Céline GARNIER Promotion 2008-2010
LA DIMINUTION DE L'IMPACT
ENVIRONNEMENTAL DES
OPÉRATIONS D'AMÉNAGEMENT
Le rôle de l'aménageur
Sous la direction de
Mme Véronique BRISSET-INSERGUET Maître de
Conférence en Droit Public Université de Rennes 1
Université de Rennes 2 - Haute Bretagne Institut
d'Urbanisme de Rennes
Master Maîtrise d'Ouvrage Urbaine et
Immobilière
2 / 59
SOMMAIRE
INTRODUCTION
PARTIE 1 -
LA DIMENSION ENVIRONNEMENTALE DANS LA PRODUCTION DES TERRAINS
À BÂTIR
PARTIE 2 -
LA PÉRENNISATION DES ENGAGEMENTS PRIS EN EN MATIÈRE
D'ENVIRONNEMENT DANS LE CADRE DE
L'OPÉRATION
CHAPITRE 1 LE CONTRAT DE L'AMÉNAGEUR
Section 1 Le recours au mandat
Section 2 Le contrat d'aménagement : la concession
CHAPITRE 2 LA CONCEPTION ET LA RÉALISATION DE
L'OPÉRATION
Section 1 La phase de conception Section 2 La réalisation
des ouvrages
CHAPITRE 1 LA RELATION AVEC LES ACQUÉREURS /
CONSTRUCTEURS DES PARCELLES
Section 1 La cession des parcelles ZAC Section 2 La cession des
lots du lotissement
CHAPITRE 2 LE TRANSFERT DES ESPACES/ÉQUIPEMENTS PUBLICS
AUX GESTIONNAIRES
Section 1 La relation avec les futurs gestionnaires
Section 2 Les DOE-DIUO : des documents mobilisables au service de
l'environnement
3 / 59
CONCLUSION ANNEXES
BIBLIOGRAPHIE
TABLE DES MATIÈRES
4 / 59 Introduction
INTRODUCTION
Malgré les critiques dont il fait aujourd'hui l'objet,
le Grenelle de l'environnement demeure un événement important
dans la progression de la protection de l'environnement dans l'ensemble de la
société et dans le droit français. Le succès des
mouvements écologistes au premier tour des dernières
élections régionales1 confirme l'intérêt
croissant que portent les populations à ce sujet. Cette prise de
conscience n'épargne pas la production urbaine. Ce secteur reste une
source majeure d'impacts environnementaux par le grignotage des espaces
naturels et agricoles consécutifs de l'étalement urbain, par
l'imperméabilisation des sols qui perturbe notamment l'écoulement
des eaux, puis par les consommations de ressources pour assurer son
fonctionnement. L'ensemble des bâtiments résidentiels et
tertiaires, majoritairement urbains, représente 42% de l'énergie
finale consommée en France en 20092. Il faut ajouter à
cela les consommations d'eau, le transport et les risques de pollution
associés... Il est donc déterminant d'intégrer cette
dimension environnementale dans les projets urbains, et ce d'autant plus que le
renouvellement de la ville étant lent, les espaces produits ont vocation
à faire partie du paysage pendant plusieurs dizaines d'années.
Si les efforts à fournir pour diminuer l'empreinte
écologique des villes doit être réalisé dans
l'existant, il n'en demeure pas moins essentiel de se préoccuper de la
production de nouveaux terrains à bâtir, tant en extension urbaine
qu'en réutilisation de friches industrielles ou portuaires
insérées dans le tissu urbain. Dans les deux cas, un
découpage foncier et la viabilisation de terrains sont
nécessaires, ce qui implique le recours à une procédure de
lotissement ou de ZAC. Une démarche responsable en matière
environnementale dans le traitement de ces opérations nécessite
le recours à des moyens adaptés destinés à garantir
l'application des principes développés. L'aménageur public
ou privé3, en tant qu'intervenant de premier plan dans ces
opérations d'aménagement, a, de toute évidence, un
rôle à jouer dans la diminution de l'impact environnemental de ces
nouveaux fragments de villes, et de l'ensemble urbain auquel ils participent.
En effet, il doit répondre à la fois à une demande
croissance de la part des maîtres d'ouvrage publics, mais il peut aussi
les conseiller et les orienter grâce à son savoir-faire et son
positionnement comme expert auprès de ces derniers. Quelle place peut-il
prendre pour favoriser la prise en compte de la dimension environnementale dans
les opérations auxquelles il participe ? Quels sont les moyens dont il
dispose pour ce faire ?
1 A l'issue du premier tour le 14 mars 2010, les Verts
représentaient au niveau national plus de 12% des suffrages
exprimés.
2 Commissariat Général du Développement
Durable, Chiffres clés de l'énergie 2009, décembre 2009,
sur le site du Ministère
de l'Écologie, de l'Énergie, du
Développement Durable et de la Mer (MEEDDM).
3 Sont considérés les établissements
publics, les SEM et les aménageurs privés.
Introduction 5 / 59
L'aménageur intervient en premier lieu dans la
production des terrains à bâtir proprement dite (partie 1). Il
convient de considérer le cadre de son action, constitué par le
contrat qui le lie à la collectivité ayant l'initiative de
l'opération (chapitre 1). Puis l'aménageur peut participer
à une meilleure prise en compte de l'environnement dans la conception et
la réalisation des ouvrages concourant à l'opération
(chapitre 2). Les impacts environnementaux d'une opération ne se
limitant pas à la seule intervention de l'aménageur, les moyens
pour assurer la pérennisation des engagements pris sont un levier
essentiel à prendre en compte (partie 2). Ils concernent à la
fois les parcelles cédées (chapitre 1) et les espaces et
équipements destinés au domaine public (chapitre 2).
LISTE DES SIGLES ET ABRÉVIATIONS
AAPC Avis d'appel public à la concurrence
ADEME Agence de l'environnement et de la maîtrise de
l'énergie
AEU Approche environnementale de l'urbanisme
AMO Assistance à maîtrise d'ouvrage
BBC Bâtiment basse consommation
BET-VRD Bureau d'études techniques en voirie et
réseaux divers
BTP Bâtiment et travaux publics
CCAG Cahier des clauses administratives
générales
CCCT Cahier des charges de cession de terrain
CCTP Cahier des clauses techniques particulières
CE Conseil d'État
CGCT Code général des collectivités
territoriales
CPAUP Cahier des prescriptions architecturales, urbaines et
paysagères
CSPS Coordinateur en matière de sécurité
et protection de la santé
DIUO Documents d'intervention ultérieure sur ouvrage
DOE Dossier des ouvrages exécutés
DRE Direction régionale de l'équipement
EPCI Établissement public de coopération
intercommunale
HQE Haute qualité environnementale
PAZ Plan d'aménagement de zone
PGC Plan général de coordination
PGCSPS Plan général de coordination en
matière de sécurité et protection de la santé
PLU Plan local d'urbanisme
POS Plan d'occupation des sols
RT2005 Réglementation thermique 2005
SEM Société d'économie mixte
SHOB Surface hors oeuvre brute
SHON Surface hors oeuvre nette
THPE Très haute performance
énergétique
ZAC Zone d'aménagement concertée
6 / 59 Introduction
Partie 1 La dimension environnementale dans la production des
terrains à bâtir 7 / 59
PARTIE 1 LA DIMENSION
ENVIRONNEMENTALE DANS LA
PRODUCTION DES TERRAINS À BÂTIR
8 / 59 Partie 1 La dimension environnementale dans la
production des terrains à bâtir
CHAPITRE 1 LE CONTRAT DE L'AMÉNAGEUR
Tout aménageur intervenant dans une opération
d'aménagement d'initiative publique agit dans le cadre d'un contrat
passé avec la collectivité locale, l'État ou
l'établissement public en ayant pris l'initiative. Ces contrats
définissent a minima les missions qui lui sont confiées, les
modalités de leur réalisation et les conditions de leur
financement. Ainsi, l'activité de l'aménageur est bornée
au respect des clauses du contrat qui le lie à la collectivité,
sans se soustraire aux dispositions législatives et
règlementaires s'appliquant à ses activités. Deux types de
contrats régissent les relations entre les collectivités
maîtres d'ouvrage et les aménageurs (établissements
publics, SEM d'aménagement ou aménageurs privés) pour
encadrer l'intervention de ces derniers : le mandat (section 1) et la
concession d'aménagement (section 2).
Section 1 Le recours au mandat
Le mandat est un contrat administratif passé par une
collectivité publique (État, collectivité locale ou
établissement public) en vue de transférer à un mandataire
l'exécution d'un service pour son compte. Cette convention est un
marché public de prestation intellectuelle, soumis au code des
marchés publics. Les dispositions relatives à la publicité
et la mise en concurrence sont donc applicables. Les contrats passés par
le mandataire sont soumis aux règles applicables au mandant.
Les mandats passés en matière
d'aménagement relèvent de l'article R321-20 du Code de
l'urbanisme qui indique que « les collectivités publiques
[précitées] peuvent confier à des [SEM ou
établissements publics]4 de procéder, en leur nom et
pour leur compte, à la réalisation d'études, à des
acquisitions foncières, à l'exécution d'ouvrages et
à la construction d'ouvrages ou de bâtiments de toute nature
». La convention de mandat détermine les conditions
techniques, administratives et financières de la réalisation des
travaux. Elle précise notamment les conditions du contrôle du
mandataire par le mandant, et le processus de réception des ouvrages
s'il y a lieu.
Les aménageurs de type SEM interviennent en mandat
principalement pour la réalisation d'études préalables
à toute opération d'aménagement, en phase amont des
projets (I), et jusqu'à l'obtention du permis d'aménager un
lotissement (II). La réalisation d'une ZAC sous ce mode de relation
entre l'aménageur et le maître d'ouvrage public est envisageable
d'après les textes. Cependant, cette possibilité ne sera pas
traitée ici, car elle est très peu utilisée. C'est la
concession d'aménagement (section 2) qui est privilégiée,
étant l'outil prévu pour ce type d'opération. En effet, si
les concessions sont aujourd'hui applicables à des opérations
d'aménagement hors procédure, elles n'en ont pas moins
été créées pour réaliser des ZAC.
4 Les aménageurs privés ne sont pas
concernés par le mandat, qui est réservé aux
établissements publics et SEM.
Chapitre 1 Le contrat de l'aménageur 9 / 59
I Le mandat d'études préalables
Le mandat est la formule utilisée pour la
réalisation des études préalables à
l'opération d'aménagement, lorsque le maître d'ouvrage
public ne peut ou ne souhaite pas faire réaliser lui-même ces
études. En effet, ces études sont de la responsabilité
même de l'autorité publique à l'initiative du projet
d'aménagement envisagé. Ceci implique que si elle souhaite faire
réaliser ces études par un tiers, il convient de le faire sous la
forme d'un mandat, dans lequel le mandataire agira « au nom et pour le
compte » du mandant. Les études préalables à une
opération d'aménagement comprennent les études
nécessaires à la définition des principales
caractéristiques de l'opération (périmètre,
programme, bilan). Elles doivent permettre au mandant de statuer sur la
faisabilité et l'opportunité de l'opération
d'aménagement envisagée et conditionnent donc l'existence de
l'opération5.
Si la réalisation de l'opération est
prévue sous la forme d'une ZAC, les études préalables
doivent conduire à l'élaboration du dossier de création de
la ZAC6. Dans le document type du RéseauSCET pour la
rédaction d'une convention de mandat passés entre la SEM et une
collectivité pour la réalisation des études
préalables à une opération d'aménagement, il est
précisé que dans le cas où la ZAC est envisagée, le
mandat d'études a pour objectif de préparer l'approbation, par
l'organe compétent, des dossiers de création et de
réalisation de la ZAC. La collectivité peut alors confier au
mandataire la mission de rédaction des dossiers de création et de
réalisation. L'organe compétent procèdera à leur
approbation. Mais le mandat d'études préalables n'est pas
réservé aux études devant mener à la
création d'une ZAC. La réalisation de ces études peut
justement conduire à privilégier un autre type d'intervention,
comme le lotissement, en fonction des caractéristiques de
l'opération, du contexte foncier, etc.
Les études préalables à une
opération d'aménagement doivent comprendre, entre autres, les
évaluations environnementales imposées par la loi pour des
opérations dépassant les seuils d'application (A). Si le
maître d'ouvrage souhaite mettre en place la démarche de
l'approche environnementale de l'urbanisme, c'est à ce stade qu'elle
peut être initiée (B)7.
A/ Les études environnementales obligatoires
Le droit français prévoit de nombreuses
évaluations, qui visent à évaluer les conséquences
environnementales d'un projet. En raison de cette nature, deux
évaluations environnementales s'appliquent directement aux
opérations d'aménagement : l'étude d'impact (1) et le
document d'incidences au titre de la loi sur l'eau (2). Une nouvelle
étude obligatoire a été créée par la loi de
Grenelle 18 : l'étude de faisabilité sur les
énergies renouvelables (3).
5 RéseauSCET, Guide juridique des ZAC, 4ème
édition, 2010, p. 20
6 RéseauSCET, Guide juridique des ZAC, 4ème
édition, 2010, p. 20
7 L'approche environnementale de l'urbanisme (AEU) ne
relève pas à proprement parler du régime du mandat, car
l'ADEME
intervient dans ce cadre comme assistant à
maîtrise d'ouvrage (AMO). Cependant, comme pour le mandat, le mandant
garde la responsabilité de la réalisation et se fait assister par
une mission de prestation intellectuelle, ce qui justifie de traiter de cette
démarche dans cette section.
8 Loi n°2009-967 du 3 août 2009 de programmation
relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement.
10 / 59 Partie 1 La dimension environnementale dans la production
des terrains à bâtir
La portée de ces différentes évaluations
environnementales est considérée comme «
décevante », ou insuffisante. En effet, l'administration
conserve un pouvoir discrétionnaire pour se déterminer par
rapport à un projet. Ainsi, une évaluation environnementale
inquiétante ou alarmante ne la conduit pas nécessairement
à refuser d'autoriser le projet correspondant9. La
portée donnée à cette étude repose donc sur sa
prise en compte effective par le maître d'ouvrage et l'aménageur
dans l'ensemble du projet. C'est l'ambition de la démarche d'approche
environnementale de l'urbanisme (AEU) développée par l'ADEME
(voir B/ ci-après). On peut souligner aussi le manque
d'impartialité dont souffrent ces évaluations environnementales.
Elles sont commanditées et financées par les maîtres
d'ouvrages, ce qui les rend peu enclines à faire apparaître les
atteintes de l'opération à l'environnement.
1. L'étude d'impact des travaux et projets
d'aménagement10
Les études d'impact sont entrées en vigueur en 1978
et leur application est régie par les articles L. 122-1 à
L. 122-3 et R. 122-1 et suivants du code de l'environnement.
« Les études préalables à la réalisation
d'aménagements ou d'ouvrages qui, par l'importance de leur dimensions ou
leurs incidences sur le milieu naturel, peuvent porter atteinte à ce
dernier, doivent comporter une étude d'impact permettant d'en
apprécier les conséquences »11.
L'étude d'impact est conçue pour être une
référence pour l'aménageur qui doit effectivement la
prendre en compte dans le déroulement de l'opération.
Au-delà de son caractère règlementaire, elle doit guider
les actions de l'aménageur en faveur de l'environnement, et être
un prétexte à une réflexion globale dès l'amont du
projet. Bien souvent perçus comme une contrainte administrative
imposée, elle devrait être envisagée comme une incitation
à rechercher des solutions visant à limiter les impacts
recensés, assumant alors son rôle intégrateur. Le contenu
de cette étude est spécifié à l'article R. 122-3 du
code de l'environnement. Elle doit comporter, outre le résumé non
technique destiné à faciliter son appropriation par le public
lors d'une éventuelle enquête, cinq rubriques :
1. Une analyse de l'état initial du site et de son
environnement ;
2. L'analyse des effets du projet sur l'environnement ;
3. Les justifications du projet parmi les partis
envisagés ;
4. Les mesures proposées par le maître d'ouvrage
pour supprimer, réduire ou compenser les conséquences sur projet
pour l'environnement ;
5. Une analyse des méthodes utilisées, et les
difficultés éventuelles rencontrées.
9 V. INSERGUET-BRISSET, Droit de l'environnement, PUR, collection
Didact Droit, 2005, p. 100
10 Il s'agit ici de l'étude d'impact de droit commun.
La notice d'impact, qui est une étude d'impact simplifiée,
à présenter pour des projets de petite envergure ne s'appliquant
pas aux lotissements ni aux ZAC, il n'y sera pas fait mention dans ce
paragraphe. L'étude d'impact des installations classées ne sera
pas abordée non plus, en vertu du fait qu'elles ne s'appliquent pas aux
opérations d'aménagement.
11 Article L122-1 du Code de l'Environnement
Chapitre 1 Le contrat de l'aménageur 11 / 59
Pour les opérations qui nous concernent, le champ
d'application de l'étude d'impact est présenté dans le
tableau suivant :
|
Lotissement permettant la construction de moins de
5000m2 de SHOB
|
Lotissement permettant la construction de plus de
5000m2 de SHOB
|
Création d'une ZAC (quelle que soit la taille de
l'opération)
|
Commune dotée d'un PLU, d'un POS ou d'un document en
tenant lieu ayant fait l'objet d'une enquête publique
|
-
|
-
|
Soumis à étude d'impact**
|
Commune non dotée d'un PLU, d'un POS ou d'un document en
tenant lieu ayant fait l'objet d'une enquête publique
|
-
|
Soumis à étude d'impact*
|
Soumis à étude d'impact**
|
* article R. 122-6 du code de l'environnement / ** article R.
122-8 du code de l'environnement Tableau 1: Soumission des
opérations à l'étude d'impact
(Réalisation Céline GARNIER, mai 2010)
Il apparaît d'après ce tableau une
différence dans les critères de soumission à
l'étude d'impact entre les lotissements et les ZAC. L'exclusion des
lotissements du champ d'application de l'étude d'impact dans les
communes dotées de documents d'urbanisme pourrait s'expliquer par le
fait que ces derniers sont déjà soumis à une
évaluation environnementale s'apparentant beaucoup à
l'étude d'impact12. Mais cette évaluation
environnementale n'est imposée qu'aux PLU ayant « des effets
notables sur l'environnement »13, ce qui exclut bon nombre
de lotissements de toute évaluation d'impacts. De plus, « on
[considérerait] à tort que le PLU à lui seul a
suffisamment pris en compte l'environnement alors qu'un lotissement, bien que
devant être conforme au PLU, peut très bien introduire des
bouleversements sociaux et écologiques qui n'auront fait l'objet
d'aucune réflexion préalable »14. Par
ailleurs, dans la mesure où les ZAC ne disposent plus de leur statut
dérogatoire en matière de droit des sols applicable sur leur
périmètre, une telle distinction entre ZAC et lotissement
apparaît incohérente. En l'absence de révélateur des
impacts créés par le lotissement sur l'environnement grâce
à une étude d'impact, il est délicat de prendre
effectivement en compte ces effets dans la suite de l'opération.
2. Le document d'incidences au titre de la loi sur
l'eau
Le document d'incidences au titre de la loi sur l'eau,
n°92-3 du 3 janvier 1992 est un mécanisme d'évaluation
spécifique aux installations, ouvrages et travaux d'aménagement
soumis à autorisation ou à
12 V. INSERGUET-BRISSET, op. cit., p. 92.
13 Cette évaluation environnementale
créée par l'ordonnance n°2004-489 du 3 juin 2004 transpose
la directive 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil, du 27 juin
2001, relative à l'évaluation des incidences de certains plans et
programmes sur l'environnement.
14 M. PRIEUR, Droit de l'environnement, Précis Dalloz,
5ème édition, 2004.
12 / 59 Partie 1 La dimension environnementale dans la production
des terrains à bâtir
déclaration au titre de l'article 10 de la loi. Il
s'agit d'évaluer plus spécifiquement les conséquences du
projet sur la ressource en eau, tant sur le plan quantitatif que sur le plan
qualitatif, pour rentrer dans le cadre d'une gestion planifiée,
prévue par la loi.
