ABSTRACT
Agricultural activity in Nassian, whose practices remain
traditional and production is dependent on climatic conditions, keeps 90% of
the rural population busy. In the current context of climate change and
variability, marked by irregular rainfall and rising temperatures, the rural
world is the most exposed to food crises despite the implementation of programs
and policies aiming at developing agricultural sector in Côte d'Ivoire.
But, Nassian people always succeed in coping with various disturbances using
their own techniques and know-how. Taking into account this local know-how and
popularizing it in agricultural policies is essential in order to deal with
these climate deregulations. Therefore, this research is about analyzing the
perception of climate change and variability faced by Nassian rural populations
in their agricultural practices. The methodology is based on quantitative and
qualitative research approach applied in agriculture. The data processing tools
used are, among others, descriptive and analytical statistics. The results
revealed that climatic parameters faced by farmers are rainfall, temperature
and wind. However, the causes used to justify climate change and variability
are function of their attachment to tradition and personal conception. The
negative environmental consequences vary according to the topography of
agricultural plots and the phenomenon involved. Rain excess is manifested by
frequent flooding of shallows and erosion. The delays / breaks of rain lead to
the drying up of the rivers, the drop of the groundwater, the degradation of
the vegetal cover, the desiccation of the grounds and the decrease of
agricultural productions. Indicators as "culture destroyed by wind" and
"temperature too high" are the remarkable consequences of the effects of wind
and temperature on corn and yam crops. Then, the consequences on people's lives
result in a decrease of agricultural income and a deterioration of their living
environment. Coming to the strategies, the farming calendar is developed by
farmers considering the agro-climatic constraints of the area. It is constantly
being edited to meet the dynamics of climate deregulation. Poverty and the
scarcity of arable land lead to shifting in former production systems towards
lowland development. However, some measures to restore land and improve
fertility are adopted. While making agricultural policies, integrating all
these practices could effectively contribute to the resilience of rural
economies subject to climate risks.
Key words: Perceptions, Climate Change
and Variability, Populations, Agricultural activities, Nassian
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CHAPITRE 1 : INTRODUCTION GENERALE
L'agriculture forme le paysage et le transforme (Noufé,
2011). Depuis la révolution agricole du Néolithique, les hommes
n'ont cessé de déboiser, planter, brûler, labourer, couper,
etc., modelant leur environnement naturel afin d'en tirer les ressources
nécessaires à leur survie (Mazoyer, 1987 ; Mazoyer et Roudart,
2002). Comme le soulignent ces auteurs, l'agriculture faisait
déjà partie intégrante des relations de chaque
société avec son milieu. Les paysages sont donc le
résultat de milliers d'années d'intervention humaine (Fairclough,
2007), parfois soudaine et étendue (exploitation, déboisement),
parfois progressive et spécifique (altération de la
biodiversité à des fins agricoles, d'élevage, d'abattage
sélective, etc.). Mais face à cette longue emprise humaine, la
société commence à s'interroger sur les rapports entre
l'agriculture et l'environnement. En effet, pour les géographes,
comprendre et expliquer les interactions homme/nature, est devenu une
priorité au vu de l'état dans lequel se trouvent certaines
ressources naturelles (Brou et al., 1998 ; Noufé, 2011 ; N'Guessan, 2012
;). Aussi, du fait de la place grandissante de la multifonctionnalité de
l'agriculture (exploitation des ressources naturelles, durabilité et
reproductibilité de l'agriculture, etc.).
En Afrique, le secteur agricole joue un rôle primordial
dans le développement de nombreux pays, notamment ceux d'Afrique de
l'Ouest. En tant que pilier de l'économie, il touche à la vie de
la société, dans la mesure où les économies
nationales et les emplois, les revenus et la sécurité alimentaire
des populations en dépendent (Zougmoré et al., 2015). Cette
agriculture, est hyper-dépendante des aléas climatiques. Les
paramètres climatiques comme la sécheresse, les inondations et
les températures extrêmes influencent la production agricole
depuis les premiers stades de la culture jusqu'à la récolte
finale (Doumbia et al., 2013). En effet, on assiste depuis les années
1970 à une modification des régimes pluviométriques dans
la sous-région ouest-africaine, signe du changement climatique (Yao et
al., 2013). Une des raisons de ce changement réside certainement dans le
réchauffement climatique global lié à l'impact des
émissions des gaz à effet de serre. En outre, l'action de l'homme
sur l'environnement local contribue significativement à travers la
déforestation, les feux de brousse, la pollution atmosphérique
(Yao et al, 2013). Les productions agricoles subissent alors une importante
baisse de rendement.
La Côte d'Ivoire subit également les impacts du
changement climatique. Depuis plusieurs années, elle est aux prises avec
des conditions climatiques qui se traduisent par une baisse moyenne des pluies
de 0,5% par an entre 1965 et 1980, aggravés dans les années 1980
avec une diminution de 4,6% (Boko et al., 2016).
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Ainsi, le climat influence largement la production alimentaire
et l'économie dans son ensemble (Doumbia et al., 2013). De ce fait, les
effets potentiels du changement climatique sur la productivité agricole
suscitent de nombreuses préoccupations, car les aléas climatiques
ont des répercussions immédiates sur les activités et la
production agricole. Les institutions internationales du développement
et de la recherche, menées par des chercheurs généralement
issus du milieu académique, s'attardent à ce problème et
tentent d'y trouver des solutions. De l'autre côté, les paysans,
perçoivent et développent également des stratégies
d'adaptation contre les changements et variabilités climatiques.
A Nassian, comme partout en Côte d'Ivoire, il y a une
irrégularité de pluie surtout au moment des périodes
culturales où les paysans s'apprêtent pour les activités
champêtres. Ces bouleversements constituent un risque important qui
laisse naitre, un sentiment d'incertitude au niveau des paysans en
matière du respect des calendriers culturaux. Face à cette
situation, les agriculteurs développent des stratégies pour
assurer leur survie. Ces mesures développées par les agriculteurs
sont en fonction de la lecture qu'ils font de l'évolution du climat, de
leurs connaissances environnementales traditionnelles et de leurs perceptions
des changements et variabilités climatiques en cours (Agossou, 2008).
Dans le cadre de la présente étude
intitulé « Activités agricoles et perceptions des
populations de Nassian face aux changements et variabilités climatiques
», il s'agit d'analyser les changements et variabilités climatiques
perçus par les populations notamment ses manifestations et ses causes
dans leurs pratiques agricoles.
1.1 . Contexte et motivations de l'étude
L'agriculture constitue un des secteurs les plus importants de
l'économie ivoirienne (Doumbia et al, 2013). Elle joue un rôle
crucial dans le développement de la Côte d'Ivoire et constitue le
moteur de l'économie. A ce titre, la Banque mondiale (2015) souligne que
l'agriculture génère plus de 50% des recettes d'exportation et
constitue également 22% du Produit Intérieur Brut (PIB). Mais les
acteurs de ce milieu rencontrent bien des difficultés liées aux
changements climatiques car l'agriculture est de type pluvial et donc
tributaire du climat (Dibi Kangah, 2004). Les paramètres climatiques
comme la sécheresse, les inondations et les températures
extrêmes influencent la production agricole (Doumbia et al., 2013).
Même si la pluviométrie est relativement importante, son
irrégularité et sa rareté peuvent affecter les rendements
des cultures.
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Sans pluie, les rendements agricoles sont médiocres et
l'agriculture, pour beaucoup, est la principale activité lucrative. Les
changements climatiques font peser sur l'agriculture, secteur vital de
l'économie nationale, une menace réelle.
Partant, les impacts des changements et variabilités
climatiques sur l'agriculture sont une préoccupation majeure. Depuis
plusieurs années, de nouvelles stratégies d'adaptations sont
proposées dans l'accompagnement des populations paysannes (Brou, 2005 ;
Diouf et al., 2014 ; Kouassi et al., 2015 ; Boko et al., 2016). Mais la
majorité de ces travaux ont porté sur l'impact des changements et
variabilités climatiques sur les activités agricoles. Dans cette
recherche, il ne s'agit pas d'une reprise des travaux déjà
effectués, mais d'étudier la perception paysanne du changement
climatique telle que vécue dans la pratique agricole. Ainsi, ce travail
s'inscrit dans le programme de recherche du Centre d'Excellence Africain sur
les Changements Climatiques, la Biodiversité et l'Agriculture Durable
(CEA CCBAD), qui vise l'excellence à travers la formation des
étudiants. Il met l'accent sur la biodiversité, l'agriculture
durable et fait partie d'un réseau régional préexistant de
dix institutions axées sur le changement climatique à travers le
programme du West African Science Service Centre on Climate Change and Adapted
Land Use (WASCAL). Ce programme s'intéresse à plusieurs domaines
de l'agriculture.
D'abord, de développer des technologies innovantes pour
une résilience surtout les systèmes de culture, les pesticides et
autres alternatives aux pesticides. Ensuite, de contribuer au renforcement des
capacités des humaines en PHD et Master dans le domaine de
l'alimentaire. En outre, de disposer d'une masse critique et compétitive
d'enseignant-chercheurs, de chercheurs et d'agents de développement
africains de haut niveau dans le but d'informer, former et sensibiliser les
populations, les décideurs, sur les causes et les conséquences du
changement climatique et les mesures d'atténuation afin de
préserver l'environnement pour une agriculture durable. Enfin, de
rédiger ou actualiser des ouvrages collectifs sur la
biodiversité, l'agriculture et les mécanismes physiologiques
d'adaptation au changement climatique.
En choisissant ce sujet : « Activités agricoles et
perceptions des populations de Nassian face aux changements et
variabilités climatiques », le souci est de montrer la perception
des paysans et les nouvelles stratégies développées dans
leurs relations avec le milieu. Cette recherche est aussi menée dans le
but de capitaliser les connaissances des populations paysannes pour mieux
quantifier les différentes variations du climat pour une meilleure
planification des activités agricoles à partir des savoirs
traditionnels. Les réflexions et connaissances locales permettront de
proposer des mesures de renforcement des capacités des paysans face aux
perturbations climatiques.
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Cette contribution pourrait aider à la prise de
conscience des décideurs afin d'améliorer les capacités
d'adaptation des agriculteurs face aux aléas climatiques. Pour y
arriver, il est nécessaire d'améliorer la gestion des ressources,
des connaissances et compétences, et la capacité d'influencer des
politiques.
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