INTRODUCTION
L'agriculture algérienne a connu des changements
considérables, au cours des deux dernières décennies. Ces
changements économiques et sociaux font suite aux efforts de
libéralisation du marché dans le cadre du Programme d'Ajustement
Structurel. Ils ont été suivis depuis la fin du dernier
siècle, par des réajustements successifs des politiques
agricoles, notamment, le Plan National de Développement Agricole (PNDA)
lancé depuis l'année 2000.
Dans ce contexte, l'objectif des pouvoirs publics demeure la
sécurité alimentaire1 et l'augmentation de la
production agricole pour les produits de base constituant la ration alimentaire
de la famille algérienne, parmi lesquels figure, en bonne place, le
lait. En effet la consommation en lait dépend fortement des importations
en poudre de lait et lait instantané, mais il n'en demeure pas moins que
la production nationale couvre, en partie, les besoins en zones rurales.
Face à cette dépendance vis à vis de
l'extérieur et du faible niveau de contribution de la production
nationale en lait notamment pour la couverture des besoins des populations
urbaines, les pouvoirs publics tentent, à travers des actions
d'interventions budgétaires et d'encadrement économique,
d'améliorer la situation de l'élevage bovin.
Ces tentatives, menées dans le cadre du PNDA,
coïncident avec les négociations d'accession de l'Algérie
à l'Organisation Mondiale du Commerce. A travers l'accord
spécifique sur l'agriculture, l'OMC propose avec fermeté des
disciplines en termes de limitation du soutien interne et de
libéralisation progressive du commerce extérieur.
1. La sécurité alimentaire a été
définie comme : « l'accés par tous, à
tout moment, à assez de nourriture pour leur permettre une vie active et
en bonne santé », (Banque Mondiale, 1986).
« Pour que la sécurité alimentaire de
tous les ménages d'une même nation soit assurée, il importe
que la sécurité alimentaire le soit au niveau national.
Là, il s'agit essentiellement des conditions de l'approvisionnement,
c'est-à-dire qu'il est essentiel que l'ensemble des besoins des
ménages de la nation soit couvert par la production intérieure
plus les importations, que celles-ci soient faites pour des raisons
commerciales ou au titre d'aide alimentaire » (Michel Petit,
Marie-Lajaunie dans Agroalimentaria N°2 juin 1996).
Compte tenu de ce qui précède, les questions
fondamentales à l'origine de notre présent travail sont
posées ci-après :
*L'Accord d'Association avec l'Union Européenne et
l'adhésion prochaine à l'Organisation Mondiale du Commerce
« OMC », constituent un tournant important pour
l'économie algérienne. Ce qui nous amène à nous
demander : Quel sera l'impact de ces accords sur la filière
lait ?
* En évaluant la situation actuelle de la
filière lait, quels types de recommandations efficaces peuvent
être prévus pour asseoir convenablement de meilleures orientations
techniques et économiques dans un souci de rentabilité et de
compétitivité ?
Pour répondre à ces questions, nous nous sommes
interrogés sur plusieurs points :
- Quelle est la problématique de la filière
lait ?
- Quelles sont les politiques menées par l'Etat,
particulièrement dans le domaine des prix et du soutien à
l'investissement ?
- Quelle est la part d'influence de la politique de
protection tarifaire sur les objectifs assignés à la
filière lait ?
- Quelle est la marge de manoeuvre de la politique
laitière actuelle par rapport aux disciplines de l'OMC ?
A partir de ces questions, nous avons formulé les
hypothèses suivantes :
Hypothèse 1 : Le programme de
développement de la production laitière n'a pas atteint les
résultats escomptés. Les interventions de l'Etat en termes de
soutien à l'investissement et de prix n'ont pas eu de
conséquences significatives sur les niveaux de production
laitière et de la collecte. Dans le contexte économique et social
actuel, la filière n'est pas rentable et non compétitive ;
elle subira les conséquences (l'augmentation des prix de la poudre de
lait, la diminution de l'offre, etc.) du marché international, en zone
de libre échange.
Hypothèse 2 : Le Plan National de
Développement Agricole (PNDA) a permis d'orienter les soutiens vers
l'investissement à la ferme. Cette nouvelle orientation est conforme aux
disciplines de l'OMC puisque ce type de soutiens n'est pas soumis à des
engagements de limitation et de réduction. D'autres types de soutiens
à la production et à la collecte seront mis en place pour
développer l'intégration de la production dans l'industrie
agro-alimentaire. Le plafond toléré par l'OMC permettra un
soutien important à la filière. Les résultats
escomptés viseraient le moyen terme.
Hypothèse 3 : Toute politique
d'intervention de l'Etat en matière de prix et de soutien à
l'investissement ne peut obtenir les résultats escomptés sans une
adaptation de la politique financière dans toute sa dimension d'appui au
développement du pays, de participation à l'amélioration
des ressources physiques et une capitalisation effective des moyens de
production.
Pour confirmer ou infirmer ces hypothèses, nous avons
choisi d'adopter la démarche suivante :
Dans une première étape, nous
procédons à un état des lieux de la situation de la
filière lait sur la base des données récoltées
à partir de différentes sources, dans le but de faire ressortir
les contraintes de développement de la filière lait. L'approche
filière constitue la méthode la plus appropriée pour nous
éclairer sur la situation de la filière.
Dans une deuxième étape, nous
établissons une analyse des politiques laitières suivies pour
répondre à la problématique de la filière lait.
Dans une troisième étape, nous
effectuons une évaluation de la politique laitière en cours, en
recourant à la méthode la moins complexe pour avoir des
résultats objectifs en utilisant la Matrice d'Analyse des Politiques
(MAP) développée par l'Institut d'Harvard pour le
Développement International, qui permet d'évaluer le degré
d'intervention de l'Etat (niveau de soutien et de protection) à partir
d'une comparaison entre deux situations distinctes : une situation avec
intervention de l'Etat et une autre sans intervention de l'Etat. Il s'agit de
déterminer la marge de manoeuvre de la politique laitière
actuelle par rapport aux disciplines de l'OMC.
Enfin, nous tenterons d'anticiper sur un éventuel
changement de la politique d'intervention et ses effets sur les principaux
acteurs de la filière tout en prenant en considération le nouveau
contexte économique mondial par le processus d'intégration
économique régionale (UE, UMA,...).
Le plan de travail sera organisé autour des quatre
parties ci-après ;
Ø La première
partie traitera de la situation de la filière lait
en Algérie.
Ø La deuxième
partie portera sur l'évolution des interventions de
l'Etat
Ø La troisième
partie sera un essai d'évaluation de la politique
laitière
Ø La quatrième
partie incitera à la prospection de nouvelles pistes
pour un ajustement adéquat de la politique laitière en
réponse aux nouvelles règles du commerce mondial.
Ø Et enfin, une conclusion
générale regroupera les principales voies d'investigation
d'avenir.
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