Les opérations d'aménagement comme les ZAC et
les lotissements, réalisés en extension urbaine, sont soumis aux
dispositions des articles L. 214-3 et R. 214-1 et suivants du code de
l'environnement, en tant que « ouvrages [et] travaux [...]
susceptibles [...] de nuire au libre écoulement des eaux ». En
effet, l'aménagement d'une telle zone implique nécessairement la
création de surfaces imperméabilisées, le régalage
des terres, modifiant les conditions initiales d'écoulement des eaux. Il
relève de la rubrique 2.1.5.0 de la nomenclature des opérations
soumises à autorisation ou à déclaration en application
des articles L. 214-1 à L. 214-3 du code de l'environnement : «
Rejets d'eaux pluviales dans les eaux douces superficielles ou sur le sol
ou dans le sous-sol ». Si la surface du projet, augmentée de a
surface correspondant à la partie du bassin naturel dont les
écoulements sont interceptés par le projet est comprise entre 1
et 20 hectares, l'opération est soumise à déclaration. Si
cette surface est supérieure à 20 hectares, elle est soumise
à autorisation. Le document d'incidences est instruit par les services
de l'État compétents sur le territoire concerné par
l'opération.
Dans le cadre d'une ZAC, le document d'incidences
rédigé au titre de la loi sur l'eau fait partie du dossier de
création, au même titre que l'étude d'impact. Leur
rédaction peut être confiée à un même
prestataire. Pour la ZAC du Bois Bocquet à Tourville-la-Rivière,
c'est la formule qui a été retenue par Rouen Seine
Aménagement. L'étude d'impact, le document d'incidences au titre
de la loi sur l'eau, ainsi que l'étude hydraulique faisaient partie
d'une même mission confiée à un bureau d'études dans
le cadre d'un marché unique. Sur le plan de la commande publique, il
n'est pas certain qu'une telle démarche ne soit pas de nature à
exclure des petits bureaux d'études des candidats potentiels. Ils
pourraient malgré tout se présenter sous la forme de groupements.
Pour éviter cet écueil, on peut envisager de passer un
marché alloti, dans lequel les candidats peuvent présenter une
offre pour plusieurs lots en même temps. Si deux interlocuteurs
différents sont choisis, ils auront à collaborer dans la mesure
où les deux dossiers sont complémentaires. Il est alors opportun
de le mentionner dans les documents de la consultation.
3. L'étude de faisabilité énergies
renouvelables
Introduite par la loi du 3 août 200915, cette
étude doit être réalisée pour toute action ou
opération d'aménagement telle que définie à
l'article L. 300-1, soumise à étude d'impact16. Compte
tenu du champ d'application de l'étude d'impact pour les
opérations dont traite ce mémoire, les lotissements permettant de
créer plus de 5000m2 de SHOB sur le territoire d'une commune
non couverte par un document d'urbanisme et les ZAC y seront soumis.
L'étude de faisabilité porte sur le potentiel de
développement en énergie renouvelable sur la zone, en particulier
sur l'opportunité de la création ou du raccordement à un
réseau de chaleur ou de froid ayant
15 Loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation
relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement.
16 Voir 1. L'étude d'impact des travaux et projets
d'aménagement, p. 10
Chapitre 1 Le contrat de l'aménageur 13 / 59
recours aux énergies renouvelables et de
récupération17. Elle doit être
intégrée au dossier de création de la ZAC18, le
cas échéant. L'intérêt de cette nouveauté est
qu'elle renverse le raisonnement à tenir face à la
création éventuelle d'un réseau de chaleur alimenté
en énergies renouvelables, ou le raccordement d'une opération
à un réseau existant. Jusqu'à présent, la
justification portait sur l'opportunité et l'intérêt d'un
tel investissement. Désormais, il faudrait justifier le fait de ne pas
le proposer. Cependant, le décret d'application n'étant pas
publié, nous avons peu d'informations quant à la mise en oeuvre
effective de cet article du code de l'urbanisme.
Dans le cadre de la ZAC Aubette-Martainville (Rouen), Rouen
Seine Aménagement (SEM titulaire de la concession d'aménagement),
souhaitait proposer au maître d'ouvrage la mise en place d'un
réseau de chaleur alimenté en géothermie sur le
périmètre de l'opération. Un bureau d'études avait
établi la faisabilité et l'opportunité de
l'investissement, mais les élus ne se sont pas laissés
convaincre. Les difficultés venaient du fait qu'il est délicat
d'imposer le raccordement au réseau, et donc d'assurer la
rentabilité de l'opération ; de l'absence d'expérience sur
ce type de technologie (aucun réseau de chaleur alimenté en
géothermie basse énergie n'existe encore à ce jour) ; les
difficultés juridiques de la réalisation (faire approuver un
nouveau dossier de réalisation pour intégrer les canalisations du
réseau dans le programme des équipements publics) et la
contrainte du calendrier (la mise en place d'un réseau de chaleur en
cours d'opération risquait de retarder l'ensemble du processus, alors
que des terrains étaient déjà cédés).
L'application des dispositions de l'article L. 128-4 en amont des
opérations d'aménagement est de nature à favoriser la
création de réseaux de chaleur et les énergies
renouvelables.
B/ L'approche environnementale de l'urbanisme : pour
une prise en compte effective de l'étude d'impact
Le maître d'ouvrage public peut souhaiter mettre en
place une démarche volontariste en matière d'environnement, par
le biais de l'approche environnementale de l'urbanisme par exemple. Dans ce
cas, cette démarche doit préférentiellement être
mise en place dès le stade des études préalables.
L'approche environnementale de l'urbanisme (AEU) est une démarche
proposée par l'ADEME. Elle s'applique aussi bien pour la
rédaction des documents de planification que pour la réalisation
d'opérations d'aménagement.
L'AEU vise à répondre à plusieurs
objectifs : il s'agit de contribuer au respect des exigences
règlementaires en matière d'environnement, de faciliter
l'intégration des politiques environnementales, de concrétiser
les principes d'une qualité urbaine plus durable et de contribuer
concrètement à la qualité environnementale des projets
urbains. Pour cela, la question environnementale est abordée dans sa
globalité autour de l'opération. Ainsi, différentes
thématiques sont traitées : choix énergétiques,
environnement climatique, gestion des déplacements, gestion de l'eau,
gestion des déchets, environnement sonore, sites et sols pollués,
diversité biologique, paysages...
17 Article L. 128-4 du code de l'urbanisme.
18 RéseauSCET, Guide juridique des ZAC, op. cit. p. 24.
14 / 59 Partie 1 La dimension environnementale dans la production
des terrains à bâtir
La démarche de l'AEU prend la forme de l'assistance
à maîtrise d'ouvrage proposée par l'ADEME. Elle se
décline aux différents stades du projet d'aménagement, en
commençant par les études préalables, et en particulier
l'étude d'impact à laquelle elle peut apporter des
compléments. Au fur et à mesure du projet, l'assistant à
maîtrise d'ouvrage AEU pourra contribuer à la définitions
d'objectifs sur l'économie générale du projet, aider
à la définition d'orientations pour la programmation et la
définition du projet, permettre d'optimiser le projet en matière
d'environnement, ... « L'interlocuteur AEU® est un animateur qui
a des convictions, il doit les défendre et sert de médiateur
entre le maître d'ouvrage et le maître d'oeuvre. Ce n'est pas
rajouter un acteur supplémentaire. On décloisonne les structures
institutionnelles. L'intérêt est que cet animateur puisse faire
sauter les verrous pour trouver une synergie dans un même objectif qui
est d'insuffler du développement durable dans le développement de
la ville »19.
II L'obtention du permis d'aménager un
lotissement
Cette phase de l'opération du lotissement peut
être réalisée à la fois sous mandat, mais aussi dans
le cadre de la concession liant l'aménageur à la
collectivité.
Deux procédures de contrôle administratif
coexistent pour préparer la mise en oeuvre d'un lotissement et la prise
en compte de la protection de l'environnement diffère d'une
procédure administrative à l'autre. Nous distinguerons donc les
lotissements soumis à permis d'aménager (A) et les lotissements
soumis à déclaration préalable (B). Les champs
d'application respectifs de ces deux procédures sont définis aux
articles R. 421-19a et R. 421-23a du code de l'urbanisme,
issus du décret du 5 janvier 2007 pris pour l'application de
l'ordonnance du 8 décembre 200520.
A/ Les lotissements soumis à permis
d'aménager
Les lotissements soumis à permis d'aménager sont
les lotissements qui répondent aux deux conditions cumulatives suivantes
:
- ils permettent la création de plus de deux lots sur une
période de moins de dix ans et
- ils prévoient la réalisation de voie ou
d'espace commun ou sont localisés dans un secteurs sauvegardé ou
un site classé.
La demande de permis d'aménager, dont le contenu est
fixé par l'article R.* 441-1 du code de l'urbanisme, est
accompagnée d'un dossier décrivant le projet. Depuis le
décret du 5 janvier 200721, ce dossier comprend, entre
autres, le projet architectural, paysager et environnemental, qui
présente les principales caractéristiques du projet, grâce
à une notice précisant l'état initial du terrain, les
partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la
prise en compte des paysages.
19 Jean-Christophe Rousseau / Architecte - Urbaniste, Cabinet
Forma 6, brochure ADEME « L'approche environnementale de l'urbanisme pour
concilier urbanisme et environnement », mars 2008, p. 2/6
20 Ordonnance n°2005-1527 du 8 décembre 2005 relative
aux permis de construire et aux autorisations d'urbanisme.
21 Décret n° 2007-18 du 5 janvier 2007 pris pour
l'application de l'ordonnance n° 2005-1527 du 8 décembre 2005
relative au
permis de construire et aux autorisations d'urbanisme.
Chapitre 1 Le contrat de l'aménageur 15 / 59
Loin d'être aussi complète que l'étude
d'impact, cette notice donne à voir quelques effets du projet sur
l'environnement : profil du terrain, conservation des arbres, insertion
visuelle et paysagère, mesures pour la collecte des déchets,
traitement des espaces collectifs, imperméabilisation des sols... Ceci
permet d'obliger à un questionnement, même restreint, relatif
à l'impact environnemental des lotissements créés dans les
communes dotées d'un document d'urbanisme, lorsqu'ils sont soumis
à permis d'aménager, mais reste largement insuffisant pour
réaliser une démarche intégrée et volontariste.
B/ Les lotissements soumis à déclaration
préalable
La déclaration préalable n'est pas un
véritable régime déclaratif, il s'agit plutôt d'un
régime d'autorisation simplifié. Le déclarant ne peut
mettre en oeuvre son projet que si l'autorité administrative n'a pas
manifesté son opposition. Il s'agit d'alléger le contrôle
mais pas de le faire disparaître.
Concernant son contenu, la déclaration préalable
en elle-même est à peu près identique à la demande
de permis d'aménager. En revanche, le dossier à joindre à
la déclaration est beaucoup plus « léger ». Il ne
contient qu'« un plan de situation du terrain, un plan sommaire des
lieux indiquant les bâtiments existants su le terrain, un croquis et un
plan de l'aménagement projeté coté dans les trois
dimensions, faisant apparaître, le cas échéant, la ou les
divisions projetées »22. Ce dossier ne comprend
donc aucun document de nature à évaluer les impacts du
lotissement projeté sur l'environnement, ni de mesures destinées
à limiter les effets négatifs du projet sur l'environnement.
Ainsi, tout lotissement soumis à déclaration préalable
situé dans une commune dotée d'un document d'urbanisme ne fait
l'objet d'aucune étude portant sur les impacts de l'opération sur
l'environnement.
22 H. JACQUOT, F. PRIET, Droit de l'urbanisme, Précis
Dalloz, 6ème édition, 2008, p. 603.
16 / 59 Partie 1 La dimension environnementale dans
la production des terrains à bâtir
Section 2 Le contrat de l'aménageur : la
concession d'aménagement
L'article L. 300-4 du code de l'urbanisme prévoit que
l'État et les collectivités territoriales ainsi que leurs
établissements publics peuvent « concéder la
réalisation des opérations d'aménagement prévues
par le présent code à toute personne y ayant vocation
», sans opérer de distinction entre les établissements
publics, les SEM et les autres aménageurs privés. Si dans le
cadre d'un mandat, le mandataire agit au nom et pour le compte de son
mandant, dans le cadre de la concession d'aménagement,
l'aménageur agit pour son propre compte. La passation d'une concession
d'aménagement relève d'un régime particulier (I)
défini dans code de l'urbanisme23. Ce régime donne une
certaine marge de manoeuvre à l'aménageur (II), et permet de
mettre en place un contexte favorable à la prise en compte de
l'environnement dans le projet.
I Le régime de la concession
d'aménagement
On peut établir deux critères cumulatifs
constitutifs d'une concession d'aménagement :
- le contrat porte sur une véritable opération
d'aménagement. Une opération d'aménagement doit comporter
trois aspects : acquisitions foncières, réalisation
d'équipements publics et privés, et commercialisation. Et elle
est réalisée en vue d'atteindre l'un des objectifs prévus
par la loi : organiser des activités ou ordonnancer l'urbanisation sur
une portion significative de son territoire24 ;
- le contrat opère un réel transfert de la
maîtrise d'ouvrage de l'opération du concédant à
l'aménageur25. L'article L. 300-4 du code de l'urbanisme
précise que « le concessionnaire assure la maîtrise
d'ouvrage des travaux et équipements concourant à
l'opération », contrairement au mandat dans lequel le
mandataire agit au nom et pour le compte du mandant.
Deux types de concessions d'aménagement coexistent :
- les concessions d'aménagement pour lesquelles
l'aménageur assume une part significative du risque économique de
l'opération. Ces concessions constituent des concessions de travaux au
sens du droit communautaire ;
- les concessions d'aménagement pour lesquelles
l'aménageur n'assume pas une part significative du risque
économique de l'opération. Ces concessions constituent des
marchés de travaux au sens du droit communautaire, mais restent bien des
concessions d'aménagement au sens du code français de
l'urbanisme26. Elles sont soumises aux
23 Articles L. 300-4 à L. 300-6 et R*. 300-4 à R*.
300-14 du code de l'urbanisme. Le contenu de ces articles a
été
sensiblement modifié par la loi n°2005-809 du 20
juillet 2005relative aux concessions d'aménagement et la loi
n°2006-872 du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le
logement.
24 Code des marchés publics et autres contrats, Dalloz,
op. cit., p. 1106.
25 RéseauSCET, Les procédures de passation des
concessions d'aménagement suite au décret n°2008-889 du 27
juillet 2009, Dossiers du réseau, n°14/2009 de septembre 2009, p.
5.
26 RéseauSCET, Concessions d'aménagement - le
décret est paru, Flash du réseau, n°08/2009 du 30 juillet
2009, p. 3.
Chapitre 1 Le contrat de l'aménageur 17 / 59
dispositions des articles L. 300-4 et suivants du code de
l'urbanisme pour définir la procédure de passation applicable,
qui doit malgré tout respecter les principes essentiels du droit
européen en matière de commande publique27.
Avant de traiter des différentes procédures
applicables à la passation des concessions d'aménagement, il
convient de préciser les opérations relevant de ce type de
contrat.
A/ Les opérations relevant des concessions
d'aménagement
Les opérations pouvant être
concédées par les personnes publiques en ayant l'initiative sont
les opérations d'aménagement du code de l'urbanisme,
c'est-à-dire les opérations qui « ont pour objet de
mettre en oeuvre un projet urbain, une politique locale de l'habitat,
d'organiser le maintien, l'extension ou l'accueil des activités
économiques, de favoriser le développement des loisirs et du
tourisme, de réaliser des équipements collectifs ou des locaux de
recherche ou d'enseignement supérieur, de lutter contre
l'insalubrité, de permettre le renouvellement urbain, de sauvegarder ou
de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces
naturels »28. L'opération d'aménagement
présente en principe un triple aspect : acquisitions foncières,
construction d'équipements publics et privés, et
commercialisation. Elle doit en outre être réalisée en vue
d'atteindre l'un des objectifs précités29.
L'opération la plus caractéristique est la ZAC, mais on peut y
ajouter entre autres30, le lotissement. En effet, celui-ci est
défini expressément comme une opération
d'aménagement à l'article L. 442-1 du code de l'urbanisme :
« Constitue un lotissement l'opération d'aménagement qui
a pour objet [...] ». Ainsi, les deux types d'opérations dont
traite le présent mémoire (lotissement et ZAC) sont
concernées par la concession d'aménagement.
Il est à noter que la concession d'aménagement
relative à une ZAC ne peut être signée avant l'approbation
du dossier de création de celle-ci31. En effet, la concession
d'une opération d'aménagement ne peut précéder son
existence. Dans le cas d'un lotissement, la signature de la concession
d'aménagement intervient après la délibération de
la collectivité créant l'opération d'aménagement.
La concession peut comprendre l'obtention du permis d'aménager par le
concessionnaire.
B/ Les procédures de passation des concessions
d'aménagement
La passation des concessions d'aménagement a longtemps
été dérogatoire des règles générales
applicables à la commande publique en France. Des réformes ont
été conduites sous la pression du droit communautaire, dont les
principes relatifs à la commande publique impliquent une obligation de
transparence qui suppose une publicité adéquate et une obligation
d'impartialité dans les procédures. Les règles
actuellement applicables à la passation des concessions
d'aménagement sont les dispositions issues de la loi du 20 juillet
200532, du décret du 31 juillet 200633 et du
décret du 22 juillet 200934, codifiés aux articles L.
300-1 et suivants et R.* 300-4 et suivants du code de l'urbanisme.
27 Directive 2004/18/CE du Parlement européen et du
Conseil, du 31 mars 2004 relative à la coordination des
procédures de passation des marchés publics de travaux, de
fournitures et de services.
28 Article L. 300-1 du code de l'urbanisme
29 Code des marchés publics et autres contrats
commenté, 3ème édition, Dalloz, 2010, p. 1106
18 / 59 Partie 1 La dimension environnementale dans la production
des terrains à bâtir
Différentes procédures de passation sont
prévues pour les concessions d'aménagement, selon le montant des
produits prévisionnels, selon qu'elles soient soumises au droit
communautaire des concessions ou des marchés, et selon d'autres
caractéristiques tenant aux relations avec le concédant et
à l'attribution de prérogatives de puissance publique. Le tableau
suivant synthétise les procédures applicables en fonction des
situations :
Situation
|
Procédure applicable
|
Source du droit
|
Montant total des produits prévisionnels du contrat
inférieur à 5 150 000 € HT
|
Procédure adaptée
C. urb., art. R.* 300-11-7 et 8
|
Principes généraux du droit
communautaire
Code de l'urbanisme
|
Montant total des produits prévisionnels du contrat
supérieur à 5 150 000 € HT
|
L'aménageur assume une part significative du risque
économique de l'opération
|
Participation > à 135 000 € HT Ou terrains devant
être acquis auprès du concédant > 10% Ou terrains devant
être expropriés ou préemptés > 10%
|
Procédure «concession de travaux» normale
C. urb., art. R.* 300-4 à R.* 300-11
|
Droit
communautaire des concessions
Code de l'urbanisme
|
Participation < à 135 000 € HT Et terrains devant
être acquis auprès du concédant < 10% Et terrains devant
être expropriés ou préemptés < 10%
|
Procédure «concession de travaux»
simplifiée
C. urb., art. R.* 300-11
|
L'aménageur n'assume pas une part significative du risque
économique de l'opération
|
Procédure «marché
de travaux» (appelcommunautaire
d'offres, dialogue
compétitif ou procédure négociée)
C. urb., art. R.*
300-11-1 à R.* 300-Code 11-6
CGCT, art. L. 1414- 1 et suivants
|
Droit
des
marchés
Code de l'urbanisme
général des collectivités territoriales
|
Tableau 2: Procédures de passation de
concessions d'aménagement applicables suivant les situations
(Réalisation : Céline GARNIER, Source :
RéseauSCET, les procédures de passation des concessions
d'aménagement suite au décret n°2009-889 du 22 juillet 2009,
Dossiers du Réseau)
30 Une concession d'aménagement peut aussi être
conclue en vue de réaliser des opérations de restauration
immobilière, des opérations dans les secteurs sauvegardés,
etc.
