9- CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
Depuis le début des années 1990, le Bénin
assiste à une réorganisation du secteur cotonnier, autrefois
coordonné et géré entièrement par l'Etat. La
filière est aujourd'hui gérée par une Interprofession
regroupant les organisations des producteurs, les égreneurs et les
distributeurs d'intrants. Avec ces réformes, on assiste dans le secteur,
à une profonde crise de confiance entre les divers acteurs.
A la suite de conflits entre acteurs au sein des organisations
professionnelles originelles, ces dernières ont connu des clivages avec
la création de nouvelles organisations. Ainsi, de la FUPRO, les
producteurs ont créé l'AGROP et la FENAPRA. De même, au
niveau des distributeurs d'intrants, des dissidents du GPDIA ont mis en place
l'ADIAB. Dans le rang des égreneurs, même s'il n'y a pas
formellement la création d'une organisation dissidente, toutes les
compagnies d'égrenage ne se reconnaissent plus membres de l'APEB. Toutes
ces organisations dissidentes mènent leurs activités en dehors du
cadre formel établi dans le contexte de la libéralisation,
perturbant ainsi le fonctionnement normal du mécanisme. Cette
restructuration institutionnelle a plus que jamais dessoudé les
relations entre différents groupes d'acteurs en créant au sein de
chaque classe des «mécontents» qui ne retrouvent plus leurs
intérêts dans ce nouveau jeu de la libéralisation. Mais le
non-respect par certains acteurs des engagements pris, ne saurait causer tant
de problèmes à la filière si l'Etat béninois jouait
à plein le rôle qui est le sien dans la réforme. En
réalité, il suffirait que l'Etat assure l'exécution de ses
prérogatives pour mettre fin au débordement actuel observé
au niveau de la filière coton.
Au-delà de toutes ces considérations, vu
l'importance de cette filière dans l'économie nationale (en terme
de contribution en valeur fiscale), il serait illusoire de l'approcher
uniquement sous un angle technique. Le secteur cotonnier n'est pas un terrain
libre où, différentes parties prenantes se retrouvent pour
échanger et se rendre complémentaires. Il est par contre, un
champ de bataille, où l'économie, la politique et les
intérêts (individuels, collectifs, nationaux ou de partenaires
étrangers) se confrontent et s'entrechoquent. La filière reste un
véritable foyer d'enjeux pour les différents acteurs.
Cet environnement de la filière ne manque pas
d'affecter la basse classe paysanne : la multiplication des réseaux, les
conflits de leadership,.... De nombreux producteurs se sont retrouvés
incapables d'utiliser la Lutte Etagée Ciblée, méthode de
contrôle des ravageurs reconnue assez efficace et peu coûteux.
Cette inaccessibilité à l'innovation est due à la
dissidence. Mais aussi, les distributeurs qui supportent ces
réseaux ne retrouvent pas leurs intérêts, à mettre
en place des intrants dans un système qui fait appel à moins
d'intrants.
Au vu des résultats de cette étude, il ressort
que l'Etat conserve encore une fonction de coordination et de régulation
des activités du secteur libéralisé, qu'il doit assurer
conjointement avec l'Interprofession. Mais le relâchement de l'Etat
à encourager le non- respect des règles définies pour la
conduite de la filière par certains groupes d'acteurs.
Des efforts devraient surtout être concentrés sur
l'augmentation des rendements afin que toutes les compagnies d'égrenage
atteignent au moins leur production nominale, ce qui limiterait les
guères entre égreneurs.
De même, compte tenu de l'échec des fonds de
stabilisation existants, le gouvernement devra rechercher des mécanismes
alternatifs de stabilisation (le cas de l'approche commodity risk management
par exemple) permettant de réduire les risques encourus par les
producteurs du fait des fluctuations des prix sur les marchés
internationaux. Toujours au plan international, surtout dans le contexte actuel
de la décentralisation, le développement d'un partenariat entre
les zones de production cotonnière et les compagnies d'égrenage
et de distribution d'intrants agricoles constituerait un atout pour les
municipalités. Le renforcement de la recherche et des capacités
de développement afin d'identifier d'une part, des
débouchés pour d'autres spéculations et d'autres part, des
alternatives durables aux méthodes de production actuelles (incluant le
coton organique et la réduction des coûts de production)
lèverait le goulot d'étranglement qui repose sur les
producteurs.
Face à la mauvaise gestion qui s'opère
continuellement dans les organisations paysannes, l'encadrement des producteurs
sur les modes de gestion doit être renforcé pour permettre de
relever les défis posés par la libéralisation. Il est
aussi recommandé d'accentuer la formation des producteurs, selon une
approche participative, sur les reconnaissances des ravageurs du coton et de
leurs ennemis naturels en vue de la promotion de la lutte biologique, qui
protège aussi bien les producteurs que l'environnement.
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