Annexe 14 : Transcription entretien individuel 5
Informateur : E
Date : 25 avril 2014
Durée : 1 h 04 min
Lieu : Local de l'ASBL Avenir
1. S : Alors donc E (silence) donc en fait, je voulais
savoir comment, euh : se passe ou s'est passée ton installation en
Belgique.
2. E : Hum alors bon en fait, quand je voulais venir ici
en fait, je voulais venir pour rencontrer ma famille. Enfin surtout mon
frère. Ben oui, parce que j'étais étudiante à mon
pays et puisque mon frère n'a pas encore de papiers à ce
moment-là, alors il avait déjà cinq ans qu'il
n'était pas venu. Fin, il était avec ses enfants, sa femme.
J'avais déjà ma soeur ici tu vois, j'ai beaucoup de femmes ici.
Mais surtout lui, il n'avait pas encore de papiers et puis, c'est moi (main sur
le coeur) je n'avais pas de parents. Fin mes parents ils étaient
déjà décédés. J'avais dix-huit ans quand
j'ai perdu mes parents en fait.
3. S : Donc tu étais seule au Kosovo
?
4. E : Non non, nous on vit toujours avec un
frère ou quelqu'un de la famille tu sais. Si tu n'es pas mariée,
tu ne vis pas toute seule. On avait la maison au village, y avait mon
frère qui l'habitait parce qu'il, enfin ils sont enseignant avec sa
femme. Et ben, quand j'ai perdu ma mère, y avait encore mon père
mais tout le monde était déjà marié en fait. Je
suis la dernière de la famille, mais puisque moi je faisais les
études alors je vivais avec mon père. Mais mon père il est
mort directement un an après ma mère. Fin
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c'est incroyable. C'est comme ça, alors j'suis
allée chez mon frère. Je vivais chez mon frère, je faisais
des études en même temps.
5. S : Donc, des études de math !
6. E : Oui, mais j'habitais après chez mon
frère. Fin, tu ne peux pas rester toute seule chez nous. Une fille
qu'elle n'est pas mariée, elle ne vit pas toute seule et même
quand je suis venue ici hein, j'ai vécu chez mon frère trois ans.
Je ne pouvais pas vivre toute seule si je n'étais pas mariée. Fin
j'suis musulmane, mais enfin j'suis très ouvert. C'est comme ça
on est élevé. Comme ça, ce n'est pas que moi je veux.
Quand mais tu es élevée comme ça c'est dans les coutumes,
les machins. J'suis très très ouvert, je fais ce que je veux et
tout. Je veux dire on garde toujours des trucs de chez nous quand même.
Du moins au début hein, alors j'suis y avait la fille de ma soeur qui
était venue. Elle est restée deux mois à ce
moment-là, mais parce que moi, il fallait accompagner la fille de ma
soeur.
7. S : C'est pour ça que t'es venue ?
8. E : Oui, à ce moment-là, tu venais avec
un passeport. Je fais mon passeport et c'est tout. Et je venais pour rendre
visite, accompagner ma nièce qu'elle avait seize ans. J'suis venue avec
le bus pas avec l'avion.
9. S : Avec le bus ?
10. E : Oui !
11. S : Mais y a combien d'heures, de jours
?
12. E : Deux jours et un nuit, mais y avait deux
chauffeurs quand même.
13. S : D'accord.
14. E : Et c'est comme ça, que je suis venue
en Belgique tu vois. Y avait la période des vacances hein, moi
j'étais venue pour les vacances ici en fait. Juste après, nous
on
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commence attends septembre, octobre. Je commençais
à aller à l'école au mois de octobre tu sais, pour
écouter la deuxième année.
15. S : Donc, tu étais à
l'université ?
16. E : Non, de l'école
supérieure.
17. S : De l'école supérieure
deuxième année ?
18. E : Oui.
19. S : Mais c'était en quelle année
ça ?
20. E : C'est nonante deux. Je suis venue ici le mois
d'octobre nonante deux et j'suis venue pas pour rester hein. Moi (main sur le
coeur) j'étais venue .... Et je vois parce que euh :::, mon frère
vivait là-bas en fait et moi allez. J'ai grandi avec les enfants de mon
frère parce que j'avais six ans et demi quand mon grand frère est
marié. J'étais très jeune et lui il a eu des enfants assez
vite. Ça veut dire que j'ai grandi avec les enfants de mon frère
et nous on vivait tous ensemble. Mes parents, mes frères, les soeurs qui
étaient pas mariées tout ça, on vivait ensemble.
L'âge, en fait, dans une maison mais ce n'est pas une petite maison comme
ici hein. T'as plein de, euh :::, bon y avait le salon qui est pour les
invités. Y avait la partie où l'on faisait à manger tu
vois, comme une cuisine. Mais c'était un grand espace qui faisait
à manger et qu'on mangeait aussi et le grand salon c'est juste pour les
invités. Fallait pas manger là-bas là, c'était
juste une partie. Une grande chambre six avec huit, je ne sais pas, enfin de
mètres. C'était très grand. C'est un village tu appartiens
à toi. Toi tu ne payes pas chez nous. Tu parterre et tu construis quand
tu as envie quoi. Tu payes une petite taxe maintenant la loi mais c'est
différent en fait. Mais on vivait tellement bien et heureux et on
n'avait pas arrière-pensée comme maintenant. Y avait pas
d'arrière tu vois, des trucs comme dis maintenant tu sais. On a toujours
une arrière-pensée tu vois, on pense toujours pour après.
Avant on ne pensait pas comme ça, on vivait et voilà comme
ça on ne vivait pas. Spécialement ici, faut toujours dire ouais
qu'est-ce que je dois faire demain ou après une semaine tu vois. C'est
stressant stressant stressant. La vie, elle
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était meilleure. En tout cas moi, j'étais
content. Parce que moi, je faisais ce que je voulais. Je faisais quelque chose
que j'aimais bien de faire. Mes études parce que bon, sinon on fait
c'était chez nous. C'était un truc après la
quatrième secondaire. Parce que nous, tu fais huit ans en primaire et
quatre ans, mais ça revient la même chose tu dois quand même
faire tes douze ans d'études pour aller en fac. Alors à ce
moment-là, quand tu es en quatrième année, les parents ou
les grands frères, les machins, ils disent toujours tu veux continuer
tes études ? Ça veut dire aller en fac ou ce que tu veux, comme
ici des grandes études, ou tu veux rester à la maison ? Mais tu
dois quand même faire le secondaire hein. Tu vois si tu veux plus
continuer, si tu trouves difficile et tout ça, alors tu trouves
quelqu'un tu vois, pour qui la famille comme par exemple chez les marocains qui
t'épouse, te marie et qui te fait les choses quoi. Voilà chez
nous c'était comme ça.
21. S : Ah on te trouvait ton mari ?
22. E : Non, si tu ne trouves pas ben, c'est avec tes
connaissances après voyez. Alors si tu es en dernière
année ben, voilà tu connaissais les gens, tu étais
toujours à l'école et t'avais la possibilité d'avoir
quelqu'un que tu aimes. Ben dans ma famille c'était comme
ça.
23. S : Tu pouvais choisir toi quand même
?
24. E : Oui bien sûr, moi (main sur le coeur)
j'étais libre de faire ce que je voulais mais alors si tu trouvais
quelqu'un c'était toujours un peu plus difficile. Bon parce
qu'après un an, il voulait se marier avec toi et c'était fini les
études quoi tu vois. Ça ne pouvait pas durer comme ici tu vois.
Tu es avec la personne, tu vis comme elle un an ou deux ans ou trois ans tu
vois. Tu sors avec la personne mais, tu es sûr que c'est lui, ça
marche pas comme chez nous. Ça va pas durer voilà et alors tu as
été décidée ben, après fallait que tu te
maries et ça ce n'était pas mon ma personne moi, je voulais que
l'école pour moi. Ce n'était pas important de trouver quelqu'un,
se marier, d'avoir des gosses, des machins. Pourtant j'adore les enfants,
j'adore, j'ai toujours dit d'avoir beaucoup d'enfants. Pourtant, j'en ai
quelques-uns mais bon, ça c'est la vie et quand
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j'suis venue ici voilà, je suis venue mais tout de
suite après avec tout ce qu'on n'a pas fait, d'ailleurs moi, je ne
pouvais plus retourner dans mon pays parce qu'on avait fait, tu vois des
démonstrations tous les étudiants on faisait ça en fait.
Avant la guerre pour ce qu'on n'était pas d'accord, on n'était
pas content. Ça c'était ma déclaration en fait. Quand je
suis venue ici moi, je ne suis pas partie six ans à mon pays moi hein,
je pouvais plus retourner.
25. S : Quand t'es venue en octobre tu pouvais plus
retourner ?
26. E : Si si, il fallait que je retourne après
un mois. Ça c'est tu vois, quand j'ai eu mon passeport, ça veut
dire je venais en visite. Je venais voir ma famille, mais alors fallait que je
retourne à ces délais-là. Mais j'suis pas
retournée, parce que avec tout ce que j'avais fait avant la
première année avec les jeunes et tout ça, les
démonstrations et tout ça en fait.
27. S : Démonstrations c'est manifestations
?
28. E : Oui, dans manifestations les jeunes avec les
pancartes, on veut ça, on veut ça parce que c'est la seule vie
qu'on voulait prendre au Kosovo. Mais alors c'est souvent les jeunes qui
commencent contre en fait chez nous. C'était comme ça ça a
commencé et puis l'école était fermée. Alors il
fallait aller dans y avait des gens riches comme partout qui laissent leurs
maison pour les étudiants pour aller étudier.
29. S : Ah d'accord.
30. E : Ça a duré quelques années
comme ça chez nous.
31. S : Comment ça ? C'est-à-dire que tu
pouvais aller à la fac et ensuite tu allais étudier dans la
maison ?
32. E : Ben c'était fini la fac, tout
était détruit !
33. S : Ok, tout était détruit, plus de
bâtiments ?
34.
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E : N'y avait plus rien pendant la guerre chez nous.
Où y avait tu vois, où on faisait les journaux tout ça,
tout tout ce qui est en construction, qui était connu et tout ce qui
était les bâtiments qu'on faisait des choses, tout était
fini en fait. Il fallait reconstruire en fait maisons et tout hein.
35. S : Mais toi tu l'a vu ça ?
36. E : Non, j'étais déjà venue
ici. je n'ai pas connu la guerre. C'est pour ça en fait, puisque mes
parents vivaient pas. Alors puisque l'école était fermée
un moment donné, parce qu'il disait oui ça va fermer pour un
moment ! C'était fini, c'était pour des années en fait.
C'est ça, même les enfants en primaires, en secondaire tout c'est
dans les maisons hein ils ont continué après la guerre quelques
années, y avait plus d'écoles.
37. S : D'accord. C'est les personnes riches qui
donnaient des leçons ?
38. E : Non, les profs. Non, non, c'était des
profs. Mais par exemple, c'est comme cette maison, alors les personnes ils
laissaient leur maison et faisaient des classes.
39. S : D'accord, je comprends. Donc, c'était
caché enfin c'était clandestin ?
40. E : Pour ce n'était pas tout à fait
fini l'école en fait. Pour ne pas tout à fait arrêter,
parce que ça a duré quand même des années. Moi je
n'étais pas là, mais c'est pour ça mon frère il m'a
dit après trois mois, il a dit pourquoi tu veux retourner ? Mais moi je
ne voulais pas rester ici, ça me plaisait pas du tout.
Déjà la maison qui sont collées l'un à l'autre,
mais non ce n'est pas une vie. Tu sors, tu vois que la rue et tous les
bâtiments sur les côtés et tu vois que le ciel. Je
n'étais pas habituée comme ça. Je ne sortais plus, car je
me sentais, on dirait que je ne sais pas respirer hein. C'était
très difficile au début hein, avec pas moyens et ma soeur mes
soupirs, enfin si les parents vivaient, j'suis d'accord tu pouvais y aller.
