CONCLUSION
La communication du tourisme, c'est un ensemble technique, un
processus, une organisation dans la chaîne de tous les acteurs du secteur
touristique visant à piloter, à concevoir un produit depuis sa
préparation (input) jusqu'à sa consommation (output). Pour les
acteurs, c'est l'organisation du produit à destination du consommateur
final. Le produit est palpable, mais le service est intangible. Cependant, on
affirme que ce processus marketing du produit, pris dans le sens du territoire,
dans ce cas d'exemple est marqué par les conflits, les crises
notées un peu partout dans le monde. La problématique de la
communication du tourisme dans une zone de conflit est assez
préoccupante. Elle fait face à de multiples facteurs qui
entravent l'activité touristique dans les différentes
localités sous prétexte qu'elles se situent dans la zone de
conflit. Certes il existe plusieurs conflits, plusieurs crises dans des
destinations touristiques différentes, mais la physionomie des espaces
géographiques n'est pas la même. Il faudrait alors se pencher sur
un modèle de communication et des politiques plus adaptées aux
zones souvent prises dans cet étau. La communication du tourisme
réussit ainsi son pari de rendre le territoire d'accueil attrayant au
profit des visiteurs potentiels d'une part et d'autre part subit les
conséquences d'un conflit accentué par une couverture qui peut
être analysée sous plusieurs angles.
Le Sénégal, pays indépendant depuis 1960,
s'est vite lancé dans le tourisme dans les années 1970.
Cependant, l'implantation de son premier village de vacances au Cap-Skirring
avait suscité une discorde entre les populations locales et les
bailleurs, des relations purement commerciales loin des interactions humaines
comme pour l'atteste Saglio : « Ici Aline Sitoé est inconnu, et
de toute façon on en aurait fait une superbe hôtesse d'accueil.
» 83 On note ainsi des difficultés dans l'implantation du
tourisme dans ce village de pêcheurs devenu plus tard un hub touristique.
Dans tout le reste du Sénégal, néanmoins l'activité
marche plus ou moins bien. En effet, le pays de la Téranga, qui recevait
neuf millions de touristes, a connu une chute drastique de la
fréquentation touristique. C'est une situation déplorable pour la
Casamance. Elle est parfois amplifiée par certains médias qui
diffusent constamment ou occasionnellement de fausses informations. Cela attire
de plus en plus l'attention des chercheurs. En effet, le conflit qui s'est
déclaré dans cette partie continue de nuire au secteur du
tourisme. Ceci interpelle l'opinion nationale et internationale.
83 Saglio (2004). Casamance op.cit. p176
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A coup sûr, un conflit ou une crise impacte toujours sur
les différents secteurs économiques. A cet effet, la couverture
médiatique dans une zone de conflit peut devenir aussi fatale que le
conflit lui-même. Cet élément appelé communication
intéresse donc plus surtout quand il s'agit des conflits armés.
En Casamance, les médias sont devenus populaires à cause de
l'ampleur qu'a prise cet événement historique, mais, aussi et
surtout une communication touristique noyée par les acteurs
médiatiques et des TIC, une faible présence sur la scène
des acteurs touristiques notamment. Nous retrouvons pour le cas de notre
étude la présence de radios, de télévisions, de
nouvelles technologies d'information et de communication à l'instar de
la presse en ligne et une forte audience auprès des réseaux
sociaux et des pages internet de manière générale.
La couverture médiatique dans une zone de conflit
représente souvent de très grands risques compte tenu des
nombreuses exactions commises sur les professionnels de l'information et de la
communication. Toutefois, leur communication, basée des exigences
professionnelles, est quelque part un obstacle majeur pour les territoires
concernés comme le dit l'adage : « Le bonheur des uns fait le
malheur des autres ». Nous constatons donc dans ce travail que les
médias sont seulement préoccupés par la diffusion
d'informations immanentes au conflit qu'elles soient vérifiées ou
non, la commercialisation de leurs journaux, leurs comptes rendus, etc. Cette
attitude s'explique fondamentalement par la course à la primeur des
informations, la concurrence des gros titres entre les différents
organes de presse ; il s'agit d'une responsabilité partagée entre
les correspondants locaux, les directions se trouvant hors du champ de conflit
et les médias sociaux.
Dans ce dernier, nous avons eu à noter plusieurs
facteurs dans la diffusion de l'information parmi lesquels les articles et
leurs sources. Nombreux sont ceux qui relaient des informations puisées
directement dans un article dans la presse en ligne et pourtant ils
n'appartiennent ni à la corporation journaliste ou encore touristique.
En outre, les images que l'on retrouve dans la plupart des articles sur le
conflit lorsqu'ils parlent du tourisme ne sont pas des images réelles,
car elles ne sont ni actualisées ni adaptées. Nous les avons donc
classées dans la catégorie des sources non autorisées.