31 Article R. 311-2 du code de l'urbanisme
32 Loi n°2005-809 du 20 juillet 2005 relative aux
concessions d'aménagement
33 Décret n°2006-959 du 31 juillet 2006 relatif aux
conditions de passation des concessions d'aménagement et des contrats
conclus par les concessionnaires et modifiant le code de
l'urbanisme.
34 Décret n°2009-889 du 22 juillet 2009 relatif aux
concessions d'aménagement.
Chapitre 1 Le contrat de l'aménageur 19 / 59
Les différentes procédures de passation
évoquées sont très proches des dispositions applicables
aux conventions de délégation de service public et aux
concessions de travaux au sens de la directive 2004/18/ CE du Parlement
Européen et du Conseil, du 31 mars 2004 relative à la
coordination des procédures de passation des marches publics de travaux,
de fournitures et de services.
L'article R.* 300-11-7 indique que les concessions
d'opérations dont le montant des produits prévisionnels du
contrat sont inférieurs à 5 150 000€HT, « font
l'objet, préalablement à leur attribution, d'une publicité
et d'une procédure adaptées dont les modalités sont
fixées par le concédant en fonction de la nature et des
caractéristiques de l'opération envisagées ».
Cette publicité et cette procédure adaptées doivent
respecter les principes généraux du droit communautaire
énoncés dans la directive 2004/18/CE35.
Les procédures relevant du droit communautaire des
concessions se déroulent avec une phase de négociation entre
l'exécutif de la collectivité concédante avec un ou
plusieurs candidats, après transmission de leurs propositions. Les
procédures soumises au droit communautaire des marchés sont
l'appel d'offres et le dialogue compétitif. La procédure
négociée est aussi mentionnée. Cependant, étant une
procédure dérogatoire, elle ne devrait être mise en oeuvre
que de façon marginale36 et ne sera pas évoquée
ici. Ces procédures sont issues du code général des
collectivités territoriales, complété par quelques
dispositions du code de l'urbanisme (cf tableau ci-dessus) relatives au
caractère particulier des opérations d'aménagement dans
les contrats publics relevant de la législation interne.
II Le rôle de l'aménageur et la place
accordée à l'environnement
A/ La réponse à l'appel d'offres
L'engagement environnemental est à établir
dès la signature de la concession d'aménagement, et ce d'autant
plus que les nouvelles concessions d'aménagement seront moins
aisément modifiables par avenants. En effet, celles-ci étant
conclues après publicité et mise en concurrence de plusieurs
opérateurs économiques, une modification substantielle du contrat
en cours de réalisation méconnaîtrait les principes
généraux de la commande publique : « les pouvoirs
adjudicateurs traitent les opérateurs économiques sur un pied
d'égalité de manière non discriminatoire et agissent avec
transparence »37. L'aménageur peut s'impliquer en
ce sens au cours de la procédure mise en place pour le choix du
concessionnaire. Il peut être une force de proposition auprès des
maîtres d'ouvrage public dans ses propositions.
35 Directive 2004/10/CE du Parlement européen et du
Conseil du 31 mars 2004 relative à la coordination des procédures
de passation des marchés publics de travaux, de fourniture et de
services.
36 RéseauSCET, les procédures de passation des
concessions d'aménagement suite au décret n°2009-889 du 22
juillet 2009, Dossiers du Réseau, p. 16.
37 Article 2 de la Directive 2004/18/CE u Parlement
européen et du Conseil du 31 mars 2004 relative à la coordination
des procédures de passation des marchés publics de travaux, de
fourniture et de services.
Voir B/ Marge de manoeuvre de l'aménageur pendant la
durée du contrat, p.20.
20 / 59 Partie 1 La dimension environnementale dans la production
des terrains à bâtir
La passation des concessions d'aménagement relevant du
régime communautaire des concession comporte des phases de discussion
libre entre le concédant et les candidats38, pendant
lesquelles l'aménageur peut faire valoir un engagement en matière
d'environnement.
Pour les procédures soumises à la
réglementation européenne des marchés, il est
précisé que « les critères de choix des offres
sont définis et appréciés de manière à
prendre en considération le respect des exigences du
développement durable exprimées par la personne publique,
notamment en matière de [...] performances environnementales [...]
»39. Cette disposition favorise une implication importante
de l'aménageur sur ce sujet. En effet, l'offre à retenir par le
concédant est l'offre « la plus économiquement
avantageuse ». Une réponse qualitative de l'aménageur
apportant une plus-value environnementale intéressante pourra être
privilégiée à une réponse d'un montant
inférieur mais moins complète de la part d'un concurrent. Mais
pour être pris en compte, la collectivité concédante doit
avoir prévu l'environnement dans les critères de choix du
concessionnaire, en amont de la procédure. Dans l'appel d'offres comme
dans le dialogue compétitif, l'offre des candidats reste intangible
après leur remise à l'autorité concédante, en vertu
de l'article L. 1414-5 du code général des collectivités
territoriales. Celui-ci indique que les demandes formulées par
l'autorité concédante aux candidats après le
dépôt de leur offre finale « ne peuvent avoir pour effet
de modifier des éléments fondamentaux de l'offre ou les
caractéristiques essentielles du contrat dont la variation est
susceptible de fausser la concurrence ou d'avoir un effet discriminatoire
».
Il convient de remarquer que lorsque l'aménageur a
déjà été mandaté par la collectivité
pour réaliser les études préalables à
l'opération, la concurrence introduite par la passation de la concession
d'aménagement apparaît largement faussée par rapport
à d'autres concurrents n'ayant pas une telle maîtrise du contexte
et des enjeux de l'aménagement prévu.
B/ La marge de manoeuvre de l'aménageur pendant
la durée du contrat
Dans une concession d'aménagement, une partie du risque
financier lié à l'opération est portée par
l'aménageur lui-même. En effet, il est en principe
rémunéré par la commercialisation des terrains
aménagés. La participation du concédant au coût de
l'opération n'est pas érigée en règle au vu de la
formulation même de l'article L. 300-5 du code de l'urbanisme qui impose
des clauses au contrat d'aménagement « lorsque le
concédant décide de participer au coût de
l'opération ». Malgré cela, les participations
publiques, financières ou en nature sont souvent nécessaires pour
la réalisation des équipements publics prévus, et
l'équilibre financier de l'opération40.
38 Article R.* 300-7 du code de l'urbanisme : « Le
concédant choisit le concessionnaire [...] après avoir
engagé librement toute discussion utile avec une ou plusieurs personnes
ayant remis une proposition »
39 Article R. 300-11-3 du code de l'urbanisme
40 Code des marchés publics et autres contrats
commenté, op. cit., p. 1108.
Chapitre 1 Le contrat de l'aménageur 21 / 59
Cette responsabilité financière de
l'aménageur dans la concession d'aménagement lui confère
une légitimité pour prendre certaines initiatives pendant la
durée du contrat le liant à l'autorité concédante.
Ainsi, dans l'opération du Technopôle du Madrillet,
l'aménageur a devancé la décision politique d'agir en
faveur de l'environnement. Une démarche environnementale a
été conduite à l'initiative de l'aménageur, puis
validée par les élus. C'est ensuite l'aménageur qui a
organisé la création d'un système de management
environnemental visant la certification ISO 14 001 de ses activités pour
la gestion de l'opération. La SEM s'est assuré les services d'un
consultant, sur le budget de l'opération. La démarche
initiée doit ensuite être validée par le syndicat mixte du
Technopôle du Madrillet (maître d'ouvrage de l'opération),
et la mission de responsable du système de management environnemental
intégrée au bilan de l'opération pour que le maître
d'ouvrage donne à la SEM les moyens des ambitions affichées.
Le concessionnaire doit toutefois agir dans le respect des
clauses de la concession conclue avec le concédant. Si des modifications
doivent être opérées, la « solution » ne pourrait
venir d'un avenant au contrat dans la mesure où les avenants d'un
contrat conclu après mise en concurrence ne sont envisageables que s'ils
ne modifient pas de façon substantielle l'un des éléments
essentiels du contrat. Si les « éléments essentiels »
du contrat sont à apprécier au cas par cas, la
rémunération de l'aménageur doit en faire partie. Ainsi,
un engagement tardif en matière d'environnement, venant se
réaliser pendant la concession d'aménagement ne pourrait se
traduire par un engagement financier supplémentaire de la part du
concédant. Mais on peut aussi imaginer qu'un aménageur souhaite,
pour des raisons tenant de la stratégie commerciale ou du positionnement
de sa société pour des opérations futures, s'investir en
faveur de l'environnement pour l'une ou l'autre de ses opérations, et le
fasse sur ses moyens propres sans requérir d'avenant de la part du
concédant. Ces cas resteront probablement rares, d'autant plus que la
volonté politique et l'implication du concédant constituent un
facteur de réussite d'un projet, en particulier dans sa composante
environnementale. Et ils demeurent soumis au contrôle du concédant
qui peut exiger d'être informé en détail de
l'exécution financière et patrimoniale de la
convention41, en vertu de l'article L. 300-5 du code de l'urbanisme,
en particulier lorsque le concédant participer au coût de
l'opération.
Cette limitation dans la passation des avenants réduit
les marges d'évolutions des nouvelles concessions d'aménagement.
Le programme aura dû être précisément défini
en amont par le concédant42. Les opérations
d'aménagement étant des opérations longues,
s'étendant souvent sur plusieurs années, ceci pourrait
réduire la capacité d'adaptation des opérations au nouveau
contexte local. C'est particulièrement vrai pour les opérations
dont les durées peuvent atteindre plus de vingt ans : les
opérations réalisées sur de vastes territoires, et les
créations de zones d'activités économiques, dont la
réalisation est souvent plus longue que les opérations à
vocation d'habitat. Si des exercices de prospective sont menés lors des
études préalables, des études de marché
liées à ces opération, il demeure indéniable que de
fortes évolutions peuvent se produire sur des périodes de dix ou
vingt ans.
Par exemple, il est imposé par la loi du 3 août
200943 que les bâtiments tertiaires dont les permis de
construire seront déposés à partir du 1er janvier 2011 (et
les bâtiments à usage d'habitation dont les
41 Code des marchés publics et autres contrats
commenté, op. cit., p. 1111.
22 / 59 Partie 1 La dimension environnementale dans la production
des terrains à bâtir
permis de construire seront déposés à
partir du 1er janvier 2012) devront justifier d'une consommation
d'énergie primaire inférieure à la moitié de la
RT2005, c'est-à-dire de respecter la norme Bâtiment Basse
Consommation (BBC). Cette règle s'appliquera aux demandes de permis de
construire déposées pour des terrains situés dans le
périmètre des zones en cours d'aménagement. Celles qui
sauront s'adapter en donnant les moyens d'atteindre plus facilement ces
performances aux bâtiments qui seront construits sur leur
périmètre gagneront un potentiel de commercialisation. En effet,
le seuil de consommation d'énergie primaire sera notamment modulé
en fonction des émissions de gaz à effet de serre
générées par les installations de fourniture
d'énergie. Ainsi, l'utilisation de la géothermie sera avantageuse
par rapport à d'autres types d'énergie. L'application des
prescriptions architecturales de nature à favoriser des bâtiments
économes, ou la création d'un réseau de chaleur
alimenté en énergie renouvelable, la desserte des bâtiments
par le gaz sont autant de moyens de bonifier le calcul de la consommation
d'énergie primaire des bâtiments, en limitant les surcoûts
lors de la construction.
Pour ne pas entraver la possibilité de faire
évoluer l'opération d'aménagement avec le contexte
économique, financier, ou législatif, les termes de la concession
ne doivent pas être trop précis, et peuvent se
référer à des objectifs plutôt qu'à des
moyens.
42 RéseauSCET, Concessions d'aménagement - le
décret [n°2009-889 du 22 juillet 2009 relatif aux concessions
d'aménagement] est paru, Flash du Réseau, n°08/2009 du 30
juillet 2009, p. 5
43 Loi n°2009-967 du 3 août 2009 de programmation
relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement.
Chapitre 2 La conception et la réalisation de
l'opération 23 / 59
CHAPITRE 2 LA CONCEPTION ET LA RÉALISATION
DE L'OPÉRATION
Si la prise en compte de l'environnement dans la
définition du projet est importante dès la phase amont, au moment
des études préalables, il n'est pas moins nécessaire de
lui accorder la place qui doit lui revenir dans la production de
l'opération en elle-même. Cette phase comprend : la conception de
l'opération dans son ensemble, et en particulier des espaces et ouvrages
publics relevant de la maîtrise d'ouvrage de l'aménageur (section
1), et la réalisation de ceux-ci (section 2).
Section 1 La phase de conception
La conception d'ensemble de l'opération, et des espaces
publics revient à la maîtrise d'oeuvre retenue par
l'aménageur. Le choix de la maîtrise d'oeuvre (I) est donc une
étape clé pour garantir une opération limitant ses effets
sur l'environnement. Pour assurer la prise en compte de l'environnement
à toutes les étapes, il convient d'associer une compétence
d'expertise environnementale au projet (II).
I Le choix de la maîtrise d'oeuvre urbaine
Dans cette section traitant de la phase de conception des
aménagements, nous n'aborderons que les missions de maîtrise
d'oeuvre relevant de cette phase, c'est à dire les études
d'avant-projet et de projet. Les éléments de mission d'assistance
à la passation des contrats de travaux et de direction de
l'exécution des travaux seront traités dans la seconde section
relative à la phase de chantier. Pour certaines opérations
complexes, la maîtrise d'oeuvre de conception peut d'ailleurs être
distincte de celle assurant la réalisation des travaux. En effet, la
réalisation des ouvrages dans le cadre d'une ZAC ou d'un lotissement
n'est pas soumise à la loi du 12 juillet 198544
modifiée.
La maîtrise d'oeuvre urbaine est réalisée
par une équipe pluridisciplinaire impliquant à minima un
architecte-urbaniste et un bureau d'études techniques
spécialisé en voiries-réseaux-divers (BET-VRD). Pour une
opération volontariste en matière d'environnement dans laquelle
le maître d'ouvrage est soucieux de l'intégration du projet dans
son environnement, pris ici au sens de « ce qui l'environne », on
peut ajouter un paysagiste, voire un sociologue pour les opérations le
nécessitant au regard de leur importance ou des enjeux
soulevés45. Un expert environnemental, ou BET
spécialisé en qualité environnementale, ou en
développement durable peut aussi faire partie de cette équipe.
Mais nous traiterons ce cas à part dans un second temps.
44 Loi n°85-704 du 12 juillet 1985 relative à la
maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports à la
maîtrise d'oeuvre privée, dite loi MOP.
45 RéseauSCET, Aménagement
durable-écoquartiers, Dossiers du Réseau, n°8/2009, mai
2009, p. 27.
24 / 59 Partie 1 La dimension environnementale dans la
production des terrains à bâtir
A/ Une intervention tardive dans le projet
Dans la plupart des cas, un schéma d'aménagement
est produit lors des études préalables. En effet, dans le cas
d'une ZAC, l'étude d'impact doit justifier du choix du schéma
d'aménagement du point de vue de l'environnement. Et cette étude
fait partie intégrante du dossier de création. La conception du
projet commence donc avant l'intervention de l'aménageur
concessionnaire. Certaines fois, l'aménageur concessionnaire a pu
être le mandataire pour la réalisation des études
préalables, ce qui assure une certaine continuité dans la
conduite du projet.
L'ensemble de la conception ne peut être confiée
à un acteur unique dès lors que la réalisation de la ZAC
est concédée à un aménageur. En effet, la
maîtrise d'oeuvre doit être retenue par le maître d'ouvrage
qui est alors le concessionnaire. Et la signature de la concession ne peut
intervenir avant l'approbation du dossier de création46. Or
ce dossier comprend, entre autres, l'étude d'impact qui doit exposer
« les raisons pour lesquelles, notamment du point de vue de la
préoccupation environnementale, parmi les partis envisagés qui
font l'objet d'une description, le projet présenté a
été retenu »47.
Si environnement déjà pris en compte en amont,
alors la maîtrise d'oeuvre devra progresser dans la continuité du
travail effectué en amont, en déclinant les orientations de
manière plus précise et plus pratique. Si l'environnement n'a pas
ou peu été pris en compte dans les études
préalables, ou pas de manière volontariste plus poussée
que ce qu'exige la loi, le choix de la maîtrise d'oeuvre urbaine devient
alors déterminant pour la prise en compte de l'environnement dans la
suite de l'opération. Même si la marge de manoeuvre de la
maîtrise d'oeuvre est encadrée par les décisions prises en
amont de son intervention, cette dernière reste un maillon essentiel
pour la poursuite du projet dans le sens d'une plus grande implication au
service de l'environnement. En effet, si les grandes orientation du projet sont
déjà posées, il n'en reste pas moins que leur
déclinaison précise et les modalités de leur
réalisation concrète sont à prévoir. Les
modalités de choix de la maîtrise d'oeuvre devront faire
apparaître ces éléments.
B/ Les modalités de prise en compte de
l'environnement dans le marché de maîtrise d'oeuvre
La mission de conception de la maîtrise d'oeuvre inclut
: l'aménagement des espaces publics, les réseaux desservant la
zone, le mobilier urbain et la conception lumière, dans le respect des
lignes directrices définies par les dossiers de création et de
réalisation, et le programme imposé par la maîtrise
d'ouvrage. Le rôle de la maîtrise d'oeuvre consiste à «
concevoir le projet et en établir les pièces écrites
et dessinées en respectant la réglementation, les règles
de l'art, le programme et le coût d'objectif fixés par le
maître d'ouvrage »48. La consultation permettant de
retenir l'équipe de maîtrise d'oeuvre se révèle
constituer une étape clé pour le projet. Celle-ci doit
s'effectuer conformément à la réglementation applicable.
Suivant les
46 Article R. 311-2 du code de l'environnement
47 Article R. 122-3 du code de l'environnement
48 F. ANGOT, Qualité environnementale et parcs
d'activités, de la conception à la réalisation, M2 MOUI
2005-2007, sous la direction de P. CLERGEAU et J.-F. BLACHE, p. 79
Chapitre 2 La conception et la réalisation de
l'opération 25 / 59
cas, on applique le code des marchés publics, ou
l'ordonnance du 6 juin 200549, complétée par le
décret du 30 décembre 200550. Le code des
marchés publics s'applique aux marchés passés par le
mandataire d'un maître d'ouvrage soumis au code et les
établissements publics d'aménagement, tandis que l'ordonnance est
appliquée par les concessionnaires d'opérations
d'aménagement privés ou SEM, d'après le champ
d'application de chacun de ces textes51. Mais les dispositions
prévues par le décret du 30 décembre 2005 étant
proches des dispositions du code des marchés publics52, en
particulier les articles où il est fait mention de clauses
environnementales, les deux textes précités seront
étudiés communément.
Pour les pouvoirs adjudicateurs soumis au code des
marchés publics, la procédure formalisée applicable aux
marchés de maîtrise d'oeuvre est le concours restreint. On peut
aussi recourir à l'appel d'offres ouvert ou restreint, ainsi qu'à
une procédure négociée. Une procédure
adaptée peut être utilisés si le montant de la prestation
est fixé prévisionnellement en-dessous du seuil de 193 000
€HT pour les marchés passés par les collectivités
locales (et leurs mandataires) et 387 000 €HT pour les marchés
passés par l'État53. Pour les pouvoirs adjudicateurs
soumis à l'ordonnance, la procédure formalisée applicable
aux marchés de maîtrise d'oeuvre est l'appel d'offres, ouvert ou
restreint. Le recours à la procédure de marché
négocié, de concours ou de dialogue compétitif est
possible sous conditions. Une procédure adaptée peut être
utilisée si le montant du marché est fixé
prévisionnellement en-dessous du seuil de 193 000
€HT54.
Le cahier des charges de la consultation ainsi que les
critères d'analyse des offres et leur pondération, à
utiliser pour chacune des procédures formalisées ci-dessus,
doivent faire l'objet d'une réflexion particulièrement
approfondie55. L'ensemble des pièces de la consultation et du
marché qui sera signé doivent faire mention d'un engagement
particulier dans la prise en compte de l'environnement pour la conception du
projet.
