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Une analyse de l'impact de la libéralisation agricole sur le revenu agriculteurs. Le cas de la filière riz de la vallée de l'Artibonite.


par Ernson Augustin
HEC-Liège/ESFAM - Master en Science de gestion 2018
  

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CONCLUSIONS

La situation économique des agriculteurs haïtiens après la libéralisation agricole nous préoccupe. Notre intérêt s'est tourné particulièrement vers la Vallée de l'Artibonite puisque cette dernière est considérée comme le grenier de la République avec ses principaux atouts agricoles. Pour répondre aux besoins de consommation des ménages à faible revenus dans les pays les plus pauvres et accroître le revenu des agriculteurs, il faut libéraliser l'agriculture mondiale par la baisse des tarifs douaniers selon le paradigme des agences internationales de développement au cours de la décennie 1981-90.

Sur la base de l'application du Programme d'Ajustement Structurel du FMI, les dirigeants haïtiens arrivent à libéraliser l'agriculture du pays. Les droits de douanes sur l'importation du riz ont été réduits considérablement et les autres mesures protectionnistes ont été démantelées. Paradoxalement, depuis le début des années 2000, Haïti est considéré comme le pays qui applique les droits de douanes les plus faibles dans la Caraïbe et aussi l'un des plus pauvres au monde, avec la diminution continue du revenu des riziculteurs. Partant d'un tel constat, nous nous sommes questionné sur la relation qui existe entre la baisse des droits de douanes sur le riz importé et le revenu des riziculteurs de la Vallée de l'Artibonite.

En effet, dans le Plan Stratégique de Développement d'Haïti (PSDH), l'agriculture haïtienne, particulièrement sa riziculture, est considérée comme un secteur stratégique pour lutter contre l'insécurité alimentaire et contribuer à la croissance économique du pays. Pourtant, plusieurs travaux réalisés au début des années 2000, dont Sylla, K. & Touré, A. (2004), Baptiste, BJ. (2005) et Fréguin, S. & Devienne S. (2006) confirment l'Hypothèse selon laquelle la libéralisation de l'agriculture n'est profitable qu'à un petit groupes restreints d'individus. Par ailleurs, ces auteurs relatent que la baisse des droits de douanes en faveurs des denrées agricoles importées entraine une détérioration de la situation économique et alimentaire des ménages à faibles revenue au niveau des pays pauvres. Avec la problématique construite et en s'inspirant du résultat de ses recherches, nous avons posé les deux hypothèses suivantes :

1. Plus les droits de douanes sur le riz importé diminuent, plus le revenu des riziculteurs de la Vallée de l'Artibonite diminue.

2. Il existe d'autres facteurs internes, comme la corruption, qui influencent le revenu des riziculteurs de la Vallée de l'Artibonite.

Ce travail est composé de quatre (4) chapitres. Dans le premier, il était question de présenter deux théories contradictoires et de définir les différents concepts afin de donner le sens qu'ils revêtent et d'éviter toutes sortes d'ambigüités. Nous avons essayé, dans le second chapitre, de démontrer que le marché mondiale du riz est concentré et a les caractéristiques d'un oligopole. Le

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troisième chapitre est consacré à la mise en lumière de la situation de la riziculture haïtienne tout en soulignant ses principales contraintes. Le dernier chapitre concerne l'étude de cas. Nous avons réalisé des entretiens libres aux près de huit (8) personnes ressources afin d'avoir une compréhension approfondie de la problématique construite.

Les résultats de notre recherche montrent que le marché rizicole mondial est un oligopole. La majeure partie de la production est concentrée au niveau des pays d'Asie et 93% de cette production est consommée au niveau du marché national contre seulement 7% vendue sur le marché international en 2006. De plus, il faut de souligner la protection de la riziculture au niveau de certains pays producteurs alors que l'agriculture des PMA est libéralisée.

Les pays de l'Europe, avec l'application de la PAC après la deuxième guerre mondiale ainsi que les Etats-Unis appliquent une politique protectionniste afin d'accroître la production et d'augmenter le revenu des agriculteurs. Ce même cas de figure a été constaté au niveau des pays en développement d'Asie, principaux producteurs et exportateurs du riz. Vers les années 1980, ces pays ont investi des sommes exorbitantes dans les infrastructures agricoles, condition indispensable pour accroître la production et le revenu agricole. Parallèlement, les dirigeants de ces pays utilisent d'autres mécanismes, comme l'interdiction de l'importation à des moments donnés, afin de protéger leurs productions et d'accroître le revenu des riziculteurs.

Cependant, vers les années 1980, certains PMA ont procédé à la libéralisation de leurs agricultures sur la demande des Institutions Financières internationales (IFI) dans le cadre de l'application du Programme d'Ajustement Structurel (PAS). Etant l'un des pays les plus pauvres, l'agriculture de la République d'Haïti d'une façon générale et sa riziculture en particulier, a été libéralisée. L'Etat haïtien a démantelé les droits de douanes sur l'importation du riz et d'autres mesures servant à protéger la riziculture de la Vallée de l'Artibonite comme la réouverture de certains ports et la limitation des importations.

