1-2) les sols
Dans le delta du fleuve Sénégal, les sols peuvent
être regroupés en deux grandes familles. Une première
formée par les sols déterminés par la présence de
l'eau et une seconde regroupant les sols salés.
a) Les sols hydromorphes
Les sols hydromorphes sont principalement ceux des cuvettes de
décantation. Ils résultent d'une submersion plus ou moins durable
par les eaux de la crue du fleuve. Ce sont
les sols de « walo » constitués
essentiellement de « hollaldé » très argileux,
pauvres en
matière organique et d'une structure massive. Difficiles
à travailler, ils conviennent à la
riziculture.
b) Les sols salés
Les sols salés sont également appelés
sols halomorphes. Ils sont localisés au niveau de certaines cuvettes de
décantation et levées fluviodeltaiques. On peut aussi les
rencontrer dans les dépressions vouées à recueillir les
eaux de drainage. Les facteurs explicatifs de la présence du sel dans
ces sols sont la proximité de l'océan et la transgression marine
(Houma.Y 1993).
Aujourd'hui, le processus de salinisation des terres du delta du
fleuve Sénégal est si
accrue que l'on note beaucoup d'abandons en pleine campagne
agricole. Et face à cette situation alarmante, des mesures
draconiennes sont à prendre car la présence du sel dans les
sols compromet toute activité agricole (Lerricolais.A et
al. 1976).
Hormis ces deux grandes familles de sols, il faut y ajouter les
sols du système dunaire plus connus sous le nom de sols du
diéri. Ce sont des sols bruns subarides dont la teneur en
argile est faible.
1-3) la végétation
Les écosystèmes du Delta sont des formations
sahéliennes. Le couvert végétal naturel est souvent bien
adapté aux conditions difficiles du milieu. Dans l'ensemble, la
végétation est
discontinue et composée à majorité
d'herbes xérophiles. Selon Konaté.M. (1999), une
corrélation positive existe entre formation
végétale et type de sol dans ce paysage
sahélien. Ainsi, sur chaque grand ensemble morpho-pédologique
que compte le Delta vont pousser des
espèces spécifiques.
* Sur les dunes du diéri
Du point de vue floristique, les dunes du diéri
supportaient des espèces ligneuses comme Acacia albida, Acacia
radiana, Acacia seyal, Balanites aegyptiaca, etc. ; les strates
arbustives et herbacées sont constituées
d'euphorbiacées (Euphorbia balsamifera),
de combrétacées (Guiera senegalensis), et de
graminées saisonnières (Cenchrus biflorus, etc.)
Wade (2003). Ces espèces végétales sont
celle de la savane.
* Sur les cuvettes
Dans les cuvettes argileuses de décantation, autour des
défluents du Sénégal, prospéraient des forêts
d'Acacia nilotica. A cela s'ajoutaient les graminées
pérennes telles que
Oryza longistaminata, Echinochola stagnina et Vossia
cuspidata qui constituaient une ressource alimentaire d'une importance
non moins considérable pour le bétail.
Dans les cuvettes très salées (Sebkhas) se
développaient des plantes halophiles comme
Salsola baryosma, Tamarix sen egalensis,
etc.
* Sur les levées fluvio deltaïques
Les levées fluvio deltaïques constituent le plus
souvent le support des aménagements hydro agricoles.
Sous l'effet combinatoire de facteurs physiques
(sécheresses) et humains (création d'aménagements hydro
agricoles), de nombreuses espèces ont disparu ou ne
subsistent qu'à l'état résiduel (Kane. A in
mélanges) d'une part ; de nouvelles espèces ont vu le
jour (Typha australis, Salvinia molesta, etc.) d'autre part.
2- Climatologie
Le climat peut être défini comme la synthèse
des temps qu'il fait. Selon Maxe Sorre cité par Brunet.R et al. (2005),
« le climat d'un lieu est la série des états de
l'atmosphère au- dessus de ce lieu dans leur succession habituelle
».
Le climat du delta du fleuve Sénégal est
caractérisé par la double influence de l'océan et du
continent. Il est conditionné par trois principaux centres d'action ou
anticyclones. Ces
anticyclones sont celui des Açores, de
Sainte-Hélène et du Sahara communément appelé
anticyclone libyen. Chacun d'eux est responsable de
l'installation d'un type de vent spécifique et qui domine la
circulation atmosphérique générale du Delta pendant un
moment
bien déterminé.
2-1) Les masses d'air
* L'alizé maritime : c'est un vent issu de l'anticyclone
des Açores, de direction Nord à
Nord Ouest. De novembre à février (saison
sèche froide) ce vent domine la circulation
atmosphérique générale de la zone. Il est
chargé d'humidité en raison de son parcours océanique
mais n'est pas porteur de pluies. Il provoque un abaissement de la
température, du
brouillard, de la rosée cependant il s'assèche
rapidement vers l'intérieur.