Nous avons alors constaté que la communication est loin d'être
favorable au tourisme car certains Etats ne la réglementent pour qu'elle
ne nuise à aucun intérêt national ou à celui des
particuliers.
Les enjeux sont multiples pour les chancelleries et pour les
collectivités locales concernées, mais aussi l'Etat qui
définit les politiques touristiques. Pour le cas de notre pays, la
France, via son ambassade, se porte garant de ses compatriotes ressortissants
dans le territoire national.
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Cependant, elle ne fait pas office d'un bon juge car, entre
les décisions prises (zone-rouge) et la réalité sur
l'espace, dans une analyse géopolitique, il y a certains mystères
qui mériteraient d'être levés. En effet, la décision
de déclarer la Casamance zone d'insécurité laisse à
désirer. Non seulement elle a des impacts sur des zones qui ne sont pas
affectées actuellement par le conflit, mais elle ralentit
considérablement l'activité touristique en Casamance au profit
des autres parties du pays. Malheureusement, cette discrimination
régionale demeure un sérieux problème à cause
notamment des politiques territoriales de l'Etat. En réalité, les
collectivités territoriales sont impuissantes. En d'autres termes, elles
ne peuvent entreprendre des actions planifiées pour remédier
à ces deux faits regrettables. Elles n'ont assez de ressources
financières en vue de la réalisation de projets d'attraction
touristique. Au Sénégal, le tourisme reste une compétence
non transférée. En ce sens, nous notons à Ziguinchor
l'absence d'une organisation chargée spécifiquement de la
communication touristique avec des moyens pour partager également des
compétences au niveau local. Ainsi, avec les services en charge du
tourisme, nous avons constaté un gap énorme en termes de
communication touristique, un manque d'organisation et de coordination aussi.
Certains d'entre eux se limitent strictement à leurs activités
primaires, c'est-à-dire accueillir et informer le client. La culture, un
atout pour la communication du tourisme, est insuffisamment exploitée
à cause du manque de volonté des autorités locales qui
n'accompagnent pas toujours des initiatives immanentes à la promotion
des traditions locales et de la sous-région. En conséquence, la
bataille médiatique est fréquemment gagnée par une
communication parallèle qui est un obstacle au développement du
tourisme dans cette zone.
Avec la révolution des TIC, la multiplication et la
prolifération des sources internet et leur forte
pénétration, beaucoup de personnes ont dorénavant
l'habitude et la facilité de s'informer et de communiquer au jour le
jour. Ces TIC, bien qu'elles soient de véritables atouts, constituent un
danger pour la communication touristique, surtout pour une zone en conflit. Les
informations relayées ne sont pas contrôlées,
filtrées et peuvent être à la portée de tout le
monde et n'importe où. Dans un pays qui fait plus de neuf millions
d'abonnés sur quinze et plus de deux millions d'abonnés à
un medium social comme Facebook, un territoire est vite fiché
sur la planète en seulement quelques secondes. Dans ce cas
précis, le monde est conscient du danger de ces TIC en matière de
désinformation, surtout les médias sociaux. Cette intoxication
affecte profondément les zones étudiées dans ce travail.
Même l'usage du concept Casamance par exemple pose problème. Pour
certains, il désigne trois régions qui se trouvent dans la
même zone géographique, tandis que pour d'autres il a tout
simplement une connotation péjorative. Il
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fait allusion au séparatisme, à
l'insécurité. C'est plutôt cette stigmatisation permanente
qui est actuellement en vogue.
En effet, les acteurs du tourisme ne cachent pas leur
désarroi et affirment que la situation de la Casamance profiterait
à la concurrence qu'ils jugent déloyale. Une économie de
guerre s'installe silencieusement marquée par une guerre de la
communication. Elle est déclenchée par des acteurs du secteur qui
ne soucient que de leurs propres intérêts au point de nuire
à leurs collègues qui se trouvent en Casamance. Même si la
liberté d'expression est garantie par Déclaration universelle des
Droits de l'homme et la Constitution du Sénégal, elle ne devrait
jamais être détournée de sa quintessence et orientée
intentionnellement, exclusivement, vers l'accomplissement d'oeuvres
crapuleuses. L'on s'interroge alors sur les rapports entre conflit et tourisme
dans des localités un peu moins concernées par les tensions. Sous
ce rapport, nous avons constaté que certains risques, quoiqu'ils
n'existent pas, sont inventés et promulgués aux niveaux national
et international. Et cela freine la motivation de voyage de potentiels
visiteurs. Il laisse la place à une identité autre que celle qui
existe réellement sur le terrain, reflétant ainsi une image
perçue au plan national et au-delà des frontières. Donc,
nous pouvons déclarer que toutes nos hypothèses sont
justifiées.
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