Mais on a plus de parents, tout le monde déjà marié.
Qu'est-ce que tu vas faire, qu'est-ce que tu vas faire là-bas et pis y a
la guerre et y a pas, tu peux plus y aller à l'école. C'est plus
comme avant quoi. C'est vrai, fallait beaucoup de temps que j'accepte
déjà aller me présenter ici comme
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réfugiée. Bon avant, nous on ne comprenait
pas le mot réfugiée politique hein, parce que moi j'suis
déclarée comme réfugiée politique.
41. S : D'accord, parce que ta soeur t'a dit de te
déclarer comme ça ou c'est toi qui... ?
42. E : Oh ben, mon frère, ma soeur, ils disent
il faut que tu ailles présenter comme tu vois xx xxx. Tu vois à
ce moment-là, c'était juste le château près de xx
xxx. Y avait des réfugiés en fait. Ça n'existait pas les
bâtiments tout près de coin du nord. Moi je n'ai pas connu
ça. Moi j'ai eu mes papiers après un an et demi j'ai
été reconnue
directement. Ben j'ai raconté ce que je vous dis
hein, moi je ne sais pas dire autre chose.
43. S : Mais tu l'as dit en français
?
44. E : Non, j'avais une traductrice en albanais. Ah
oui, au début moi je ne connaissais pas mais après non je te
jure. J'ai commencé à travailler et c'est venu toute seule comme
ça. Mais moi (main sur le coeur), c'est avec la télé. J'ai
regardé beaucoup la télé, mais je ne savais pas quoi faire
d'autre. J'ai nettoyé chez mon frère, j'ai nettoyé la
maison de ma soeur parce que mon frère avait une maison, ma soeur aussi
et alors comme ça j'allais chez l'un chez l'autre et j'aidais. Je
faisais la cuisine, j'adore faire la cuisine et alors avant que j'ai eu mes
papier, j'avais travaillé dans un restaurant gréco-italien.
C'était juste au coin de xx xxx.
45. S : Ah, c'est ce que tu disais une fois.
46. E : Oui oui, c'est la vérité. J'ai
fait ça un an et demi. Mais quand j'ai eu mes papiers, je pouvais
travailler. Ben j'ai eu mon travail, mais c'est comme ça que j'ai
commencé. Mais depuis que je suis en Belgique, j'ai toujours
travaillé au noir ou et après toujours déclarée tu
vois. C'est au coin chez ma soeur, y avait une connaissance et dit : oui on a
besoin de quelqu'un pour couper la salade, pour nettoyer par exemple, tu vois
les scampis. Tu vois des trucs durs tout tout. Voilà, je ne sais pas
comme on dit ça, mais bon moi j'avais compris et enlever tu vois, les
assiettes et tout ça de la machine. Bien y avait des trucs comme
ça tu vois, ce n'était pas des, c'est juste des planches que
tu
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mets dans les restaurants. C'est comme ça moi je
travaillais, c'était comme ça et voilà. Je n'avais pas
encore les papiers quand j'ai commencé à travailler comme
ça.
47. S : Et comment tu communiquais avec les gens quand
tu es arrivée ?
48. E : Et alors ils étaient gentil avec
moi.
49. S : Les Belges, ils étaient gentils
?
50. E : Oui, y avait une Algérienne et un Belge
qui faisaient la cuisine, mais le patron c'était un Italien et sa
femme c'était une Grecque ou c'est lui grec et sa femme
italienne fin. C'est pour ça qu'il faisait la
cuisine italienne, euh :::, gréco-italien s'appelait. C'est comme
ça je me suis présentée et en fait y avait beaucoup de
monde à ce moment-là. Y avait beaucoup d'albanais en fait,
justement c'est parce que la guerre venait et y avait beaucoup à ce
moment-là. Quand t'allais au commissariat, ben tout autour de toi il ne
parlait que les albanais. Alors tu ne te sentais pas toute seule, parce qui tu
dis bon j'suis pas la seule que je fais ça. Allez tu es un petit plus
assurée comme on dit et alors quand je commençais, mais moi
j'avais des larmes tu vois, j'ai des frissons quand je raconte ça, parce
que déjà quitter mes études je n'arrivais pas à
comprendre que je dois plus le faire ça, ça c'est...
51. S : Parce que tu étais jeune là, E
?
52. E : Vingt ans, pour moi (main sur le coeur)
c'était des études qui comptaient à ce moment-là. Y
avait rien d'autres dans mes yeux hein et alors cette personne fin, je la
voyais souvent. Maintenant quand j'y vais en ville, elle s'appelait xx xxx.
Elle venait de l'Albanie, la traductrice, oui et tu sais elle a tout de suite
compris. Parce qu'elle dit : on sent les gens qui sont sincères, on le
sent parce qu'ils ont, tu vois une sincérité et moi je n'arrive
pas à mentir. Y a rien à faire. Ça sort je ne sais pas, tu
vois je dis toujours si tu donnes une éducation à ton enfant
comme ça, c'est il va partir comme ça. Tu ne peux pas la faire
autrement. Moi (main sur le coeur), je donne une éducation à mes
enfants, j'suis pas stricte, je donne une bonne éducation. Qu'ils ont
une bonne base et qui sont des gens biens. Si va pas faire de grands
études et alors, s'il est bon
dans son coeur, s'il va faire du bien et s'il est bien
avec les gens, s'il respecte les gens pour moi c'est la première chose
pour moi. Pour nous c'est comme ça et moi je le sens
comme ça et c'est vrai ce que je fais avec mes
enfants. Ils ont une bonne éducation.
53. S : Mais à tes enfants, tu leurs a appris
l'albanais ?
54. E : Ils connaissent l'albanais et le
français.
55. S : Ils le parlent et l'écrivent
?
56. E : Mon grand oui. Le petit, c'est pareil en fait,
il va apprendre parce que bon, c'est tous les étrangers qui font
ça. Tu vois, qui avoir peur comme mon frère. Il a fait par
exemple les anciens comme on dit parce que mon frère il n'a pas fait des
études ni ma soeur. Ils sont venus ici, vous voyez, c'est des gens
simples.
57. S : Ils parlaient français ton frère
et ta soeur ?
58. E : Quand ils sont venus non. Ici pas du tout, ils
sont venus avant moi et je parle mieux que tout le monde dans ma famille. Fin
pas ceux qui sont nés ici je veux dire, mais ceux qui sont venus de chez
nous, ils ont tous un accent très allez assez fort comme on dit. J'suis
la seule que je parle mieux que de tout le monde et je suis la dernière
en tout cas.
59. S : Et comment tu expliques ça ?
60. E : Euh :::, souvent quand je suis avec les gens,
ils disent c'est parce que tu avais déjà une base des
études. Ils pensent enfin, j'en sais rien, tu parlais déjà
même à ma langue par exemple, si tu demandes à mon
frère de faire de belles phrases, il a difficile parce qu'il a fini que
la huitième. Il n'a fait que les premières. Il a soixante-cinq
ans mon frère.
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61. S : D'accord.
62.
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E : Il a fait les primaires et ma soeur aussi et ma soeur
mariée à dix-huit ans. Toute façon elle n'avait pas son
mot à dire ma soeur. Par exemple, les trois premiers dans ma famille on
leur a pas demandé leurs avis en fait.
63. S : Vous êtes combien de fils ?
64. E : Six, on a quatre filles et deux frères.
Un frère ici, un frère là-bas mais les trois derniers ma
soeur qui est deux ans de plus que moi, elle a fait l'anglais. Elle enseigne
l'anglais comme prof.
65. S : Ici ?
66. E : Non non, au pays. On est trois ici, moi je suis
avec les plus âgés. Mon frère âgé et ma soeur
âgée et parce qu'ils sont venus euh :::, ben, je ne sais pas y a
quarante ans. Je n'en sais rien, ils sont venus comme ça, comme tout le
monde pour avoir du travail.
67. S : Pour travailler à la mine ou quelque
chose comme ça ?
68. E : Ici non non. A ce moment-là, ce
n'était pas la mine en fait. Quand mon frère il est venu ici, il
a d'abord travaillé. Nettoyer les trains, dans les hôtels, les
machins et pis après il a commencé à travailler dans la
société ISS je ne sais pas enfin.
69. S : Ah oui (...) c'est pour faire du
ménage.
70. E : Oui.
71. E : Tu sais, lui il est devenu chef d'équipe.
Quand il est sorti, il était chef d'équipe. Mon frère
maintenant il a soixante-cinq ans. Il est pensionné en fait. Non, c'est
parce qu'on vient d'une famille, allez on aime bien avancer malgré qu'il
n'a pas fait des études. Il a bien réussi. Il a six maisons en
Belgique, ici en fait.
72. S : Six ?
73. E : Oui.
74. S : Donc, il les loue ?
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75. E : Oui.
76. S : Ah oui, c'est bien parce que ça te
fait...
77. E : Il a bien réussi, c'est ça que je
veux dire. Il a vraiment beaucoup travaillé. Il a travaillé dans
une fabrique où on fait des fromages. Moi je n'étais pas encore
là, ici hein. Ma soeur, c'est dans le nettoyage.
78. S : Mais du coup, ils parlaient bien le
français quand même ?
79. E : Ils parlent mais ils ont un fort
accent.
80. S : Ses phrases sont correctes tu veux dire
?
81. E : Oui oui, chez mon frère. Mais tu vois,
quand tu vois mon mari. Si tu parles avec mon mari, ben tu tu dis comment
ça se fait. Pourtant, on est même temps ici il sait pas parler le
français.
82. S : Et toi combien de temps à peu près
tu as mis ?
83. E : Moi à peu près deux ans, quand
j'ai commencé à travailler, dans mon travail
déclaré. Quand j'étais dans cet restaurant en fait,
j'apprenais les fourchettes, la cuillère tu vois. Le chef le grand
cuisinier comme on dit, alors il me disait, il prenait des fourchettes. Il me
disait, moi j'ai appris avec mon travail. C'est ce que je dis à tout le
monde parce que les gens ils voyaient que j'ai envie et alors, c'est parce que
s'ils te voient que tu mets ta tête comme ça et que t'as pas
envie. Il ne sait pas t'aider, moi je voulais apprendre. Alors, il disait
donne-moi une fourchette et je savais parce qu'il mettait sa fourchette.
Donne-moi une cuillère et c'est comme ça, alors moi j'arrive
enfin. J'ai une bonne mémoire aussi je suppose. Parce que je ne sais pas
alors j'étais xx xxx. C'est pour ça que je te dis : quand tu vois
ici dans la classe, quand on parle on ne s'écoute pas.
84.
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S : Hum hum oui, là tu ne t'écoutais pas
tout à l'heure par exemple. M n'a pas compris je pense, parce qu'ils ont
l'habitude de parler avec un accent comme tu dis donc, toi tu en a beaucoup
moins. Il ne t'a pas compris.
85. E : Voilà (rires), moi c'est difficile pour
faire comprendre El M.
86. S : Oui.
87. E : Moi El M., c'est il coupe les mots. Tu vois la
plupart du temps des étrangers par exemple, il coupe le mot alors c'est
comme le mien par exemple. Comme tu fais une phrase, il ne dit pas bien les
choses. Moi je comprends mon mari en français. C'est vrai quand il parle
avec quelqu'un, ils ont difficile à rentrer donc ça fait dix-huit
ans qu'il est ici. Moi j'suis venue avant lui en fait, lui était en
Allemagne.
88. S : Mais toi comment tu donc, tu as appris le
français par ton travail et ensuite en cours ?