* L'alizé continental ou Harmattan : de Mars à juin
(saison sèche chaude) domine l'harmattan. C'est un air saharien issu de
l'anticyclone libyen. Il est caractérisé par une grande
sécheresse (la population l'appelle « mboyo ») avec
des amplitudes thermiques fortes : frais
ou froid la nuit, il est chaud le jour. Souvent il s'accompagne
de poussière, de sable.
* La mousson : ce vent ne s'installe qu'en juin-octobre et issu
de l'anticyclone de Sainte-Hélène. Son long trajet maritime le
rend très humide. Il est responsable de la quasi- totalité des
précipitations enregistrées au niveau du Delta.
En dehors de ces types de vent, il est possible de rencontrer
dans la zone des vents
locaux qui se manifestent généralement en fin de
saison sèche : ce sont les vents tourbillonnaires que la population
locale désigne sous le nom de « ngëlewër
».
2-2) Les températures
L'étude de la température présente une
importance capitale pour l'agriculture irriguée.
Dans le delta du fleuve Sénégal, les
températures sont élevées et sont liées à la
latitude tropicale de la région. Les moyennes annuelles vont de 20
à 40°c avec des extrêmes variant
entre 12°c (novembre-février) et 45°c
(mai-juin). Les températures sont également
caractérisées par des variations dans le temps
avec les saisons notamment avec les précipitations qui les abaissent
et dans l'espace avec la proximité ou l'éloignement de la mer.
Il convient de signaler que lorsqu'elle est élevée,
la température favorise le développement de la plante de riz
tandis que si elle est basse, elle est source d'avortement du
riz conduisant sans doute à de mauvais rendements. C'est
pour cette raison qu'il n'est pas
indiqué de cultiver du riz en saison sèche
froide.
2-3) Les précipitations
Les précipitations revêtent une grande importance en
ce sens que l'essentiel des activités du Delta leur sont tributaires
(Diagne P.S, 1974). La pluviométrie y est globalement
faible et est caractérisée par une
irrégularité interannuelle très marquée (voir tab.
1).
L'existence d'une seule et courte saison pluvieuse (3 mois
d'hivernage sur 12) fait que la quasi-totalité des
précipitations tombent durant cette période. Cependant, en saison
sèche, la
zone peut enregistrer des pluies éphémères
dues aux perturbations du front polaire appelées «Eug» par
la population locale.
Tableau (1): Evolution de la pluviométrie de
2000 à 2004
Postes Pmm
|
2000/2001
|
2001/2002
|
2002/2003
|
2003/2004
|
2004/2005
|
H
|
NJ
|
H
|
NJ
|
H
|
NJ
|
H
|
NJ
|
H
|
NJ
|
Dagana
|
Dm
|
Dm
|
307
|
17
|
170
|
13
|
275
|
18
|
118
|
9
|
Richard- Toll
|
359
|
19
|
318
|
19
|
163
|
16
|
261
|
17
|
221
|
12
|
Mbane
|
387
|
19
|
350
|
15
|
237
|
13
|
308
|
20
|
207
|
12
|
Ross- Béthio
|
Dm
|
Dm
|
366
|
24
|
226
|
14
|
263
|
15
|
185
|
11
|
Rao
|
419
|
22
|
Dm
|
Dm
|
191
|
17
|
216
|
23
|
159
|
14
|
Saint- Louis
|
446
|
23
|
282
|
31
|
228
|
20
|
353
|
28
|
131
|
16
|
H = hauteur - NJ= nombre de jour de pluie - Dm= données
manquantes Source : DRDR/Saint-Louis
D'après le tableau ci-dessus, la zone a reçu,
dans la période de 2000 à 2004, une moyenne pluviométrique
de l'ordre de 21 7mm, et la station de Richard-Toll située dans le haut
Delta, une moyenne de 264,4mm ( voir fig.1). Pour ce qui est du nombre de jours
de
pluie, on note aussi une faible moyenne (soit 14 jours de
pluie).
Au cours de cette période, les maxima et minima
enregistrés à Saint-Louis sont de
446mm et 131 mm, alors qu'à Richard-Toll nous avons 3
59mm et 221 mm. Le nombre de jours de pluie n'est pas constant d'une
année à une autre. A Saint-louis les extrêmes sont 31
et 16 (soit une moyenne de 23,5) et à Richard-Toll ils sont 19 et 12
(soit une moyenne de 15,5).