Pour expliquer l'impact de la baisse des droits de douanes en faveur du riz importé sur le revenu des riziculteurs de la Vallée de l'Artibonite, nous avons analysé des articles et des documents officiels du MANDR et de ses partenaires comme la CNSA, le FAO.... Par ailleurs, des entretiens libres ont été réalisés auprès des personnes ressources. Malgré les difficultés rencontrées, nous avons réussi à réaliser 8 entretiens. Il a été démontré qu'avec l'application de cette politique néolibérale, la situation économique des riziculteurs de la Vallée de l'Artibonite s'est détériorée. La totalité des répondants (8) pensent que cette politique de libéralisation rizicole entraine une baisse du revenu des agriculteurs de la Vallée de l'Artibonite. Donc, les résultats de notre recherche confirment l'hypothèse 1. Cependant, nous n'avons pas eu la possibilité de vérifier la validité de

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l'hypothèse 2. Bien que le pays figure parmi les plus corrompus depuis le début des années 2000, nous ne sommes pas arrivés à établir la relation entre la corruption et la baisse du revenu des riziculteurs de la Vallée de l'Artibonite.

La nouvelle politique appliquée est profitable surtout aux exportateurs étrangers qui peuvent livrer leurs surplus de productions sur le marché haïtien à des prix subventionnés. A leurs côtés se trouvent un groupuscule formé par des commerçants haïtiens très riches qui ont le droit exclusif d'importer le riz avec des franchises douanières accordé par l'Etat haïtien. Les consommateurs haïtiens quant à eux bénéficient en partie de la baisse des prix du riz sur le marché local. Toutefois, cette libéralisation agricole cause des préjudices à l'Etat haïtien qui renonce à une portion des recettes douanières et aux riziculteurs de la Vallée de l'Artibonite. Elle contribue à la baisse de la production agricole et du revenu de ces derniers.

Cependant, cette recherche est limitée surtout par le nombre très restreint (8) de participants. C'est pourquoi que nous espérons que dans les jours qui viennent, d'autres études seront menées tout en réalisant une enquête quantitative aux près des riziculteurs de la Vallée de l'Artibonite afin de confirmer les résultats de ce travail.

Formulation des propositions

Comme nous l'avons souligné à plusieurs reprises, la production du riz au niveau de la Vallée de l'Artibonite joue un rôle primordial dans la survie des riziculteurs de cette région. D'ailleurs, elle est considérée comme la principale source de revenu pour 90,000.00 riziculteurs et contribue à hauteur de 12% dans la disponibilité alimentaire en Haïti contre 8% pour l'ensemble des autres régions du pays. Considérée comme la principale zone de production du pays, il s'avère nécessaire de prendre des mesures afin d'accroître la production et d'augmenter le revenu des riziculteurs de la Vallée de l'Artibonite. Dans ce cadre, nous avons faits les propositions suivantes :

1. Réviser la politique commerciale de l'Etat haïtien

Avec la révision de sa politique commerciale, l'Etat haïtien peut contribuer à la modernisation des structures de production et d'échange par l'augmentation progressive des tarifs douaniers (profiter de la marge de protection non utilisée) pour augmenter ses recettes. Ça va lui donner aussi des ressources nécessaires pour financer les réseaux douaniers (système douanier) afin d'éviter la contrebande. Toutefois, il convient de savoir si le secteur rizicole est encore viable pour

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susciter un tel niveau de protection quant à sa capacité de réponse en termes de production de masse quand nous considérons les contraintes structurelles auquel il fait face.

2. Elaborer un plan de développement agricole inclusif au niveau de la Vallée

Bon nombres de plan de développement de la filière riz sont élaborés sans la participation des riziculteurs. Le modèle de développement souhaitable dans la Vallée de l'Artibonite doit être constitué par un ensemble de moyens visant à réaliser la participation de la population et ses responsabilités au progrès de sa propre communauté. De plus, les potentialités agricoles réelles, les besoins du marché local, les aspects environnementaux qui sont très liés à l'agriculture, l'aspect institutionnel en voyant le véritable rôle du MARNDR et de l'ODVA ainsi que l'aspect organisationnel du côté des riziculteurs doivent être pris en compte.

3. Augmenter l'investissement de l'Etat dans les infrastructures agricoles

La Vallée de l'Artibonite est traversée par deux grands cours-d `eaux. Pourtant, l'inaccessibilité des riziculteurs aux ressources hydrauliques constitue l'une des contraintes majeures à l'augmentation de la production. L'intervention de l'Etat paraît comme une condition sine qua non pour accroître la production et contribuer à la hausse du revenu agricole. L'Etat doit aussi investir dans les infrastructures routières afin de faciliter le transport de la production et dans l'agro-industrie afin de faciliter la transformation et la conservation des denrées et d'augmenter la valeur ajoutée en agriculture.

4. Mettre en place un service d'assurance agricole

Les riziculteurs de la Vallée de l'Artibonite sont, dans la majeure partie des cas, des personnes à faibles revenus. Ils ont un accès limité aux services et intrants agricoles (semences de qualité, produits phytosanitaires, crédits, etc.). La culture d'une parcelle nécessite beaucoup d'investissements que ni le secteur privé des affaires ni les paysans ne peuvent engager. Ces considérations sont autant d'éléments fondamentaux qui requièrent une intervention de l'Etat. Ce dernier doit assurer la production des riziculteurs afin de faciliter l'accès au crédit de ces derniers et de répondre aux besoins financiers nécessaires pour exploiter les parcelles.

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams