L'union africaine face aux graves violations des droits de l'homme.par Paul Sékou Yaradouno Université Général Lansana Conté Sonfonia Conakry - Master 2 Droits de l'Homme et droit humanitaire 2019 |
B. Face à l'impunité devant les violations des droits de l'hommeParce qu'elle est l'organisation panafricaine chargée de garantir le respect et la protection des droits de l'homme, l'UA présente cependant un niveau insuffisant de protection des droits de l'homme et ne se montre pas aussi disposée à coopérer avec la Cour pénale internationale pour rendre effectif, le renforcement des garanties juridiques qu'elle a dans son mécanisme de protection. Elle a entrainé une innovation institutionnelle très sérieuse, mais l'analyse de cette dernière se révèle être décevante, cela ne peut que l'être pour le renforcement de son système. En effet, à la lecture de l'Acte constitutif de l'UA299(*) du 11 juillet 2000, l'organisation panafricaine affirme son attachement à la DUDH du 10 décembre 1948, un instrument de portée générale mais à vocation universelle. A travers le même acte fondateur exprime l'adhésion de l'UA à d'autres instruments pertinents relatifs aux droits de l'homme300(*), ce qui peut nous amener à parler des deux (2) Pactes internationaux du 16 décembre 1966, des textes onusiens aussi de portée générale qui viennent préciser les principes de droits, civils, politiques, économiques, sociaux et culturels exprimés clairement dans la DUDH et forment avec elle ; la Charte internationale des droits de l'homme. Mais dans la pratique, aucune référence n'est faite à ces conventions adoptées sous l'égide de l'ONU pour protéger les droits de l'homme et lutter contre l'impunité en mettant hors d'état de nuire leurs auteurs afin de faire de l'UA une entité de dissuasion. Parmi ces Conventions figurent en bonne place la Convention sur la prévention et la répression du crime de génocide 1948, la Convention contre la torture et autres traitements cruels inhumains et dégradants de 1984. Certes il existe une Charte africaine depuis son adoption en juin 1981 et son entrée en vigueur en octobre 1986 mais là encore, il ne s'agit que d'un texte de portée générale des droits de l'homme au niveau régional étendu aux droits des peuples301(*), une particularité africaine omis par la DUDH et une manière d'intégrer le facteur communautaire et historique africain dans les droits de l'homme. Ainsi, en insérant le règlement à l'amiable dans la Charte africaine qui est mis en oeuvre par la Commission. ADHP, ce mécanisme prend l'image d'un contrôle politique peu contraignant devant la lutte contre l'impunité. Et même s'il était établi que les violations ont lieu, la Commission est soumise dans son fonctionnement à la tutelle de la Conférence de l'Union, un organe politique constitué de chefs d'Etat et de gouvernement, c'est à lui de décider de la suite à donner à la procédure de communication reçue par la Commission. En outre, alors que même la coopération des Etats dans la répression des crimes internationaux est automatique du seul fait de la ratification ou de l'adhésion au statut de Rome302(*), sous réserve bien entendu de l'adoption d'une loi nationale pour la remise du criminel présumé à la CPI. Chose qu'on ne retrouve pas dans les Organisations internationales. Pourtant la réussite de la communauté internationale dans la lutte contre l'impunité face aux graves violations des droits de l'homme ou la mise oeuvre de la responsabilité de protéger passe aussi par cette coopération de l'UA. En plus, conformément au chapitre VIII de la Charte de l'ONU du 26 juin 1945, intitulé « accords régionaux », les Organisations internationales régionales sont des relais continentaux de l'ONU sur les questions relatives à la paix, à la sécurité internationale et à la protection des droits de l'homme. Pour aller au bout de cette mission, elles sont appelées à agir pour faire cesser les graves violations des droits de l'homme et du principe d'humanité, en faisant usage de tous les moyens disponibles