89. E : Jamais, j'suis jamais. c'est la
première année que je viens à l'école en
français. J'ai travaillé toute ma vie. Moi j'ai travaillé
et pis un an avant toi j'ai commencé. Je
n'avais pas encore mon permis de travail à ce
moment-là, car je n'étais pas mariée. J'étais
jeune, alors il fallait que tu commandes le permis de travail.
90. S : D'accord.
91. E : Parce que je me suis inscrite ici, ben bon tu
dois t'inscrire oui. Moi c'est à Jette de toute ma vie je suis
présentée à Jette et, j'ai jamais changé de commune
jamais jamais et, c'est ça que j'ai tout là en fait et, j'ai
été fort aidée C'est ça en fait, j'suis tellement
content pour ce qu'ils ont fait pour moi. Moi j'étais aidée mais
déjà la commune. Ici moi j'ai été aidée, je
trouve on m'a aidée. J'étais allez appuyée parce que
chaque fois qu'on allait quelque part ou parce que j'étais tellement
honnête, il voulait bien m'aider. Quand je me suis inscrit à CPAS,
tu sais je me suis présentée. Il faut attendre tu sais, ton
démarche puis j'ai été convoquée trois fois au
commissariat.
92. S : Donc, tu y allais avec ta traductrice ou tu y
allais toute seule ?
93.
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E : J'allais avec ma soeur.
94. S : Ah, donc ta soeur traduisait ?
95. E : Oui non. Au commissariat, t'avais toujours une
traductrice hein. Chaque fois que tu étais convoquée et moi c'est
trois fois, j'étais convoquée la première fois et pis il
t'appelle après quelques temps. J'ai tout dans une papier hein, je
voulais la trouver mais je n'arrivais pas. Si un jour je les trouve, je
t'apporterai enfin en quelques mots ce n'est pas toute mon histoire, parce que
tout ce que je vous dis, c'est comme quoi toi par exemple tu vas
écouter, tu vas faire une résumé.
96. S : Oui il faut que je l'écrive. Non je vais
tout écrire, il faut tout écrire et après...
97. E : Oui mais voilà. Mais alors, tu fais une
résumé. Ce qui est euh :::, ce que moi je fais. Oui pour toi ce
qui est bien pour toi pour ton travail. Alors c'est comme ça, tu
étais convoquée encore une fois, mais alors moi j'étais en
larmes à ce moment-là hein je pleurais.
98. S : T'avais peur ?
99. E : Non, j'étais triste pourquoi je dois
rester ici.
100. S : Ah tu ne voulais pas rester en Belgique
?
101. E : Non n'y avait rien à faire. J'allais
présenter et j'étais encore convoquée et je n'arrivais pas
à gérer pour rester ici. Je ne sais pas au début, c'est
vrai difficile comme moi je dis maintenant. La nouvelle I qu'est venue ici
ça fait cinq mois, quand tu viens pour la première fois c'est
très très difficile. Malgré que j'avais toute ma famille
ici. J'ai mes cousins, mes tantes, mes oncles, mes....
102. S : Mais qu'est ce qui te manquait ?
103. E : Je ne sais pas, je ne sais pas. T'as la
nostalgie. Ça vient toute seule, je ne sais pas expliquer. Je vous
assure, mais tu es fort nostalgique. Tu vois, tu penses qu'est-ce que t'aurais
pu faire au début parce que quand tu ne travailles pas, tu
fais
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rien. Alors tu penses à des tas de choses en fait.
Tu penses vraiment qu'à ça et ça ne collait pas avec ce
que je voulais faire moi et, bon c'est comme ça et alors pour la
troisième fois, j'étais convoquée. Mais à l'endroit
pour et j'avais fait tout en albanais. Tout écrit mon histoire, alors il
fallait se présenter et tout traduire. Y avait un traducteur Albanais,
un vrai pas celui qui traduire au commissariat.
104. S : D'accord un qui était
assermenté.
105. E : Mais avec une cachette, il est connu ici en
Belgique et le machin et c'était une connaissance. Quelqu'un que nous on
connaissait en fait, qui fait beaucoup pour les Albanais ici et alors quand
j'ai présenté mon travail moi j'ai écrit tout en albanais
j'aime bien écrire.
106. S : L'alphabet c'est comment, c'est cyrillique
ton alphabet ?
107. E : C'est comme ici, c'est comme vous je pense.
Mais on a trente-six, ici c'est vingt-six. On a dix lettres en plus
voilà et j'avais écrit tout en albanais. Tout ce que j'avais dit,
tout mon histoire et lui il a traduit quand je présentais au grand truc
pour la dernière fois. Fin qui décide pour moi ce qui vont faire
en fait et là, j'avais un autre traducteur parce que c'est ailleurs.
C'est pas dans le château, mais c'était je ne sais plus où
je suis allée, vous savez avant, ça n'existait pas tout
çà. C'était comme une maison en fait, tu rentrais, y avait
rien marqué. T'avais que l'adresse et c'est à toi maintenant. Tu
vas en ville, tout est là pour les étrangers. Avant ça
n'existait pas tout ça en fait, parce qu'il n'y avait pas autant
d'étrangers quoi. Maintenant, ils viennent de toutes les pays.
Maintenant ils viennent de Roumanie, machin, mais en fait c'est plein. C'est
plein à Jette, tu entends que ça t'entendais pas.
108. S : Qu'est-ce que tu entends ?
109. E : Maintenant que des Polonais, parce qu'ils
parlent comme les Serbes alors moi je choisir la langue qui parle, encore je ne
connais pas tous les mots. C'est des langues slaves, ils parlent comme les
Russes, les Serbes tout ça.
110.
110
S : Albanie ce n'est pas slave ?
111. E : Albanais c'est une langue à part. C'est
ancien, je ne sais pas si tu connais l'histoire les Balkans. Avant c'est
Ilyria, ça c'est la première origine Albanais. Y avait xx xxx...
tu ne connais pas l'histoire ? Moi (main sur le coeur) je connais l'histoire de
mon pays en fait, je connais par coeur et c'est xx xxx.... C'est la Turquie
maintenant, avant c'était des sultans machin, il a pris la partie mais
en fait ici, on faisait des colonies comme maintenant la Belgique, machin, tu
vois, il prenait un pays, c'était une colonie mais à ce
moment-là on ne disait pas une colonie. On ne connaissait pas ce
mot-là.
112. S : On ne disait pas colonie ?
113. E : Non, ce n'était pas colonie à ce
moment-là, alors euh :::, y avait beaucoup plus des catholiques
Albanais, mais puisqu'en fait on t'obligeait à devenir musulman, parce
que les turcs, les sultans c'étaient des musulmans et c'est comme
ça que eux prennent des jolies filles et alors, ils étaient dans
l'harem des sultans comme on dit. Alors cette femme, elle était à
mon avis, elle était très belle puisque c'est le sultan qui l'a
pris. Ben, elle a eu un guerrier, nous on appelle des guerriers ici aussi. Hein
non, c'est des guerriers qui plus se battre tu vois xx xxx... C'était un
Albanais, mais puisqu'elle était dans l'harem, on a jamais connu son
père, mais c'est lui qui est devenu très fort xx xxx. Comment
c'est qu'on dit ça ?
114. S : Sa statue ?
115. E : Oui ben bien sûr, c'était un
Albanais, sa mère venait de chez nous mais était dans l'harem du
sultan.
116. S : Ok, il est métis.
117. E : En fait c'est-à-dire, il est
élevé dans une richesse comme on dit. C'est lui en fait à
ce moment-là et à ce moment-là, y avait
l'impératrice xx xxx. Y a beaucoup de
111
filles maintenant en Albanie. Oui ma traductrice, elle
s'appelle xx xxx, mais à ce moment-là, ça existait en
Balkans Ilyria ouais.
118. S : C'est joli Ilyria !
119. E : C'est une perle d'orient. C'était une
reine comme on dit et c'était une femme et puisque c'était une
femme, ça n'a pas duré longtemps évidement. C'était
comme ça. Ça doit ici aussi, y a la femme, y avait pas beaucoup
mais bon, c'était une femme. Tout ce que je sais vous dire et c'est
comme ça en fait. Bon alors, c'était fini cette partie-là
parce qu'elle avait la plus grande partie des Balkans Ilyria.
120. S : Donc l'Albanais, euh :::, c'est une langue qui
a du turc aussi ou pas ?
121. E : Non, oui, peut-être quelques mots parce
qu'ils sont restés. Parce que tu vois, quand un pays comme ici, elle
devient, je veux dire afin qu'elle est occupée du autre pays comme
avant. c'est lui qui était plus fort et ben tu prenais les autres. Ben y
a des mots qui restent c'est obligé. Les vieux y vont toujours
l'utiliser, mais moi par exemple je n'utilise pas. Moi je vais à
l'école quoi, c'est les vieux qui utilisaient et c'est ça en
fait. Y a beaucoup moins de catholiques chez moi et des orthodoxes parce qu'on
les a obligés. Mais si tu dis ça à A, il est furieux hein.
Je lui ai dit hein, y va jamais accepter. J'ai dit A c'est toi maintenant, ce
n'est pas maintenant, c'était avant parce qu'y l'histoire on ne peut pas
mentir. Y a des films tiens qu'on a fait, y a des choses qui est, tu sais des
Albanais qui voulaient le drapeau à ce moment-là, on ne voulait
pas laisser le drapeau des albanais rouge et avec ce que je t'ai dit
(silence)...
122. S : Avec un oiseau ?
123. E : Oui, avec un oiseau avec un bec comme ça
et il est rouge et au milieu noir avec un bec comme ça. Ce n'est pas un
corbeau c'est pffff comment on dit en français, nous ont dit *xx xxx*
mais comment on dit en français ? Je ne sais pas qu'elle est traduire
pour nous. C'est important quand on faisait des guerres et tout ça
contre la Turquie et tout ça des gens de ::: du :::. Albanie ils sont
allés aux pieds jusqu'à l'Angleterre parce qu'à ce
moment-là y avait des tables, des grands qui faisaient entre
112
douze et treize personnes. Ils sont allés vraiment
demander la libération et être libres pour mettre le drapeau. Ils
pouvaient même ne pas mettre le drapeau.
124. S : Mais maintenant ce drapeau il est toujours le
même ?
125. E : Oui si y a des gens qui se sont tués
juste pour avoir le droit de mettre ces drapeaux. Mais avant c'était
comme ça, je ne comprends pas pourquoi ils ont fait tout ça. Mais
avant la liberté comme on dit, c'est pour ça maintenant y a plus
de musulmans. Mais ça n'a rien à voir par exemple comme les
Marocains qui font ici.
126. S : Tu n'as pas le voile toi par exemple
?
127. E : Ben je n'ai pas la voile. Je ne sais pas parce
qu'ils disent oui c'est obligé. Ça c'est obligé, mais non
ce n'est pas obligé. Si on met quelque chose dans le coran dans une
livre c'est ta volonté. On peut pas dire que t'es pas obligée, tu
ne fais pas ça t'es pas un bon musulman. Mais tout ce qu'il y a dans les
trucs catholiques, les gens ils vont ne jamais faire tout ça. Alors tu
n'es pas un catholique, on ne peut pas dire ça, on ne peut pas
influencer quelqu'un pour être un bon. D'abord mon coeur et la
difficulté avec les locataires c'est ça en fait, parce que
j'avais eu une en fait qui faisait ça. T'es pas une musulmane, t'es pas
une bonne musulmane. C'était à chaque fois qu'on se rencontrait,
c'est la même chose. Ouais tu ne fais pas le ramadan, tu ne fais pas si,
tu ne fais pas ça. Oui j'ai dit, j'ai eu bon coeur, j'aime tout le
monde. Pour moi, c'est ça pour moi, ça n'a pas d'importance
quelle religion tu as. Comme toi, tu es qu'est ce tu fais, est ce que tu fais
du bien, est-ce que vous êtes gentils, parce que tu viens dans ma rue moi
je ne sais pas marcher hein. Je dois m'arrêter avec tout le monde et je
m'arrête.
