SECTION I. LES MODELES DE BASE
DU DIAGNOSTIC STRATEGIQUE
Toute organisation qui a des objectifs de
pérennité devrait faire un diagnostic stratégique de
manière fréquente afin de connaître son
« état de santé ». Un diagnostic
stratégique se base sur des assertions fondamentales justifiant son
importance. La plupart des organisations peuvent être plus efficaces si
elles apprennent à diagnostiquer leurs forces et leurs faiblesses. Nous
présenterons ici le modèle le plus connu du diagnostic
stratégique, à savoir le modèle « LEARNED
CHRISTENSEN ANDREWS GUTH ». Tout en relevant les
principaux outils adaptés à ce modèle, nous parlerons
brièvement des autres modèles.
I. Le modèle
« LEARNED CHRISTENSEN ANDREWS GUTH » (LCAG)
Ce modèle est un point de référence
important car il constitue le premier modèle d'aide à la
formulation stratégique. Bien que simple dans sa présentation, il
possède un processus d'analyse stratégique riche et complexe qui
propose une méthode progressive conduisant à des conclusions
réfléchies. Il est question ici de faire une analyse interne et
une analyse externe de l'entreprise.
I.1.
L'évaluation externe L'analyse
extrinsèque a longtemps dominé l'analyse stratégique. Elle
a pour objectif de mettre à jour les opportunités de
développement dont peut bénéficier l'entreprise et les
menaces dont elle doit se garder. Cette analyse concerne quatre pôles (la
demande, l'offre, l'intensité concurrentielle et la concurrence)
permettant de définir les facteurs clés de succès du
secteur.
I.1.1. La
demande Son étude se décompose en
quatre étapes qui sont : -la mesure de la demande actuelle
qui permet de déterminer qui achète, dans quelles
proportions, suivant quelles modalités et quelle est la politique de
prix susceptible d'attirer un maximum de clients ; - l'étude
des facteurs susceptibles de l'influencer : la démographie, les
styles de vie, la publicité, les pouvoirs publics. Il faut en tenir
compte ; - l'appréciation de l'évolution de la demande
en fonction du cycle de vie de l'entreprise et actions à entreprendre
par les différents fonctions ou services de l'entreprise; - la
synthèse de la demande à l'issue de laquelle l'on peut soit
conclure à une insuffisance de la demande soit à un potentiel
fort de demande. Dans le premier cas le projet ou le produit est
abandonné et dans le second cas il faut investir.
I.1.2.
L'offre Son étude consiste à
répertorier l'ensemble des produits ou des services proches de ceux que
l'on souhaiterait commercialiser. Il s'agira
ici d'étudier :
- l'offre actuelle en dressant un catalogue des propositions
des concurrents ;
- son évolution en déterminant les attentes du
secteur, la valeur ajoutée du produit proposé par l'entreprise
par rapport aux produits existants, l'impact de l'évolution
technologique sur l'offre actuelle.
I.1.3.
L'intensité concurrentielle Cinq forces
commandent l'intensité concurrentielle au sein d'un même secteur:
la menace des nouveaux entrants, la menace des produits de substitution, la
rivalité entre les firmes, le pouvoir de négociation des
fournisseurs, le pouvoir de négociation des clients (PORTER M., 1997, p.
257).
I.1.4. La
concurrence
Il convient de connaître les
orientations stratégiques et le potentiel de développement
stratégique des concurrents. La démarche comporte classiquement
quatre étapes (MOSCHETTO B.L., 2002, p.43) : - le
repérage concurrentiel ; - la mise en place des profils
concurrentiels; - l'élaboration d'un tableau de bord
concurrentiel; - l'alimentation du système de veille qui doit
être à la fois offensif, défensif, permanent, exhaustif et
discret. I.1.5. La définition
des facteurs clés de succès (FCS) Les
FCS désignent des compétences ou ressources de toute nature que
doit impérativement posséder l'entreprise pour pouvoir atteindre
ses objectifs et établir une position concurrentielle durablement
défendable (MOSCHETTO B.L, 2002, p.44). I.2.
