TITRE 2 : LE MANQUE D'EFFICACITÉ DES
GOUVERNEMENTS POUR FAIRE FACE AU TERRORISME CHIMIQUE ET BIOLOGIQUE
La menace du terrorisme chimique et biologique a
encouragé les pays à entreprendre des négociations dans le
but de se protéger, et de ne pas avoir à faire face à de
telles attaques. Ainsi, les pays ont tenté à coups d'accords et
de protocoles de parvenir à des accords afin d'assurer la paix, ou du
moins d'éviter des attaques chimiques et biologiques.
Ces négociations n'ont pas toujours été
fructueuses, et il aura fallu attendre longtemps avant de parvenir à la
conclusion d'un accord contraignant (Chapitre 1).
De nos jours, les pays en possessions d'armes ou de
laboratoires sont soumis à des obligations de désarmement
(Chapitre 2), bien qu'il s'agisse de procédés pouvant
s'étendre sur de nombreuses années, et que certains Etats parties
soient moins efficaces que d'autres dans ce processus de destruction.
CHAPITRE 1 : LA CONCLUSION D'ACCORDS INTERNATIONAUX
POUR METTRE FIN AU TERRORISME CHIMIQUE ET BIOLOGIQUE
Les Etats sont aujourd'hui conscients du danger que
représente le terrorisme chimique et biologique. Toutefois, bien que les
accords pour lutter contre cela sont de plus en plus nombreux, force est de
constater qu'ils ne sont pas pour autant récents.
En effet, le premier accord international date de 1675 et fut
signé à Strasbourg par l'Allemagne et la France, ce qui prouve
que depuis longtemps déjà les gouvernements tentent de se
protéger juridiquement.
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Malheureusement les débuts ont été
difficiles (section 1), puisque pour faire adhérer les pays il fallait
que les mesures ne soient pas trop contraignantes, ce qui présentait
l'inconvénient de l'inefficacité.
Il aura fallu attendre 1992 pour qu'une Convention
contraignante et efficace soit proposée (section 2), permettant ainsi de
lutter efficacement contre les armes, principalement contre les armes
chimiques.
SECTION 1: LA CONCERTATION DES ETATS DANS LE BUT
D'ERADIQUER LES MENACES TERRORISTES CHIMIQUES ET BIOLOGIQUES
L'accord de Strasbourg, cité ci-dessus, entre la France
et le Saint Empire Romano Germanique, avait pour objectif d'interdire
l'utilisation de balles empoisonnées, alors considérées
comme des armes chimiques.
L'accord suivant intervient plus d'un siècle
après, en 1817: les Etats-Unis et le Royaume-Unis signent l'Accord
Rush-Bagot, qui limite la taille des forces navales engagées par les
deux pays sur les Grands Lacs et le Lac Champlain.
En 1874, la Convention de Bruxelles, dans le cadre d'un
traité concernant les lois et coutumes de la guerre, interdit «
l'emploi de poison ou d'armes empoisonnées et l'emploi d'armes, de
projectiles ou de matériel causant des souffrances inutiles »,
biens que cette Convention s'abstienne de définir les « souffrances
inutiles », ce qui laisse un vide juridique et peut conduire à des
difficultés d'interprétation. Cet accord fut par la suite
complété en 1899 par un accord qui cette fois-ci interdisait
l'emploi de projectiles chargés de gaz toxique. Cet accord fut
signé à La Haye, lors d'une conférence internationale de
la paix.
Les Etats ont donc manifesté leur volonté de se
protéger contre les armes chimiques et biologiques avec de nombreux
traités, conventions ou encore protocoles.
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En 1925, signature du Protocole de Genève «
concernant la prohibition d'emploi à la guerre de gaz asphyxiants,
toxiques ou similaires et de moyens bactériologiques » . Ce
Protocole est le premier
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texte international à interdire l'utilisation des armes
chimiques et des armes biologiques. En 2008, ce protocole comptait 135 Etats
parties, et un Etat signataire (le Salvadore). De nos jours, on
considère que ce Protocole fait partie intégrante du droit
international coutumier, et que de ce fait même les Etats qui n'y sont
pas partie sont tenus par ses dispositions.
La portée de ce protocole est relative, car ce dernier
n'interdit pas la production ou le développement d'armes chimiques et
biologiques, et d'autant plus il ne prévoit aucun système de
vérification de ses dispositions.
De plus, lors de la signature de ce Protocole, certains Etats
ont déclaré qu'ils se réservaient le droit de riposter
dans l'éventualité où un Etat les attaquerait avec de
telles armes.
C'est alors en 1972 qu'intervient la Convention sur
l'interdiction des armes biologiques (CABT), qui constitue le premier
traité multilatéral de désarmement à bannir une
catégorie entière d'armes. Il aura fallu pour en arrive là
de nombreuses négociations internationales, four faire face aux carences
du Protocole de Genève. Il convient de préciser toutefois que
cette convention est limitée aux armes biologiques. Cette Convention
compte aujourd'hui 162 Etats parties, qui ont pris l'engagement de « ne
pas développer, produire, stocker ou utiliser des armes biologiques
».
