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L'initiatve Pays pauvres très endettés (PPTE) et les perspectives de croissance en Afrique subsaharienne cas de la République Démocratique du Congo

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par Benjamin EBUELA BALONGELWA
Université protestante au Congo - Licence en sciences économiques 2004
  

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Chapitre III.

L'INITIATIVE PPTE ET LES PERSPECTIVES
DE CROISSANCE EN RDC

Les problèmes du financement de la croissance en Afrique constituent un thème qui s'inscrit tout naturellement dans le droit fil des préoccupations majeures du moment. La relance économique de l'Afrique Subsaharienne qui est aujourd'hui un sujet qui mobilise aussi bien les gouvernements du continent que les membres de la Communauté Internationale, constituera l'objet de la première section de ce chapitre. On se souviendra à ce sujet que les chefs d'Etat de l'Ex Organisation de l'Unité Africaine ont adopté en 1985 le « Programme Prioritaire de Redressement Economique et de Développement de l'Afrique 1986 - 1990 », programme qui a été soumis et adopté par la Communauté Internationale au cours d'une session spéciale des Nations - Unies consacrée à cette crise économique que traverse le continent Africain. Par ailleurs, le régime PPTE a été conçu par les Institutions de Brettons Woods (IBW) en 1996 pour rencontrer les problèmes liés à l'allègement de la dette des pays à faible revenu, dette considérée comme un obstacle pour leur développement. L'admission de la République Démocratique du Congo à cette Initiative constituera notre deuxième section. Alors que l'allégement de la dette sera progressif au niveau de son service d'ici 2006, quelles seront les perspectives d'une croissance pour une économie aussi délabrée que celle de la RDC ? C'est autour de cette dernière question que sera organisée la troisième section de ce chapitre.

Section I. Problèmes du financement de la croissance en RDC

I . 1 . Le poids de l'histoire

Dans les lignes qui suivent, nous allons partir d'abord d'une restrospective historique des mécanismes fortuits du financement de la croissance en Afrique en remontant à la période coloniale, nous présenterons ensuite pour terminer les difficultés de financement en R.D.C.

Le financement de la croissance provient, en premier lieu, de l'épargne nationale, c'est - à- dire la somme de l'épargne publique et l'épargne privée. Lorsque celle - ci est insuffisante, pour financer la croissance possible, on peut alors recourir à l'épargne d'autres pays, c'est-à-dire du reste du monde. Cependant, comme le bon sens l'exige, à terme les prêts extérieurs doivent être remboursés grâce aux excédents de production réalisés à l'aide d'apports financiers extérieurs et de l'épargne nationale. Comme l'indique Chandra HARDY67, au cours des années 60, les taux de croissance du PNB par habitant de l'Afrique Subsaharienne étaient faibles mais positifs et des acquis considérables ont été enregistrés en matière d'augmentation du niveau de l'épargne et de l'investissement. Les entrées des capitaux étrangers correspondaient en moyenne à 3% du PIB et le niveau de l'investissement est passé de 16 à 21% entre 1960 et 1970.

67.Hardy cité par Kabuya Kalala,(1987) «Problèmes et gestion de financement du développement en Afrique », in Zaïre -Afrique, n°163 , Kinshasa, p.620

Au cours des années 70, la décennie des chocs pétroliers, la détérioration des termes de l'échange s'est traduite par une baisse de 50% du pouvoir d'achat des exportations et par une baisse régulière des revenus. Les entrées de capitaux étrangers ont considérablement augmenté après la première et la seconde hausse du prix du pétrole. Ce qui permis initialement d'amortir la baisse du niveau de vie et à maintenir le niveau des investissements, mais n'a pas suffi pour à compenser les effets défavorables de la sécheresse et de la crise en général de la balance des paiements. Les ressources en devises de nombreux pays Africains ne permettent pas d'honorer le service de la dette et de financer les importations de première nécessité. Le taux d'épargne intérieure qui était passé de 13% du PIB en 1960 à 20% en 1979 a été que de 12% en 1983. L'Afrique se trouvait manifestement dans une situation où les contraintes de l'épargne et des devises constituent des entraves.

GORDON 68 retrace l'origine de la débâcle des politiques africaines de financement de croissance partiellement dans la fragilité et le manque d'adaptation des structures institutionnelles en matières de politique économique et financière. Les pays Africains, pour la plupart et la République Démocratique du Congo en particulier, ont accédé à l'indépendance sans y être bien préparés: système monétaire représentait un accessoire marginal de la Banque Centrale Métropolitaine; les banques commerciales étaient, elles aussi, des avant- postes secondaires des centres monétaires européens avec très peu d'autonomie de financement; la croissance économique était financée par des dons venant de la métropole. 40 à 50% de l'investissement global étaient consacrés à l'industrie contre 5% seulement à l'agriculture au cours des années 60 et 70.Or comme l'affirme FRIMPONG - ANSAH 69, dans la plupart des pays Africains, il a été constate une détérioration du potentiel d'épargne au cours des années 1980.