Les références à l'environnement peuvent
se situer à deux niveaux : dans le cahier des clauses techniques
particulières (CCTP), et dans les critères de sélection
des offres et des candidatures apparaissant dans l'avis d'appel public à
la concurrence (AAPC) et/ou dans le règlement de la consultation.
Les clauses du CCTP sont des conditions d'exécution du
marché, c'est à dire des clauses que l'attributaire du
marché quel qu'il soit devra respecter. Ces conditions
d'exécution peuvent comporter des éléments à
49 Ordonnance n°2005-649 du 6 juin 2005 relative aux
marchés passés par certaines personnes publiques ou
privées non soumises au code des marchés publics
50 Décret n°2005-1742 du 30 décembre 2005
fixant les règles applicables aux marchés passés par les
pouvoirs adjudicateurs mentionnés à l'article 3 de la
l'ordonnance du 6 juin 2005
51 Article 2 du Code des marchés publics et article 3
de l'ordonnance n°2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés
passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises
au code des marchés publics.
52 Code des marchés publics et autres contrats
commenté, Dalloz, op. cit., p. 863.
53 Articles 26 et 74 du code des marchés publics
54 Articles 7,41 et 41-2 du décret n°2005-1742 du
30 décembre 2005 pris en application de l'ordonnance 2005-649 du 6 juin
2005
55 RéseauSCET, Aménagement durable -
éco-quartiers, Dossiers du Réseau, n°8/2009, mai 2009, p.
27
26 / 59 Partie 1 La dimension environnementale dans la production
des terrains à bâtir
caractère environnemental56. La commission a
donné des exemples possibles de telles conditions dans la communication
interprétative du 4 juillet 2001 sur les possibilités
d'intégrer des considérations environnementales dans les
marchés publics57. Dans l'article 6 du code des
marchés publics, l'accent est mis sur les exigences en matière
d'environnement, et sur le recours à la référence à
des écolabels avec les restrictions introduites par l'article 23 de la
directive 2004/1858 : les mentions de l'écolabel doivent
avoir été établies sur la base d'une information
scientifique, l'écolabel doit avoir été adoptés
à l'issue d'un large processus de concertation, et être accessible
à toutes les parties59. C'est la conformité de l'offre
du candidat à ces conditions d'exécution du marché qui est
attendue.
La mention de critères environnementaux peut aussi
intervenir dans la sélection des candidatures60 et le
classement offres. Le maître d'ouvrage peut demander aux candidats de
fournir des certificats de qualité ou de capacité, qui doivent
être délivrés par des organismes indépendants et
fondés sur des normes européennes. Il doit dans ce cas accepter
tout autre moyen de preuve susceptible de justifier de sa capacité. Les
candidatures sont examinées au regard des niveaux de capacités
professionnelles, techniques et financières mentionnées dans
l'AAPC, ou dans le règlement de consultation pour un marché sans
publication d'un tel avis. Les candidatures qui ne satisfont pas à ces
niveaux de capacité sont éliminées. Si le maître
d'ouvrage peut demander aux candidats des pièces justificatives de leur
expérience, l'absence de référence relative à
l'exécution de marchés de même nature ne saurait justifier
l'éviction du candidat pour la consultation. Le pouvoir adjudicateur
doit examiner ses capacités.
Les offres sont notées et classées
d'après des critères qui peuvent s'appuyer sur la dimension
environnementale de la proposition. Le maître d'ouvrage peut
prévoir un critère environnemental à part entière,
ou considérer l'environnement comme un sous-critère de la
méthodologie demandée aux candidats. Pour la mission de
conception de l'opération, la méthodologie
présentée pour la relation entre la maîtrise d'oeuvre et
l'expert environnemental peut être déterminante. Si la
compétence environnementale est intégrée à la
maîtrise d'oeuvre, la présentation des méthodes
utilisées au sein du groupement a aussi tout son intérêt.
Enfin, la valorisation d'options ou de variantes de nature à diminuer
l'impact environnemental de l'opération intervient aussi à ce
stade.
II La place de l'expert environnemental
La compétence d'expertise environnementale peut
être comprise dans le groupement de maîtrise d'oeuvre. Mais il peut
être opportun de conclure avec un expert environnemental un marché
spécifique d'assistance à maîtrise d'ouvrage, comme dans la
démarche AEU, dont on peut s'inspirer pour définir son
rôle. Sa mission peut précéder celle de la maîtrise
d'oeuvre (voir infra, cas de Cléon) et va bien au-delà de la
56 Article 14 du code des marchés publics et article.
57 COM/2001/274/Final.
58 Directive 2004/18/CE du Parlement européen et du
Conseil du 31 mars 2004 relative à la coordination des procédures
de passation des marchés publics de travaux, de fourniture et de
services.
59 Article 6 du code des marchés publics.
60 La sélection des candidatures est prévue par les
procédures restreinte (appel d'offres, concours).
Chapitre 2 La conception et la réalisation de
l'opération 27 / 59
conception du projet. En effet, on attend de l'expert
environnemental un regard autre sur l'opération et un éclairage
différent sur l'ensemble des choix qui sont à faire. Son
indépendance contractuelle vis-à-vis de l'équipe de
maîtrise d'oeuvre peut donc apparaître positive.
A/ Les missions de l'expert environnemental
Pour définir les missions à confier à
l'expert environnemental, on peut s'inspirer de la démarche AEU de
l'ADEME. Il ressort ainsi que l'expert environnemental doit apporter à
tout moment une autre analyse du projet, afin d'éclairer les choix de la
maîtrise d'ouvrage sur les aspects environnementaux de
l'opération. Les analyses habituellement menées par les autres
acteurs concernent les impacts financiers, juridiques, politiques, ou
concernant le planning de l'opération. L'expert environnemental peut
nourrir un questionnement supplémentaire autour de l'environnement.
Grâce à son implication dans le projet, l'environnement peut
devenir un élément à part entière dans les prises
de décision, au même titre que d'autres.
Dans les cas où une démarche AEU a
été mise en place lors des études préalables, ou
lorsque l'engagement de la maîtrise d'ouvrage et de ses prestataires en
matière d'environnement a été initié plus en amont,
l'expert environnemental assurera la continuité avec les actions
déjà proposées. Si une telle démarche n'avait pas
cours, la réalisation d'un diagnostic pré-opérationnel
peut s'avérer nécessaire. A cette occasion, l'expert
environnemental effectuera un bilan de l'opération telle qu'elle est
prévue au regard de ses impacts sur l'environnement, et définira
des objectifs à atteindre dans différentes thématiques
environnementales. On peut reprendre les thématiques
développées par l'AEU : énergie et climat,
déplacements, déchets, eau, biodiversité et paysage, sites
et sols pollués, bruit.
Dans le cas de la ZAC des Berges de l'Étang à
Cléon61, les missions de l'expert environnemental sont
définies en trois phases. Lors de la phase
pré-opérationnelle, L'expert environnemental a en charge la
réalisation d'un diagnostic du projet du point de vue de
l'environnement. Il doit pointer les points forts et les points faibles du
projet sur ce thème. A partir de celui-ci, il procède à la
définition d'objectifs à atteindre en s'inspirant de la
méthode AEU.
Au cours de la phase opérationnelle, plusieurs
sous-missions sont détaillées :
- Collaboration avec la maîtrise d'oeuvre. Il peut aussi
proposer des solutions techniques et des matériaux adaptés, qui
doivent être validés par le BET-VRD.
- Avis avant chaque validation de phase par la maîtrise
d'ouvrage. L'expert environnemental présente les implications
environnementales des schémas proposés, du choix des
matériaux envisagés (en raisonnant de l'extraction de la
matière première à sa mise en oeuvre sur site).
- Rédaction du volet environnemental du CPAUP.
- Participation à la charte chantier vert. Dans son
avis avant les validations de phases par la maîtrise d'ouvrage.
61 Voir description de l'opération au B/ Relation avec la
maîtrise d'ouvrage et la maîtrise d'oeuvre, p.25.
28 / 59 Partie 1 La dimension environnementale dans la production
des terrains à bâtir
Dans une troisième phase, il participe la
sensibilisation des services, futurs gestionnaires des aménagements en
élaborant une charte d'orientation pour que ces derniers puissent
s'approprier la démarche de qualité environnementale mise en
place62. L'aménageur aurait pu ajouter que la sensibilisation
devait aussi s'effectuer auprès des entreprises intervenant sur le
chantier.
Dans l'éclairage des choix de la maîtrise
d'ouvrage, on peut donner des exemples de préconisations possibles.
Toutefois, il faut rappeler que l'expert environnemental doit aussi être
une force de proposition et d'innovation en collaboration avec
l'architecte-urbaniste et le BET-VRD. Les solutions innovantes d'il y a
quelques années deviennent aujourd'hui relativement communes. C'est le
cas de la gestion alternative des eaux pluviales, qui constitue l'une des
thématiques de l'AEU. La séparation des réseaux entre eaux
pluviales et eaux usées est de mise pour toutes les nouvelles
opérations. Mais l'impact des eaux pluviales reste important pour les
stations de traitement, quantitativement d'abord, en entraînant un
surdimensionnement des ouvrages, mais aussi qualitativement lorsque ces eaux
ont ruisselé sur la voirie avant d'atteindre le réseau. Pour
réduire l'impact des eaux pluviales tant quantitativement que
qualitativement, la régulation des débits peut être
réalisée au niveau des toitures, terrasses, chaussées
poreuses, réservoirs63. On peut aller plus loin en imposant
l'infiltration des eaux pluviales sur les parcelles, avec ou sans rejet d'un
débit de fuite dans le réseau public, en fonction des
caractéristiques du sol. Autant de solutions que l'expert
environnemental peut proposer et pour la mise en oeuvre desquelles il collabore
avec le maître d'oeuvre.
Au-delà de l'impact environnemental lié au
parfait achèvement des espaces et ouvrages publics, l'expert
environnemental doit aussi envisager l'opération dans son ensemble, et
son objectif final qui reste la construction privée sur les parcelles
constructibles produites. Ainsi, il peut éclairer le choix du plan masse
et des règles applicables pour s'assurer que les règles
émises pour les constructions sur les parcelles n'entravent pas leur
possibilité de créer de l'architecture bioclimatique, ou de
construire un bâtiment économe en énergie, ou encore de
recourir aux énergies renouvelables dans les meilleures conditions
possibles. Des règles d'alignement sur des voiries dans « le
mauvais sens » peuvent empêcher d'orienter au mieux l'habitation
pour profiter de l'apport énergétique du soleil et de la
lumière naturelle. De même, des règles sur l'inclinaison
des toitures peuvent être en opposition avec la mise en place de panneaux
solaires ou photovoltaïques.
L'expert environnemental devra donc tenir compte non seulement
de la conception des espaces publics en eux-mêmes, mais aussi de la
préservation de la capacité des maîtres d'ouvrages
constructeurs sur les parcelles de produire une architecture économe sur
le plan environnemental. Il doit en permanence avoir cette vision globale de
l'opération et des bâtiments qui seront produits. Car la
production immobilière est bien le but final de toute opération
d'aménagement.
62 Voir chapitre 2 de la seconde partie : Le transfert des
espaces/équipements publics aux gestionnaires, p.49.
63 A. BOURGOIN-BAREILLES, Guide de l'environnement à
l'usage des citoyens et des collectivités territoriales, Éditions
Frison-Roche, 2ème édition, 2000.
Chapitre 2 La conception et la réalisation de
l'opération 29 / 59
B/ Les relations de l'expert environnemental avec les
différents acteurs du projet
Pour mener à bien les missions qui lui sont
confiées, et assurer le meilleur conseil aux décideurs de
l'opération, il semble que le plus efficace soit de confier à
l'expert environnemental une mission d'assistance à maîtrise
d'ouvrage (AMO), en particulier quand l'environnement n'a que peu ou pas
été pris en compte en amont du projet. Mais même si tel
était le cas, l'indépendance de l'expert par rapport à
l'équipe de maîtrise d'oeuvre peut être l'assurance d'un
avis le plus neutre possible, d'autant que sa mission de l'expert
environnemental peut être plutôt envisagée comme un «
pont » entre maîtrise d'ouvrage et maîtrise d'oeuvre.
La ZAC des Berges de l'Étang à Cléon a
été créée sans souci particulier de protection de
l'environnement Si les études préalables ont mis en
lumière l'importance du paysage et l'enjeu d'une urbanisation
qualitative des berges, aucun volontarisme fort dans ce domaine n'a
été montré. C'est après la concession
d'aménagement (26 octobre 2007), et surtout suite Grenelle de
l'environnement que le maire a souhaité s'orienter vers un «
écoquartier ». En phase d'études préalables, avaient
déjà été définis des principes
généraux d'aménagement, incluant le recours à des
noues pour recueillir les eaux pluviales, et l'aménagement
végétal d'une partie des espaces publics, l'importance des
cheminements doux, autant d'éléments pouvant s'intégrer
dans une démarche plus globale d'écoquartier. Même si cette
volonté du maire relevait davantage du marketing territorial lié
à ce sujet à la mode que d'un engagement fort en la
matière, l'aménageur a pris les mesures nécessaires pour
réaliser cette demande et a procédé au recrutement d'un
expert environnemental parallèlement à la maîtrise
d'oeuvre. La mission de l'expert environnemental relevait alors d'une
assistance à maîtrise d'ouvrage incluant des missions
s'étendant au-delà de la phase de conception et de chantier.
Dans les documents de consultation pour le choix de l'expert
environnemental, la méthodologie et les relations à
établir entre les différents intervenants sont
précisés, de même que dans le marché de
maîtrise d'oeuvre. La clarification des rôles de chacun et
l'organisation des méthodes de travail entre les différents
cocontractants revient à l'aménageur lui-même. Dans le cas
de Cléon, l'aménageur a prévu dans le cahier des charges
de la consultation de l'expert environnemental qu'il participerait aux
comités techniques restreint entre la SEM et la ville, au comité
de pilotage rassemblant élus et techniciens, et à des groupes de
travail thématiques ponctuels. Cette organisation justifie la
nécessité de passer avec l'expert environnemental un contrat
séparé de la maîtrise d'oeuvre, dans la mesure où il
intervient aussi auprès des décideurs en-dehors de celle-ci.
Mais le maître d'ouvrage peut choisir d'intégrer
la compétence d'expertise environnementale à l'équipe
pluridisciplinaire de maîtrise d'oeuvre. Dans ce cas, il sera
précisé dans le règlement de consultation et le cahier des
charges relatifs à la passation du marché de maîtrise
d'oeuvre que l'équipe devra comprendre un expert environnemental
qualifié pour assurer les missions précisée au paragraphe
ci-après. Une attention particulière devra être
apportée à la méthodologie prévue par les
candidats. La place de l'expert dans l'équipe définit en grande
partie l'intérêt que les membres de l'équipe porteront
à sa mission.
30 / 59 Partie 1 La dimension environnementale dans
la production des terrains à bâtir
Section 2 La réalisation des ouvrages
D'un point de vue global, si l'on considère toute la
durée de vie de l'ensemble construit et son fonctionnement, les impacts
environnementaux de la phase chantier sont à relativiser. En termes
d'image pour l'opération et le maître d'ouvrage, ils sont pourtant
important dans la mesure où la phase de réalisation de
l'opération est celle durant laquelle les impacts à
l'environnement sont les plus perceptibles par les riverains du chantier
notamment. De plus, contrairement à la vie ultérieure de la zone
nouvellement aménagée, la phase travaux relève des
activités propres à l'aménageur et il peut donc plus
aisément influer sur celle-ci. La prise en compte des impacts
environnementaux de la phase de réalisation des ouvrage, et la recherche
d'une moindre importance de ceux-ci nécessitent que tous les
intervenants du chantiers soient impliqués (I). Les impacts
environnementaux couvrent un champ assez vaste des chantiers de génie
civil, mais le plus emblématique reste celui de la gestion des
déchets (II).
I L'implication des différents intervenants : la
maîtrise
d'oeuvre de travaux et les entreprises
Au-delà de la phase de conception, c'est ensuite toute
la réalisation des ouvrages qui doit s'effectuer dans le respect de
l'environnement. La gestion environnementale du chantier doit mobiliser
l'ensemble des intervenants sur le terrain : maître d'ouvrage,
maîtrise d'oeuvre et entreprises. Les critères environnementaux
peuvent d'ailleurs être utilisés pour le choix des
différents intervenants.
A/ La gestion environnementale : une mission
supplémentaire pour la maîtrise d'oeuvre en phase de travaux
La maîtrise d'oeuvre de travaux a un rôle
déterminant à jouer dans la préservation de
l'environnement dans le temps de l'opération. Elle doit intégrer
cette dimension dans la conception des ouvrages, comme vu plus haut, mais aussi
dans l'assistance du maître d'ouvrage à la passation des contrats
de travaux, et dans le suivi du chantier, conformément aux prescriptions
de son marché. La gestion environnementale de la phase chantier
constitue dès lors une mission supplémentaire de la
maîtrise d'oeuvre dans la phase de réalisation des ouvrages. Des
clauses spécifiques relatives aux actions à mener en
matière d'environnement auprès des entreprises en
préparation du chantier et pendant la durée d'exécution de
leurs marchés peuvent être introduites dans les marchés de
maîtrise d'oeuvre.
Une mission « déchet » supplémentaire
peut être introduite, en suivant les exemples donnés par le Guide
des recommandations à destination des maîtres d'ouvrage et des
maîtres d'oeuvre pour prendre en compte la gestion des déchets de
chantier de travaux publics dans les marchés publics. Mais la gestion
environnementale du chantier va au-delà de la seule gestion des
déchets produits. Le maître d'oeuvre doit aussi s'assurer que le
stockage des matériaux à utiliser, en particuliers ceux
présentant une toxicité avérée pour
l'environnement, soit effectué de manière à limiter tout
risque de pollution du milieu naturel. D'une manière
générale, le recours à de tels produits doit être
limité aux seuls cas où aucune autre solution n'est envisageable.
Ainsi, sur le chantier du Technopôle du Madrillet, l'entreprise en charge
de réaliser les bétons désactivés prévus
pour les cheminements piétons a changé l'adjuvant utilisé
pour satisfaire aux
Chapitre 2 La conception et la réalisation de
l'opération 31 / 59
exigences portées par la maîtrise d'ouvrage et
relayés par la maîtrise d'oeuvre en matière de protection
de l'environnement. En effet, le nettoyage des trottoirs à l'issue du
chantier et le lessivage par l'eau de pluie ultérieur entraînaient
les restes d'adjuvant toxique dans les noues végétalisées
de recueil des eaux pluviales, malgré toutes les précautions de
mise en oeuvre prises pour traiter les eaux utilisées lors de la mise en
oeuvre proprement dite du béton. L'adjuvant toxique a été
remplacé par un équivalent certifié biologique
présentant une nocivité bien moindre pour l'environnement.
Le maître d'ouvrage peut demander au maître
d'oeuvre toutes pièces de nature à justifier ses capacités
professionnelles et techniques dans le suivi de chantier respectueux de
l'environnement et utiliser la valeur technique de la méthodologie
proposée en ce sens comme critère de notation des candidats, pour
retenir l'offre la plus économiquement avantageuse.
B/ Les critères environnementaux dans le choix
des entreprises
Les entreprises de travaux constituent le dernier maillon de
la démarche et participent pleinement aux objectifs du maître
d'ouvrage. L'incidence de l'activité d'une entreprise sur le chantier
dépend évidemment de la prise en compte effective de
l'environnement dans les étapes préalables à son
intervention, au moment de la conception notamment64. Mais chaque
entreprise présente sur le chantier a aussi une responsabilité
propre en matière d'environnement, ne dépendant pas des
décisions prises en amont. L'installation et le fonctionnement du
chantier, ainsi que le suivi des déchets issus de la production
relèvent de l'activité de l'entreprise, indépendamment du
parti d'aménagement retenu et du dessin des espaces publics et des
ouvrages de génie civil prévus.
