2-LES TÂCHES DES TIERS:
En fonction de ce qui vient d'être écrit, quelles
sont, d'une façon pratique, les tâches accomplies par les tiers et
aussi leur utilité ?
Quel que soit son pouvoir, la première tâche
d'un tiers consiste à établir sa crédibilité. Il
est évident qu'elle ne requiert pas les mêmes efforts selon les
circonstances. Le supérieur qui est pris à agir comme
médiateur dans un conflit opposant deux de ses subalternes, n'a pas une
longue pente à remonter pour établir sa
crédibilité. Le pouvoir et l'autorité que son poste lui
confère assoient déjà un certain poids. Il est en de
même le plus souvent pour un juge ou un arbitre nommé par le
gouvernement ou par une instance judiciaire. Par contre, la personne externe
recommandée ou appelée par une partie pour aider à
régler un litige aura davantage le fardeau de prouver cette
crédibilité.
Quoi qu'il en soit, on dit souvent et
régulièrement que l'impact d'un tiers vient d'abord et avant de
la crédibilité que lui accordent les parties. Même dans le
cas d'untiers désigné qui rend une sentence finale et grande et
plus faciles si le tiers jouit d'un crédit certain. Entre un patron
crédible qui arbitre un conflit et un autre moins crédible ; il
ne faut pas être grand clerc pour constater rapidement la
différence.
En relation avec cette crédibilité, il y a toute
la question de la neutralité et de l'impartialité ou plus
précisément, de la perception de cette neutralité et
impartialité. En matière de conflit, peut-être plus
d'ailleurs qu'en toute autre matière, la réalité est ce
que l'on perçoit. Or, on sait qu'un des éléments
importants en situation conflictuelle porte sur les biais de perception.
D'ailleurs plus le conflit est rendu loin dans le processus d'escalade, plus
les perceptions sont biaisées jusqu'à la simplification
cognitive. On comprend alors l'importance pour le tiers de convaincre les
parties de sa neutralité et de son impartialité s'il veut
vraiment faire oeuvre utile.
Ces deux préalables établis, la tâche du
tiers va varier selon le pouvoir et le mandat qui lui ont été
dévolus. Dans le premier quadrant c'est-à-dire dans le cas
où sa présence n'est pas imposée et où ses
recommandations sont laissées à la discrétion des parties
(quand il y a recommandation), le tiers verra essentiellement à
structurer le processus de façon à ce que les parties en arrivent
elles-mêmes à trouver une solution acceptable.
Il se donnera comme tâche d'établir un bon climat
de travail en suggérant un minimum de règles de fonctionnement
visant le respect mutuel. Pour ce faire, il misera sur le temps, le lieu et les
règles de communication qui ont déjà fait leurs preuves.
Il verra à ce que les parties définissent bien le problème
et aient une compréhension mutuelle des questions en litige.
(Très souvent, les parties en conflit ont une perception et une
compréhension fort différentes du problème). Il cherchera
à découvrir les véritables intérêts en jeu.
Il contribuera à l'exploration des solutions, par exemple par des
rencontres de remue-méninges, et par la suite à leur
évaluation. Finalement, il fera cheminer les parties vers un plan
d'action et l'élaboration de mécanismes donnant suite à
l'entente.
A l'autre extrémité, soit lorsque le tiers est
désigné par une instance supérieure dans le but d'imposer
un règlement, les tâches de la personne nommée
varientgrandement bien que certaines règles de base demeurent les
mêmes comme par exemple des règles visant un certain respect
mutuel. Dans ces cas, on se rapprochera, en termes de fonctionnement,
d'avantages des règles quasi judiciaires qui, évidemment peuvent
varier d'un continent à l'autre et d'un pays à l'autre. Par
exemple, alors que précédemment on procédait à des
rencontres visant à explorer différentes avenues, dans ce cas-ci,
ce sera davantage une procédure de contre-interrogatoire qui
prévaudra. Le tiers verra ainsi à contrôler non seulement
le processus mais aussi le résultat. Entre ces deux extrêmes, les
ajustements seront selon le mandat attribué au tiers.
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