Mais encore une fois, l'efficacité de cette convention
reste relatif car elle ne prévoit pas de régime de
vérification du respect de ses dispositions en raison de l'opposition
des Etats-Unis.
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Protocole de Genève, 17 juin 1925: La portée du
Protocole reste très limitée car il n'interdit pas la
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production, le développement, l'acquisition et le
stockage des armes chimiques et biologiques. De plus, il ne prévoit
aucun régime ou système de vérification de ses
dispositions. Enfin, lors de la signature du protocole, de nombreux
États ont déclaré qu'ils se réservaient le droit de
riposter au cas où un autre État utiliserait de telles armes
à leur encontre (la plupart de ces pays ont cependant levé ces
restrictions après l'entrée en vigueur de la Convention sur
l'interdiction des armes biologiques et de la Convention sur l'interdiction des
armes chimiques). Aujourd'hui, la production, le développement,
l'acquisition, le stockage et l'utilisation des armes chimiques et biologiques
sont interdites par la Convention sur l'interdiction des armes biologiques
signée en 1972 et par la Convention sur l'interdiction des armes
chimiques signée en 1993.
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Il faudra attendre le 3 septembre 1992 pour que soit
adopté la Convention sur l'interdiction des armes chimiques (la CIAC),
qui cette fois-ci est un traité international de désarmement, qui
interdit « la mise au point, la fabrication, le stockage et l'usage
d'armes chimiques ». Cette convention est entrée en vigueur
seulement le 29 avril 1997.
SECTION 2 : L'ABOUTSSEMENT, LA CONVENTION SUR
L'INTERDICTION DES ARMES CHIMIQUES
La CIAC est considérée comme l'un des plus
grands succès en matière de désarmement car elle implique
l'interdiction complète d'armes chimiques, la destruction des arsenaux
existants , ainsi qu'un régime de vérification des engagements
pris dans le cadre de la Convention et placé « sous l'égide
d'une institution indépendante: l'OIAC ».
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L'OIAC est soutenue financièrement par l'Union
Européenne dans le cadre de la stratégie européenne de
2003 concernant la lutte contre la prolifération des armes de
destruction massive.
La CIAC considère que tous les agents chimiques sont
considérés comme des armes chimiques sauf s'ils sont
utilisés à des fins strictement permises par elle, comme par
exemple dans un but industriel, agricole, de recherche, ou encore dans un but
de maintien de l'ordre public. La Convention contient des annexes qui
détaillent les agents chimiques autorisés, et ceux interdits.
Les Etats parties ont donc l'interdiction « de
développer, produire, mettre au point, acquérir, stocker,
détenir ou transférer des armes chimiques », et ne peuvent
ni utiliser ces armes, ni participer à des opérations militaires
aux côté d'Etats qui les utiliseraient.
En raison de la souveraineté des Etats, il appartient
à chaque Etat d'instaurer une législation nationale pour
étendre les dispositions de la Convention.
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L'organisation pour l'interdiction des armes chimiques:
L'Organisation pour l'interdiction des
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armes chimiques, abrégée en OIAC, en anglais
Organisation for the prohibition of chemical weapons, OPCW, est une institution
internationale basée à La Haye aux Pays-Bas et qui veille
à ce que la Convention internationale sur les armes chimiques soit bien
appliquée par les membres l'ayant signée. Le prix Nobel de la
paix lui est décerné le 11 octobre 20131, pour « ses efforts
étendus visant à éliminer les armes chimiques »2.
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La CIAC prévoit également des modalités de
destruction, comme il le sera étudié plus bas.
En ce qui concerne le régime de vérification
imposé par la CIAC : ces vérifications sont opérées
par l'OIAC dans un but d'indépendance. Les missions de cette
organisation sont la supervision et la confirmation de la destruction des armes
chimiques et des installations militaires afférentes, tenter de faire
adhérer de nouveaux Etats à la CIAC, contrôler la
conformité des activités d'industries chimiques pour
éviter les débordements et promouvoir la coopération entre
les Etats parties.
En 2013, il ne restait que trois Etats encore en dehors de la
CIAC : La Corée du Nord, l'Egypte et le Soudan du Sud (avec comme
précision qu'Israël à signé la Convention en 1993
mais ne l'a toujours pas ratifiée).
Selon les données de la CIAC, aujourd'hui 6 Etats
partis ont officiellement déclaré détenir des stocks
d'armes chimiques : la Russie, la Libye, l'Inde, les Etats-Unis, la
Corée du Sud et l'Albanie.
Toujours selon la CIAC, le total des stocks
déclarés de ces Etats s'élèverait à plus de
8 millions d'armes chimiques, soit 71 000 tonnes d'agents chimiques toxiques.
Bien que les Etats se soient engagés à détruire leurs
stocks, ils ont demandé des délais supplémentaires pour le
faire, et ces délais leur ont été accordés.
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