Le choix des entreprises pour réaliser les travaux
revêt donc une certaine importance. Il est fait par le maître
d'ouvrage en concertation avec la maîtrise d'oeuvre. Quelle que soit la
procédure à mettre en oeuvre pour retenir les entrepreneurs
(procédure adaptée, appel d'offre ouvert ou restreint), la
rédaction des documents de la consultation est essentielle pour retenir
les entreprises qui s'intégreront au processus engagé en
matière de préservation de l'environnement et de limitation des
nuisances.
1. Les références à la protection de
l'environnement dans les textes applicables
La passation des marchés suit le code des
marchés publics ou l'ordonnance du 6 juin 200565 suivant les
cas66. S'appliquent aussi aux marchés passés
l'arrêté du 8 septembre 2009 portant approbation du cahier des
clauses administratives générales applicables aux marchés
publics de travaux (CCAG-travaux). Des dérogations à ce texte
peuvent être utilisées dans les marchés ; le maître
d'ouvrage doit alors récapituler dans le CCAP la liste des articles du
CCAG auxquels il déroge.
64 Voir section 1 : La phase de conception, pp. 23 et
suivantes.
65 Ordonnance n°2005-649 du 6 juin 2005 relative aux
marchés passés par certaines personnes publiques ou
privées non soumises au code des marchés publics.
66 Voir section 1 : La phase conception, pp. 23 et suivantes.
32 / 59 Partie 1 La dimension environnementale dans la production
des terrains à bâtir
Les conditions d'exécution du marché peuvent
comporter des éléments à caractère
environnemental67, et dans le cas d'une opération
volontariste en matière d'environnement, les pièces du dossier de
consultation des entreprises doivent mentionner l'implication du maître
d'ouvrage dans une démarche de responsabilité environnementale et
les implications que celle-ci représente pour les entreprises : tenue du
chantier, base de vie, gestion des déchets68... Ainsi,
l'engagement dans une démarche de chantier à faible impact
environnemental et l'exigence de signer une éventuelle charte en ce sens
peuvent apparaître à ce niveau. Ces conditions d'exécution
du marché ne sont pas les critères de choix des entreprises, mais
des clauses que l'attributaire du marché devra respecter, quel qu'il
soit69.
Le maître d'ouvrage peut définir les prestations
par des spécifications techniques, qui peuvent faire
référence à des normes ou être définies en
termes de performances ou d'exigences fonctionnelles, d'après l'article
6 du code des marchés publics. Cet article met d'ailleurs l'accent sur
les exigences en matière d'environnement, et sur le recours à la
référence à des écolabels dans les conditions
introduites par l'article 23 de la directive 2004/1870 : les
mentions de l'écolabel doivent avoir été établies
sur la base d'une information scientifique, l'écolabel doit avoir
été adopté à l'issue d'un large processus de
concertation, et être accessible à toutes les
parties71. La jurisprudence et la doctrine72 vont dans ce
sens : le pouvoir adjudicateur peut fixer des spécifications techniques
supérieures aux normes règlementaires en vigueur qui ont pour
effet de réduire la variété des produits qui peuvent
répondre si des nécessités particulières
l'exigent73. Cependant il convient d'être prudent, car ces
spécifications techniques ne doivent pas conduire à une
discrimination entre les candidats potentiels. Toute mention d'une norme ou
d'une marque doit être suivie de la mention « ou
équivalent ».
Enfin, le maître d'ouvrage peut exiger de la part des
candidats des niveaux de capacité minimaux pour l'exécution du
marché, qui doivent être liés et proportionnés au
marché. Il demande alors la production de pièces destinées
à attester des capacités professionnelles, techniques et
financières, pouvant inclure des certificats de qualités, qui
doivent être délivrés par des organismes
indépendants et fondés sur des normes
européennes74. La mention d'une telle norme est
tolérée à condition que le maître d'ouvrage accepte
tout autre moyen de preuve équivalent.
67 Article 14 du code des marchés publics.
68 Voir II : La gestion des déchets de chantier, pp. 34 et
suivantes.
69 Code des marchés publics et autres contrats
commenté, Dalloz, op. cit., p. 188.
70 Directive 2004/18/CE du Parlement européen et du
Conseil du 31 mars 2004 relative à la coordination des procédures
de passation des marchés publics de travaux, de fourniture et de
services.
71 Article 6 du code des marchés publics.
72 CE, 3 novembre 1995, District de l'agglomération
nancéienne, requête n°152484 : Lebon 391 ; cité par le
code des marchés publics et autres contrats commenté, op. cit.,
p. 179.
73 Code des marchés publics et autres contrats
commenté, Dalloz, op. cit., p. 179.
74 Article 45 du code des marchés publics
Chapitre 2 La conception et la réalisation de
l'opération 33 / 59
2. L'application des textes dans la passation des contrats de
travaux
L'introduction de dispositions à caractère
environnemental dans les marchés de travaux passés avec les
entreprises se fait dans les différents documents du dossier de
consultation pour la passation du marché : avis d'appel public à
la concurrence (AAPC) et règlement de la consultation, acte
d'engagement, cahier des clauses administratives particulières (CCAP) et
cahier des clauses techniques particulières (CCTP). Pour les exemples
indiqués ci-dessous, le modèle de document utilisé est
celui proposé par la SCET pour la passation des marchés de
travaux soumis au code des marchés publics et selon une procédure
formalisée (appel d'offres ouvert ou restreint, ou procédure
négociée). C'est le cas le plus encadré par les textes
pour le maître d'ouvrage. Ces indications sont transposables dans les
marchés passés en application de l'ordonnance du 6 juin
200575, ou encore dans les marchés passés selon une
procédure adaptée, tant soumise au code des marchés
publics qu'à l'ordonnance du 6 juin 2005.
L'engagement du maître d'ouvrage en matière
d'environnement doit apparaître dans tous les documents là
où figure l'objet du marché, et ses caractéristiques
principales. Dans le règlement de la consultation et dans l'avis
publié, des précisions sont établies sur la
possibilité offerte aux candidats de proposer des variantes et/ou des
options. Pour favoriser l'innovation environnementale, les variantes et options
peuvent être acceptées sur les éléments relatifs
à la protection de l'environnement (techniques de mise en oeuvre des
matériaux prévus, gestion des déchets, réduction
des pollutions issues des travaux...). Les éléments
nécessaires au choix des candidatures et de l'offre et les
critères de jugement des offres sont indiqués. La liste des
intervenants prévue à l'acte d'engagement fait figurer, outre
l'équipe de maîtrise d'oeuvre retenue, l'expert environnemental.
Elle précise les rôles de chacun afin que l'entreprise puisse se
situer par rapport à chacun d'eux.
Il conviendra au maître d'ouvrage d'être prudent
dans le maniement des dispositions relatives aux spécifications
techniques ou aux critères de sélection des offres et des
candidatures. En effet, le recours à des caractéristiques
environnementales ne doit pas se révéler discriminatoire.
L'aménageur doit donc veiller à ce qu'elles ne puissent pas
être regardées comme défavorables voire dissuasives pour
certains candidats, même potentiels76. Le maître
d'ouvrage peut recourir à la référence à des normes
européennes. Hélène CHALMETON identifie trois types de
normes applicables en matière de travaux publics : la normalisation
concernant l'organisation des entreprises, celle qui concerne les produits, ou
encore les démarches de construction77. La normalisation
concernant l"organisation des entreprises et les systèmes de management
environnemental (ISO 14 001 ou EMAS) étant plutôt rares dans le
domaine des travaux publics78, une telle référence
risque de créer une disposition discriminatoire envers des candidats
75 Ordonnance n°2005-649 du 6 juin 2005 relative aux
marchés passés par certaines personnes publiques ou
privées non soumises au code des marchés publics
76 Code des marchés publics et autres contrats
commenté, Dalloz, op. cit., p. 188.
77 H. CHALMETON, Peut-il y avoir trop d'initiatives
volontaires? L'exemple du secteur des travaux publics, in Les approches
volontaires et le droit de l'environnement, sous la direction de Nathalie
HERVE-FOURNEREAU, PUR, coll Univers des normes, 2008, p. 173.
78 H. CHALMETON, op. cit., p.179.
34 / 59 Partie 1 La dimension environnementale dans la production
des terrains à bâtir
potentiels. En revanche, les normes relatives à des
produits semblent plus aisées à justifier. Les clauses relatives
à la provenance et à la qualité des produits CCAP et le
CCTP sont susceptibles d'accueillir l'utilisation de matériaux reconnus
par les normes NF-Environnement ou leurs équivalents
européens.
Le règlement de la consultation détermine la
composition de la candidature et de l'offre à adresser au maître
d'ouvrage, et précise les éléments nécessaires au
choix des candidatures et de l'offre exigés. Le maître d'ouvrage
peut fixer assez librement le contenu des candidatures et offres, en
cohérence avec les critères de jugement des offres. Un
critère relatif à la protection de l'environnement peut
être introduit, sous réserve qu'il soit lié au
marché. Dans le cadre d'un chantier se réclamant d'un fiable
impact environnemental, et en cohérence avec les marchés de la
maîtrise d'oeuvre et de l'expert environnemental, on peut penser que
cette condition est remplie. Le maître d'oeuvre qui doit produire le
rapport d'analyse des offres et le maître d'ouvrage qui prend la
décision, in fine, peuvent demander aux candidats des documents
décrivant les moyens techniques qu'ils comptent mettre en oeuvre sur
site pour limiter l'impact de leurs activités, et qui rentreront dans la
notation de leur offre.
Il faut prêter attention à ce que les entreprises
du territoire soient en mesure de répondre au cahier des charges
prévu, pour éviter le piège de la restriction
d'accès à la commande publique et le faussement de la libre
concurrence. Il faut envisager d'adapter, le cas échéant, les
modalités de publicité à mettre en oeuvre.
Outre les divers éléments évoqués
ci-dessus, les pièces de la consultation, puis du marché,
préparent la mise en oeuvre de mesures permettant d'assurer une gestion
des déchets rationnelle et conforme aux textes en vigueur.
II La gestion des déchets de chantier
De plus en plus d'initiatives voient le jour en termes de
chantier à faible impact environnemental, ou de chantier à
faibles nuisances. Ces « chantiers verts » ont été
lancés à titre expérimental par le Ministère du
logement en 1993. Il s'agit d'un engagement contractuel entre un maître
d'ouvrage et un entrepreneur de travaux pour le respect de
l'environnement79. Aujourd'hui, différents acteurs proposent
des chartes allant dans ce sens, et donne des pistes pour d'actions à
mener par les maîtres d'ouvrages et/ou les entreprises de travaux. Ces
initiatives, bien qu'intéressantes, ne s'appuient que sur des
recommandations, ne sont pas normées, et ne permettent pas d'attester du
niveau d'engagement de l'utilisateur. Si la communication autour de ce
thème par un opérateur ne permet pas de s'assurer d'une
réelle implication dans la gestion des déchets de chantier, la
démarche proposée demeure intéressante.
La gestion des déchets de chantier est un thème
emblématique de ces démarches, qui vont souvent bien
au-delà80. La législation française est riche
sur cette question (A), et peut se révéler suffisante si elle
est
79 H. CHALMETON, op. cit., p. 177.
80 L'enjeu des chantiers verts est de limiter les nuisances
causées aux riverains, aux ouvriers et à l'environnement. Leur
objet dépasse donc la simple gestion des déchets et concerne
aussi les pollutions sur le site, le bruit, la sécurité autour
des rotations de véhicules.
Chapitre 2 La conception et la réalisation de
l'opération 35 / 59
mise en oeuvre de manière effective dans la
réalisation des opérations de génie civil et
d'aménagement urbain, par des méthodes et moyens d'applications
adaptés (B).
A/ Les textes applicables à la gestion des
déchets de chantier
La réglementation sur les déchets a
été initiée par la loi du 15 juillet 197581.
Cette loi donne les grande orientations de la gestion des déchets et en
précise notamment la définition : « est déchet
tout résidu d'un processus de production, de transformation ou
d'utilisation, toute substance, matériaux ou produit, ou plus
généralement tout bien meuble abandonné ou que son
détenteur destine à l'abandon »82. La loi du
13 juillet 199283 a rénové la loi cadre de 1975 en
initiant une politique plus ambitieuse axée sur le développement
de la prévention, de la valorisation et du recyclage. Cette loi exige
que la mise en décharge soit limitée aux seuls déchets
ultimes à partir du 1er juillet 2002. Un déchet ultime est
défini comme « un déchet résultant ou non du
traitement d'un déchet, qui n'est plus susceptible d'être
traité dans les conditions techniques et économiques du moment,
notamment par extraction de la part valorisable ou par réduction de son
caractère polluant ou dangereux »84. Toutes les
dispositions relatives aux déchets issues de ces deux lois, de leurs
modifications et de leurs décrets d'application sont codifiées
aux articles L. 541-1 à L. 541-30 et R. 541-1 et suivants du code de
l'environnement.
Contrairement à la gestion des déchets
ménagers et assimilés qui relèvent de la
responsabilité des communes et de leurs groupements, la gestion des
déchets du BTP est de la responsabilité de ceux qui les
produisent ou les détiennent85. Tous les intervenants de
l'acte de construire sont concernés et impliqués dans
l'élimination des déchets. Le maître d'ouvrage, les
maîtres d'oeuvre, les entreprises et industriels font partie d'une
chaîne économique et technique. C'est à l'ensemble de cette
chaîne que revient la responsabilité de gérer le traitement
et l'élimination des déchets.
La circulaire du 15 février 2000 relative à la
planification de la gestion des déchets de chantier du BTP demande aux
préfets de département et de régions d'élaborer des
plans de gestion des déchets du BTP sur leurs territoires86.
Ces plans ont pour objectifs d'assurer le respect de la réglementation
applicable en matière de déchets, de mettre en place un
réseau de traitement des déchets du BTP, de permettre au secteur
du BTP de participer aux principes de la loi de 1992, de réduire la mise
en décharge en favorisant la valorisation et le recyclage, de permettre
l'utilisation de matériaux recyclés dans le BTP, ... Bien que
81 Loi n°75-633 du 15 juillet 1975 relative à
l'élimination des déchets et à la
récupération des matériaux.
82 Article 1er de la loi n°75-633 du 15 juillet 1975, L.
541-1 du Code de l'environnement.
83 Loi n°92-646 du 13 juillet 1992 relative à
l'élimination des déchets ainsi qu'aux installations
classées pour la protection de
l'environnement.
84 Article. 1 de la loi n°92-646 du 13 juillet 1992.
85 Article L. 541-2 du code de l'environnement.
86 Circulaire n°15/02/00 relative à la
planification de la gestion des déchets de chantier du BTP demande aux
préfets de département et de régions d'élaborer des
plans de gestion des déchets du BTP sur leurs territoires (Texte non
paru au JO).
36 / 59 Partie 1 La dimension environnementale dans la production
des terrains à bâtir
cette circulaire ne soit pas parue au Journal Officiel, des
plans départementaux et régionaux de gestion des déchets
du BTP étaient approuvés dans plus de la moitié des
départements français au 8 juin 200587.
Les plans départementaux de l'Eure et de la Seine
Maritime ont fait l'objet d'une élaboration conjointe en 2002 dans le
cadre d'un schéma régional, par les services de
l'équipement (DRE et DDE). Une actualisation du schéma a
été réalisée en 2006, elle présente
l'analyse du degré d'atteinte des objectifs du schéma en
matière d'offre de site d'accueil des déchets des entreprises, la
situation du recyclage des déchets du BTP par catégorie en
Haute-Normandie, l'identification des exutoires locaux pour les déchets
ultimes non valorisables et la présentation des actions mises en oeuvre
par les acteurs régionaux pour la meilleure gestion des déchets
du BTP et le recyclage. Ces plans départementaux fournissent aux acteurs
des travaux publics, du maître d'ouvrage aux entreprises, les clés
pour mettre en oeuvre une gestion des déchets de chantier efficace en
utilisant au mieux les possibilités offertes par le réseau local
de traitement des déchets issus des chantiers du BTP.
Le CCAG applicable aux marchés de travaux publics pris
par arrêté du 8 septembre 2009 présente des dispositions
relatives aux déchets de chantier et à la protection de
l'environnement. Il y est précisé que les prescriptions
législatives et règlementaires en vigueur en matière
d'environnement doivent être respectées par le titulaire, et que
ce dernier doit être en mesure d'en justifier sur simple demande du
maître d'ouvrage. Les responsabilités en matière de gestion
des déchets de chantier sont décrites à l'article 36. Le
producteur des déchets de chantier identifié est le maître
d'ouvrage, excepté pour les emballages des produits mis en oeuvre par le
titulaire qui sont de la responsabilité de celui-ci. L'article 36 impose
aussi au titulaire de fournir au maître d'ouvrage les
éléments de la traçabilité des déchets et
matériaux issus du chantier au moyen de bordereaux de suivi. Plusieurs
mentions de cet article renvoient aux documents particuliers du marché
et à des recommandations adressées aux maîtres d'ouvrages
pour la mise en oeuvre de ces mesures.
B/ Les méthodes et moyens d'application à
la disposition du maître d'ouvrage
Les textes applicables permettent d'assurer une gestion
efficace des déchets sur les chantiers, à condition qu'ils soient
effectivement mis en oeuvre. Pour leur donner cette effectivité, le
maître d'ouvrage doit prévoir de donner aux entreprises les moyens
notamment financiers, mais également en termes d'organisation et de
délais, leur permettant de gérer les déchets de chantier
en respectant la législation relative à la protection de
l'environnement. Le tri des déchets de chantier et l'évacuation
par des filières adaptées a un coût qui doit être
intégré dans les budgets et pris en charge, il demande une
organisation qui doit être prévue et partagée par tous les
intervenants.
Dans certains cas, où des démolitions
précèdent les aménagements, il est possible de
réaliser certaines économies en réutilisant les
matériaux sur place. D'autres moyens consistant à
équilibrer les déblais et
87 Annexe 1 de la circulaire du 18 mai 2006 relative à la
planification des déchets de chantier du bâtiment et des travaux
publics (BOMEDD n°15/2006 du 15 août 2006)
Chapitre 2 La conception et la réalisation de
l'opération 37 / 59
remblais sur l'opération, à optimiser les
rotations des poids lourds permettent de réduire les coûts
liés au transport des matériaux. La prise en compte de la
production des déchets dès la phase de conception peut aussi
participer à la diminution du coût qu'ils engendrent.
Néanmoins, il demeure indéniable qu'un chantier à faible
impact environnemental provoque un surcoût pour le maître
d'ouvrage.
La responsabilité des déchets de chantier est
partagée entre le maître d'ouvrage et les entreprises. Le
transfert de la responsabilité de la gestion des déchets de
chantier du maître d'ouvrage aux entreprises est possible, à
condition que les clauses relatives aux déchets soient
précisées dans les marchés. Le maître d'ouvrage doit
donc prendre les précautions nécessaires et clarifier les
obligations données aux différents intervenants, dès la
rédaction des dossiers de consultation pour la maîtrise d'oeuvre,
l'expert environnemental et les entreprises. Il rappelle alors dans ces
documents les dispositions applicables et donne les moyens aux acteurs
concernés de les mettre en oeuvre sur le terrain.
Ainsi, le maître d'ouvrage peut demander au maître
d'oeuvre et/ou au coordonnateur en matière de sécurité et
de protection de la santé (CSPS) de prévoir pour l'ensemble des
entreprises présentes sur le site les modalités de stockage et
d'évacuation des déchets vers des filières de valorisation
lorsqu'elles existent, et d'élimination, en collaboration avec l'expert
environnemental. Cette mutualisation permet des économies
d'échelle, et simplifie le suivi et le contrôle
ultérieurs.
La Direction Régionale de l'Équipement de
Haute-Normandie a édité en mai 2005 un guide de recommandations
à destination des maîtres d'ouvrage et des maîtres d'oeuvre
pour prendre en compte la gestion des déchets de chantiers de travaux
dans les marchés publics. Ce guide est « conçu comme un
outil d'accompagnement des prescripteurs dans le cadre d'une démarche
d'optimisation de la gestion des déchets de chantier
»88. Sont détaillés les rôles et
responsabilités des différents acteurs du chantier : maître
d'ouvrage, bureau d'études et maître d'oeuvre, coordonnateur SPS,
entreprises. Le document propose des exemples de clauses à
insérer dans les documents de consultation concernant l'aspect
spécifique de la gestion des déchets.
