1.2 Problématique et justification
Avant les années 90, la situation économique de
la filière a été particulièrement
préoccupante et, plus le niveau de la production du coton-graine
augmentait, plus le déficit financier enregistré par la
filière était important (MDR, 1995). Cette situation était
due notamment à la gestion peu efficiente de la vente du coton-fibre
béninois.
Dans ces conditions, le déficit cumulé de la
filière coton n'a pas cessé de croître et elle était
au bord de la faillite. Le gouvernement avec l'appui des bailleurs a alors
décidé de la réhabiliter en apportant des modifications
à ses structures et aux règles de son fonctionnement.
Ainsi depuis 1992, le gouvernement béninois a entrepris
un programme de restructuration du secteur. Il entend ainsi réduire le
coût d'intervention des structures étatiques par
l'amélioration de leur efficacité et le transfert de certaines
activités aux opérateurs privés (PNUD, 2000). Dans ce
cadre, la filière a connu de nouvelles orientations
caractérisées par un libéralisme économique. Ces
orientations concernent en particulier, le désengagement de l'Etat qui
s'est traduit notamment par une forte réduction des agents des services
de l'encadrement technique.
Cette libéralisation a favorisé l'ouverture de
la filière à divers acteurs. Ainsi, les usines d'égrenage
sont passées de neuf (09) à seize (16) et les
sociétés de distribution d'intrants agricoles sont passées
de deux (02) à onze (11) entre 1994 et 2003 (CSPR-GIE, 2003). Ce
réarrangement institutionnel au niveau du secteur a amené les
divers acteurs à créer, avec l'aval du gouvernement, des
structures spécifiques afin de coordonner le fonctionnement de la
filière. A cet effet, l'Association Interprofessionnelle du Coton (AIC)
a été mise en place pour constituer un cadre de concertation aux
diverses organisations professionnelles de la filière. La
Coopérative d'Approvisionnement et de Gestion des Intrants Agricoles du
Bénin (CAGIA) est constituée afin de sélectionner et
d'évaluer les distributeurs d'intrants. A côté de ces deux
structures, la Centrale de Sécurisation des Paiements et du Recouvrement
(CSPR) a été mise
en place pour assurer la commercialisation du coton-graine et
pour sécuriser le recouvrement des crédits intrants et le
paiement des producteurs.
Aujourd'hui, en dépit de ces réformes et des
acquis obtenus, le secteur cotonnier rencontre toujours d'importantes
difficultés aussi bien d'ordre organisationnel, que d'ordre technique,
qui s'opposent au fonctionnement du mécanisme mis en place (Hounkpatin,
2003).
Au plan organisationnel, les retards dans la mise en place des
intrants et dans le paiement des recettes cotonnières aux producteurs,
les perturbations des dispositifs d'égrenage et de mise en place de
semences certifiées, en débouchant sur la chute de la production,
ont engendré une désagrégation avancée de la
filière coton (Djiwan, 2001). La Centrale de Sécurisation des
Paiements et de Recouvrement se débat avec les égreneurs pour
récupérer ses créances, sans grands résultats
pendant que les mésententes entre égreneurs sur la
répartition du coton-graine sont devenues fréquentes. Certains
acteurs violent les règles de fonctionnement adoptées et les
contestations des appels d'offres effectués par la CAGIA pour la
sélection des distributeurs d'intrants se multiplient (Akibou, 2003). Au
niveau des producteurs, la mauvaise gestion des organisations paysannes
entraîne la remise en cause des cautions solidaires et la naissance
d'organisations dissidentes comme AGROP et FENAPRA (Gbèssou, 2004).
Les structures professionnelles mises en place, ont donc, au
bout de quelques années, laissé apparaître des
difficultés majeures auxquelles la filière doit faire face. Mais
est-ce vraiment une insuffisance des familles professionnelles qui est à
la base de ces divers problèmes que rencontre la filière
aujourd'hui ?
Selon Aïssi (2000), cette crise que traverse la
filière n'est que le résultat d'un partenariat ambigu mis en
place depuis la libéralisation. Le fonctionnement réel de la
filière se fait en l'absence de tout cadre réglementaire qui
définit clairement la répartition des responsabilités
entre l'Etat et les différents acteurs, dans la gestion de la
filière, ce qui développe une guerre d'intérêts
(Gbèssou, 2004).
Dans ce contexte, après la première
décennie de la libéralisation de la filière, il
paraît opportun de réaliser une étude pour
appréhender d'une part, les responsabilités et les motivations de
chacune des parties prenantes de la filière en vue d'expliquer les
dynamiques qui s'y opèrent et d'autre part, d'examiner les impacts de la
prolifération de nouvelles organisations professionnelles concurrentes
à celles existantes, sur les pratiques agricoles au niveau de la
production du coton.
La présente étude se place dans un processus de
développement participatif des innovations avec l'intégration des
connaissances endogènes et scientifiques de tous les acteurs
dans la perspective d'une orientation de la recherche vers les
besoins et les opportunités des producteurs. Ce cadre qui est l'un des
principes de base du projet Convergence des Sciences pour une meilleure gestion
des cultures et du sol (Projet-CoS), vise à renforcer la capacité
des paysans en les intégrant dans la mise en place des technologies afin
de réduire les charges de production agricole. Autrement, il s'agit de
mettre à la disposition des producteurs, des outils facilement
utilisables pour mieux gérer leur production.
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