3. Suggestions aux Peuples de la CEDEAO
Les types de dérive constatés surtout en
période électorale rendent inefficientes les règles
d'égalité et d'équité inscrites dans les textes
régissant les élections. Les dirigeants profitent des confusions
dans ce dispositif principalement pour imposer de nouvelles règles du
jeu. En effet, l'élection étant par essence un acte de
souveraineté de l'État, il est normal que chaque État en
assure en toute indépendance l'organisation et le financement.
Malheureusement, le financement des élections, dans la
plupart des Etats membres de la CEDEAO, est souvent largement tributaire des
ressources extérieures dont la mobilisation est souvent liée
à des conditionnalités que les États
bénéficiaires ne remplissent pas toujours. Il en résulte
des blocages qui entravent l'évolution sereine du processus
électoral laissant le chemin libre aux antis démocrates de
remettre en cause la sincérité du scrutin en déclassant
les Etats. La prise en charge par chaque État du coût financier
des élections est de toute évidence l'objectif à atteindre
et il importe que l'intégralité de ces dépenses soient
inscrites au budget.
Par ailleurs, les MOE déployées lors des
élections pour s'assurer de la sincérité du scrutin dans
les Etats n'ont pas toujours les coudées franches pour un travail
fiable.
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L'OBJECTIVITE DES MISSIONS D'OBSERVATION ELECTORALE EN AFRIQUE
: CAS DE LA CEDEAO FRANCOPHONE
Quelle est donc la pertinence des missions d'observation
électorale si elles ne peuvent être objectives ?
Le challenge consiste donc à établir les liens
organisationnels et fonctionnels les plus pertinents en vue de
l'établissement d'un mécanisme cohérent et orienté
vers l'efficacité et l'impact durable sur les processus
démocratiques des Etats bénéficiaires. Il revient à
chaque peuple de porter le concept de la « Nouvelle Conscience
Régionale » en vue de préconiser la mise en place des
creusets de pression, de dissuasion et d'action au niveau de chaque Etat membre
de la CEDEAO. Le financement des élections inscrit dans le budget de
l'Etat et la traçabilité des fonds mis à disposition
doivent être analysés à la loupe. Le partenariat du peuple
avec les institutions sous - régionales doit être
revendiqué.
Dans ce cadre, le Sénégal donne depuis 2011 un
exemple de « Cadre d'Action et de Pression » qui
regroupe des acteurs de la société civile et qui pourrait
être amélioré et étendu aux autres Etats de la
CEDEAO. Ce cadre a contribué énormément à la
réalisation de consensus importants sur les questions électorales
et, partant, à la prévention de potentiels conflits
électoraux.
En effet, ces dernières années, des pans
importants de la société civile sont soucieux de marquer leur
identité et leur autonomie par rapport aux partis politiques et
manifestent une propension à prendre leurs distances et à assumer
une certaine équidistance par rapport aux acteurs politiques en
compétition pour l'exercice du pouvoir. Ces dynamiques tendent à
montrer que les citoyens, à travers leurs organisations et mouvements,
sont déterminés aujourd'hui à se positionner comme acteurs
du processus afin de contribuer à déterminer, non pas qui doit
assumer le pouvoir politique (c'est l'objet des élections), mais les
règles minimales auxquelles doivent se soumettre tout acteur de la
« classe politique » pour une dévolution du
pouvoir et une gouvernance légitime. C'est ainsi, par exemple, que sont
nées les plateformes comme Nchoof en Tunisie (2011)38,
EDNA-DIAPOL au Sénégal
38 Nouvel outil citoyen à la disposition des Tunisiens
démocrates, la plateforme Nchoof, lancée par l'association Sawty,
l'association "conscience politique" et l'association "Société de
l'Internet en Tunisie (ISOC Tunisie)" se propose de contrôler le
processus électoral tunisien par internet. Le site propose
également des éclairages, en français et en arabe, sur les
textes juridiques et les procédures réglementaires relatifs au
processus électoral, ainsi que des analyses publiées dans la
presse sur ce thème. Destiné à publier toutes les
réclamations des citoyens au cours de la période
électorale, ce site a pour mission de rendre le plus transparent
possible le déroulement du processus électoral dans les
différentes régions du pays. Contrairement à l'observation
classique des élections dont les résultats ne seront
révélés qu'à la fin du dépouillement, ce
site permet de contrôler l'opération électorale de
façon quotidienne et instantanée. Au-delà de son
utilité de contrôle, la plate-forme incite clairement les
Tunisiens à s'impliquer dans le processus démocratique en marche
et de décider de l'avenir du pays. Elle se présente
également comme un outil collaboratif de détection des fraudes en
demandant aux citoyens de former une chaîne de vigilance.
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(2012)39, APEM40 ou Réseau
Plaidoyer et Lobbying au Mali (2013). Il est nécessaire maintenant que
chaque peuple de la CEDEAO prenne les dispositions de mobilisation utiles en
vue de soutenir les réformes induites par le modèle
suggéré.
En dépit des mécanismes mis en place par la
CEDEAO pour observer les Etats membres, les processus électoraux restent
relativement peu crédibles dans la sous-région et les risques de
conflits électoraux demeurent élevés.
Il convient dès lors de réinventer l'observation
électorale et d'en faire un instrument permettant d'une part
d'améliorer la crédibilité des élections et de
prévenir les conflits dans l'espace CEDEAO et, d'autre part, de faire
progressivement reprendre en main par les Etats eux-mêmes la
maîtrise et le contrôle de leurs processus électoraux.
Dans cette perspective, la première clé de la
réussite du système demeure une véritable coordination des
interventions des différents acteurs par une structure comme la
« Nouvelle Conscience Régionale » qui
regroupera tous les Etats de cet espace sous régional et qui est
doté d'organes et de mécanismes capables de porter efficacement
cette responsabilité.
39 L'Organisation Edna Prospective et Dialogue politique
(Diapo), en partenariat avec la Plateforme des acteurs non étatiques
pour le suivi de l'action de contrôle, a mobilisé 250 observateurs
et 28 superviseurs sur l'ensemble du territoire national pour la
présidentielle du 26 février 2012. En dehors des moyens
mobilisés pour ces observateurs, Edna-Diapol fera aussi appel à
des volontaires pour étoffer son effectif. Observateurs à long
terme (OLT) d'Edna-Diapol, les superviseurs ont pour tâche de
façon continue d'assurer l'observation électorale, la
sensibilisation et la mobilisation des électeurs jusqu'aux
élections. Deux niveaux de coordination sont mis en place pour
travailler avec les observateurs étrangers sur le terrain, d'abord avec
les observateurs de l'Union Européenne et ensuite avec ceux
déployés par la Communauté économique des Etats de
l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO).
40 Réseau d'Appui au Processus Electoral du
Mali.
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