L'organisation et la gestion des déchets de chantier
devient une mission à part entière pour le maître d'oeuvre.
Le CCAP du marché qui le concerne précise qu'il doit appliquer la
législation sur les déchets en précisant les
références des textes, et détermine des actions à
réaliser par le maître d'oeuvre en relation avec celle-ci en phase
chantier :
- définir la gestion de tri retenu en fonction du
chantier à partir des traitements et filières de valorisation
existantes, en concertation avec le CSPS,
- établir un projet d'installation de chantier faisant
apparaître les zones de stockage des bennes ou autres et les circuits
d'évacuation des déchets,
- assurer en phase travaux le contrôle des dispositions
prévues par l'entreprise, notamment la gestion des équipements
mis en place pour le tri des déchets de chantier, la fourniture des
88 Direction Régionale de l'Équipement
Haute-Normandie, Prendre en compte la gestion des déchets de chantier de
travaux publics dans les marchés publics, Guide de recommandations
à destination des maîtres d'ouvrage et des maîtres d'oeuvre,
mai 2005.
38 / 59 Partie 1 La dimension environnementale dans la production
des terrains à bâtir
bordereaux de suivi des déchets (banals, inertes,
déchets spéciaux) mais aussi la qualité des
matériaux d'apport utilisés pour les remblais (analyse des
pollutions éventuelles des matériaux).
Ces différents éléments doivent
apparaître dans les documents à produire par le maître
d'oeuvre.
Le CSPS doit participer au choix du mode de tri du chantier
avec le maître d'oeuvre, et faire apparaître ces modalités
dans le(s) plan(s) de coordination qu'il doit établir : plan
général de coordination en matière de
sécurité et de protection de la santé (PGCSPS), ou plan
général de coordination (PGC) simplifié89. Les
articles L. 4532-1 à L. 4532-15 et R. 4532-1 et suivants du code du
travail (nouveau) donne la composition de ces plans et précisent qu'ils
doivent comporter « la délimitation et l'aménagement des
zones de stockage et d'entreposage des différents matériaux, en
particulier s'il s'agit de matières ou de substances dangereuses
», et « les conditions des stockage, d'élimination ou
d'évacuation des déchets et des décombres ». Ces
dispositions sont obligatoires pour les ouvrages de catégories 1 et 2.
Pour les ouvrages relevant de la troisième catégorie devant faire
l'objet d'un PGC, le maître d'ouvrage peut ajouter ces dispositions aux
documents du marché du CSPS. Pour les travaux d'ouvrages ne
nécessitant pas la présence d'un CSPS, la gestion et
l'évacuation des déchets se partage entre le maître
d'oeuvre et les entreprises.
Le guide de recommandations de la Direction Régionale
de l'Équipement de Haute Normandie livre donc aussi des exemples de
rédaction pour les pièces du dossier de consultation des
entreprises de travaux. Ainsi, les variantes favorisant l'utilisation de
matériaux recyclés peuvent être acceptées, sous
réserve de respecter les conditions les critères de performance
exigés. Par ailleurs, le niveau minimum de qualification demandé
pour assurer la gestion des déchets peut être évalué
soit par la présentation du candidat de ses qualifications
professionnelles et des attestations de formation de son personnel dans ce
domaine, soit en fournissant des attestations de maîtres d'ouvrages ou
maîtres d'oeuvre signifiant leur satisfaction pour des travaux de
même nature réalisés au cours des cinq dernières
années, soit en signant un engagement à mettre en oeuvre les
dispositions du schéma régional/départemental
d'élimination et de valorisation des déchets du BTP. Le
maître d'ouvrage peut, en outre, demander aux candidats de produire dans
leur offre la méthodologie qu'ils comptent adopter pour gérer les
déchets produits par son activité, en application des mesures
communes imposées, le cas échéant. La valeur technique de
cette offre peut être un critère de jugement des offres
reçues. D'autres exemples de formulations sont indiqués pour les
articles du CCAP et du CCTP liés de près ou de loin au suivi des
déchets, à la définition du coût de leur gestion,
etc.
89 Le recours à l'un ou l'autre de ces documents est
précisé aux articles L. 4532-1 et R. 4532-1 et suivants du code
du travail.
Partie 2 La pérennisation des engagements en
faveur de l'environnement pris dans le cadre de l'opération 39 /
59
PARTIE 2 LA PÉRENNISATION DES
ENGAGEMENTS EN FAVEUR DE
L'ENVIRONNEMENT PRIS DANS LE
CADRE DE L'OPÉRATION
La mission de l'aménageur est par définition
circonscrite dans le temps. Elle ne s'exerce en effet que pendant la
durée du contrat qui l'encadre. Le rôle de l'aménageur sur
le périmètre de l'opération d'aménagement
s'éteint à la cession des terrains le composant. Ceux-ci sont
destinés, pour les parcelles, à être cédées
à des propriétaires constructeurs, et pour les espaces publics et
les réseaux, aux collectivités locales et aux concessionnaires,
qui en assureront la gestion.
Pour bâtir une ville plus écologique,
réduisant durablement ses impacts sur l'environnement, il convient que
l'aménageur puisse pérenniser et inscrire dans la durée
l'engagement pris dans la réalisation de sa mission, auprès des
propriétaires et gestionnaires. En effet, il ne suffit pas de
réaliser l'opération en limitant ses impacts sur l'environnement,
notamment en phase chantier. Encore faut-il que le quartier, dans son
fonctionnement futur, induise une réduction des impacts
environnementaux.
La présente partie a pour objectif de déterminer
différentes moyens dont disposent les aménageurs pour favoriser
cette pérennisation. Le premier chapitre concernera la relation avec les
acquéreurs et constructeurs des parcelles, pour lesquels on distinguera
le cas des ZAC (section 1) de celui des lotissements (section 2). Dans un
second temps, nous verrons comment l'aménageur peut envisager le
transfert des espaces et équipements publics aux gestionnaires (chapitre
2). Après avoir vu les relations avec les futurs gestionnaires (section
1), nous nous intéresseront aux documents sur lesquels on peut s'appuyer
pour établir ce transfert : les Dossiers des Ouvrages
Exécutés et les Documents d'Intervention Ultérieure sur
Ouvrage (section 2).
40 / 59 Partie 2 La pérennisation des engagements en
faveur de l'environnement pris dans le cadre de l'opération
CHAPITRE 1 LA RELATION AVEC
LES ACQUÉREURS/CONSTRUCTEURS DES PARCELLES
Lorsque l'aménageur cède un terrain à
bâtir dans le cadre d'une opération d'aménagement, il est
en mesure de fixer un certain nombre de règles s'appliquant aux
acquéreurs et constructeurs de parcelles ou de lots. Les
modalités afférentes à la cession des terrains par
l'aménageur sont différentes selon qu'il agisse dans le cadre
d'une ZAC (section 1) ou d'un lotissement (section 2).
Section 1 La cession de parcelle en ZAC
En ZAC, le document clé pour imposer des prescriptions
environnementales aux acquéreurs est le cahier des charges de cession de
terrain (I). Mais l'aménageur dispose aussi d'autres moyens pour
favoriser la prise en compte de préoccupations environnementales et
écologiques dans les projets développés sur les parcelles
cédées (II).
I Le CCCT : un document contractuel entre
l'acquéreur et l'aménageur
Rendu obligatoire lors de toute cession réalisée
par un aménageur dans le cadre d'une ZAC, le Cahier des Charges de
Cession de Terrain (CCCT) et ses annexes sont annexés à l'acte de
vente du terrain signé entre l'aménageur et
l'acquéreur90. Ce document est donc un document contractuel
régissant les relations entre l'aménageur et l'acquéreur
de la parcelle. Mais dans la mesure où il est approuvé par le
maire ou le président de l'EPCI, et publié, on peut lui
reconnaître un caractère règlementaire91.
Le seul élément obligatoire que doit contenir le
CCCT est la SHON de construction qu'il est possible de réalisée
sur la parcelle cédée. Il peut en outre fixer des prescriptions
techniques, urbanistiques et architecturales92. Dans le cas
où les terrains cédés ont été acquis
après déclaration d'utilité publique93, le CCCT
doit comprendre les clauses types prévues par le décret du 3
février 195594 qui continue à
s'appliquer95. L'absence de précision donnée par le
code de l'urbanisme sur le contenu du CCCT permet à l'aménageur
une certaine marge de manoeuvre pour les dispositions à y introduire. A
ce titre, il est aussi
90 Article L. 311-6 du code de l'urbanisme.
91 Cassation, 3ème chambre civile 30 juin 1993, Blanchard
contre Letellier, Bulletin des arrêts de la Cour de cassation,
chambres civiles III, n°106, p. 68 ; Defrénois
1994, I, article 35803, observation S. PERIGNON, cité par H. JACQUOT, F.
PRIET, Droit de l'urbanisme, op. cit., p.654.
92 Article L. 311-6 du code de l'urbanisme.
93 Articles L. 21-1 et L. 21-3 du code de l'expropriation.
94 Décret n°1955-216 du 3 février 1955
portant approbation de clauses types à insérer dans les cahiers
des charges annexés aux actes de cession de terrains acquis en
application du titre IX du livre Ier du code de l'urbanisme et de
l'habitation
95 Avis CE n°343-303 du 5 janvier 1988, EDCE 1988,
n°40, p. 299, cité par H. JACQUOT et F. PRIET, Droit de
l'urbanisme, op. cit., p. 655.
Chapitre 1 La Relation avec les acquéreurs/constructeurs
des parcelles 41 / 59
un support intéressant pour intégrer des
prescriptions environnementales (A). Cependant, sa portée est
entravée de doutes relatifs à son opposabilité, et de
limites à la fois spatiales et temporelles pour son application (B).
A/ L'intégration de prescriptions
environnementales dans le CCCT
Les prescriptions environnementales que l'aménageur
peut souhaiter imposer aux acquéreurs de parcelles sur le
périmètre de la ZAC sont de nature techniques, ou urbanistiques,
ou architecturales, ce qui justifie leur intégration au CCCT. Il vient
alors compléter les dispositions du document d'urbanisme applicable sur
le périmètre de la ZAC. Pour inscrire ces prescriptions,
l'aménageur peut recourir à l'annexion au CCCT d'un Cahier des
Prescriptions Architecturales, Urbanistiques et Paysagères (CPAUP).
L'objectif d'un tel document est de créer une harmonie
architecturale et urbaine dans les ZAC. Ses dispositions peuvent être de
nature à favoriser la prise en compte de l'environnement dans les
projets des acquéreurs. Ainsi, il est un support pour imposer la gestion
des eaux pluviales en infiltration sur les parcelles, la création ou le
maintien d'espaces végétalisés, l'utilisation de certaines
catégories de matériaux ayant un moindre impact environnemental,
la diminution des espaces de stationnement totalement
imperméabilisés. Le CCCT est aussi utilisé pour imposer
aux constructeurs l'obtention de labels de performance
énergétique (HPE, THPE, BBC), ou de haute qualité
environnementale (HQE).
Pour le Technopôle du Madrillet, on a
inséré dans le CPAUP des prescriptions sur la gestion des eaux
pluviales. En effet, sur la majeure partie de la ZAC, les eaux de ruissellement
doivent être gérées de manière individuelle avec un
débit de fuite limité pour le rejet dans le réseau public
; par infiltration sur la parcelle y est privilégiée. On y incite
les acquéreurs à créer des noues
végétalisées, des bassins des rétention ou encore
des mares. Ces procédés ont l'avantage, outre leur fonction de
gestion des eaux pluviales, de favoriser la biodiversité en
créant des milieux humides, qui sont des écosystèmes
riches. Tous ces éléments étaient auparavant
présentés aux acquéreurs lors des réunions de suivi
des projets architecturaux. La démarche environnementale a
été l'occasion d'une mise par écrit cohérente et
d'une systématisation de la communication sur ce thème par le
biais du CPAUP, annexé au CCCT.
B/ La portée du CCCT : des limites
importantes
La portée réelle des dispositions du CCCT et de
ses annexes, dont les prescriptions environnementales souffre de trois limites
:
- une contestation de son opposabilité aux demandes de
permis de construire ;
- une limite spatiale à son application, dans le cas des
ZAC à maîtrise foncière partielle ;
- des limites temporelles à son champ d'application :
seul le premier acquéreur est concerné, et le document devient
caduc à l'expiration de la ZAC.
42 / 59 Partie 2 La pérennisation des engagements en
faveur de l'environnement pris dans le cadre de l'opération
1. L'opposabilité contestée du CCCT aux
demandes de permis de construire
La question de l'opposabilité du CCCT aux demandes de
permis de construire est importante pour l'aménageur dans la mesure
où elle détermine les moyens juridiques dont il dispose pour
s'assurer du respect de ses dispositions dans l'édification des
constructions dans le périmètre de la ZAC.
Sur son site internet, le MEEDM96, répondant
à une interrogation sur ce point, indique que « le non-respect des
clauses du cahier des charges peut être à l'origine d'un refus [de
permis de construire] ». Cette interprétation de l'article R.
431-2397 du code de l'urbanisme va à l'encontre de la
jurisprudence administrative. Tout en reconnaissant la nature
règlementaire du CCCT dès lors que les conditions d'approbation
par l'autorité administrative sont remplies, le juge administratif
dénie son opposabilité aux tiers en raison d'une publicité
insuffisante, la publicité d'un acte administratif étant
nécessaire pour le rendre opposable.
De plus, l'arrêt « Nougarou »98
rappelle que le CCCT ne peut prévaloir sur les dispositions
règlementaires du document d'urbanisme. Ainsi, en cas de divergence
entre ces deux documents, le juge applique la règle du PLU ou du
document en tenant lieu. L'autorisation de construire est fondée sur le
respect des règles de fond d'urbanisme opposables aux tiers : celles
contenues dans le code lui-même et celles issues des documents
d'urbanisme locaux opposables aux tiers, établis en application des
dispositions du code. Sont concernés par cette seconde catégorie
les PLU et documents en tenant lieu, de même que le règlement du
lotissement. La reconnaissance de la nature règlementaire du CCCT, au
moins en parie, pourrait le rendre opposable aux demandes de permis de
construire. Mais, alors que le code est explicite sur la sanction du respect du
règlement du lotissement lors de l'instruction d'une demande de permis
de construire, aucune indication de cette nature n'existe pour le CCCT. Le juge
administratif réduit donc souvent sa portée à sa nature
contractuelle.
En cas de non-respect des dispositions du CCCT par le
constructeur, et en l'absence de jurisprudence administrative favorable,
l'aménageur peut engager une action contractuelle devant le juge civil.
Il reste cependant « peu probable » que le juge exige une mise en
conformité. Pour prétendre au versement de dommages et
intérêts, l'aménageur doit justifier d'un préjudice
indemnisable. Mais la jurisprudence de la Cour d'Appel de Paris
considère que le seul non-respect du CCCT ne peut constituer un tel
préjudice99.
96
http://www.developpement-durable.gouv.fr/spip.php?page=article&id_article=16082,
consulté le 24 mai 2010
97 Article R.431-23 du code de l'urbanisme : La demande de
permis de construire sur un terrain cédé dans le cadre d'une ZAC
doit être accompagnée « d'une copie de celles des
dispositions du cahier des charges de cession de terrain qui indiquent le
nombre de mètres carrés de surface hors oeuvre nette dont la
construction est autorisée sur la parcelle cédée ainsi
que, si elles existent, de celles des dispositions du cahier des charges qui
fixent des prescriptions techniques, urbanistiques et architecturales
imposées pour la durée de réalisation de la zone
».
98 CE 18 octobre 2000, Époux Nougarou, requête
n°200617.
99 CA Paris, 10 mai 2001, SEMAVIP contre SCI Perspectives
Courrèges de la Villette.
2. Chapitre 1 La Relation avec les
acquéreurs/constructeurs des parcelles 43 / 59
Les conditions d'application aux terrains non acquis par
l'aménageur
Dans une ZAC, l'aménageur n'a pas obligation
d'acquérir l'ensemble des terrains. Il est possible que des
propriétaires gardent la jouissance de leur bien au sein du
périmètre. Dans ce cas, en l'absence de cession à leur
bénéfice, le CCCT ne peut pas s'appliquer. Cependant, si le
propriétaire du terrain souhaite construire, une convention doit
être signée entre la collectivité à l'initiative de
l'opération , précisant les modalités de sa participation
au coût des équipements publics100. Celle-ci doit
être jointe au dossier de demande de permis de construire ou de lotir. Il
est envisageable de négocier, dans le cadre de cette convention,
l'application de certaines dispositions du CCCT, et en particulier celles
concernant la protection de l'environnement.
3. La caducité du CCCT à la suppression de la
ZAC
Par l'article L. 311-6 du code de l'urbanisme, le CCCT est
déclaré caduc à la suppression de la ZAC, ce qui est
cohérent avec le fait que le CCCT est attaché aux actes de vente
des terrains. La fin de la procédure d'aménagement met donc fin
à l'application de ce document.
En somme, il n'y a pas de moyens de droits de nature à
assurer à l'aménageur l'application des dispositions du CCCT aux
cessions réalisées dans le cadre de l'opération.
II Les autres moyens dont dispose l'aménageur
Pour appuyer une meilleure prise en compte de l'environnement
dans la définition des projets immobiliers sur le territoire de
l'opération d'aménagement, d'autres moyens peuvent être mis
en oeuvre par l'aménageur. Nous présenterons en premier lieu le
recours au concours promoteur-architecte, puis l'accompagnement des
acquéreurs dans leurs projets architecturaux.
A/ Le concours promoteur-architecte
L'aménageur peut avoir recours à cette
procédure dans l'optique de choisir les acquéreurs de parcelles.
La vente cession des parcelles sur appel d'offres permet d'inclure des
critères liés au développement durable et à la
prise en compte des problématiques environnementales dans le choix des
acquéreurs. Cette procédure peut être utilisée pour
tout ou partie des parcelles d'une opération. Elle n'est cependant
envisageable que sur des territoires attractif où un marché
immobilier actif permet d'espérer que la mise en concurrence favorisera
effectivement l'émergence de la meilleure proposition, dans le respect
des conditions économiques de prix de sortie des différents
programmes. Cette procédure peut en particulier s'appliquer pour la
construction d'ensembles immobiliers tertiaires, ou des programmes d'habitat
collectif.
L'aménageur doit identifier les objectifs à
privilégier et fixer les niveaux de performance à atteindre avant
de rédiger le cahier des charges de l'appel à projet. Le cahier
des charges, qui guidera le travail des équipes participant à la
consultation doit permettre d'assurer l'articulation entre le projet d'ensemble
de l'opération et le projet immobilier.
100 Article L. 311-4 du code de l'urbanisme.
44 / 59 Partie 2 La pérennisation des engagements
en faveur de l'environnement pris dans le cadre de
l'opération
B/ L'accompagnement des acquéreurs dans leur
projet
Outre l'utilisation du CCCT ou le recours à la
procédure de concours architecte-promoteur, l'aménageur peut
aussi intervenir en accompagnant les projets des acquéreurs de terrains
dans le périmètre de l'opération. Cette procédure
ne découle pas de l'application de textes juridiques quels qu'ils
soient. Il ne s'agit pas dans ce cas d'imposer le respect de l'environnement
comme une contrainte aux constructeurs, mais d'emporter leur adhésion au
volet environnemental du projet, et que les maîtres d'ouvrages
privés s'impliquent dans des démarches plus volontaires. Pour
cela, les dispositions règlementaires et contractuelles peuvent avoir un
impact, mais il ne faut pas négliger le recours à des
méthodes moins « normées ». En ayant une action
pédagogique, et en émettant des propositions techniques de nature
à favoriser le respect des dispositions imposées dans les
différents règlements, ou encore en incitant les
acquéreurs à s'inscrire dans un projet « environnemental
», l'aménageur peut faire adhérer les futurs
habitants/occupants du territoire concerné au projet et aux ambitions
environnementales affichées. Dans un certain nombre d'opérations,
l'architecte urbaniste de la ZAC émet un avis sur les projets
immobiliers présentés dans les dossiers de demande de permis de
construire. Une collaboration est ainsi établie entre la maîtrise
d'oeuvre publique et les maîtrises d'oeuvre privées intervenant
dans le périmètre de l'opération.