L'évaluation interne L'analyse
intrinsèque permet d'apprécier les forces et les faiblesses de
l'entreprise. Elle est basée sur trois axes : le métier, les
Domaines d'Activité Stratégiques et l'évaluation des
forces et faiblesses de l'entreprise. I.2.1.
Le métier La définition du
métier ne doit être ni trop large ni trop restrictive. Le
métier désigne ainsi un savoir-faire global d'une entreprise
permettant de satisfaire une demande avec une offre adaptée (Lexique de
Gestion, 2003, p.339). La technologie est une des principales composantes du
métier mais d'autres paramètres sont à considérer.
Il s'agit entre autres du niveau de qualification du personnel, du style de
gestion, du type de production, du mode de distribution. Le métier donne
à l'entreprise sa spécificité, son identité et sa
vocation. Ainsi, l'entreprise qui veut définir son métier doit
cerner sa raison d'être en répondant aux questions suivantes (HIAM
A. et al., 1994, p.193): -quelle est notre activité ?
-quelle devrait être notre activité ? L'entreprise
s'appuiera ensuite sur son métier pour choisir les objectifs qui la
guideront dans les trois à cinq années à venir.
I.2.2. Les Domaines d'Activités
Stratégiques( DAS) Un DAS ou segment
stratégique est constitué d'un ensemble homogène de biens
et/ou services de l'entreprise, destinés à un marché
spécifique ayant des concurrents déterminés et pour lequel
il est possible de formuler une stratégie (Lexique de Gestion, 2003,
p.192). Il s'appuie sur trois critères : La technologie, les
besoins à satisfaire, la clientèle. Il est nécessaire que
la segmentation soit convenablement faite afin que les DAS de l'entreprise
soient clairement définis. Une bonne segmentation stratégique se
base sur les critères suivants (BENAVANT C., 2002): -la
nécessaire indépendance des secteurs ;
-l'indépendance des processus de conception, de production et de
distribution ; -la cohérence entre le présent et le
futur ; -le degré de définition ni trop
général, ni trop étroit ; -la prise en compte
dans la définition de toutes les sources possibles de concurrence. Il
existe plusieurs outils pour déterminer les différents
DAS que l'on regroupe comme suit : les démarches descriptives,
les démarches formalisées, les démarches ouvertes, la
démarche formalisée mais large.
I.2.2.1. Les démarches descriptives Il
s'agit ici des méthodes de check-lists qui se servent
d'un grand nombre de variables pour balayer l'ensemble des activités de
l'entreprise. Ces variables sont de nature très diverse et il faut les
regrouper. Elles conduisent souvent à des séries de questions
dont les réponses sont qualitatives. Certaines peuvent faire l'objet
d'une notation relative sur une échelle de type 1 à 5 ou de type
sémantique (faible, moyen,...). Ces méthodes, bien
qu'exhaustives ne sont pas formalisées.
I.2.2.2.Les démarches formalisées
Elles sont fondées sur une théorie de
l'entreprise. Il s'agit ici de : - la matrice du Boston
Consulting Group (BCG) qui se présente comme suit :
Figure 1.1. La matrice de BCG
Taux de croissance
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Fort
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Vedettes
- Contribuent à la croissance ;
- S'autofinancent.
|
Dilemmes
- Contribuent à la croissance ;
- Réclament des liquidités.
|
Utilisation des liquidités
|
Faible
|
Vaches à lait
- Contribuent peu à la croissance ;
- Fournissent des liquidités.
|
Poids morts
- Ne contribuent pas à la croissance;
- Ne contribuent pas aux profits.
|
Forte Faible
Part de marché
Source : MARTINET A.C., 1988, p.29
De cette matrice, il ressort des priorités (TUGRUL
ATAMER et al., p.189): · maintien de la position des vaches
à lait ; · soutien des activités vedettes ou
dilemmes prometteuses par les liquidités dégagées des
vaches à lait ; · élimination des poids
morts en vertu de la règle de non-dilution des ressources qui
préconise l'abandon immédiat ou progressif des poids morts. -
la démarche de McKINSEY : modèle qualitatif par
excellence basé sur 2 principes : l'attractivité du secteur
et la position concurrentielle; - la méthode d'Arthur D. LITTLE
(ADL) : elle préconise un traitement en 3 dimensions :
position compétitive, risque concurrentiel et
rentabilité.
I.2.2.3. Les démarches ouvertes
Ces méthodes peuvent être ajustées en fonction des
objectifs que l'on veut atteindre. L'on distingue ainsi : -
l'analyse de la situation concurrentielle et des avantages compétitifs
de Michaël PORTER qui permet de déterminer la position de
l'entreprise face à ses concurrents et cherche à dresser une
carte d'ensemble des forces concurrentielles auxquelles est confrontée
la firme ; - la méthode de
« genèse » dont l'ambition est d'expliciter les
aspects humains et organisationnels au même titre que l'analyse
concurrentielle. Chaque composant est analysé puis noté
relativement aux concurrents. Un pré-diagnostic doit
généralement être fait sur la base d'entretiens avec
l'encadrement. Cette phase est suivie d'une analyse approfondie de la situation
concurrentielle et des croisements opportunités/ menaces de
l'environnement, forces/carences de l'entreprise par segments puis globalement.
La méthode de « genèse » emprunte des
techniques aux autres : au BCG elle emprunte le positionnement
concurrentiel en calculant la part de marché relative, la méthode
ADL lui permet d'expliquer ce positionnement et la méthode de
PORTER lui permet de mettre en évidence les stratégies des
concurrents. I.2.2.4. La
démarche formalisée mais large
Cette démarche développée par le
Crédit Commercial de France (CCF) se veut stratégique et
financière Elle se base sur plusieurs critères regroupés
en six familles : - la technologie : capacité de la firme
à exploiter la technologie sur les produits ; - le
marché : expérience et connaissance du marché ;
- la maîtrise des incertitudes : capacité à
évaluer et prévenir les menaces ; - le verrouillage :
capacité à protéger, améliorer et développer
la position concurrentielle ; - l'attrait du secteur :
potentiel du domaine d'activités et capacité de l'entreprise
à en bénéficier ; - la position
concurrentielle : importance des avantages compétitifs. Chaque
critère, puis chaque famille a une note de 0 à 5. Cela permet de
construire le diagramme hexagone-diagnostic qui permet de repérer
très vite la surface globale qu'occupe la firme en pourcentage de la
surface totale donnant ainsi une idée de sa puissance ou de sa faiblesse
stratégique. La régularité ou l'irrégularité
du périmètre met en lumière l'équilibre ou le
déséquilibre de l'entreprise dans l'une ou l'autre dimension.
L'on a ci-après la représentation d'un diagramme
hexagone-diagnostic :
- Figure1. 2. L'hexagone-diagnostic
- Technologie Marché
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5
|
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5
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Attrait du secteur
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1
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Maîtrise des
|
5
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3
|
|
4
|
5
|
incertitudes
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2
|
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4
|
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5
|
|
5
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Position concurrentielle
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Verrouillage concurrentiel
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- Source : MARTINET A.C., 1988, p.39 En pointillé,
on a la forme idéale que devrait avoir le diagramme pour une entreprise
puissante. En pratique, l'on doit avoir en gras un périmètre
représentant la situation de l'entreprise. Dans ce schéma la
surface stratégique est de 37 % ce qui montre une faiblesse
stratégique. L'équilibre stratégique pour sa part est de
76 % traduisant une stabilité relative.
-
- I.2.3. L'évaluation des
forces et faiblesses de la fonction marketing et commerciale
Elle est faite en vue d'établir une liste de critères qui
permettent d'apprécier les forces et faiblesses de chacune des fonctions
majeures de l'entreprise. En ce qui concerne la fonction marketing et
commerciale, son diagnostic passe par l'étude d'un certain nombre de
critères retracés dans le tableau ci-dessous:
- Tableau 1 .2. Les forces et les faiblesses de la
fonction marketing et commerciale
Critères
|
Forces
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Faiblesses
|
Evolution des ventes sur les trois derniers exercices
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Parts de marché
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Evolution des parts de marché sur les trois derniers
exercices
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Image de marque
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Politique de prix
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Diversité des produits
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Qualité des produits
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Qualité du service
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Efficacité de la force de vente
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Efficacité de la publicité
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