INTRODUCTION
Dans la première partie, nous sommes arrivés
à la conclusion selon laquelle, le système de gestion des
déchets ménagers à Yaoundé était inefficace
et donc incompatible avec le développement de l'activité agricole
urbaine et périurbaine.
Selon Kouemo (2002), face à l'accroissement continu de
la population, pour maintenir ou accroître les rendements agricoles
appropriés, le système de gestion de la fertilité dans les
différents agroécosystèmes urbains et périurbains
devrait favoriser un fort taux d'utilisation d'engrais chimiques et de la
matière organique (les déchets ménagers notamment). La
gestion durable et efficace des déchets ménagers à travers
les opérations de récupération et de recyclage participe
donc à l'amélioration des rendements agricoles en zone
urbaine.
L'AUP est devenu aujourd'hui la principale source de
ravitaillement en légumes et fruits des populations des grandes villes
africaines en général et de la ville de Yaoundé en
particulier. De part son importance, cette activité montante et
controversée qui s'inscrit plutôt dans un paysage urbain,
constitue une source importante de récupération des
déchets ménagers ; d'ailleurs des tonnes de déchets
ménagers aussi bien à l'état frais que
décomposés sont utilisées dans les exploitations agricoles
urbaines et périurbaines.
Afin de proposer une stratégie de collecte des
déchets qui soit compatible avec les préoccupations de
développement de l'AUP, il nous a semblé nécessaire
d'identifier les variables susceptibles d'influencer la demande des
déchets ménagers récupérés et
recyclés dans les bas-fonds de Yaoundé.
Deux chapitres nous guiderons à cet effet.
Le premier chapitre consistera à situer l'AUP dans son
contexte théorique et le deuxième permettra d'identifier les
variables qui déterminent leur utilisation dans les exploitations
agricoles urbaines et périurbaines de Yaoundé.
56
Joë& Sotamenou Mémoire de DEA- PTCI /UY II/
Octo6re 2005
INTRODUCTION :
L'activité agricole urbaine et périurbaine
s'inscrit dans un contexte historique et regroupe entre autres l'exploitation
des cultures maraîchères, vivrières et du petit
élevage. Plusieurs raisons ou motifs militent en faveur de cette
activité. En dépit des contraintes foncières et
environnementales liées à cette activité, l'impact
socioéconomique au niveau familiale et macroéconomique est
connu.
La récupération et la valorisation des
déchets ménagers constituent l'une des missions fondamentales de
l'AUP. En effet, la gestion de la récupération et du recyclage
doit permettre de renforcer le système de production alimentaire future
au sein des exploitations. Celle-ci préserve non seulement les
ressources naturelles de l'exploitation, mais protège le sol (facteur de
production essentiel) et l'environnement contre toute dégradation pour
les générations futures et présentes.
Depuis très longtemps, on utilise les déchets
d'animaux et de végétaux pour améliorer la qualité
des sols. L'utilisation des déchets ménagers recyclés dans
les exploitations agricoles datent de la fin des années 20 aux Pays-Bas
et prend de l'ampleur au fil des années, surtout en Afrique au sud du
Sahara.
Ces dernières années, les chercheurs
perçoivent l'utilisation des déchets ménagers
recyclés dans les exploitations agricoles comme une innovation, dans ce
chapitre il sera question pour nous tout d'abord d'analyser la demande
d'innovation et ensuite de donner les caractéristiques de
l'activité agricole urbaine et périurbaine.
Dans cette section, nous allons présenter le cadre
théorique et les modèles empiriques relatifs à la relation
déchets ménagers - AUP et établir le lien qui existe entre
les déchets ménagers et l'AUP.
III-1-1. Cadre théorique et adoption des
innovations agricoles
a- Les innovations agricoles
En économie de la production, l'innovation est la mise
en oeuvre des changements dans la fonction de production. L'agriculteur urbain
qui décide d'intégrer dans ses activités un intrant qu'il
n'utilisait pas dans le passé, et l'intègre dans son
système de production, affecte ainsi sa fonction de production. En ce
sens, l'utilisation des déchets ménagers recyclés (frais
et décomposés) est considérée comme étant
une innovation.
Selon Varian (2003), l'objectif du consommateur rationnel est
la maximisation de son utilité, sous sa contrainte budgétaire
(R). Supposons qu'il consomme une quantité x1 de
déchets recyclés et une quantité x2 d'engrais
chimiques, son problème peut donc s'écrire sous la forme :
57
Joë& Sotamenou Mémoire de DEA- PTCI /UY II/
Octo6re 2005
SC
?
MaxUxx
(, )
12
??Px+ Px= R
1122
() ()
La contrainte budgétaire ou droite de budget
définit une droite dans le plan (x1, x2). La
résolution de ce programme permet d'obtenir les quantités
optimales x1* de déchets recyclés et x2*
d'engrais chimiques qui maximisent son utilité.
