B. Jeu d'alliances et consolidation de la
démocratie
La consolidation de la démocratie suppose la
stabilisation du jeu des institutions par le respect du principe de la
séparation des pouvoirs. Les branches législative,
exécutive et judiciaire doivent jouir chacune d'une certaine autonomie
fonctionnelle pour clarifier le jeu politique et renforcer la consistance
institutionnelle. Ce principe d'autonomisation n'aura pas été
effectif en RDC, les pouvoirs législatif et judiciaire étant
totalement subjugués par l'exécutif et spécialement
à l'institution président de la République.
Le gouvernement de la République à l'issue des
élections de 2011 à l'instar de celles de 2006 aura
été constitué de façon extraparlementaire. Le
premier ministre n'est toujours pas le chef de la majorité parlementaire
et la correspondance de la majorité parlementaire avec la
majorité présidentielle n'est pas pour assurer le triomphe du
parlementarisme rationnalisé. Car, du fait que le premier ministre ne
soit pas issu de la coalition parlementaire et que son programme d'action ne
résulte pas des programmes des partis coalisés, a favorisé
une inclinaison vers le présidentialisme n'assurant pas la
séparation du pouvoir et moins encore le respect de la constitution.
Le pouvoir judiciaire encore en transition n'est pas
véritablement indépendant. L'armature judiciaire telle que
définie dans la constitution de 2006 n'étant pas encore
effectivement mise sur pied, les procédures devant les cours et
tribunaux subissent des intrusions intempestives. A cette allure,
l'avènement d'un Etat de droit et protecteur des droits de l'homme
devient problématique sinon hypothétique.
C. Jeu d'alliances et gouvernabilité de
l'Etat
En RD Congo le jeu d'alliances et de coalitions politiques
n'est pas seulement lié au fait électoral mais plutôt
à la réalité du pouvoir politique souvent partagé.
Les différents régimes politiques ont généralement
été dominés par des oppositions gouvernantes - celle des
nationalistes aux mobutistes, celle des mobutistes aux kabilistes, celle des
kabilistes aux partis de l'étranger - l'espace politique demeurant
fragmenté, militarisé et en équilibre toujours
instable.
Les élections de 2006 et de 2011 avaient dès
lors pour finalité la restauration de la légitimité
institutionnelle devant faciliter la gouvernance républicaine et
démocratique. L'organisation des jeux de gouvernement
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devrait dans ce cas s'opérer essentiellement au sein de
l'assemblée nationale dont le groupe majoritaire qui aurait librement
formé un gouvernement aurait eu également le devoir d'appuyer le
programme et les décisions de ce même gouvernement pour garantir
la pertinence de la rationalité publique.
Le jeu de gouvernement aura été en marge de ce
principe durant ces deux quinquennats. Les arrangements particuliers par
lesquels se sont constitués les gouvernements ont empêché
le fonctionnement normal du parlementarisme dualiste consacré par la
constitution du 18 février 2006 et fondé sur le principe de la
responsabilité ministérielle et le droit de dissolution. Ces
arrangements politiques auraient même bloqué la constitution d'une
coalition parlementaire autour des partis de la majorité. Le Palu tout
en gouvernant, aura été boudé par les vrais partis du
pouvoir, et la ligne entre l'opposition et la majorité est restée
de ce fait difficile à tracer.
Le Gouvernement Matata Ponyo aura également
été constitué en marge du jeu parlementaire, le
président de la République ayant préféré un
technocrate à la place du chef de fil du PPRD, parti dominant autour
duquel se sont formées les majorités présidentielle et
parlementaire). Le contrôle parlementaire étant devenu purement
protocolaire, le premier ministre, chef du gouvernement, aura été
davantage responsable devant le président de la République que
devant l'Assemblée Nationale.
Les initiatives parlementaires de défiance ou de
censure ont à chaque fois été bloquées par des
injonctions et des consignes de vote qui paralysent l'Assemblée
Nationale. Pour faire passer certaines décisions essentielles, le
premier ministre et les ministres sont obligés de marchander avec les
parlementaires. Les consultations répétées de Kingakati 12
auront substantiellement aussi contribué à faire passer certaines
décisions ou encore à maintenir ces genres d'arrangements.
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