et légaux surtout dès lors que les autorités nationales n'assurent pas véritablement la protection de leur population contre le génocide, les crimes de guerre, le nettoyage ethnique et les crimes contre l'humanité303(*). Par conséquent, au terme des articles 52-54 il est du ressort des OI régionales d'agir et, en cas de menace contre la paix ou de rupture contre la paix ou d'acte d'agression de mettre en oeuvre la responsabilité de protéger selon les termes du chapitre VII. Comment agir à partir du moment où l'UA présente des insuffisances mais aussi est peu efficace à combattre l'impunité des auteurs de graves violations ou de crimes internationaux. Cette attitude de l'UA nous amène d'exprimer presqu'une véritable volonté de cette dernière de coopérer avec la CPI puisqu'elle est dirigée par des chefs d'Etat qui sont d'ailleurs les auteurs de ces graves violations des droits humains. De ce fait, le 04 mars 2009 la CPI, a délivré un mandat d'arrêt contre Oumar El-Béchir en tant qu'initiateur et coordonnateur de la campagne anti-insurrectionniste dans le Darfour après avoir réunis les preuves suffisantes. Au cours de cette campagne, il y a eu meurtre, extermination, transfert forcé, torture et viol à l'encontre de groupe de population Four, Massali, Zaghawa d'Avril 2003 au 14 juillet 2008. Convaincu qu'il est pénalement responsable en tant qu'auteur ou coauteur indirect. De même le 27 juin 2011, la CPI a délivré un mandat d'arrêt contre le colonel Mouammar Kadhafi pour crime contre l'humanité (persécutions, meurtre). Mais à partir du moment où ces présumés criminels sont des chefs d'Etat, alors la question de la régularité du mandat se pose puisqu'il bénéficie de l'immunité de fonction et mieux, la Conférence qui est censée agir n'est constituée que de chefs d'Etat. Cependant le Statut de Rome304(*) est clair à travers l'article 27 et suivant que l'immunité de juridiction liée à la qualité officielle de chef d'Etat ou de gouvernement, de membre d'un gouvernement ou d'un parlement, de représentant élu ou d'agent de l'Etat ne devra en aucun cas exonérer une personne de sa responsabilité criminelle305(*), pas plus qu'elle ne saurait constituer un motif de circonstance atténuante ou de réduction de peine306(*). Mais très souvent l'UA à travers ses Etats membres a toujours invoqué l'impartialité de la Cour et sa volonté de ne trimballer rien que les dirigeants africains devant les prétoires de la Cour. C'est d'ailleurs ce qu'exprime Jean Ping alors président de la Commission de l'UA « Comme si rien ne se passait ailleurs en Irak, à Gaza, en Colombie ou dans le Caucase. C'est surtout en se cachant derrière de ces fausses théories des chefs d'Etat et dirigeants africains que l'impunité a gagné et continu de gagner le terrain partout en Afrique. Il est alors intéressant de faire mention sur la possibilité pour l'UA de lutter véritablement contre l'impunité mais aussi sur la certitude de son avenir face à la démocratie et aux droits de l'homme au niveau régional africain étant l'organe qui assure la jouissance des droits de l'homme et leurs protections face aux atteintes éventuelles des Etats. * 299 Acte constitutif de l'UA, art. 3(e) * 300 Ibid. art. 3(h) * 301 ChADHP. Art. 19-24 * 302 Statut de Rome sur la CPI, art. 72 et 86 * 303 Nations Unies, Document final du sommet mondial 2005, 20 septembre 2005, UN. Doc. A/60/L, p.139 * 304 Egalement le statut TPIY (art. 7.2), celui du TPIR (art. 6.2) ce fut le cas aussi pour le Statut du Tribunal militaire International de Nuremberg (art. 7) et le Statut du Tribunal militaire International de Tokyo (art.6) * 305 Sassoli. M, « L'arrêt Yérodia », p. 8O9 « un tribunal pénal international agit toutes fois nécessairement dans la perspective d'un droit de coordination et, une fois qu'il est créé et accepté par les Etats, l'immunité, institution typique du droit de coordination ne se conçoit logiquement pas devant lui ». * 306 Statut de Rome de la CPI, art. 27.1 |
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