Pour l'opération du Technopôle du Madrillet, les
constructeurs doivent produire à l'appui de leur dossier de demande de
permis de construire une notice hydraulique pour que l'autorité
compétente puisse s'assurer du respect des dispositions en la
matière (infiltration sur les parcelles et rejet d'un débit de
fuite limité dans le réseau public). Cette notice fait l'objet
d'un avis du bureau d'études techniques spécialisé en
voirie réseau divers de l'équipe de maîtrise d'oeuvre de
l'opération. Le projet architectural, quant à lui, fait l'objet
d'un avis de l'architecte urbaniste de la ZAC. Ces avis ne sont que
consultatifs, mais justifient une collaboration étroite entre
l'aménageur et les acquéreurs, et un suivi régulier de
l'évolution des projets de construction prévus sur le
périmètre de l'opération. Ceux-ci se font au cours de
réunions régulières auxquelles participent :
l'aménageur et la maîtrise d'oeuvre de l'opération
(architecte urbaniste et BET-VRD), l'acquéreur et son maître
d'oeuvre, la commune qui doit délivrer le permis de construire. Ces
réunions ont un double-objectif : prévenir les refus de permis de
construire et éviter ainsi des pertes de temps inutiles pour les
projets, mais aussi de sensibiliser les acquéreurs aux enjeux
environnementaux et de favoriser leur prise en compte. L'adhésion de
chacun au projet est déterminante pour la pérennisation des
engagements.
Ce dispositif, décrit ici dans le cas d'une zone
d'activité, présentant des projets de construction plutôt
important, peut se décliner pour des opérations plus modestes,
et/ou tournées vers l'habitat. L'aménageur a un rôle
à jouer dans l'articulation entre le projet d'aménagement et les
projets immobiliers. La coordination nécessaire entre les deux volets de
l'opération justifie l'implication de l'aménageur en ce sens. Si
la coordination concerne avant tout l'aspect technique lié aux
réseaux101, on peut prévoir de l'associer plus
largement à une sensibilisation aux aspects environnementaux.
101 Un Cahier des Limites de Prestation Techniques peut
déterminer les travaux à la charge de l'aménageur et ceux
à la charge de l'acquéreur, notamment en limite de
propriété. Dans le cas où un tel document n'existe pas,
ces dispositions peuvent être introduites dans le CCCT.
Chapitre 1 La Relation avec les
acquéreurs/constructeurs des parcelles 45 / 59
Section 2 La cession des lots composant le
lotissement
La cession des lots dans un lotissement s'appuie sur deux
documents : le règlement (I) et le cahier des charges (II). Ils ont
chacun une fonction et une portée différentes. Ils ont en commun
d'être facultatifs, depuis les réformes de
1976-1977102.
I Le règlement du lotissement : un support pour
les prescriptions environnementales
La rédaction du règlement revient au lotisseur.
Le projet de règlement est un élément du dossier de
demande de permis d'aménager ou de la déclaration
préalable. Son objet est d'« apporter des compléments
aux règles d'urbanisme en vigueur »101. Il doit
être approuvé par l'autorité administrative, ce qui lui
confère un caractère règlementaire et prescriptif (A) ;
mais il demeure provisoire (B).
A/ Les caractéristiques du règlement : un
document d'urbanisme prescriptif
Le règlement du lotissement est un document dont le
contenu s'inspire de celui du PLU et qui accueille des dispositions relatives
à l'accès, la desserte, l'implantation et l'aspect
extérieur des constructions, aux coefficients d'emprise et d'occupation
du sol 101 . Son caractère facultatif est exprimé
à l'article R.* 442-6 : il n'intervient que « s'il est
envisagé d'apporter des compléments aux règles d'urbanisme
en vigueur ». Le cas échéant, le projet de
règlement fait partie du dossier de demande d'autorisation de lotir,
comme le prévoit ce même article. Il doit respecter les
règles d'urbanisme de droit commun applicables au moment de la
délivrance de l'autorisation, ce qui conditionne la
légalité de cette autorisation103.
Le respect du règlement du lotissement est
assuré par le fait qu'il est opposable aux demandes de permis de
construire déposée pour les différents lots composant le
lotissement. L'article L. 421-6 soumet la délivrance du permis de
construire à la conformité aux dispositions législatives
et règlementaires applicables. Sont visées les dispositions
contenues dans le code de l'urbanisme elles-mêmes, et celles prises en
application de celui-ci, dans le cadre des documents d'urbanisme locaux
opposables aux tiers, parmi lesquels le PLU ou document en tenant lieu, et le
règlement du lotissement104. Les dispositions du PLU et du
règlement du lotissement s'appliquent donc cumulativement. S'il y a
divergence entre ces deux documents, la règle la plus
sévère est appliquée105.
Ainsi, l'aménageur qui souhaite introduire des
prescriptions environnementales, opposables aux demandes de permis de
construire peut le faire par le biais du règlement du lotissement,
à condition que ces prescriptions soient assimilables à des
règles d'urbanisme, et qu'elles complètent celles existant dans
le
102 MORAND-DEVILLER, Droit de l'urbanisme, Mémentos
Dalloz, p. 99
103 H. JACQUOT, F. PRIET, Droit de l'urbanisme, Précis
Dalloz, 2008, p. 622.
104 H. JACQUOT, F. PRIET, Droit de l'urbanisme, Précis
Dalloz, 2008, p. 779.
105 J. MORAND-DEVILLER, Droit de l'urbanisme, Mémentos
Dalloz, 2006, p. 100.
46 / 59 Partie 2 La pérennisation des engagements en
faveur de l'environnement pris dans le cadre de l'opération
document d'urbanisme applicable. Des prescriptions concernant
des matériaux à utiliser ou encore le maintien d'une surface
végétalisée sur la parcelles remplissent ces
conditions.
B/ La pérennisation des dispositions du
règlement : conditions de modification et caducité
Le règlement du lotissement n'est pas inamovible et
peut être modifié pendant la durée de l'opération.
Il est en plus rendu caduc après un délai de dix ans suivant la
délivrance de l'autorisation de lotir.
1. Les conditions de modification du règlement du
lotissement
Les modifications acceptées ou demandées par les
propriétaires de lots sont prononcées par l'autorité
administrative compétente lorsqu'une majorité qualifiée
des colotis se prononce en ce sens. La majorité qualifiée est
constituée des deux tiers des propriétaires détenant
ensemble les trois quarts au moins de la superficie du lotissement, ou les
trois quart des propriétaires détenant au moins les deux tiers de
ladite superficie, aux termes de l'article L. 442-10 du code de l'urbanisme. La
condition d'exécution de cette disposition est que la modification soit
compatible avec la réglementation d'urbanisme applicable. Les
modalités de décompte des voix pour l'application du
présent article sont précisées par la jurisprudence.
L'appréciation du juge civil et du juge administratif divergent. Pour le
premier, il convient de décompter les lots. Ainsi, un
propriétaire dispose d'autant de voix qu'il ne possède de
lots106. Dans ce cas, l'aménageur lui-même peut prendre
l'initiative de modifier le règlement du lotissement dès lors
qu'il possède toujours les deux tiers des lots représentant les
trois quarts de la surface, ou l'inverse, et ce malgré une opposition
éventuelle de l'un des colotis. Le second quant à lui, retient le
principe de décompte suivant : une voix pour un propriétaire,
quel que soit le nombre de lots qu'il possède107. C'est le
juge administratif qui est compétent pour traiter du règlement du
lotissement, de nature règlementaire108; il convient donc de
retenir ce mode de calcul. Alors, l'aménageur même s'il
possède encore une majorité de surface du lotissement ne peut
faire évoluer le règlement sans l'accord d'une partie au moins
des propriétaires de lots. En l'absence de volontarisme de la part des
acquéreurs de lots, le règlement ne peut donc pas évoluer
dans le sens d'un plus grand respect de l'environnement. On pourrait même
craindre un recul de ces règles, mais l'aménageur dispose d'un
droit de veto qui interdit toute modification des documents du lotissement sans
l'accord du lotisseur, dans un délai de cinq ans à compter de
l'achèvement des travaux, tant que celui-ci possède un lot
constructible109. Enfin, la demande de modification doit être
acceptée par l'autorité compétente en matière de
lotissement, qui dispose d'un certain pouvoir
d'appréciation110.
106 Cour de Cassation, 3ème chambre civile 17 juillet
1973, 738, note Franck, cité par H. JACQUOT, F. PRIET, Droit de
l'urbanisme, 2009, Précis Dalloz, p. 621.
107 CE 13 juin 1975, Amarger, JCP 1976, II, 18257, note F.
Bouyssou, cité par H. JACQUOT, F. PRIET, Droit de l'urbanisme, 2009, p.
621.
108 Au contraire, alors que le contentieux lié au cahier
des charges relève de l'ordre judiciaire.
109 Article L. 442-10 du code de l'urbanisme.
110 H. JACQUOT, F. PRIET, Droit de l'urbanisme, 2009,
Précis Dalloz, p. 621.
Chapitre 1 La Relation avec les acquéreurs/constructeurs
des parcelles 47 / 59
Des modifications du règlement peuvent aussi être
imposées par l'autorité administrative pour le mettre en
conformité avec un nouveau document d'urbanisme approuvé. La
décision doit être précédé d'une
enquête publique et d'une décision du conseil
municipal111.
2. La caducité du règlement du
lotissement
Le règlement du lotissement a vocation à
disparaître, évitant ainsi la superposition entre les dispositions
de droit commun issues du PLU ou d'un document en tenant lieu et les
règles particulières du lotissement. Cette caducité est
soumise à la condition que le lotissement soit couvert par un PLU ou un
document d'urbanisme en tenant lieu112 au terme de la période
de dix ans à compter de la délivrance du permis
d'aménager. Si une majorité qualifiée de
colotis113 se prononce en faveur du maintien de ces règles,
l'autorité compétente peut malgré tout décider de
les faire disparaître, sur décision expresse après
enquête publique114. L'article L. 442-9 du code de l'urbanisme
précise que cette caducité ne concerne pas les règles de
droit privé établies entre les colotis par le biais du cahier des
charges, ni le mode de gestion des parties communes.
II Le cahier des charges du lotissement
Le cahier des charges a une vocation bien distincte de celle
du règlement du lotissement. En effet, il s'agit d'un document
contractuel entre colotis, qui a vocation à demeurer effectif
au-delà de la période de caducité du règlement.
Facultatif, le cahier des charges du lotissement ne contient
en principe que des règles d'intérêt privé ou
collectif destinées à régir les relations entre les
colotis. Il s'agit de clauses relatives aux servitudes de droit privé et
à la vie communautaire : bonne tenue des propriétés, lutte
contre le bruit... Il se présente en pratique comme un contrat
d'adhésion auquel il est souscrit lors des ventes de lots (A). Bien que
les clauses d'intérêt général de nature
administrative n'y aient pas leur place, la tendance à « surcharger
» le cahier des charges par de véritables servitudes
d'aménagement a pu être dénoncée. Le cahier des
charges devient alors un moyen détourné de pérenniser les
dispositions d'urbanisme particulières du lotissement (B).
111 Article L. 442-11 du code de l'urbanisme.
112 Article L. 442-9 du code de l'urbanisme.
113 Voir 1. Les conditions de modification du règlement du
lotissement, p. 46.
114 Article L. 442-9 du code de l'urbanisme.
48 / 59 Partie 2 La pérennisation des engagements en
faveur de l'environnement pris dans le cadre de l'opération
A/ Les caractéristiques du cahier des charges :
un document contractuel entre colotis
Le cahier des charges du lotissement est un document
régi par le droit privé des contrats. Il ne contient en principe
que des règles d'intérêt privé ou collectif
destinées à régir les relations entre les colotis,
c'est-à-dire des clauses relatives aux servitudes de droit privé
et à la vie communautaire : bonne tenue des propriétés,
lutte contre le bruit... Il se présente comme un contrat
d'adhésion auquel il est souscrit lors des ventes de lots.
Dans la pratique, il n'est pas rare que des cahiers des
charges contiennent des dispositions d'urbanisme que le lotisseur et les
colotis s'imposent contractuellement pour tenter de protéger leur
environnement contre les évolutions éventuelles des règles
d'urbanisme115.
B/ La pérennité du cahier des charges :
un moyen détourné de
maintenir des règles d'urbanisme particulières
Le cahier des charges du lotissement n'a pas vocation à
être rendu caduc de manière automatique à l'issue de la
période de dix ans suivant l'obtention du permis d'aménager,
comme l'indique expressément l'article
L. 442-9 du code de l'urbanisme. L'introduction de
prescriptions d'urbanisme dans le cahier des charges peut alors être
considéré comme un moyen de les faire perdurer au-delà de
la caducité du règlement du lotissement. « Il n'est pas
rare de trouver dans les cahier des charges pourtant non approuvés par
l'autorité administrative, des prescriptions d'urbanisme que le
lotisseur et les colotis s'imposent contractuellement pour tenter de
protéger leur environnement contre les évolutions
éventuelles des règles d'urbanisme »116. La
création ou la modification du document d'urbanisme applicable n'aurait
donc pas d'effet sur le territoire couvert par le cahier des charges du
lotissement. On assiste alors à une forme de privatisation d'une portion
du territoire communal qui s'exonère de la réglementation de
droit commun que constitue le PLU ou POS, ou un autre document en tenant lieu.
En effet, des règles d'urbanisme qui auraient été
introduites dans ce cahier des charges sont contractualisées et
échappent ainsi à l'autorité administrative. Le juge
judiciaire, seul compétent en matière contractuelle, fait
prévaloir l'aspect formel du document sur son contenu. Ceci a pour
conséquence une possible action en démolition de constructions
édifiées en violation des dispositions du cahier des charges,
même si elles ont fait l'objet d'un permis de
construire117.
Les dispositions de nature à préserver
l'environnement dans un lotissement peuvent être de nature
règlementaire et doivent à ce titre être introduite dans le
règlement. Mais on peut admettre que certaines dispositions peuvent
relever des règles de droit privé établies entre colotis :
utilisation de produits naturels pour l'entretien des espaces verts, y compris
les jardins privés. Ceci est d'autant plus justifiable lorsqu'une
association syndicale assure l'entretien des espaces communs du lotissement.
115 H. JACQUOT, F. PRIET, Droit de l'urbanisme, op. cit., p.
617.
116 H. JACQUOT, F. PRIET, Droit de l'urbanisme, Précis
Dalloz, 2008, p. 617.
117 Y. JEGOUZO, Sécurité des constructeurs et
autorisation de lotir, Droit et ville 1991, n°31, cité par H.
JACQUOT, F. PRIET, Droit de l'urbanisme, Précis Dalloz, 2008, pp. 624 et
629.
Chapitre 2 Le transfert des espaces/équipements publics
aux gestionnaires 49 / 59
CHAPITRE 2 LE TRANSFERT DES
ESPACES/ÉQUIPEMENTS PUBLICS AUX GESTIONNAIRES
L'aménageur ayant vocation à disparaître
de l'activité urbaine du périmètre de la nouvelle
opération, il doit, rétrocéder les espaces et
équipements publics réalisés à leurs gestionnaires.
L'implication des services concernée est déterminante pour
assurer la pérennisation des engagements de la maîtrise d'ouvrage
en faveur de l'environnement.
Section 1 La relation avec les futurs gestionnaires
Dans ses activités, l'aménageur doit collaborer
avec les futurs gestionnaires des équipements publics dont il dote la
zone qu'il aménage, afin de préparer la rétrocession de
ceux-ci. Pour mener l'opération à son terme dans les meilleures
conditions possibles, il convient d'avoir connaissance du jeu d'acteurs local
(I), et les modalités applicables au transfert de
propriété des espaces et équipements publics
réalisés dans le cadre de l'opération (II).
I La complexité du jeu d'acteurs local
Les relations entre les différentes
collectivités locales du territoire, et la compréhension de leurs
domaines de compétences respectifs est essentiel pour une bonne
anticipation de la gestion des équipements publics. L'aménageur
doit distinguer les acteurs relevant de la maîtrise d'ouvrage et ceux
formant les futurs gestionnaires (A). Il doit en outre identifier ses
interlocuteurs et définir leurs rôles (B).
A/ La distinction entre la maîtrise d'ouvrage et
les futurs gestionnaires
Différentes personnes publiques peuvent avoir
l'initiative et la maîtrise d'ouvrage d'une opération
d'aménagement. Ce sont principalement les communes et les EPCI qui sont
concernées, mais aussi des syndicats de communes ou syndicats mixtes. La
décentralisation a transféré aux communes l'urbanisme,
leur donnant la compétence de l'initiative des opérations
d'aménagement. La montée en puissance de
l'intercommunalité a vu le développement des compétences
des EPCI, notamment en matière d'aménagement de l'espace, ou
d'aménagement et de développement
économique118.
En matière de ZAC, les communautés urbaines,
communautés d'agglomération et communautés de communes
à dotation globale de fonctionnement bonifiée sont
compétences en matière de « création et de
réalisation de ZAC d'intérêt communautaire
»119, la notion d'intérêt communautaire
étant à définir par les conseils communautaires des
communautés urbaines ou d'agglomération, et les conseils
communaux
118 Ce sont les deux champs de compétences qui sont
exercés de plein droit par les différentes formes d'EPCI :
article L. 521416 du CGCT pour les communautés de communes ; article L.
5216-5 pour les communautés d'agglomération et article L. 5215-20
du CGCT pour les communautés urbaines.
119 Articles L. 5215-20 et L. 5216-5 du CGCT.
50 / 59 Partie 2 La pérennisation des engagements en
faveur de l'environnement pris dans le cadre de l'opération
des membres de communautés de communes. Cette
possibilité est aussi offerte aux communautés de communes. La
compétence des syndicats intercommunaux et des syndicats mixtes, quant
à elle, est définie par les membres de la structures dans ses
statuts. Il n'existe pas, pour les lotissements, de compétence
statutaire associée à un intérêt communautaire de
l'opération. Il convient de considérer le domaine dans le cadre
duquel le lotissement est prévu. Un lotissement d'activités
économiques doit être réalisé par la commune ou
l'EPCI ayant la compétence « développement économique
»120.
Parallèlement, les services publics locaux, dont
relèvent les équipements publics que l'aménageur doit
remettre aux gestionnaires sont eux aussi répartis entre les communes et
les intercommunalités, qu'il s'agisse de syndicats intercommunaux ou
d'EPCI. Par exemple, l'assainissement ou la gestion des déchets sont des
compétences obligatoires des communautés urbaines, et
facultatives pour les communautés d'agglomération et les
communautés de communes121. Ils peuvent aussi être
confiés à un syndicat intercommunal.
Cette variété des acteurs conduit
l'aménageur à dialoguer avec multiples interlocuteurs, dans la
mesure où, en application des éléments expliqués
ci-dessus, les gestionnaires des équipements publics créés
sont nécessairement, au moins en partie, distincts de la
collectivité concédante ou mandante de l'opération. Par
exemple, dans l'opération du Technopôle du Madrillet, la
maîtrise d'ouvrage est assurée par un syndicat mixte rassemblant
le département de la Seine Maritime et la communauté
d'agglomération de Rouen. L'opération est formée de deux
ZAC située sur deux communes différentes. A l'issue de
l'opération, les équipements publics réalisés par
l'aménageur seront partagés entre : les deux communes (voirie,
éclairage public, espaces verts), la régie de l'eau de
l'agglomération (adduction d'eau potable et assainissement), et les
concessionnaires de réseaux techniques (télécommunication,
fourniture d'énergie). Et le cas de cette opération n'est pas
isolé.