128. S : Avec tes voisins ?
129. E : Toute la rue.
130. S : Pour, pour dire bonjour ?
131. E : Je :::, oui. Il faut que je dise un mot, parce
qu'ils ont l'habitude. Moi j'ai des... Je ne sais pas, c'est c'est c'est moi et
ça me dérange pas du tout. Parce que dire un mot gentil à
quelqu'un ou des personnes âgées et ça fait plaisir. Ils
sont gentils et tout ça et je vais jamais dire oh je n'ai pas le temps,
je n'ai pas le temps. Je dis jamais ça même si je suis
allée tout juste, je ne vais pas à dire à une personne
âgée je n'ai pas le temps et je ne peux pas parler. Je ne dis
jamais ça et c'est ça que mes enfants apprennent. Ils vont jamais
dans la rue, ils vont jamais parler méchamment parce que si mon enfant
il parle méchamment au prof ou dans la rue à quelqu'un je serais
malheureuse, je serais malheureuse pour ça et ils le savent. Des bonnes
manières de vie ça fait beaucoup et c'est comme ça en
fait, je j'arrive à obtenir ce que je veux
132. S : De tes enfants ou de :::....
133. E : Non de tout de, tout le monde de la vie, parce
que quand je commençais au mois de novembre nonante trois à
travailler pour ma première patronne en déclarée comme on
dit, parce que moi je me suis inscrite à la CPAS de Jette y avait pas
beaucoup de gens qui demandaient la CPAS hein et alors je dis : ah non moi
madame je ne veux pas de CPAS. J'ai dit pourquoi ? Parce que j'avais le droit
de chez ma soeur ou chez mon frère avant six cent francs belges. C'est
plus, c'était comme je me souviens pas des francs belges en fait.
Maintenant te vois parce que t'avais le logement, mais ça c'est quelque
chose pour toi tu sais. Pour t'habiller pour x xxx.
134. S : Ça fait quoi, ça fait
soixante-dix, quatre-vingts euros peut-être ?
135. E : Non non plus.
136. S : Six cents francs belges c'était plus
?
137. E : Non non, ce n'est pas six cents francs belges
oh ::: non ce n'était pas six cents francs belges. C'est comme si je
disais maintenant trois cents euros.
138. S : Ah oui d'accord.
113
139. E : Oui oui, c'est trois cents euros
maintenant.
140.
114
S : D'accord c'est bien.
141. E : Si.
142. S : C'était bien à cette
époque peut-être ?
143. E : Mais dis moi je n'ai pas été
payée à vingt et un ans hein !
144. S : Trois cents euros c'est pour être chez
ton frère ou chez ta soeur ?
145. E : Oui, mais je m'inscrivais parce que tu dois
avoir une adresse. Alors moi je m'inscrivais là, c'était
très très bien, c'était comme ça. Elle m'inscrit
madame je dis moi je ne veux pas avoir la CPAS. J'ai à manger tout
ça, je veux travailler, moi je veux travailler. Attends, tu n'as pas
encore les papiers tout ça. Oui je le savais, c'est comme ça.
C'est pour ça que je travaillais à côté, mais
ça je n'avais pas dit en fait. On ne veut pas que je travaille au noir,
ça c'est quelque chose xx xxx et alors au coin où moi je
travaillais y avait le CPAS, ici rue l'Église où ma soeur elle
habitait ici la CPAS. Ma soeur, elle habitait au milieu du restaurant la CPAS
et au coin de la rue y avait une société de sérigraphie et
machin, tu vois c'était des bureaux et alors en passant par-là
moi, tu sais le patron il était là avec une personne vieille
qu'elle habitait à côté du.... Enfin face à face du
travail que moi j'avais eu et alors même moi cette personne elle
était toujours tu vois près de la fenêtre la fenêtre
ici, elle était toujours là avec son chien et moi je
m'arrêtais et je parlais avec elle avec les mains.
146. S : Ah oui tu ne savais pas encore
bien.....
147. E : Non.
148. S : Tu ne savais pas ?
149. E : Et alors tu sais et c'est comme ça que
je rentrais. En voilà parce que le parc euh :::, roi Baudoin
c'était tout près de ma soeur quoi. Tu sais ma soeur, elle habite
ici. Mon frère pas loin, alors le parc, il est au milieu. Je vais chez
mon frère, j'allais en xx
115
xxx. Je ne savais pas passer ma journée autrement,
j'étais à la maison et pis de ma soeur j'allais toujours avec les
enfants.
150. S : Tu parlais toujours avec les gens ?
151. E : Avec les mains.
152. S : Avec les mains, comment tu... ?
153. E : Comme ça, je ne sais pas. Quand je
voulais quelque chose, ils arrivaient à me comprendre. Je ne sais pas,
je sais ne pas expliquer. Mais y y, j'avais besoin de parler moi. Je ne sais
pas rester sans parler, c'est ma nature, je dois parler avec les gens et c'est
comme ça que je suis rentrée en contact et elle sort la personne
âgée et elle parle avec la patronne de la société
comme on dit et fin parce qu'ils étaient avec son mari et elle savait
après ma soeur, la personne âgée que moi j'avais besoin de
travail et raconte je ne sais pas. Elle raconte mon histoire à ses
patrons. Eux, ils partaient et moi c'était à six heures je
prenais les enfants de ma soeur. J'avais un peu, ben je sortais je savais pas
quoi faire et alors elle a dit quelque chose, alors m'a dit : demain toc toc
toc ta soeur venir ici, elle me dit chez elle, chez la vieille hein et alors
c'est ce qu'on a fait avec ma soeur et j'suis allée chez ma soeur.
Comprenez parce que déjà, elle a presque quarante ans et lui a
racontée comme ça, comme ça elle peut commencer
malgré qu'elle n'a pas son permis. Pour moi, je n'avais pas mon permis
de travail et je n'avais pas encore les papiers tiens, parce que j'avais
déjà donné tous les papiers, il fallait
attendre.
154. S : Oui oui.
155. E : Et alors, elle a dit oui. Tu sais ce qu'on va
faire ? Alors avec la personne âgée, avec ma soeur en rendant les
clés, on dit notre xx xxx.... Mon histoire comme on dit et la patronne a
bien écouté, parce qu'elle avait une dame, c'était des
Belges. Avant y y avait pas beaucoup d'étrangers qui qui nettoyaient et
alors elle dit la femme, elle a accouché. La fille qui travaillait pour
elle, elle avait eu le troisième enfant. Elle avait personne pour
nettoyer dans les bureaux, elle voulait bien que moi je commence.
156.
116
S : D'accord.
157. E : C'est comme ça que j'ai
commencé.
158. S : C'est une chance dis donc !
159. E : Et alors ben, c'était un peu avec la
CPAS aussi mais c'est ça en fait, moi c'est, c'est l'envie. Tu dois
montrer que t'as envie de faire quelque chose, sinon ça ne marchera
jamais et c'est comme ça que ça a commencé mon histoire.
Ben moi (main sur le coeur), je dis que je peux écrire un livre à
mon histoire. Tous les parcours que j'ai fait ici en Belgique si si si et je
saurais faire étapes par étapes oh.
160. S : Ah oui tu vas l'écrire, tu vas
écrire ?
161. E : Je saurais faire ça parce que c'est vrai
y a personne qui pense beaucoup comme moi en fait et voilà.
162. S : Tu sens que tu as besoin d'écrire
ça ?
163. E : Je ne sais pas, peut-être. J'adore
écrire moi. Moi, j'écris tout et il faut que ça
écrive bien en fait.
164. S : T'écris en quoi, en français ou
en albanais ?
165. S : Les mots en français et
l'écriture en albanais. Quand je fais résumer pour les enfants du
livre c'est comme ça et alors je traduis.
166. S : Alors attends les mots c'est je ne comprends
pas les mots.
167. E : Les mots par exemple, tu me dis : E est ce que
tu veux venir chez moi ? Moi, j'écris les mots en français mais
l'écriture en albanais. Quand je vous dis, quand je vous dis je peux
écrire à ma façon ? Je vous demande souvent.
168. S : Tu veux dire la phonétique ?
169.
117
E : Oui, à ma façon, ça veut dire tu
vas comprendre que c'est en français mais c'est vrai, ce n'est pas
difficile à lire toujours mais le sens c'est en albanais, tu vois
?
170. S : Ok d'accord.
171. E : Je veux venir chez toi par exemple.
172. S : Tu peux l'écrire si tu veux, je ne sais
pas s'il marche bien, mais essaye.
173. E : C'est pour t'expliquer. Voilà comme
ça tu vas comprendre ce que je veux dire, sinon tu ne vas jamais
comprendre. Je veux venir ça s'écrit tout ce que tu entends je
veux venir chez ça se dit chez toi tu vas comprendre ce que je veux
dire.
174. S : Je veux venir chez toi, ok.
175. E : Je veux venir mais tu vois, le mot ça
mit en français mais moi j'ai écrit comme j'entends. Tout ce
que j'entends, je veux venir chez toi, j'écris tout ce que je n'entends
pas le français ça ce n'est pas le français, ça
c'est à ma façon.
176. S : Et quand tu as humm, est ce que tu penses
d'abord, non je ne vais pas demander comme ça. Comment tu es bilingue
? tu comprends le mot bilingue, E ?
177. E : Oui, c'est tu parles deux langues ou trois ou
quatre enfin.
178. S : Comment tu..... ?
179. E : Comment j'suis devenue, comment je me
sens.
180. S : Voilà, comment tu te sens bilingue, est
ce que tu es bilingue et comment tu vois que t'es bilingue ?
181. E : J'adore la langue française, je
l'adore.
182. S : Et pourtant, tu ne voulais pas rester ici
?
183. E : Mais au début, c'est ce que je me dis
c'est quelque chose que tu ne comprends pas ce qui t'arrive non plus. La
moitié des gens, ils n'arrivent pas à
118
expliquer par exemple et ils ne veulent pas et ils
tiennent. Mais moi pourquoi je dois tenir ça pour moi. Bin ce n'est pas
grave ce que je raconte. En fait, que t'as pas envie de rester ici parce que
parce que parce que j'étais jamais sortie de mon pays. Je n'étais
jamais allée ailleurs et moi je voulais finir mes études. Je
voulais travailler avec les enfants. Comme je me sens bilingue, je me sens
très bien. Je te dis, j'adore la langue française. Je connais
tous les artistes, toutes les chansons françaises, presque, pas les
nouvelles. J'adore Hélène Ségara, j'adore Garou, tous les
chanteurs, mais tu vois la musique populaire comme ça qu'on comprend ce
qu'on raconte.
184. S : Et ça te touche le français
autant que l'albanais ?
185. E : Oui, non parce que le français, tu
vois y a des chansons d'amour, tu tombes parterre.
186. S : Ça te touche vraiment ?
187. E : Oui oui, tu vois, je suis faux romantique, au
fond j'suis très romantique. Fin mon mariage, ce n'est pas romantique du
tout. Ça n'a rien à voir mais bon on n'a pas toujours ce qu'on
veut non plus. Hein, ne faut pas raconter. Tu vois, on ne peut pas tout avoir
dans la vie, parce que j'ai tout à fait. Tu vois, c'est un Albanais
comme moi mais il a tout à fait une autre éducation, une autre,
le caractère ça n'a rien à voir. On est tous
différents en fait, je ne sais pas, on dirait qu'il est
élevé ce n'est pas où et moi je ne sais pas
où.
188. S : Donc, tu l'as pas connu avant, tu l'as connu
ici ?
