1.4. Problème et justification du sujet
Les changements et variabilités climatiques constituent
une menace pour l'humanité. Ainsi, ses répercussions
récurrentes se traduisent sous formes de cyclones de plus en plus
puissants, de sécheresses, d'élévation du niveau de la mer
et de la fonte des glaciers et des calottes polaires (Agossou, 2008 ; Diouf et
al., 2014). Les principales perturbations pour l'agriculture sont
l'irrégularité des pluies, l'augmentation de la
température, les sécheresses et les pénuries d'eau. Ces
aléas climatiques entrainent une baisse significative des
récoltes et une aggravation des crises alimentaires. Ces bouleversements
ont pour conséquences une insécurité alimentaire
croissante des populations, menaçant ainsi les progrès accomplis
dans la lutte contre la pauvreté (Diouf et al., 2014).
Dans ce contexte global, l'Afrique subsaharienne
apparaît comme la région du monde la plus exposée aux
changements climatiques (FAO, 2008). Cette grande vulnérabilité
est due à sa forte dépendance à l'agriculture et à
sa capacité limitée d'adaptation qui est liée au manque de
ressources et de technologies (Daouda, 2007).
Dans cet ensemble continental, la Côte d'Ivoire a connu
une baisse de la pluviométrie depuis les années 1970 (Paturel et
al.,1998 ; Brou et al., 1998; Bigot, 2004 ; Dibi Kangah, 2004 ; Bigot et al.,
2005 ; Dabissi et al., 2011 ; Boko et al., 2016 ; Dibi Kangah et al., 2016).
Cela a eu pour impact le déclin de la productivité de certaines
cultures (Dibi Kangah, 2004). Ces variations pluviométriques causent une
insatisfaction des besoins hydriques des cultures et bouleversent la vie
quotidienne des sociétés en agissant sur leurs habitudes
alimentaires (Brou et al., 2005).
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Les effets potentiels de la variabilité des pluies sur
la productivité agricole sont multiples et soulèvent des
questions importantes pour le développement durable, notamment la
disponibilité des ressources en eau et la sécurité
alimentaire (Brou, 2005 ; Kouassi et al., 2008 ; Dibi Kangah et al., 2016). Cet
impact est particulièrement important en ce sens que l'agriculture
emploi près des deux tiers de la population et constitue la principale
source de revenus (Banque Mondiale, 2015). De ce fait, le changement climatique
impose trois défis majeurs à l'agriculture Ivoirienne.
Il s'agit de nourrir une population estimée à
22.671.331 habitants (RGPH, 2014). Ceci entrainera une augmentation de la
demande en nourriture nécessitant l'exploitation de ressources
supplémentaires. En outre, de s'adapter au changement climatique. En
effet, la hausse des températures, la baisse des pluies, la
fréquence accrue des périodes de sécheresse et des
inondations, ainsi que la prolifération des parasites
consécutives au changement climatique, va entraîner une baisse et
une instabilité des rendements ainsi qu'une forte augmentation des prix
des principales cultures vivrières. Enfin, de produire tout en
réduisant les effets sur l'environnement. L'agriculture constitue la
première source mondiale d'émission de méthane et de
protoxyde d'azote, une source importante d'émission de carbone et le
principal facteur mondial de déforestation (Vandaele et al., 2010 ; De
Menech, 2013).
A Nassian comme partout en Côte d'Ivoire, les
paramètres agro-climatiques présentent des particularités
contraignantes pour l'agriculture et la foresterie, qui connaissent parfois de
graves sécheresses. Dans ce contexte déjà difficile pour
les populations locales, il nait un sentiment d'incertitude climatique qui
fragilisent les systèmes agricoles (Dibi Kangah et al., 2016). Face
à ces incertitudes du climat et à la réduction des
forêts, les paysans adoptent des stratégies conservatoires et
régulatrices (Brou et al., 2007). Si les agriculteurs se sentent
impuissants face à la récession pluviométrique, en raison
de son caractère aléatoire, leurs perceptions contribuent
à de nouvelles pratiques agricoles. Ces pratiquent sont l'utilisation de
ressources foncières autrefois délaissées, notamment les
bas-fonds et l'adoption de nouvelles variétés de culture moins
sensibles aux aléas climatiques, etc., (Brou et al., 2007).
Les nouvelles mises en valeur des ressources et les choix
techniques des agriculteurs, se fondent sur la base de leur conception et leur
expérience des phénomènes climatiques. Des recherches ont
été menées en Afrique sur la perception des populations
face aux changements et variabilités climatiques (Brou et al., 2005 ;
Aho et al., 2008 ; Agossou, 2008 ; Gnanglè et al., 2009 ; Doumbia et
al., 2013 ; Boko et al., 2016 ; Dibi Kangah et al., 2016 ; Dossou-yovo et al.,
2017).
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Ces auteurs révèlent que les paysans
perçoivent clairement les effets du changement climatique et mettent au
point différentes stratégies d'adaptation. Toutefois, ces mesures
sont parfois inefficaces et limitées parce qu'ils disposent de
très peu d'économies (Gosselin, 2008). Selon Diouf et al.,
(2014), ces agriculteurs sont vulnérables parce qu'ils dépendent
directement des pluies et des saisons. Les soutiens de la part du gouvernement
ou de leurs collectivités locales demeurent insuffisants. Aucune
alternative ne s'offre à eux. Ils ont perdu leurs repères
saisonniers, les pertes de récoltes s'accroissent et
l'insécurité alimentaire menace.
Dans cette perspective, on peut alors se demander : quel est
le niveau de perception des populations de Nassian face aux changements et
variabilités climatiques dans leurs pratiques agricoles ? De cette
question principale, il se dégage trois questions de recherche : Comment
les populations perçoivent-elles dans leurs vécus les changements
et variabilités climatiques ? Quelles sont les causes et
conséquences des changements et variabilités climatiques sur les
activités agricoles ? Comment les populations réagissent-elles
face à ce phénomène ? Ce sont là autant de
questions qui nécessitent des réponses et justifient la
nécessité de réaliser la présente recherche.
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