Graphiquement, cet optimum peut être
caractérisé de la manière suivante :
X2*
Figure 3. 1 : Choix optimal du consommateur et courbe de
demande du bien X1
X1* X1 X1
Choix optimal du consommateur Courbe de demande du bien X1
Source: Varian, 2003
X2 P
L'utilité est maximale au point de tangence de la
courbe et de la droite de budget, le couple (x*1 ; x*2)
représente cet optimum. Elle montre aussi que la réduction de la
consommation des engrais chimiques se traduit automatiquement par
l'augmentation de la consommation de déchets recyclés, de sorte
que la contrainte budgétaire soit saturée. Cette situation nous
permet de définir la fonction de demande de l'un des biens.
La fonction de demande de l'engrais chimique par exemple
exprime le choix optimal du consommateur en fonction du prix unitaire et du
revenu dont celui-ci dispose. La courbe de demande est donc une relation
inverse entre la quantité consommée d'engrais chimique et son
prix.
La théorie des préférences
aléatoires qui soutend cette approche permet d'expliquer et de
prévoir la réaction des individus face à plusieurs choix.
Gourieroux (1989) souligne que la meilleure façon de décrire le
comportement de l'individu face à plusieurs alternatives est de supposer
que l'individu fait des choix rationnels, représentables par une
fonction d'utilité aléatoire. L'utilité aléatoire
qui ordonne les préférences de l'individu dans un ensemble de
technologies dépend des caractéristiques spécifiques
à l'individu, des attributs associés aux différentes
options technologiques, et d'un terme aléatoire.
58
Joë& Sotamenou Mémoire de DEA- PTCI /UY II/
Octo6re 2005
b- Adoption des innovations agricoles
L'innovation est un concept pragmatique qui a trait à
l'insertion de quelque chose de nouveau dans les activités du monde
réel.
Selon Greenwald (1984), si l'on tient compte du principe de
rationalité, les innovations sont généralement
censées conduire à une progression et par conséquent,
à une amélioration, du moins, dans l'esprit de l'innovateur.
L'économiste Américain Schumpeter J. A. est aujourd'hui
considéré comme étant le père de l'analyse de
l'innovation dans l'histoire de la pensée économique. Dans sa
théorie du développement économique et du cycle des
affaires, les innovations sont traitées comme des chocs erratiques ou
variables exogènes qui assurent l'expansion économique (Selim et
al, 1989).
Les études sur les innovations agricoles sont devenues
populaires dans de nombreux pays en développement lors de la
période dite de la << révolution verte » des
années 60 (Eicher et Baker, 1984). En Afrique au sud du Sahara, les
<< solutions nouvelles » se sont souvent heurtées à la
réticence des communautés paysannes à adopter les
nouvelles techniques (Jonhston, 1985 ; Eicher et Baker, 1984). Selon Rogers
(1983), l'adoption des innovations est centrée sur le cheminement mental
de l'individu. Depuis la première information jusqu'à
l'adoption.
L'individu passe de façon séquentielle par cinq
étapes psychologiques : Il prend conscience de l'existence de
l'innovation, manifeste de l'intérêt à son égard,
évalue les avantages et les inconvénients qu'elle
présente, ménage une période d'essai et adopte.
Selon leur rapidité d'adoption, on distingue dans une
même communauté cinq catégories d'adoptants (Rogers, 1983 ;
Bodiguel, 1975) : les innovateurs qui sont généralement les plus
jeunes et les plus informés ; les premiers adoptants plus proches des
innovateurs ; les individus de la majorité précoce qui sont
généralement prudents, réfléchis, bien
informés ; la majorité tardive qui constituée
essentiellement de sceptiques, leur adhésion est difficile à
obtenir et enfin les retardataires qui traditionnellement sont plus
âgés et se méfient des vulgarisateurs.
Il en ressort de cette classification que la
réceptivité et l'accès à l'information sont
quelques-uns des principaux déterminants de l'adoption ou de la mon
adoption d'une innovation (Adesina, 1993). Ce facteur est influencé par
les variables socio-économiques telles que l'age, le revenu, le niveau
d'instruction, ... (Cimmyt, 1993).
Selon Rogers (1983) et Bodiguel (1975) cinq critères
caractérisent l'innovation : Elle doit être plus souhaitable que
ce qu'elle doit remplacer ; Elle doit être compatible avec le
système de valeur de la collectivité dans laquelle elle est
introduite ; Elle ne doit pas être complexe et trop difficile à
comprendre ; Elle doit pouvoir être essayée ; Les résultats
doivent être observables.
La principale limite des modèles de comportement
ci-dessus examinés ne mettent en exergue que deux catégories de
facteurs d'adoption d'une innovation : ceux liés aux
caractéristiques de l'innovation et ceux liés aux
caractéristiques socio-économiques de l'exploitant. Adesina et al
(1992) montrent que les
59
Joë& Sotamenou Mémoire de DEA- PTCI /UY II/
Octo6re 2005
caractéristiques de la technologique telles que
perçues par les agriculteurs conditionnent
significativement la
décision d'adoption d'une innovation.