Cette crise africaine est caractérisée essentiellement par une baisse continue de la production face à une augmentation rapide de la pression démographique. Selon Kabuya Kalala, pour mesurer l'ampleur de la crise il faut revoir le niveau des investissements qui avait été relativement élevé en Afrique Subsaharienne pendant les années 1970 ( 22% du PIB) a amorcé, depuis 1980, une baisse continue pour se situer à seulement 14,5% environ en 1984. Ce phénomène, résulte de l'effet combiné de la faiblesse de l'épargne intérieure et surtout de la diminution de l'apport des capitaux extérieurs. Il est évident que la relance des économies exige de renverser ces tendances défavorables au développement, et pour y parvenir il faut une mobilisation d'importantes ressources financières aussi bien intérieures qu'extérieures. L'investissement destiné à répondre aux besoins vitaux n'est pas seulement souhaitable pour mettre un terme à la souffrance humaine; c'est également un élément clé dans une stratégie intégrée de croissance.

68.D.L.GORDON, cite par KABUYA KALALA,Op. Cit.,p.621

69.J.H. FRIMPONG - ANSAH, cite par KABUYA KALALA,Op. Cit.,p.622

Or, les perspectives de mise en oeuvre de ces ressources financières doivent non seulement se fonder sur les leçon tirées de plusieurs dizaines d'années de gestion économique des pays africains depuis les indépendances politiques, mais surtout sur l'adoption et la mise en oeuvre des mesures visant à tirer le meilleur profit des ressources ainsi mobilisées. Il a été cependant constaté que peu de résultats positifs ont été enregistrés malgré l'injection massive des capitaux dans le circuit économique de la République Démocratique du Congo. Certains en concluent que beaucoup de ressources ont été ainsi gaspillées70.

Lorsqu'une économie fait toujours recours à l'emprunt extérieur, ne dégage pas une épargne suffisante, est connaît des sérieux déséquilibres au niveau de sa Balance de paiements. C'est ce que nous avons fait remarquer au premier chapitre de cette étude; telle est la situation de l'économie Congolaise depuis bien des années et jusqu'aujourd'hui. L'économie Congolaise plus que jamais a besoin d'une importante bouffée d'oxygène pour se relever mais comment parvenir a une relance durable est soutenue alors que le pays doit faire face annuellement au paiement du service de la dette et aux arriérés dus aux dettes contractées. Est- ce en prélevant une partie sur des recettes intérieures ou avec les fonds reçus des nouveaux emprunts que le pays effectuera son service de la dette? Pourra-t-il financer son développement avec la réduction de sa dette dans le cadre de l'Initiative PPTE ?

Voilà autant d'interrogations posées par les problèmes du financement de la croissance en République Démocratique du Congo. Mais le débat sur le financement de la croissance remonte à l'époque des indépendances et jusque là, on semble pas trouver une réponse adéquate à cette question. Les engagements financiers se sont multipliés au cours des décennies dans le chef des pays riches mais la plupart de ces promesses sont restées lettre morte.

Le débat de ce troisième millénaire a été marqué par une prise de conscience de cette question épineuse dictée par l'ampleur de la pauvreté et des inégalités dans le monde. Nous pouvons nous demander si la communauté internationale peut faire mieux aujourd'hui que dans le passé? Il ne semble pas exister une réponse unique à cette question cependant sans négliger le sentiment des institutions de Bretton Wood en la matière, les prêteurs ont leur conception globale sur la question et les emprunteurs la leur.

Concernant la RDC, le non paiement de sa dette envers les institutions de Bretton Woods pouvait constituer un handicap à l'éligibilité aux mécanismes existant de réduction de sa dette extérieure. Elle doit chercher à se mettre en phase avec ses partenaires tant bilatéraux que multilatéraux afin de pouvoir bénéficier des différentes mesures de réduction et d'annulation des dettes. Les mesures d'annulation ne concernent que les pays les plus pauvres dont la dette comprend une forte proportion de crédits d'Etat à Etat.

70.MUELA BAKUETU.B, Op.Cit.,p.49

Avec un revenu annuel de 68,3 USD, soit à peu près 6 USD par mois et par habitant, la République Démocratique du Congo est loin en deçà du seuil de la pauvreté (à 0,21 dollar par jour et par personne soit environ 97,05 Franc Congolais), donc la tranche de l'extrême pauvreté. Par ailleurs la grande partie de sa dette est d'origine publique (à peu près 70% envers le Club de Paris). Voilà autant des problèmes qui empêchent le financement de la croissance économique de la RDC depuis des décennies alors que la RDC, était en droit de brandir son état, pour bénéficier des mesures d'allégement de sa dette extérieure. Dans le même ordre d'idées la RDC pouvait se référer au plan BAKER pour solliciter un rééchelonnement pluriannuel de sa dette, et obtenir par conséquent des flux substantiels de nouveaux prêts tels que prônés par ce plan et ainsi relancer son économie.