Figure 1 : Courbe d'évolution de la
pluviométrie à Richard-Toll de 2000 à 2004
![](maintenance-amenagements-hydroagricoles-delta-fleuve-senegal-boundoum5.png)
400
250
200
350
300
150
100
50
0
R Toll
R Toll
En culture d'hivernage, lorsque la pluie est importante, elle
peut influer négativement
sur l'activité agricole. En effet, la pluie provoque la
prolifération des adventices, rend impraticable les pistes
d'accès occasionnant le report de certaines tâches
déterminantes (par
exemple les épandages).
3) Le réseau hydrographique
Le réseau hydrographique du Delta est tributaire à
la fois de la configuration géologique et géomorphologique et du
régime pluviométrique de la sous région. Au niveau de
cette région, le fleuve Sénégal semble être le plus
important concernant les eaux de surface.
· Le fleuve Sénégal
Le fleuve Sénégal, d'une longueur de 1700 km,
traverse les zones sahélo soudaniennes et sahéliennes où
il constitue le seul cours d'eau permanent (Lavigne Delvigne Ph., 1991). Cela,
J. Rodier cité par S.M. Seck (1981), l'a si bien souligné
lorsqu'il parlait de «fleuve
tropical débouchant en zone sahélienne». Donc
c'est un fleuve allochtone formé par la jonction du Bafing
(appelé Sénégal blanc par Muriel Devey) et du Bakoye
à Bafoulabé.
Dans le delta du fleuve Sénégal, le
régime naturel du fleuve est caractérisé par une
période de hautes eaux de juillet à octobre et de basses eaux de
décembre à juin (Thior P. 1998). L'eau de la mer remontait le
fleuve jusqu'à la hauteur de Dagana en saison sèche. Ce
phénomène de remontée de la langue
salée est aboli suite à la construction, sur le fleuve,
du barrage anti-sel de Diama en 1986.
A coté de ce dernier, nous avons un réseau de cours
d'eau anastomosés dont certains jouent le rôle d'adducteur et
d'autres, le rôle d'émissaire de drainage (Voir carte 2) :
- Le Gorom, long de 60km, part du village de
Ronkh plus précisément sur le site de Bépar. Il est
intrinsèquement lié au fleuve d'où proviennent presque
toutes ses eaux. Avant les barrages, le Gorom servait de réserve
d'eau douce pour la population, en période de décrue. Il
permettait également la pratique de cultures de décrue
qui occasionnaient le déplacement de nombreuses de familles.
Aujourd'hui avec les mutations que le réseau hydrographique a connues
(artificialisation hydrologique), le Gorom ne contribue qu'à
l'approvisionnement en eau des périmètres irrigués en plus
de l'activité de pêche qui s'y développe. Il rejoint le
fleuve en amont de l'île de Tieng en alimentant sur sa rive gauche les
marigots du Kassack et du Lampsar.
- Le Lampsar relié au Gorom amont
à hauteur du village de Boundoum-barrage où il prend son
origine, entre en confluence, successivement, avec les marigots du Kassack,
du Djeuss et du marigot de Khant avant de se jeter dans le fleuve
Sénégal en amont de la ville de Saint-Louis. Il décrit
des méandres engainés par de petites levées alluviales. Il
en résulte un isolement de cuvettes plus ou moins grandes à
Thiléne, Pont-Gendarme, etc. Fall.M (1999).
Le Gorom et le Lampsar constituent un axe qui retient, avec six
autres ensembles, l'attention d'un fonds de maintenance dénommé
FOMAED. C'est pour cette raison qu'on parle de système adducteur
Gorom-Lampsar.
- Le Djeuss, long d'une cinquantaine de km,
prend son origine au sud-est du parc de Djoudj et s'écoule presque
parallèlement au Lampsar avec qui il entre en confluence au nord de
la ville de Saint-Louis.
- Le Kassack a son origine entre le Gorom et
le Lampsar. Sa jonction avec ces derniers est aujourd'hui faite par
l'intermédiaire des ouvrages de Diambar et de Demba (près
de Diawar) ; il s'écoule parallèlement au Gorom sur 30 km
avant de se joindre au Lampsar.
- Le Diawel et le
Natché situés au Nord Est du Delta servent
aujourd'hui de collecteurs d'eaux de drainage des casiers rizicoles de
Thiagar et sucriers de la CSS ; son écoulement s'arrête dans
une plaine à l'ouest de Richard-Toll ;
- Le Ngalam situé au sud-est de l'axe
Gorom-Lampsar, dans le dièri, reçoit les eaux de lessivage de
la réserve attenante à l'ouvrage vanné de Ndiawdoune.
- Le lac de Guiers
Principale réserve d'eau douce du Sénégal,
le lac de Guiers occupe une dépression allongée dans l'axe
Nord-Sud d'environ 50 km de large entre 15°55 et 16° 16 de
longitude
ouest. L'alimentation du lac dépend du fleuve
Sénégal par l'intermédiaire de la rivière
Taouey. C'est à partir de ce lac que se fait
l'alimentation en eau de la ville de Dakar.