189. E : Non non, moi je l'ai connu ici. Il était
déjà en Allemagne lui et une connaissance, bon voilà, il
m'a dit : voilà parce que mon frère, il voulait quelqu'un qui
vient de chez nous, enfin c'est le rituel comme on dit.
190. S : D'accord, mais toi tu aurais
préféré un Belge ou .... ?
191. E : Mais oui, mais à ce moment-là,
à ce moment-là c'était, mais je ne dis pas à mon
fils que tu ne peux pas voir un Belge. Hein par exemple, la
génération
119
maintenant, c'est que nous notre génération
est venue de notre pays. C'est un peu plus difficile parce que ton
éducation, il est comme ça. Mais tu viens chez moi autant que tu
veux, tu m'entends jamais dire à mon fils tu dois prendre une Albanaise
y a rien à faire non je dis jamais.
192. S : Ton mari peut-être oui ?
193. E : Non, tu vois une bonne éducation, ce
n'est pas imposer les choses aux gosses. Il faut parler avec eux c'est tout.
Moi je n'impose pas à mon fils, je ne voudrais pas une noire mais bon
une négresse ça va encore.
194. S : Ouais, c'est compliqué ça.
Après ouais chacun fait comme il veut, mais bon.
195. E : Là c'est une grande différence
comme on dit, je ne sais pas comment ça va être accepté par
tout le monde, de machin sinon je préfère qu'il a une Belge par
exemple que une noire ou une Marocaine.
196. S : C'est par rapport xx xxx ?
197. E : Non, le genre qui t'impose et tu te dis c'est
comme ça pour moi non je n'aime pas. On vient par exemple dans un
pays, c'est ce que je dis à ma commune en fait. C'est pour ça en
fait, tout le monde me connaissait à la commune de Jette. Tout le monde
me connaissait et j'étais toujours servie comme il faut. On m'a
aidée pour les papiers et les papiers c'est les papiers ! Pour moi, ils
faisaient tout mais tout parce que les enfants de mon frère et de ma
soeur à ce moment-là ils n'étaient pas forts et puis ils
étaient encore en primaire et c'était pour les papiers à
ce moment-là. Ce n'était pas et ma soeur et mon frère ils
savaient pas écrire et rien du tout.
198. S : Donc c'est toi qui les aidais pour les papiers
non, on t'aidait ?
199. E : On aidait tout tout il faisait
tout.
200. S : Parce qu'à la maison vous parlez quelle
langue ?
201.
120
E : Moi je parlais le français enfin, fin
ça c'est mon mari il est contre.
202. S : Tu parles français avec tes enfants
?
203. E : J'ai plus facile à parler en
français tu veux vas pas me croire.
204. S : Ah bon ?
205. E : Oui.
206. S : Mais pour parler de toi ou pour...
?
207. E : Pour tout, c'est bizarre xx xxx non, mais les
mots viennent plus facilement, tu vois quand tu veux expliquer un truc, machin,
je ne sais pas moi le français vient directement et je va chercher
maintenant pour l'albanais.
208. S : Et tu rêves en albanais ?
209. E : Oui mais je ne sais pas, c'est des choses comme
elle dit ma soeur qui est tellement avancée plus vite que nous, je ne
sais pas, je ne sais pas.
210. S : Donc tu rêves en français
peut-être parfois ?
211. E : J'aime tout moi. J'adore le français je
vous dis et tout le monde le sais comme il dit mon frère. Enfin ce n'est
pas méchant qu'y dit, t'es devenue comme les Belges.
212. S : Qu'est- ce qu'il veut dire ?
213. E : Il veut dire parce que bon je fais tous les
choses comme ici, tout, enfin je me suis adaptée, j'ai difficile et
peut-être c'est ça en fait j'ai eu très difficile mais
après c'est allé toute seule après j'ai trouvé mon
rythme hein.
214. S : Et ta culture tu la gardes, je veux dire tu
n'as pas... ?
215.
121
E : Je fais tout comme en mon pays, mais moi je ne mens
jamais. C'est pour ça, ils savent même je dis des dizaines de fois
que je m'exprime mal ici et ils disent tu viens de Russie.
216. S : Pourquoi ils disent ça ?
217. E : J'en sais rien, je sais pas peut-être
à la façon de je fais, rien de bizarre quand même
bon.
218. S : Ici ils t'ont dit ça ?
219. E : Oui oui, Mohamed la semaine passée, il
savait même pas que j'étais musulmane. Vous voyez, c'est comme je
vous dis, ils ne sont pas à l'écoute. Tu peux raconter ce que tu
veux, je ne sais pas s'ils restent euh ::: un mot dans leur tête et
pourtant je me suis baissée à leur niveau et je dis jamais
quelque chose. Vous voyez bien je me montre jamais et quand tu veux donner la
parole, tu donnes aux autres et je donne même quand on est en groupe. Je
prends jamais la parole, je dis tu veux le faire, fais-le alors, fais-le
malgré que je sais le faire. Mais enfin je respecte l'autre
personne.
220. S : Et tu penses que tu as plus d'affinité
avec quelques-uns dans le groupe plus de liens avec d'autre que
.....
221. E : Je parle avec tout le monde, je ne fais pas la
différence depuis le début, tu vois je me mets avec J. Je parle
avec A, je parle mais quand tu es avec le groupe par exemple, je sais que quand
t'es avec S et F tu n'as pas un mot à dire ouais. Tu veux faire une
histoire par exemple, tu dis ce que tu veux ils vont dirent ce qu'ils
veulent.
222. S : D'accord, elles ne vont pas mettre tes
idées.
223. E : Non malgré, par exemple quand je dis une
phrase, je le dis correct. Ça sert à rien, elle dit non non non,
ce n'est pas comme ça, il faut le dire comme ça.
224. S : Et pourquoi à ton avis ?
225.
122
E : Je n'en sais rien, je ne sais pas. Mais moi je ne
discute pas pour ça, moi je ne veux pas être remarquée et
du coup et après comme pour s'habiller, tu vois elles se montrent et
alors tu vois ils sont tous y allés.
226. S : Ils ont peur non ?
227. E : Je ne sais pas. Ils sont au repas avec elle et
je lui ai dit l'autre fois à S, tu vois aujourd'hui mais quand elle
vient, elle se met avec son truc là. Elle s'assit mais dis : on n'est
pas prisonnier ici, hein on est quand même, y a personne qui va nous tuer
quand même ici. On vient moi je me fais plaisir à venir ici.
Pourquoi, pourquoi je vais être stressée quand je viens ici ? Non
pas du tout .
228. S : Et toi justement, pourquoi tu viens E
?
229. E : Je viens pour apprendre à
écrire.
230. S : Et pourquoi, parce que c'est vrai que tu le dis
tout le temps pourquoi écrire ?
231. E : Parce que j'ai dit, j'ai un niveau. Je ne dis
pas que je parle parfaitement, je voulais avoir l'écriture aussi un
petit peu. Puisque bon, je sais lire et je sais écrire mais j'ai jamais
eu le temps d'apprendre à écrire le français. Parce que
j'ai toujours travaillé et ce que je faisais on ne me demandait pas
d'écrire, on m'a jamais demandée c'est ça en fait. J'ai
appris avec les gens, j'étais tout le temps corrigée parce qu'ils
savaient que j'aime bien. C'était tout le temps mes clientes. Je
travaillais neuf ans dans la société que je te dis. Que bon je
commençais, je travaillais six mois. Je n'avais pas encore mon permis
hein et je travaillais déjà six mois hein et j'étais
payée et tout et alors elle a demandé un papier au CPAS. Parce
que je lui dis : moi j'suis inscrit à la CPAS, moi je ne veux pas
travailler au noir donc en fait c'était comme ça. Je n'ai jamais
travaillé au noir et c'est comme ça que ça marche dans la
vie hein.
232. S : Oui. Quand tu as décidé
?
233. E : Parce que travailler au noir tu n'as rien au
fond.
234.
123
S : Ben disons que tu ne cotises pas pour la
retraite.
235. E : xx xxx L'argent que tu gagnes, je vous assure,
au noir tu ne le vois pas. Ils partent, tu les gaspilles et tu ne vois pas
et tu fais rien avec. Mais les gens n'y se rendent pas compte.
236. S : Hum
237. E : Et je sais, parce que je vécu tout hein.
J'ai fait quatre boulots la journée moi mais que j'étais
déclarée hein. Je peux le dire hein fin, tu ne vas pas le dire xx
xxx. Je faisais cinq heures, j'avais deux jours sept heures et trois jours cinq
heures fin dans la semaine hein et c'est elle qui a fait les démarches
pour mon permis après hein, ma patronne.
238. S : D'accord.
239. E : J'étais tellement aimée, j'allais
chez eux, j'allais chez les enfants, j'allais chez la fille, chez les
garçons. Je connaissais tous les autres les enfants, les petits enfants
de ma patronne. Je ne sais pas t'expliquer, j'étais tellement bien
accueillie que je ne dis jamais assez merci et ils ont fait tout pour moi hein.
Moi je te dis tout mais bon et c'est ça que je dis et alors quand je dis
à la dame, Madame D car je n'oublie jamais son nom. Elle est encore
vivante, elle habite tout près de la police de Jette même, avant
même, après que je la voyais, elle me disait toujours bonjour.
Elle est retraitée maintenant.
240. S : Et eux, ils te disent maintenant, quand tu les
vois oh lala votre français E ?
241. E : Oui oui, je suis toujours et je reçois
toujours des bons compliments et ma patronne elle est
décédée à soixante-deux ans.
242. S : Oh ! Elle est décédée
jeune !
243. E : Elle est décédée
très jeune. Enfin son mari vit encore et je vois les enfants, les petits
enfants qui ont grandi et qui ont fait des études et j'ai fait du
baby-sitting
pour eux. J'ai fait tout en Belgique moi, du nettoyage du
oh ::: je ne sais pas, repasser chez les gens. Tout tout ce qui rentre euh :::
la cuisine pour des personnes âgées, tout. Je ne sais pas ce qui y
a que je n'ai pas fait en Belgique. C'est pour ça je te dis que je vais
faire un livre.
244. S : Mais après quand tu sauras écrire
euh :::
245. E : Si j'écris en albanais, y a pas de mal
à ça. Moi (main sur le coeur) je t'ai dit tout est dans ma
tête et je n'oublie jamais rien. J'ai tout çà dans ma
tête en fait depuis le début. Quand je suis venue, comme quand je
suis descendu du bus euh ::: à la place xx xxx. Tu vois on fait toujours
le marché dans cette place-là hein. J'oublie jamais hein et quand
j'ai descendu xx xxx tout le tour y avait que des maisons et pour aller chez
mon frère toutes les rues se ressemblaient pour moi et tout que les rues
et les maisons xx xxx. Et je disais, c'est des maisons vieilles, moches,
j'aimais pas du tout les maisons. Nous on avait des maisons au pays c'est comme
une villa ici chez nous c'est la maison.
246. S: D'accord ah oui.
247. E : Parce que si tu construis depuis le
début toi, tu fais les plans comme tu veux, machin. Tu fais des chambres
comme tu veux, deux étages trois étages mais tu fais comme toi tu
veux, y a pas de maisons chez nous comme ça.
248. S : Mais ta maison, elle est toujours au pays
?
249. E : Elle était détruite en fait et on
la reconstruite après la guerre.
250. S : D'accord.
251. E : Mais dans ma famille non, elle existe plus dans
mon côté, parce que mon frère il est venu ici et l'autre il
est parti dans une grande ville. Parce qu'il travaille avec sa femme
maintenant, tu vois ils ont ils ont un château !
124
252. S : Un château, ah !
253.