Quel devrait être l'argument de la RDC face à son incapacité à dégager des ressources nécessaires au remboursement de sa dette Jean Claude Williame71, s'inspirant de l'une des résolutions des Nations - Unies avait abordé cette dimension du problème. Il envisageait pour la RDC l'éventualité de refuser le remboursement d'une partie de la dette étant donné l'incidence négative de cette dernière à la relance de l'économie nationale et le bien - être de la population. Pour ce dernier, la responsabilité de la dette congolaise devrait être partagée entre l'élite dirigeante congolaise et certaines puissances étrangères. Pour ce faire, il rappelle un principe du droit public international

relatif aux dettes qualifiées « d'odieuses », qui dispose que:« si un pouvoir despotique contracte une

dette non pas pour le besoin et dans les intérêts de l'Etat mais pour fortifier son régime despotique, pour réprimer la population qui le combat etc. cette dette est odieuse pour la population de l'Etat entier. Cette dette n'est pas obligatoire pour la nation ; c'est une dette de régime, dette personnelle du

pouvoir qui l'a contracté, et par conséquent elle tombe avec la chute de ce pouvoir >>. L'ancien

Président Tanzanien Mwalimu Julius Nyerere lors de son passage à Kinshasa à l'invitation de feu Président Laurent Kabila, avait aussi qualifié la dette Congolaise d'odieuse.

Dans le même ordre d'idées, Rolf KNIEPER72 renchérit en citant un passage de la Charte des Nations Unies pour appuyer le principe stipulé ci-dessus: « S'il existe une obligation de tous les

Etats de contribuer à la justice sociale et à la solidarité internationale, la destination des crédits à des

fins clairement imp roductives devrait être qualifiée d'odieuse... En conséquence, ils ne seraient pas à

rembourser. Les bailleurs de fonds privés qui contribuent au financement de tels projets effectuent dans ce cas un investissement à haut risque>>.

On s'apercevra à cette occasion que la rhétorique politique de la décolonisation a certes contribuée à la prise de conscience pour un processus rapide de croissance, mais cela s'est appuyé sur une recherche excessive de l'industrialisation. Plusieurs crédits ont servi à financer des projets dont le matériel livré n'était pas conforme aux conditions climatiques locales, ni aux besoins immédiats de l'économie nationale il s'agit entre autres de la sidérurgie de Maluku, de la zone franche d'Inga, de la Cinat : Cimenterie Nationale au détriment de l'accroissement de la productivité agricole.

71 .Williame,J.C.cité par Mokonda Bonza,Op cit.p.86 72.KNIEPER,R.cité par Mokonda Bonza,Op. cit.,p.87

Conformément au principe ci haut cité, une grande partie de la dette extérieure du pays devrait être déclarée odieuse.

Le problème d'ordre économique se rapportent aux aspects structurels de l'économie congolaise et notamment à la Balance de paiements: effritement des recettes d'exportation et diminution des importations face aux besoins croissants de l'économie, diminution des montants obtenus au titre de l'aide et de l'emprunt à cause de la dette extérieure et de l'accumulation des arriérés. La détérioration de la qualité de la vie des populations congolaises n'est qu'une véritable conséquence des problèmes d'ordre économique.

La réduction du revenu par habitant et l'augmentation du déficit du secteur public expliquent la tendance à la baisse de l'épargne intérieure. Les perspectives de mobilisation des ressources financières internes doivent naturellement se fonder sur les possibilités d'action sur tous les paramètres de formation de l'épargne, notamment le niveau général du revenu, le taux d'intérêt des dépôts d'épargne, l'accroissement et la diversification des exportations, l'accroissement des recettes fiscales.

Le mécanisme PPTE, comme proposition de résolution de la crise présente des limites et ne garantit pas la tolérabilité du niveau de l'endettement des pays pauvres. Nous pensons qu'une réduction de la dette ou son annulation totale dans le cadre de cette Initiative peut entraîner des gains en termes de croissance économique et être aussi bénéfique pour les pauvres. Ce gain de la croissance pourraient amorcer un cercle vertueux qui à l'absence d'un nouvel accroissement ou d'un nouveau paiement de la dette, abaisserait le ratio d'endettement en finançant la croissance économique. Mais ce dividende de la croissance risquerait de ne pas se matérialiser si le pays enregistre fréquemment des déséquilibres macroéconomiques.

Il convient cependant de noter que, quelles que soient les stratégies adoptées et les mesures institutionnelles mises en place à l'intérieur de la RDC, la croissance de l'épargne nationale ne pourra suffire à assurer la relance économique: les res sources extérieures constitueront encore longtemps un complément indispensable.

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote