INTRODUCTION GENERALE
Autonomiser les femmes et promouvoir l'égalité
entre les sexes, notamment dans les pays en développement, est le
cinquième Objectif de Développement Durable. L'atteinte de cet
objectif à l'horizon 2030, n'est possible que si les hommes et les
femmes participent de manière équitable à
l'activité économique et disposent des mêmes
capacités d'entreprendre.
Dans sa vision de construire une nation démocratique et
prospère, le Burkina Faso s'est doté depuis 2016 d'un nouveau
référentiel en matière de développement
économique, le Plan National de Développement Economiques et
Social (PNDES), sur l'horizon 2016-2020. Le PNDES s'appuie sur les
enseignements tirés de la mise en oeuvre des référentiels
antérieurs, notamment les Programmes d'ajustement structurel (PAS)
1991-2000, le Cadre stratégique de lutte contre la pauvreté
(CSLP) 2000-2010 et la Stratégie de croissance
accélérée et de développement durable (SCADD)
2011-2015. Le PNDES accorde une place de premier choix à l'initiative
privée, considérée comme étant le moteur de la
création des richesses.
Cependant, bien que le pays conserve une place honorable dans
le classement Doing business sur le critère de « création
d'entreprise » (classement 2014 à 2017)1, les
inégalités au niveau genre dans l'accès aux ressources
productives et aux revenus sont encore prépondérantes. En effet,
en 2015, la proportion de femmes occupant un emploi formel n'était que
de 24%2. C'est ainsi que le PNDES ambitionne à travers son
axe 2 de réduire les inégalités de genre et promouvoir la
femme comme une actrice dynamique du développement. Il s'agira de porter
la proportion des femmes propriétaires d'entreprises parmi les
entrepreneurs de 21% en janvier 2015 à 50% d'ici décembre
2020.
Conscient que l'entrepreneuriat féminin constitue un
levier stratégique de lutte contre la pauvreté, le Burkina Faso a
dans cette dynamique, multiplié des efforts dans la mise en place de
structures d'accompagnement telles que le Centre de Formalité des
Entreprises (CEFORE), le Fonds d'Appui aux Activités
Rémunératrices des Femmes (FAARF), le Fonds d'Appui à la
Formation Professionnelle et à l'Apprentissage, le Fonds
Burkinabè de Développement Economique et Social (FBDES), le Fonds
d'Appui au Secteur Informel (FASI), l'Agence de Financement et de Promotion des
PME (AFP-PME) qui oeuvrent dans la promotion de l'initiative
féminine.
Selon le rapport de l'OCDE, mai 2004, l'entrepreneuriat
féminin constitue un pôle de création d'emplois d'une part
et d'autre part, une source d'innovation dans la gestion, la promotion et la
mise en oeuvre de politiques d'appui en faveur du secteur privé. La
littérature récente sur l'entreprenariat féminin le
considère comme une source de croissance, d'emplois et
1 Rapports Doing Business, édition 13 en 2015,
14 en 2016, 15 en 2017
2 Institut National de la Statistique et de la
Démographie, 2016
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l'entrepreneuriat féminin à Ouagadougou
d'innovation (Rachidi, 2006 au Maroc ; Guerrin, 2002 au
Sénégal ; Tchoussi, 2002 au Cameroun ; Smith-Hunter, 2013 au
Ghana; Kane, 2009 en Mauritanie).
Perçu comme facteur principal de l'autonomisation de la
femme et de réduction des inégalités, l'entreprenariat
féminin a fait l'objet de peu de recherche au niveau du Burkina Faso. En
effet, les principales études existantes sur l'entrepreneuriat montrent
essentiellement d'une part les difficultés rencontrées par les
entrepreneurs (homme et femmes) dans l'auto emploi (Etude sur la
mortalité des entreprises, CEFORE, 2015 ; Etats des lieux de
l'entrepreneuriat féminin, CCI-BF, 2017) et d'autre part les
comparaisons des caractéristiques hommes-femmes dans l'accès aux
ressources productives (Etude SIGI pays Burkina Faso, OCDE 2018, Les
déterminants du secteur informel, 2014).
A l'horizon 2020, l'Etat Burkinabè ambitionne
d'atteindre un taux d'autonomisation des femmes de 50% dans le secteur formel.
Cependant, les récentes statistiques fournies par la Chambre de Commerce
et la Maison de l'Entreprise montrent que bien que le nombre d'entreprises
formelles s'est accru, force est de reconnaitre que la part des entreprises
créées par des femmes dans le secteur formel n'a pas connu la
même évolution. En effet, sur la période 20072017, on
constate que sur un volume total de création total de 73 126 nouvelles
entreprises, moins de 20% appartiennent à des femmes soit 19,27%. Une
comparaison annuelle des taux de création montre que la proportion
d'entreprises créées par les femmes a décrue ces deux
dernières années passant de 23,7% en 2015 à 19,7% puis
à 17,9% respectivement en 2016 et 2017.
Figure 1 : Evolution des créations selon le sexe du
promoteur
Evolution des créations d'entreprises
2007-2017 au Burkina Faso
2268
3 723
579
12609
10341
4302
2 007 2 008 2 009 2 010 2 011 2 012 2 013 2 014 2 015 2 016 2
017
Homme Femme Total créations
Sources : Notre construction, Fichier National des
Entreprises, compil de la base, CEFORE
Ce recul de l'entrepreneuriat féminin dans le secteur
formel intervient dans un contexte où le Gouvernement entend accroitre
la part contributive du secteur privé dans la création des
emplois et la réduction chômage, mais aussi et surtout pour sa
capacité à innover en vue
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l'entrepreneuriat féminin à Ouagadougou
d'amorcer l'industrialisation dans les secteurs
agro-sylvo-pastorales dans la mise en oeuvre du Plan National de
Développement Economique et Social (PNDES 2016-2020). Il apparait d'ores
et déjà que la remise à niveau du dynamisme
entrepreneurial féminin s'avère nécessaire pour l'atteinte
des objectifs du PNDES, la question étant des savoir comment stimuler
cette fibre entrepreneuriale chez les femmes au Burkina Faso.
Or, connaitre les leviers qui agissent sur la décision
d'entreprendre chez les femmes s'avère être fondamental pour
conduire efficacement une politique d'accompagnement de l'initiative
privée féminine. C'est ainsi que cette étude se propose
d'identifier les facteurs qui agissent sur l'entreprenariat féminin. Les
questions de recherche sont : (i) quels sont les facteurs contextuels et
individuels qui influencent l'entreprenariat féminin à
Ouagadougou ? (ii) quelle méthode utilisée pour
appréhender la décision d'entreprendre chez les femmes ? (iii)
Quelles mesures d'accompagnement proposer au niveau de la Chambre de Commerce
pour susciter et encourager l'initiative privée féminine ? (iv)
Comment repenser les mesures actuelles d'appui à l'entrepreneuriat
féminin pour plus d'efficacité au niveau national ?
L'objectif général est de cette étude est
d'identifier les facteurs qui déterminent l'intention d'entreprendre
chez les femmes à Ouagadougou afin de mieux relancer le secteur «
création d'entreprises par les femmes ».
La démarche qui sera adoptée comporte trois
grandes articulations : une recherche documentaire, la réalisation d'une
enquête par sondage et l'estimation d'un modèle de décision
d'entreprendre.
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l'entrepreneuriat féminin à Ouagadougou
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