125
E : Euh ::: oui, c'est comme un château, parce
qu'il y a six chambres à coucher. Hein je sais pas comment
décrire, une maison de deux étages avec six chambres à
coucher et y a des salles de bain, des grandes entrées comme ça
et mon frère qu'il est ici en fait, il a reconstruit encore une maison
dans une villa un petit peu plus fin. Moi enfin, j'ai acheté un
appartement, j'ai construit la maison pour la belle-famille. J'ai vécu
enfin...
254. S : Pour ta belle-famille, ici alors ?
255. E : Non là-bas, moi je n'ai pas de
belle-famille ici.
256. S : Ah ta belle-famille est
là-bas.
257. E : Oui, mon mari il n'a personne ici.
258. S : D'accord. Donc parfois vous y allez
?
259. E : Tous les ans.
260. S : Avec les enfants ?
261. E : Avec mes enfants tous les ans. J'ai jamais
allé ailleurs, j'suis jamais allée ailleurs.
262. S : D'accord, tu vas chez qui, chez ton
frère ?
263. E : Non non, je vais dans ma belle-famille. Chez
nous, tu vas dans ta belle-famille.
264. S : Ton frère, tu ne le vois pas, qui est
là-bas ?
265. E : Bien sûr, ils ne sont pas loin. J'y vais
chez mon frère mais enfin quand tu vas, tu descends donc la
belle-famille. Chez nous la femme est là vers l'homme parce que la fille
elle est mariée mais elle va chez l'homme. Mes soeurs doivent y aller
dans la belle-famille. C'est mes belles soeurs, la femme de mon frère, y
vont chez nous (rires) ils ont de la chance.
126
266. S : Même si ta maman était en vie
?
267. E : Oui, je dois y aller. Je dois d'abord descendre
chez ma belle-famille. C'est bizarre hein, c'est la coutume je te dis. C'est
une chose que c'est, c'est comme ça. C'est l'homme d'abord puis bon moi
j'ai beaucoup de liberté hein. Quand j'ai vu mon mari la première
fois, je n'ai vraiment pas aimé du tout et il le sait hein. Tu vois,
j'étais jamais été amoureuse de lui et il le sait hein et
je lui ai dit hein. On se marie, on va apprendre à s'aimer mais je ne
suis pas amoureuse de toi du tout. Tu viens de mon pays.
268. S : Et lui il était amoureux de toi
?
269. E : Lui il est plus attaché à moi. Je
fais ce que je veux S, moi je fais ce que je veux, mais bon la maintenant c'est
ma santé qui permet pas de faire grand-chose, parce que j'étais
mince avant, bon y a quatre ans que je suis devenue comme ça.
J'étais mince mais j'avais quarante quarante-deux en taille, c'est pour
ça je n'arrive pas à m'accepter.
270. S : Mais qu'est-ce qui s'est passé alors
?
271. E : Le stress, ma glande thyroïde et puis les
médicaments que je prends je prends cinq médicaments tous les
matins.
272. S : Pour ta glande thyroïde ?
273. E : Oui, pour mon estomac, pour mes jambes, plein
de choses quoi. La glande thyroïde en fait, elle était grossie
parce que chez moi elle ne travaille pas du tout.
274. S : Mais c'est récent parce
qu'avant...
275. E : Ça fait quatre ans oui oui oui elle dit
: elle se fixe avec le stress parce que je travaillais tout le temps moi, tout
le temps. J'avais les enfants, j'avais mon ménage, mes papiers et la
maison à gérer. Parce que bon, y avait les locataires et chaque
fois qu'y a un truc, ils viennent chez moi. Ce n'est pas mon mari ben, il
disent rien quoi.
127
Enfin je dois tout gérer quoi. Mais moi pour les
papiers, parce que tout le monde y en fait c'est ça, que j'appris
à faire tout. Tout ce que je dois faire pour ma maison, les locataires
tout parce que j'ai dit si j'attends toujours quelqu'un pour faire un papier je
vais jamais apprendre et je fais tout moi-même et j'appris. Maintenant je
sais tout faire. Si tu n'essayes pas, tu sauras jamais et c'est pour ça
moi je dis : il faut essayer. Tu ne dois pas avoir peur, y a personne qui va te
manger. C'est pour ça le français je disais mal, je m'en fichais
alors, ils me disaient : non madame, ce n'est pas comme ça, tu dois dire
comme ça et ben ils le disaient quelques fois et je retenais dans ma
tête. Mais ma patronne, elle était géniale en fait, son
mari parce qu'elle travaillait avec son fils, son mari, puis y avait encore
deux. On était treize en fait. C'était une petite
société. Ce n'était pas beaucoup en fait hein. Alors moi
quand je rentrais, ils n'étaient pas habitués eux comme
ça. Moi je suis, je rentrais, je prenais tous les tasses oups bien
nettoyer d'abord le lavabo. J'suis très maniaque pour ça,
maintenant ça va mieux. Mais j'étais malade dans ma tête,
la propreté.
276. 5 : Mais même en Albanie ?
277. E : Oui.
278. 5 : D'accord.
279. E : C'était comme ça, tu vois. tu es
comme ça, tu restes comme ça. Maintenant en plus, c'est ma
doctoresse qui me dit : ta santé elle est vraiment importante. Mais tu
viens chez moi le matin, tout est à sa place. Tu ne peux pas mettre
ailleurs, pourquoi tu xx xxx. Il faut que ce soit à sa place, elle a sa
place. Si on a un truc, c'est parce que j'avais la place pour le faire. Alors
tu le mets et ils savent mes enfants, tout le monde sait, mais il fallait rien
avoir sur les tapis. Y a rien qui traine et je fais toujours l'aspirateur tous
les jours. Tous les jours je dois passer l'aspirateur et toujours un truc. La
table devant le fauteuil doivent être nettoyée, y a plusieurs
choses qui doivent être faites tous les jours.
280. 5 : Disons que tu t'épuises alors
hein.
281.
128
E : C'est ça en fait et j'avais mon travail tous
les jours et j'avais plein de choses à faire en fait. C'est pour
ça bon, je ne sais pas. Je fais, je m'arrête pas toute la
journée. C'est ce qui disent dans ma famille hein. Ils disent c'est toi
que fin, c'est toi qui a fait et tout le monde dit en fait d'abord tout ce que
toi tu fais. Tu commences par toi si tu fais quelque chose de pas bien.
Ça veut dire que c'est toi-même que tu détruis. Ce n'est
pas quelqu'un autre. C'est ce que dit le coach hein, tu vois que je vais une
fois par mois.
282. S : Oui c'est vrai tu vas voir ton
coach.
283. E : Voilà et il dit : tu ne peux pas mettre
la faute à quelqu'un d'autre parce qu'on a tellement l'habitude de
faire oui parce que l'autre a dit comme ça na na tu commences par chez
toi. Il faut que tu t'écoutes pourquoi tu essayes toujours parce que si
tu fais beaucoup d'efforts pour les autres, c'est parce que toi tu veux mais ce
n'est pas pour ça qu'ils vont t'aimer moins si tu t'arrêtes un
peu.
284. S : Oui, ou qu'ils vont t'aimer plus
hein.
285. E : Oui mais on a tellement dans la tête que
oui je sais plus. C'est ce que je faisais pour mon bureau. Je croyais que je
mettrais xx xxx, mais non ça n'a rien à voir. Ils ne vont pas
faire quelque chose de plus pour toi et c'est vrai je sais maintenant. Je me
rends compte depuis que je ne travaille pas.
286. S : D'accord.
287. E : Mais oui, je vous assure, ils ne vont pas
mourir parce que moi je pouvais plus faire ce travail hein. Ça
continue chez eux, mais dans ma tête, je ne sais pas pourquoi, je pensais
comme ça moi. Ça m'a aidée hein, parce que moi, y a des
filles qui disent ou bien elles n'écoutent pas ce qu'ils
racontent.
288. S : Hum de ta coach ?
289.
129
E : Oui ou je sais pas pourquoi, ils disent que non. Mais
non je comprends tout ce qu'elle me raconte. C'est vrai ce qu'elle raconte mais
ils ne sont pas contents la moitié des personnes qui viennent là.
Oh je viens parce que je suis obligée.
290. S : Parce que peut-être aussi la
vérité ça fait mal hein.
291. E : Ça m'a fait mal, je pleurais quand je
parlais avec elle. Quand j'avais des rendez-vous individuels, elle voyait, elle
disait : mais c'est impossible, c'est grave, mais tu peux mourir quand
ça t'arrive xx xxx. J'allais en dépression. Je croyais que je
dois toujours le faire comme ça mais on s'en rend pas
compte.
292. S : Quand tu es dedans, on s'en rend pas
compte.
293. E : Et c'est ce que je voulais dire. Une fois que
dans ta tête t'as un truc, si tu t'arrêtes pas une fois pour dire
mais enfin je dois m'arrêter xx xxx. Tu ne sais pas et tu continues comme
ça sur ton chemin. Oui je fais comme ça je dois le
faire.
294. S : Oui, parce que tu penses que si y a que cette
voie xx xxx.
295. E : Non non, ce n'est pas vrai. Je sais mais ce
qu'elle dit. Par exemple quand les gens ils vont t'aimer moins si tu fais moins
c'est la vérité.
296. S : Oui.
297. E : Je te dis : je peux écrire un livre.
T'auras jamais fini avec moi, je te jure t'auras jamais fini. Parce que si je
dois raconter, oh yayaille. Je travaillais neuf ans, c'est vrai pour eux puis
j'ai eu le deuxième la patronne est
décédée.
298. S : Ah oui c'est ce que tu me disais.
299. E : xx xxx Tu vois la société, elle
n'a pas continué et moi j'ai eu mes papiers. J'suis allée au
chômage. Je restais quand même un peu avec mon fils pour qu'il
grandisse et puis que bon je n'avais pas travail. J'ai dit : je ne vais pas
trouver toute suite fin je vais afin parce que mon grand il est à la
crèche.
130
300. S : D'accord.
301. E : Oui je travaillais. Il était un petit
peu dans la famille quatre mois avec moi puis un petit peu dans la famille.
Parce que n'y avait pas de petits dans ma famille. Il était un peu chez
ma belle-soeur, ma soeur, mon frère. Il venait tout le monde garder mon
gars. Il était le seul petit dans la famille.
302. S : Ah oui, donc du coup il pouvait se
partager.
303. E : Partager tous les jours. J'avais de la famille
chez moi pour venir la voir. J'en avais marre xx xxx. Tous les jours, il
faillait qu'ils viennent la voir mon fils. A ce moment-là, il
était fort gâté mon grand. Y avait de petit dans la
famille, il était le seul, il a vraiment profité. Alors si tu
disais à quelqu'un tu veux bien garder ? Voui voui voui. Les enfants de
mon frère, de ma soeur, tout le monde le gardait et moi je pouvais
travailler et alors quand il a eu un an je l'ai mis à la crèche.
Mais le petit je l'ai gardé jusqu'à qu'il est allé
à l'école. Non d'abord, je travaillais un petit peu mais quand
elle est décédée, mais fallait que ça
s'arrête en fait et pis j'ai commencé les petits services hein.
Quand le petit il est allé à l'école, alors j'avais
trouvé du travail des services. mais moi les petits services, tu vois le
système euh ::: mon travail. C'est dire avec la commune ce n'est pas
indépendant comme y a beaucoup de sociétés machin xx xxx.
Je veux quelque chose de stable et quand j'avais commencé c'était
comme ça, moi je n'aime pas la xx xxx. Je ne prends pas ton travail mais
quand je me suis mariée...
304. S : Je pense qu'on peut s'arrêter là
et
305. E : Je n'aurai(s) jamais fini !
306. S : Non parce que.....
307. E : Qu'est-ce que tu veux savoir ?
131
Annexe 15 : « Canevas investigatif » ou
grille de questionnement analytique pour J Un « moi »
élément de l'écologie humaine
(a)
- Quels signes linguistiques les locuteurs emploient-ils
?