![](maintenance-amenagements-hydroagricoles-delta-fleuve-senegal-boundoum6.png)
4.Le cadre humain
Le Delta correspond un peu à l'ancien royaume du Waalo
qui s'est périclité en 1859. La population de ce royaume
était essentiellement composée de wolofs qui s'y sont
installés depuis fort longtemps (Barry.B 1985). Il y avait aussi des
peuls et des maures. Cependant, contrairement à la moyenne
vallée, la zone du delta du fleuve Sénégal et ses
bordures apparaissaient comme des déserts humains avant les
aménagements. En fait, les conditions du milieu naturel
n'autorisaient aucune installation humaine durable.
L'avènement de la riziculture irriguée et de
l'agro-industrie a vu la création de nouveaux établissements
humains et la venue de populations nouvelles. Il en est résulté
un enrichissement de la composition ethnique.
1- La composition ethnique Les ethnies que
l'on rencontre dans le Delta sont principalement :
- Les wolofs qui constituent la population autochtone. Ils
représentent plus de 63,6 % de la population d'après le
recensement de 1988. Ils sont des sédentaires et se concentrent
le plus souvent dans les villages anciens.
- Les peuls qui sont des nomades par excellence en raison de
l'activité pastorale qui le leur exigeait. On note aujourd'hui une
sédentarisation de certain parmi eux qui se sont convertis en de
véritables agro pasteurs. Il y a également le rôle non
moins considérable de l'Etat. En effet, dans beaucoup de hameaux
peuls des salles de classe ont été construites.
- Les maures : leur présence dans cette zone peut
s'expliquer par les rapports qu'entretenaient le royaume du Waalo et les
maures du Trarza. Leur nombre n'est devenu important qu'au lendemain du
célèbre conflit frontalier Sénégalo-Mauritanien.
Les politiques de peuplement du Delta,
développées par la SAED ont été à l'origine
de l'apparition d'ethnies étrangères. Il s'agit des
toucouleurs venus du Fouta et des sérères provenant de
l'intérieur du pays.
En outre, dans des endroits où l'agro-industrie s'est
développée, il est possible d'y trouver la majeure partie des
ethnies existant au Sénégal. C'est le cas par exemple de
Richard-Toll avec la CSS, de Dagana avec la SNTI, etc.
2) Peuplement et colonisation du Delta
L'une des ambitions que nourrissait la SAED était
d'inciter les gens à venir pratiquer l'agriculture à travers
une politique dite de peuplement. Pour l'accueil de ces populations,
de nouveaux villages ont été construits. Faisons d'abord une
étude sur les villages traditionnels avant de parler de ces villages
de colons.
2.1) Les villages traditionnels
Sont qualifiés de villages traditionnels les villages
qui existaient dans le Delta avant la création de la SAED. Ces
villages se situaient presque tous au bord du fleuve. Cette
proximité du fleuve présentait un double avantage selon Diagne
P.S : les populations pouvaient aisément s'adonner à la
pêche en plus de cela, elles avaient la possibilité, en
période de décrue, de faire de l'agriculture de
décrue.
Aujourd'hui, beaucoup de ces villages (dans le Moyen delta et
un peu dans le Haut delta) ont connu un déguerpissement suite
à la demande de l'OMVS. Par exemple, les villages de Wassoul, Ronkh,
Khor, Ndiaténe sont actuellement derrière la grande digue de
protection créée en 1964.
2.2) Les villages neufs
Avec la SAED, de nouveaux villages sont crées.
C'était dans le but non seulement de peupler la zone qui offrait un
peu l'aspect d'un «no men's land » (désert humain) mais aussi
et surtout d'encourager le développement de l'agriculture
irriguée. Ainsi pour l'installation des gens en provenance du
Diéri, le village de Boundoum Barrage fut crée en 1965.
En 1966, deux autres villages virent le jour et étaient
peuplés de paysans déplacés à cause de la crue :
Boundoum Est pour les paysans venus du village de Ronkh et Boundoum Nord
pour ceux qui sont venus de Kheune et Wassoul. Mais la plupart de ces
populations déplacées retourneront plus tard dans leurs fiefs
d'origine. Ce qui fait que Boundoum Est et Boundoum Nord sont plus connus
respectivement sous les noms de Ronkh Delta et de Diawar.
Les villages neufs ne se limitaient pas à ces trois car
dans la même année, la SAED créa deux autres qui ont
servi de zone d'accueil aux toucouleurs venus du Fouta (Kassack Nord) et
aux sérères (Kassack Sud).
Il convient de noter que ces villages étaient construits
suivant les mêmes règles architecturales et il y'a des maisons
qui perdurent jusqu'à nos jours.
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