PREMIERE PARTIE :
ORIGINES ET FACTEURS DECISIFS DU COMMERCE COLONIAL
CHAPITRE I :
LA TRAITE NEGRIERE, ORIGINE DU COMMERCE
COLONIAL
L'esclavage est l'une des plus vieilles pratiques de
l'humanité. Il a des origines dans l'Antiquité. Il est
pratiqué dans toutes les parties de la terre peuplées par
l'espèce humaine. Il s'effectue sur plusieurs échelles : au
sein d'un royaume, au sein d'un empire, au sein d'une sous-région, au
sein d'un continent et au sein d'un espace intercontinental. L'Afrique ne fait
pas exception. Elle connut une forme très importante avec une
particularité tant historique, économique, sociale que politique
sinon géopolitique.
Il est convenu d'appeler cette forme Traite
Négrière. La traite négrière
était pratiquée en direction de plusieurs grands axes,
créant ainsi deux cas : la traite orientale
et la traite atlantique.
La traite orientale était pratiquée en grande
partie dans l'Océan Indien, la Mer Rouge et la
Méditerranée. Elle consistait à amener d'Afrique les
esclaves noirs pour le Proche-Orient et les pays occidentaux bordant la
Méditerranée.
Quant à la traite atlantique, qui retient surtout notre
attention, elle était pratiquée dans l'Océan Atlantique.
Elle débuta à partir du XVème siècle et prit fin
dans la seconde moitié du XIXème siècle. La traite
atlantique consistait à acheter des esclaves noirs africains en
Afrique, pour les vendre sur le continent américain principalement et
l'Europe d'une manière relativement faible. L'itinéraire de ces
négriers (marchands d'esclaves noirs) avait trois grands
pôles : l'Europe, l'Afrique et l'Amérique. D'Europe, ils
s'approvisionnaient essentiellement en produits manufacturés
européens (verreries, textiles, alcools, friandises, etc.) qui
étaient vendus et échangés contre captifs. Ces derniers
(les esclaves) étaient vendus en Amérique et aux Antilles pour
répondre à la demande en main-d'oeuvre principalement dans les
plantations de canne à sucre, de coton et de café.
D'Amérique, les marchands s'approvisionnaient en grande partie en
épices et des matières premières pour l'industrie textile.
Ces produits étaient vendus en Europe.
La traite négrière plongea l'Afrique dans une
situation sans précédent, créant ainsi la méfiance
entre les différentes entités politico-ethniques, favorisant un
désordre conjugué à une instabilité et une
insécurité qui s'intensifia progressivement de manière
croissante. Elle fut causée principalement par l'esprit d'aventure des
Européens, la recherche par ceux-ci des bras valides pouvant satisfaire
les besoins en main d'oeuvre du nouveau monde dont la puissance réside
dans l'agriculture et la recherche pour l'Europe d'une population active
servile assumant les tâches domestiques.
La traite permit au monde occidental de se développer
tout en amorçant une croissance économique qui suit le processus
irréversible de la mondialisation. L'Europe acquit par la suite une
hégémonie économique, politique et culturelle.
L'Amérique bénéficia d'une population très active
bâtissant de véritables infrastructures économiques
permettant de préparer une longue et solide puissance
économique.
Quant à l'Afrique, qui fournit les esclaves, elle fut
dépouillée d'une de ses principales richesses que constituent
les bras valides et les femmes en âge de procréer. Comme
conséquences psychologiques, la traite amorce chez l'Africain un
sentiment de surestimation de l'homme blanc. Les différentes
entités politico-ethniques ou étatiques se lancent dans une
situation de cahot très accentuée. Ces différents facteurs
appauvrissent considérablement l'Afrique.
Cette traite balise le terrain pour les relations
économiques entre l'Afrique et l'Occident. A partir des voyages de
reconnaissance est apparue la traite négrière, à partir
de cette traite est apparu le commerce colonial, et ce commerce colonial
enclenche les relations économiques modernes entre l'Afrique et le
reste du monde que nous vivons aujourd'hui. Tous ces phénomènes
et ces relations sont classés de manière inévitable dans
le processus de mondialisation enclenché depuis l'Antiquité.
Ainsi, la traite négrière apparaît comme
un facteur prépondérant dans l'avènement du commerce
colonial. Le commerce colonial est la suite historique du processus
enclenché par la traite négrière. Plusieurs jalons
posés rendent aisés la compréhension de ce point de vue.
La pratique régulière de la voie maritime Europe-Afrique favorisa
une bonne connaissance de l'Afrique. Les infrastructures commerciales
(comptoirs commerciaux), la commercialisation à petite échelle de
certains produits africains (peaux et produits végétaux)
parallèlement au commerce d'esclaves, le contact permanent avec les
peuples africains ne pouvaient que préparer un terrain favorable
à la pratique du commerce colonial qui était déjà
latent. La cessation de la traite négrière est en soi un
début logique pour le commerce colonial car l'Europe en quête
d'une dynamique de croissance économique concevait l'Afrique comme un
déboucher et aussi il fallait trouver un substitut à l'esclave
comme marchandise. Notons qu'à cette période les progrès
technique et scientifique avaient propulsé en avant l'industrie
européenne qui était jadis « artisanale » en
créant une surproduction. Puisque ce surplus devrait être
écoulé, l'Afrique répondait à ce besoin, d'autant
plus qu'une relation de sujétion était établie.
L'événement qui consolida cette relation de sujétion est
la conquête coloniale et la colonisation.
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