Les dipôles
Pronominaux
«c'est »-« je » « je
»-« moi »
États
|
Existence
|
Actions
|
Comprendre
|
Avoir
|
Dire
|
Ne pas comprendre
|
Avoir l'habitude
|
Suivre
|
Être
|
Avoir besoin
|
Essayer
|
Savoir
|
Avoir envie
|
Faire
|
Ne pas savoir
|
Aimer
|
Aller
|
Sentir
|
Adorer
|
Laisser
|
|
|
Raccrocher
|
|
|
Penser
|
|
|
Entendre
|
|
|
Quitter
|
|
|
Apprendre
|
|
|
Partir
|
|
|
Visiter
|
|
|
Parler
|
|
|
Ne pas parler
|
|
|
Demander
|
|
|
Vouloir
|
132
|
|
Pleurer
|
|
|
Grandir
|
|
|
Venir
|
|
|
Chercher
|
|
|
Connaitre
|
|
|
Lire
|
|
|
Voir
|
|
|
Trouver
|
|
|
Pouvoir
|
|
|
Commencer
|
? « je sais pas »
Impossible à expliquer
|
Ignorance
|
Incompréhension
|
Tr 139, 250
|
Tr 151, 163, 233, 272 (par rapport à la
situation)
|
Tr 26, 145 (par rapport à la
situation)
|
- Quelle importance les signes linguistiques ont-ils par
rapport à l'appropriation du français ?
? Temporelle : J est dans un temps « initial »
: « c'est » ? sujet neutre, verbe impersonnel
·
133
Situationnelle et évènementielle :
construction du « je » par similitude avec les circonstances, les
lieux
· Idiosyncrasique : absence de conscience de
soi
- Quels comportements les sujets parlant ont-ils face
à l'idiome in posse ?
· Sujet neutre : dipôle « je »/
« c'est »
· Représentations transcendantales, tp
203-205
· Représentations logiques/
évidentes, tp 213
· La motivation : tp 217, pr le
néerlandais
· Le français correspond à
l'apprentissage
- Quels sont les éléments qui
distinguent les locuteurs qui affirment « parler » la langue et ceux
qui affirment « ne pas la maîtriser » ?
Pas questionnée à ce sujet (b)
- Comment les énonciateurs parlent-ils de
l'apprentissage en langue française ? (termes, format du discours)
?
· Petit format
· « école », « examen »,
« les autres », tp 103-105
· Projet extrascolaire, tp 203
134
- Quels changements sont associés à la
compréhension de la nouvelle langue ? (comportement cognitif, lexique,
construction des unités de communication, représentations)
?
? La langue maternelle « explique » et «
comprend », tp 252
- Est-ce que les énonciateurs font le lien entre
idiome et identité ? ? « je parle pas », tp 279
- Quels autres comportements sont relevés
?
? Inertie linguistique : construction phrastique
répétée, pauvre
Annexe 16 : « Canevas investigatif » ou
grille de questionnement analytique pour AL Un « moi »
conscientiel bien dans ses langues
(a)
- Quels signes linguistiques les locuteurs emploient-ils
?
Les dipôles
|
Pronominaux
|
Pronominaux/nominaux
|
« je »-« on»-« ils
»-« tu »-« tout un chacun »- « eux
»
|
« je »-« les gens »
|
« je »- « moi »-«
moi-même »
|
|
|
135
|
|
|
Arriver
|
Venir
|
Aimer
|
Avoir
|
Partir
|
|
Avoir envie
|
Quitter
|
|
Pouvoir
|
Retrouver
|
|
Vouloir
|
Rentrer
|
|
Être
|
Travailler
|
|
Comprendre
|
Montrer
|
|
Adorer
|
S'inscrire
|
|
Se sentir
|
Parler
|
|
Savoir
|
Faire
|
|
Habiter
|
Citer
|
|
Être appelé
|
Se tromper
|
|
Être régularisé
|
Lire
|
|
|
Trouver
|
|
|
Rencontrer
|
|
|
Croire
|
|
|
Se débrouiller
|
|
|
Dormir
|
|
|
Conduire
|
|
|
S'engager
|
|
|
Manger
|
|
|
Préparer
|
|
|
Communiquer
|
|
|
Penser
|
|
|
Voyager
|
|
|
Voir
|
|
|
Regarder
|
|
|
Dire
|
|
|
136
|
Voter
|
|
|
Supporter
|
|
|
Connaitre
|
|
|
Se méfier
|
|
|
Refuser
|
|
|
Accepter
|
|
|
Demander
|
|
|
Finir
|
|
|
Suivre
|
|
|
Signer
|
|
|
Arrêter
|
|
|
Rater
|
|
|
Acheter
|
|
|
Accompagner
|
|
|
Poser
|
|
|
Entendre
|
|
|
Frapper
|
|
|
Corriger
|
|
|
? « je sais »
Connaitre
|
Capacité (belgicisme)
|
'Fp 182
|
'Fp 196
|
|
137
- Quelle importance les signes linguistiques ont-ils par
rapport à l'appropriation du français ?
· Démontrent une appropriation «
réelle » dans le sens où le locuteur développe des
compétences linguistiques attendues
· Traduisent les aspects ontologiques : a
conscience de lui-même : « pour moi » (x6)
· Traduisent la capacité de
l'énonciateur à se désigner comme sujet : « moi
»-« je »
- Quels comportements les sujets parlant ont-ils face
à l'idiome in posse ?
· Compréhension/acceptation du propos :
« ça va », « oui », « bon »
· Va-et-vient entre deux territoires : «
là-bas »-« ici », la langue différente
désigne le « connu »
· Représentations liées à
l'école, à l'apprentissage d'enfant et d'adulte, à la
formation professionnelle, au territoire linguistique de son pays, aux amis
(« la rue »)
· Représentations « réelles
» du français : « je parlais le français », tp 48
avec la possession, au préalable, d'une identité linguistique
« francophone », tp 52/186
· A l'aise parce qu'il « parle la langue
», tp 104, 164
· Sait que le français est une des langues
in posse de la Belgique
· Représentation linguistique du
français et non pas physique, tp104/ 164, il nomme les signes à
corriger tp 176/178
· Continuité avec la langue in fieri
du pays d'origine
138
- Quels sont les éléments qui distinguent
les locuteurs qui affirment « parler » la langue et ceux qui
affirment « ne pas la maîtriser » ?
· Homme
· Langue maternelle nilo-saharienne
· Apprentissage du français en Côte
d'ivoire
· Identité en langue in esse, tp
174
· Identité linguistique
francophone
· Conscience du répertoire langagier belge :
choix de la langue tp 186
·
(b)
« pour avoir le niveau », tp 26
- Comment les énonciateurs parlent-ils de
l'apprentissage en langue française ? (termes, format du discours)
?
· L'école, « les cours du soir »,
tp 56
· Avec un projet professionnel
· Format développé
· Comme une « compétence », tp
162
· Respect linguistique et adaptation
comportementale au pays d'accueil, tp 164
· Responsabilité personnelle du locuteur, tp
186
· Trois types de français : de
l'école, de la rue en Afrique, de la formation professionnelle en
Belgique
· 139
L'interaction avec les autres, tp 84
- Quels changements sont associés à la
compréhension de la nouvelle langue ? (comportement cognitif, lexique,
construction des unités de communication, représentations)
?
· Changement de statut de la langue : langue
professionnelle
· Comportement ludique/ grave, in esse,
« dans le sang », tp 208/ « on se sent à l'aise » tp
210 ? comportement intellectif in fieri, tp 176
· Lexique temporel : « ici », «
maintenant », « après »
- Est-ce que les énonciateurs font le lien entre
idiome et identité ?
· Identité liée au territoire, tp 52,
64 mais aussi aux personnes tp 68
· Se sent à l'aise avec le français
en Belgique, tp 184
· Idiome/identité : migration, école,
transmission ancestrale, tp 212 - Quels autres comportements sont
relevés ?
· Comportement accompli et sélectif dans
une langue à trois registres : école, rue, profession
· Comportement linguistique philosophique/
idéologique sur l'appréhension des langues de terres d'accueil,
sur les attitudes des nouveaux arrivants, sur lui-même, son
répertoire langagier
· Le pays éloigné qui n'est
pratiquement jamais désigné : déictiques « ici
»-« là-bas ». On identifie l'inconnu par l'interlocuteur
par l'inconnu
140
Annexe 17 : « Canevas investigatif » ou
grille de questionnement analytique pour M Un « moi »
perpétué
(a)
- Quels signes linguistiques les locuteurs emploient-ils
?
Les dipôles
|
Pronominaux
|
Pronominaux/nominaux
|
« je »-« on»-« nous
»-« tu »
|
« je »-« les gens belges »-«
des gens »-« des/les personnes »-
|
« je »- « moi »-« eux
»-« lui »
|
|
|
État
|
Action
|
Existence
|
Savoir
|
Partir
|
Naître
|
Vouloir
|
Penser
|
|
Pouvoir
|
Trouver
|
|
Être
|
Voir
|
|
Croire
|
Dire
|
|
Comprendre
|
Venir
|
|
Se sentir
|
Rester
|
|
Avoir besoin
|
Parler
|
|
Aimer
|
Préférer
|
|
Ne plus aimer
|
Partir
|
|
|
Apporter
|
|
|
Aller
|
|
|
Marcher
|
|
|
|
Voir
|
|
|
Penser
|
|
|
Raconter
|
|
|
Se débrouiller
|
|
|
Arriver
|
|
|
Attendre
|
|
|
Étudier
|
|
|
Habiter
|
|
|
· « je sais pas »
Ignorance
|
Incapacité (belgicisme)
|
Tp 4
|
Tp 90
|
|
- Quelle importance les signes linguistiques ont-ils par
rapport à l'appropriation du français ?
· Traduisent la capacité de
l'énonciateur à se désigner comme sujet : « moi
»-« je »
· Un sujet qui passe du « tu » au «
je », tp 16
· Temporalité : « toujours » est
le leitmotiv
· Idéologique : canon linguistique au
travers du récit de migrant, tp2, 4,
6, 30
· 141
Appropriation liée à un état :
« content »
142
- Quels comportements les sujets parlant ont-ils face
à l'idiome in posse ?
· Compréhension/acceptation ou non du propos
: « ça va », « oui », « non », « bien
», « voilà », « c'est tout »
· Va-et-vient entre deux territoires : «
là-bas »-« ici », la langue différente
désigne le « connu »
· Représentations liées à
l'école, à l'apprentissage d'adulte « difficile », tp
92, au travail
· Représentation physique : « la
tête », tp 92
· Rupture avec la langue in esse du pays
d'origine tp 26
- Quels sont les éléments qui distinguent
les locuteurs qui affirment « parler » la langue et ceux qui
affirment « ne pas la maîtriser » ?
· Homme
· Langue maternelle sémitique
· Apprentissage du français en
Belgique
· Identité en langue in esse, tp
80
· (b)
« pour comprendre », tp 16
143
- Comment les énonciateurs parlent-ils de
l'apprentissage en langue française ? (termes, format du discours)
?
· « les cours du soir », tp
16
· Avec un projet professionnel, tp 16
· Format développé
· Comme une « chance », tp 26
· Respect linguistique et adaptation
comportementale au pays d'accueil, tp 26
· Problématique émique, tp
28
· De manière situationnelle limitée :
« Belgique Saint-Josse », tp 26
· Comme une interaction familiale, tp
74
· Notion d'intériorité, tp
40
- Quels changements sont associés à la
compréhension de la nouvelle langue ? (comportement cognitif, lexique,
construction des unités de communication, représentations)
?
· Changement de dipôle : « je
»-« eux »-« lui »
· Lexique temporel : « ici », «
maintenant », « après »
· Continuité temporelle : « toujours
»
· Antithèse : « pas arabe »,
« pas d'accord », tp 26
· L'âge, tp 92
144
- Est-ce que les énonciateurs font le lien entre
idiome et identité ?
· Distinction langue/ nationalité tp
80
· Le français ne fait pas parti de son
répertoire langagier, tp 84
· La trahison, tp 78/80
- Quels autres comportements sont relevés
?
· Comportement in fieri à la
demande : travail, ASBL
· Comportement linguistique idéologique sur
l'appréhension des langues de terres d'accueil, sur les attitudes des
nouveaux arrivants, sur lui-même, son répertoire
langagier
· Le pays éloigné qui n'est
pratiquement jamais désigné : déictiques « ici
»-« là-bas ». On identifie l'inconnu par l'interlocuteur
par l'inconnu
145
Annexe 18 : « Canevas investigatif » ou
grille de questionnement analytique pour I Un « moi »
adapté fidèle
(a)
- Quels signes linguistiques les locuteurs emploient-ils
?
Les dipôles
|
|
Pronominaux
|
Pronominaux/nominaux
|
« je »-« on»-« nous
»-« tu »
|
« je »-« des gens »
« je »-« A », « F »,
«
|
S »
|
« je »- « moi »
|
|
|
|
État
|
Action
|
Existence
|
Réussir
|
Venir
|
Aimer
|
Avoir
|
Commencer
|
Vivre
|
Vouloir
|
Croire
|
|
Être
|
S'entendre
|
|
Savoir
|
Parler
|
|
(se) Sentir
|
Dire
|
|
Se calmer
|
Regarder
|
|
Pouvoir
|
Travailler
|
|
S'en foutre
|
Chercher
|
|
Avoir envie
|
Essayer
|
|
Avoir le droit
|
Parler
|
|
Être d'accord
|
Comprendre
|
|
Espérer
|
Rigoler
|
|
|
146
|
Apprendre
|
|
|
Réfléchir
|
|
|
Connaitre
|
|
|
Venir
|
|
|
Trouver
|
|
|
Se rappeler
|
|
|
Jurer
|
|
|
Respecter
|
|
|
Manquer
|
|
|
Faire
|
|
|
Voir
|
|
|
Penser
|
|
|
Perdre
|
|
|
Insulter
|
|
|
Demander
|
|
|
Écrire
|
|
|
Impossible à expliquer
|
Ignorance
|
Incompréhension
|
Tr 6, 14, 44, 52,
|
Tr 2, 10, 12,
|
Tr 58, 60
|
|
147
28, 50
- Quelle importance les signes linguistiques ont-ils par
rapport à l'appropriation du français ?
· Traduisent la capacité de
l'énonciateur à se désigner comme sujet : « moi
»-« je » philosophique mais pas linguistique, tr 32,
42
- Quels comportements les sujets parlant ont-ils face
à l'idiome in posse ?
· Va-et-vient entre deux territoires : «
là-bas »-« ici », la langue différente
désigne le « connu »
· Représentations liées à
l'apprentissage (l'ASBL), à l'écoute tp 32, à la
fréquence en terme de communication tp 44/ 46
· Représentation linguistique du
français et non pas physique, tp 70
· Distinction avec la langue in esse du
pays d'origine : « c'est pas ma langue », tp 46. Elle est une langue
virtuelle : « c'est pas ma langue en réalité », tp
46
- Quels sont les éléments qui distinguent
les locuteurs qui affirment « parler » la langue et ceux qui
affirment « ne pas la maîtriser » ?
· Femme
· Langue maternelle sémitique
· Apprentissage du français en
Belgique
·
148
Identité revendicatrice, permissive en langue
in esse, tp 48
· Identité linguistique arabophone, tp
92
· « pour m'améliorer », tp
74
(b)
- Comment les énonciateurs parlent-ils de
l'apprentissage en langue française ? (termes, format du discours)
?
· Comme un accomplissement autodidactique, tp
74
· Avec un projet linguistique, tp 72,
74
· Format concis
· Comme un possible accès vers la langue
française in esse, tp 74
· L'interaction humaine, tp 74 : « voir
», « parler »
- Quels changements sont associés à la
compréhension de la nouvelle langue ? (comportement cognitif, lexique,
construction des unités de communication, représentations)
?
· Prise de conscience de sa langue in
esse, tp 46
· Revendication identitaire, tp 48, 52
· 149
Lexique temporel et situationnel limité : «
ici », « la rue », gens inconnus, tp 46
- Est-ce que les énonciateurs font le lien entre
idiome et identité ?
· Identité liée à la langue
in esse, tp 32
· Pas de sens intime avec le français, tp
46
· Idiome/identité : le foyer, la
mère, les proches, tp 44
- Quels autres comportements sont relevés
?
· Comportement « médian » et
situé : « Saint-Josse », tp 66 dans une langue non
intériorisée
· Préservation linguistique vis-à-vis
de la langue in esse
· Le pays éloigné qui n'est
pratiquement jamais désigné : déictiques « ici
»-« là-bas ». On identifie l'inconnu par l'interlocuteur
par l'inconnu
150
Annexe 19 : « Canevas investigatif » ou
grille de questionnement analytique pour E Un « moi »
hypertrophié qui se pense dans le temps
(a)
- Quels signes linguistiques les locuteurs emploient-ils
?
Les dipôles
|
Pronominaux
|
Pronominaux/substantifs
|
« je »-« il »-« ils
»-« tu »-« vous »-« elle »- « ceux qui
sont venus »,
|
« je »-« tout le monde »-« les
étrangers »«les Albanais »-« les gens
»
|
« je »-« moi »-« nous
»
|
|
|
État
|
Action
|
Existence
|
Être
|
Perdre
|
Être
|
Avoir
|
Venir
|
Avoir des larmes
|
Habiter
|
Grandir
|
Avoir des frissons
|
Comprendre
|
Dire
|
Avoir envie
|
Être stricte
|
Ne jamais dire
|
Aimer
|
Savoir
|
Écrire
|
Ne pas aimer
|
Apprendre
|
Faire
|
Adorer
|
Trouver
|
Se déclarer
|
Être déclarée
|
Se sentir
|
Accepter
|
Être reconnue
|
Préférer
|
Raconter
|
Avoir une bonne mémoire
|
Être obligée
|
Commencer
|
Être aidée
|
|
Regarder
|
Être appuyée
|
|
Nettoyer
|
Être convoquée
|
|
Aider
|
Être triste
|
|
Aller
|
Être contente
|
|
Travailler
Arriver
Changer
(se) Présenter
Entendre
Pleurer
Devenir
Ne pas oublier
Descendre
Ne pas mentir
Construire
Acheter
Voir
Prendre
Ne jamais prendre
Attendre
Vouloir
Vivre
Pouvoir
Devoir
Retourner
Connaitre
Respirer
Sentir
Jurer
Donner
Parler
Supposer
Penser
Être inscrite
Être malade
Être maniaque
Aller en dépression
En avoir marre
Être habituée
Être stressée
Se faire plaisir
Se marier
|
|
S'inscrire Apporter Assurer Ne pas utiliser
S'arrêter Chercher S'adapter
Mal s'exprimer Se baisser
Ne pas discuter Recevoir Retenir Rentrer
Rester
|
|
152
? « je ne sais pas » / « je sais pas
»
Impossible à expliquer
|
Ignorance
|
Connaitre
|
Incapacité (belgicisme)
|
Manque de mots
|
Tp 20, 52, 83,
|
Tp 66, 68,
|
Tp 42, 243,
|
Tp 40, 42, 127,
|
Tp 46, 103 ?,
|
101, 103, 127,
|
111, 153, 289
|
|
153,
|
123, 253 ?,
|
131, 153, 217,
|
|
|
|
|
281, 287
|
|
|
|
|
|
153
- Quelle importance les signes linguistiques ont-ils par
rapport à l'appropriation du français ?
· Démontrent des étapes
· Démontrent une appropriation «
simulée » dans le sens où le locuteur colle au plus
près des attentes de la chercheure débutante
· Traduisent les aspects ontologiques
· Traduisent la subjectivité de
l'énonciateur : les dipôles sémantiques
récurrents
- Quels comportements les sujets parlant ont-ils face
à l'idiome in posse ?
· L'authenticité de la langue est importante
chez E
· Comportement expressif mais pas scriptural, tp
176
· Représentations liées à la
migration, au voyage (les chanteurs francophones Tp 184) : approche
phonétique/discursive du français (les airs à
écouter se répètent) ? l'oreille comme le symbole du sens
au niveau de la tête, quelqu'un qui écoute
· Représentations affectives : tp
186/188
· Représentations liées au travail :
la main, tp 152 : symbole de l'effort, de l'action, de l'aide, de la
détermination, de l'habileté, de la force
- Quels sont les éléments qui distinguent
les locuteurs qui affirment « parler » la langue et ceux qui
affirment « ne pas la maîtriser » ?
· Femme
· Langue maternelle slave
·
154
Pas d'apprentissage du français au
Kosovo
· « toute seule comme ça », tp
44
· La main, les oreilles
· « j'ai un niveau »
(b)
- Comment les énonciateurs parlent-ils de
l'apprentissage en langue française ? (termes, format du discours)
?
· Tp 44
· Lié au travail
· Durée courte
· Format du discours ; long, descriptif,
comparatif, situé (le travail, la classe, son foyer,
· Parler : une nature tp 154
· L'écriture d'un livre, tp
159
· L'interaction avec les autres, tp
84
· Avec sa « nature », tp 154, sa
« façon », tp 176
· « j'ai jamais eu le temps d'apprendre le
français », tp 232 : le projet d'écriture
- Quels changements sont associés à la
compréhension de la nouvelle langue ? (comportement cognitif, lexique,
construction des unités de communication, représentations)
?
·
155
Le travail
· L'authenticité de ses propos
· Lexique temporel : « au début »,
« après », « commencer », « venir »,
« regarder », tp 44,
· « deux ans », « commencer »,
« me dire », « avoir envie », « te voir », «
ta tête », « vouloir apprendre », « donner »
à l'impératif, « alors », « enfin », «
arriver », « bonne mémoire », « parler/
s'écouter » tp 84
« les étrangers », « faire une
phrase », « dit pas bien les choses », tp 88
· « jamais », « première
année », le travail, évènements de vie (mariage,
permis de travail)
· Des mains, nous passons à
l'écriture en français (une de ses natures), tp 176
· « écrire », « ma
façon », « vouloir dire », « entendre », «
se sentir bien », « connaitre », « adorer », «
comprendre », « raconter », tp184
· Facilité à parler la langue, «
les mots viennent », « c'est bizarre », « un truc machin
», tp 208
· « comme les belges », « ici
», « je me suis adaptée », « j'ai trouvé mon
rythme », tp 212/214
· « je me suis baissée à leur
niveau », tp 220, « j'ai un niveau », tp 232
· Expansibilité du temps : « je te dis
je peux écrire un livre t'auras jamais fini avec toi je te jure t'auras
jamais fini », tp 298
156
- Est-ce que les énonciateurs font le lien entre
idiome et identité ?
· Le français est la langue du
travail
· Tp 184 : « vouloir », la
négation
· Idiome/identité : lien avec la
migration
· Langue in esse et histoire - Quels
autres comportements sont relevés ?
· Comportement accompli dans une langue à
reconstruire/ porter/ pousser sans cesse, tp 306-308
· Comportement linguistique illustratif,
détailliste (le pourquoi du comment : au début et à la fin
de l'entrevue)
· Le pays éloigné qui n'est
pratiquement jamais désigné : déictiques « ici
»-« là-bas ». On identifie l'inconnu par l'interlocuteur
par l'inconnu
(c)
- Quelles techniques didactiques privilégier dans
le domaine des sciences du langage ?
157
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