B/ L'identification des interlocuteurs et la
définition des rôles
Il appartient à l'aménageur d'identifier ses
interlocuteurs dès l'amont du projet, et de définir avec eux les
modalités de collaboration pendant la conception des
éléments de l'opération relevant de leur
compétence. L'aménageur doit en outre de s'assurer du respect des
différents règlements applicables, afin d'anticiper leur bonne
intégration au domaine public de la collectivité
compétente et la gestion par le service concerné. Pour quelques
cas particuliers, la définition des rôles des différents
services gestionnaire n'est pas sans poser certaines questions. C'est notamment
le cas pour les systèmes innovants développés pour
satisfaire des objectifs de préservation de l'environnement. L'exemple
de la gestion de noues végétalisées en est
l'illustration.
La mise en oeuvre d'une gestion alternative de l'eau sur
l'opération peut imposer le recours à des noues
végétalisées pour recueillir les eaux pluviales, favoriser
leur infiltration et évacuer le trop plein vers un bassin tampon, ou un
bassin d'orage. En étant végétalisées, ces noues
peuvent s'apparenter à des espaces
120 RéseauSCET, Guide des lotissements, 2007, p. 23.
121 Articles L. 5214-16, L. 5215-20 et L. 5216-5 du CGCT
Chapitre 2 Le transfert des espaces/équipements publics
aux gestionnaires 51 / 59
verts. Cependant, elles ont un rôle déterminant
à jouer dans la gestion de l'eau, qui leur confère le statut
d'équipement du réseau d'assainissement. De fait, aucun des deux
services concernés, celui des espaces verts et celui de l'assainissement
ne sont totalement compétents pour gérer ces équipements.
En effet, un traitement comme simple espace vert peut omettre de
considérer son aspect fonctionnel, et inversement, le traitement de la
noue comme un simple « tuyau » du réseau d'assainissement peut
amener à négliger la végétation qui la compose,
pourtant essentielle dans son fonctionnement global. Dans le cas où une
même collectivité assure ces deux services publics, il y a peu
d'incidences sur le transfert de propriété des noues.
L'aménageur peut néanmoins prendre l'initiative de « mettre
autour d'une table » l'ensemble des acteurs, ou de favoriser, à
l'occasion de l'opération, une modification des pratiques de la
collectivité. Si, en revanche, la responsabilité de ces deux
services est partagée par deux collectivités, le transfert de
propriété entre l'aménageur et le gestionnaire impose de
prévoir ces difficultés et de trouver des moyens d'y
remédier. Le fait de privilégier l'aspect fonctionnel ou l'aspect
paysager des noues détermine la tendance à les transférer
à l'un ou l'autre des services. Le cas intermédiaire consistant
à transférer le fond de la noue accueillant l'écoulement
au service d'assainissement et les berges au service des espaces verts, mais
cette solution ne semble pas satisfaisante, et pose des difficultés de
délimitation. Il peut être plus judicieux de former le personnel
de l'un des services aux conditions essentielles de son fonctionnement, et de
faire procéder à des contrôles périodiques par le
second.
II Les modalités du transfert de
propriété
Le transfert de propriété des espaces et
équipements publics réalisés par l'aménageur aux
collectivités compétentes doit être réalisé
à l'issue des travaux. Les règles applicables sont distinctes
selon qu'il s'agisse d'une ZAC ou d'un lotissement.
A/ Les règles applicables en lotissement :
Deux possibilités sont envisageables pour la gestion
des équipements communs du lotissement : la constitution d'une
association syndicale ou le transfert des équipements dans le domaine
public.
1. Constitution d'une association syndicale
L'association constituée est une association syndicale
libre de droit commun122. Elle se rapporte à l'ordonnance du
1er juillet 2004123. Elle assure la propriété, la
gestion et l'entretien des terrains et équipements communs du
lotissement, ce qui est conforme au troisième objectif cité par
l'article 1 de l'ordonnance : « aménager ou entretenir f...]
les voies et réseaux divers ». L'engagement de
l'aménageur-lotisseur de constituer cette association est une
pièce obligatoire du dossier de demande de permis de lotir s'il est
décidé d'y recourir124. L'association syndicale est
constituée sur le périmètre du lotissement
réalisé. Le fait qu'elle doive être obligatoirement
constituée emporte comme conséquence qu'il n'est pas
122 H. JACQUOT, F. PRIET, Droit de l'urbanisme, op. cit., p.
612
123 Ordonnance n°2004-632 du 1er juillet 2004 relative aux
associations syndicales de propriétaires, ratifiée par l'article
78 de la loi n°2004-1343 du 9 décembre 2004 de simplification du
droit.
124 Article R.442-7 du code de l'urbanisme.
52 / 59 Partie 2 La pérennisation des engagements en
faveur de l'environnement pris dans le cadre de l'opération
nécessaire de recueillir l'accord unanime des
propriétaires de lots pour adopter les statuts125. Les droits
et obligations qui incombent aux membres ont un caractère réel,
et non personnel. Ils sont attachés à la propriété,
et la qualité de membre de l'association se transmet de plein droit avec
la propriété de l'immeuble126.
L'aménageur est partie prenante dans la constitution de
l'association syndicale et la rédaction de ses statuts. Il est
envisageable d'y introduire des éléments faisant
référence à la gestion environnementale des
équipements communs du lotissement. Mais la pérennité de
ces éléments est soumise à la volonté des colotis
dès lors que l'aménageur n'a plus sa place dans l'association.
L'association syndicale n'a pas lieu d'être si les voies
et espaces communs sont destinés à être attribués en
propriété aux acquéreurs de lots, ni si le lotisseur
justifie de conventions prévoyant le transfert dans le domaine public
d'une commune ou d'un EPCI de l'intégralité des
équipements communs à l'issue des travaux.
2. Transfert des équipements dans le domaine
public
Le transfert des équipements communs d'un lotissement
dans le domaine public doit être prévu, le cas
échéant, en amont du dépôt de la demande de permis
d'aménager dans la mesure où la convention relative à un
tel transfert fait partie du dossier127. Une
délibération expresse du conseil municipale ou de
l'assemblée délibérante de l'EPCI concerné doit
précéder la signature de la convention. La décision doit
être fondée sur l'intérêt public que peut
présenter l'incorporation des voies et réseaux dans le domaine
public.
La commune ou l'EPCI ne peuvent pas intégrer dans leur
domaine public des équipements ne relevant pas de leurs
compétences. Dans la mesure où les équipements ne
relèvent pas d'un gestionnaire unique, et en vertu du fait que les
conventions peuvent porter sur un transfert partiel, on peut réaliser
plusieurs convention avec les différentes personnes publiques
concernées.
B/ Le régime de la ZAC : la souplesse
La rétrocession des espaces et équipements
publics en ZAC ne relève d'aucune obligation préalable comme en
matière de lotissement. Les équipements publics doivent en
principe être rétrocédés à la
collectivité maître d'ouvrage. Il est cependant souhaitable que
les bénéficiaires finaux de la remise des ouvrages soient
présents : EPCI, commune, concessionnaires, syndicat intercommunal. Le
document type de procès verbal de remise d'ouvrage édité
par le RéseauSCET propose de procéder le même jour à
la remise des ouvrages à la collectivité concédante, et le
transfert de celle-ci aux structures compétentes pour la gestion de ces
ouvrages.
125 Fiche n°2 « Les associations syndicales libres
», annexée à la circulaire du 11 juillet 2007 relative aux
associations syndicales de propriétaires, BOMI n°2007-07, du 31
décembre 2007.
126 Fiche n°1 « Principes généraux et
typologie des associations syndicales de propriétaires »,
annexée à la circulaire du 11 juillet 2007 relative aux
associations syndicales de propriétaires, BOMI n°2007-07, du 31
décembre 2007.
127 Article R. 442-8 du code de l'urbanisme
Chapitre 2 Le transfert des espaces/équipements publics
aux gestionnaires 53 / 59
Les termes de la concession d'aménagement doivent
prévoir les modalités de remise des ouvrages
réalisés pour pallier à toute difficulté en la
matière. Le RéseauSCET propose une trame de concession
d'aménagement utilisable par les SEM membres du réseau pour leurs
engagements envers les collectivités concédantes. Ce
modèle s'inspire des anciennes conventions publiques
d'aménagement et n'est, à ce titre, applicable qu'aux concessions
passées pour la réalisation d'opérations présentant
un fort caractère public et dans lequel la collectivité
concédante souhaite s'impliquer. Dans cette trame, l'article 14
édicte les principes qui président aux modalités de remise
des ouvrages dans le cadre de l'opération concernée.
L'aménageur doit prendre l'initiative d'inviter la collectivité
concédante et les éventuels autres intervenants aux
opérations de remise des ouvrages. Il y est précisé que
les ouvrages ayant vocation à revenir dans le patrimoine de la
collectivité concédante lui reviennent de plein droit dès
leur achèvement. Pour les ouvrages revenant à d'autres
gestionnaires que le concédant, c'est ce dernier qui est chargé
de remettre les ouvrages réalisés, en présence de
l'aménageur.
Section 2 Les DOE : des documents mobilisables au
service de l'environnement
Le transfert de propriété des ouvrages de
l'aménageur s'accompagne de la remise du dossier des ouvrages
exécutés (DOE). Ce dossier se révèle être un
outil à partir duquel l'aménageur peut
I Le DOE : un outil dans le transfert des ouvrages
aux gestionnaires
Le DOE est constitué par le maître d'oeuvre de
l'opération, à partir de divers documents remis par les
entreprises. D'après l'article 40 du CCAG-Travaux128, il
comprend au moins :
· les plans d'exécution conformes aux ouvrages
exécutés établis par le titulaire ;
· les notices de fonctionnement ;
· les prescriptions de maintenance.
Le contenu détaillé du dossier est
précisé par le maître d'ouvrage dans les documents
particuliers du marché129. Ces documents sont remis par les
entreprises titulaires des marchés de travaux lorsqu'elles demandent la
réception des travaux, ou dans le mois suivant la notification de la
décision de réception des travaux, sous peine de l'application de
pénalités130.
Le DOE a une fonction de « compte-rendu » de la
réalisation de l'ouvrage par les entreprises, à destination du
maître d'ouvrage. Mais il comprend aussi des indications relative
à la vie ultérieure de l'ouvrage et à sa maintenance, ce
qui en fait un document d'interface entre la phase de réalisation et la
phase de gestion des ouvrages. Dans cette optique, il peut être
utilisé pour permettre une gestion dans le
128 Arrêté du 8 septembre 2009 portant application
du cahier des clauses administratives générales applicable aux
marchés publics de travaux.
129 Voir II L'utilisation du DOE au service de l'environnement,
p.54.
130 Article 40 du CCAG-Travaux pris par l'arrêté du
8 septembre 2009.
54 / 59 Partie 2 La pérennisation des engagements en
faveur de l'environnement pris dans le cadre de l'opération
temps responsable du point de vue environnemental, dans la
continuité des engagements pris dans la phase de réalisation.
II L'utilisation des DOE au service de l'environnement
La réalisation des ouvrages dans le cadre d'une
opération volontariste en matière environnementale peut aboutir
au développement de techniques ou procédés nouveaux,
venant faire évoluer les systèmes de gestion antérieurs,
comme vu plus haut avec le cas des noues. Quand bien même des
méthodes relativement traditionnelles sont mises en oeuvre, le
volonté de maintenir la qualité environnementale du site peut
nécessiter des aménagements dans le mode de gestion des
ouvrages.
Pour favoriser la biodiversité à
l'échelle du périmètre de l'opération, le choix de
produits utilisés ainsi que les pratiques de gestion des espaces verts
sont déterminants. On peut recourir à une gestion
différenciée en fonction des usages qui sont fait des espaces
végétalisés ou selon les espèces plantées.
Par ailleurs, le traitement des eaux pluviales par infiltration et
écoulement dans des noues végétalisées ou vers des
bassins de rétention nécessite que des
débourbeurs-déshuileurs soient mis en place au
débouché des eaux ayant ruisselé sur les espaces de
circulation et de stationnement. En effet ces derniers sont souillés par
des hydrocarbures et des huiles de moteur. Afin de garantir l'efficacité
de ce dispositif de filtre, et d'éviter du mieux possible un risque de
pollution par les hydrocarbures, un entretien régulier de ces
équipements s'avère nécessaire.
Dans la mesure où le DOE a vocation à
être en quelque sorte un trait d'union entre les réalisateurs
initiaux des ouvrages et leurs gestionnaires, il semble qu'il puisse être
le support privilégié pour établir des principes de
gestion environnementale, comme les exemples vus plus haut.
Pour ce faire, le maître d'ouvrage précise le
contenu attendu du DOE dans les documents particuliers des marchés de
maîtrise d'oeuvre et de travaux, conformément aux commentaires de
l'article 40 du CCAG-Travaux131. Pendant la durée
d'exécution des travaux, l'aménageur s'assure de la production
des documents auprès du maître d'oeuvre, qui effectue le relai
auprès des entreprises. La rédaction des indications
environnementales du DOE doit permettre une appropriation aisée par les
utilisateurs afin d'éviter qu'elles ne soient remisées sans
être appliquées. Dans l'objectif d'une incorporation des guides
transmis dans les pratiques des gestionnaires concernés, la remise du
DOE, et en particulier des prescriptions environnementales de gestion peut
faire l'objet d'une séance de sensibilisation aux problématiques
environnementales et aux impacts sur l'environnement de la vie de l'ouvrage.
131 Arrêté du 8 septembre 2009 portant approbation
du cahier des clauses administratives générales applicable aux
marchés publics de travaux.
Conclusion 55 / 59
CONCLUSION
De la conclusion de con contrat avec la collectivité
à la cession des parcelles et la rétrocession des espaces et
équipements publics, l'aménageur dispose de moyens permettant une
meilleure prise en compte de l'aspect environnemental de l'aménagement,
et une diminution de l'empreinte écologique de la nouvelle zone urbaine
créée.
Ces différents leviers d'action lui confèrent
effectivement une place déterminante pour l'atteinte des objectifs
fixés. Mais le succès de l'opération en matière
environnementale dépend moins de moyens juridiques coercitifs que de la
capacité à fédérer et emporter l'adhésion
des différents acteurs concernés par la démarche.
L'application de l'arsenal de textes législatifs et
règlementaires peut (ou doit ?) s'accompagner d'une approche volontaire,
voire volontariste de la part de la maîtrise d'ouvrage publique, et d'une
évolution des pratiques des utilisateurs finaux. Ces
éléments s'inscrivent au-delà de l'action de
l'aménageur, bien qu'il puisse y participer par des actions de
sensibilisation et de pédagogie. Son rôle central dans les
opérations et la reconnaissance de son savoir-faire légitiment
ses actions en ce sens.
56 / 59 Partie 2 La pérennisation des engagements
en faveur de l'environnement pris dans le cadre de
l'opération
BIBLIOGRAPHIE
Textes officiels
· Code de l'urbanisme
· Code de l'environnement
· Code général des collectivités
territoriales
· Code des marchés publics et autres contrats,
Dalloz, 2010, 3ème édition, 1351 pages
· Code du travail
· Code de l'expropriation
· Loi n°2009-967 du 3 août 2009 de programmation
relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement
· Décret n°55-216 du 3 février 1955
portant approbation de clauses types à insérer dans les cahiers
des charges annexés aux actes de cession de terrains acquis en
application du titre IX du livre 1er du Code de l'urbanisme et de
l'habitation
· Arrêté du 8 septembre 2009 portant
approbation du cahier des clauses administratives générales
(CCAG) applicable aux marchés de travaux
· Circulaire du 15 février 2000 relative à la
planification de la gestion des déchets de chantier du bâtiment et
des travaux publics (non paru au JO)
· Circulaire du 18 mai 2006 relative à la
planification des déchets de chantier du bâtiment et des travaux
publics - Actions des comités de suivi (BOMEDD n°15-2006 du 15
août 2006)
· Circulaire du 11 juillet 2007 (BOMI n°2007-07 du 31
décembre 2007) Ouvrages généraux
· Henri JACQUOT et France PRIET, Droit de l'urbanisme,
Précis Dalloz, 6ème édition, 2008, 978 pages
· Jacqueline MORAND-DEVILLER, Droit de l'urbanisme,
Mémentos Dalloz, 7ème édition, 2006, 180 pages
· Michel PRIEUR, Droit de l'environnement, Précis
Dalloz, 5ème édition, 2004, 1001 pages Ouvrages
spécialisés
· A. BOURGOIN-BAREILLES, Guide de l'environnement à
l'usage des citoyens et des collectivités territoriales, Éditions
Frison-Roche, 2000, 6ème édition, 388 pages
·
Conclusion 57 / 59
Véronique INSERGUET-BRISSET et Jean-François
INSERGUET, Les approches volontaires et les collectivités territoriales,
in Les approches volontaires et le droit de l'environnement, Nathalie HERVE
FOURNEREAU (dir.), PUR, collection Univers des normes, 2008
· Hélène CHALMETON, Peut-il y avoir trop
d'initiatives volontaires ? L'exemple des travaux publics, in Les approches
volontaires et le droit de l'environnement, Nathalie HERVE-FOURNEREAU (dir.),
PUR, Coll. Univers des normes, 2008
Documents professionnels
· Xavier COUTON, PLU et ZAC, Fiche 6 : PLU et Cahier des
Charges de Cession de Terrain (CCCT), GRIDAUH, Séminaire sur
l'écriture du PLU, 2008-2009
· Laurent LE CORRE, L'opposabilité du CCCT aux
demandes de permis de construire in JuriSCET, lettre d'information juridique
destinée au réseau SCET, n°03/2010 - avril 2010
· Modèles de documents à disposition des
membres du RéseauSCET :
- Mandat d'études en marché à
procédure adaptée (acte d'engagement, cahier des clauses
administratives particulières)
- Concession d'aménagement passée par une SEM
· Guides du RéseauSCET : Guide juridique des ZAC
janvier 2010, 85 pages
· DRE, Prendre en compte la gestion des déchets
de chantier de travaux publics dans les marchés publics, Guide de
recommandations à destination des maîtres d'ouvrages et
maîtres d'oeuvre, mai 2005, 18 pages
Mémoire
· ROBIN Adeline, Les outils juridiques pour concevoir un
éco-quartier, M2 Droit de l'urbanisme et de l'aménagement,
2008-2009, sous la direction de Véronique INSERGUET
· ANGOT François, Qualité environnementale
et parcs d'activités, de la conception à la réalisation,
M2 Maîtrise d'Ouvrage Urbaine et Immobilière (MOUI), 2005-2007,
sous la direction de Philippe CLERGEAU et Jean-François BLACHE
Sites internet
· Le service public de la diffusion du droit :
www.legifrance.gouv.fr
· Site de l'Assemblée Nationale :
www.assemblee-nationale.fr
· Site du Sénat :
www.senat.fr
· Site des collectivités locales :
www.dgcl.interieur.gouv.fr
· Extranet du Réseau SCET :
reseauscet.fr/scripts/extranetv2
58 / 59 Partie 2 La pérennisation des engagements en
faveur de l'environnement pris dans le cadre de l'opération
TABLE DES MATIÈRES
Introduction 4
PARTIE 1 LA DIMENSION ENVIRONNEMENTALE DANS LA
PRODUCTION DES
TERRAINS À BÂTIR. 7
Chapitre 1 Le contrat de l'aménageur 8
Section 1 Le recours au mandat 8
I Le mandat d'études préalables 9
A/ Les études environnementales obligatoires 9
1. L'étude d'impact des travaux et projets
d'aménagement 10
2. Le document d'incidences au titre de la loi sur l'eau
11
3. L'étude de faisabilité énergies
renouvelables 12 B/ L'approche environnementale de l'urbanisme : pour
une prise en compte effective de l'étude
d'impact 13
II L'obtention du permis d'aménager un lotissement
14
A/ Les lotissements soumis à permis d'aménager
14
B/ Les lotissements soumis à déclaration
préalable 15
Section 2 Le contrat de l'aménageur : la concession
d'aménagement 16
I Le régime de la concession d'aménagement
16
A/ Les opérations relevant des concessions
d'aménagement 17
B/ Les procédures de passation des concessions
d'aménagement 17
II Le rôle de l'aménageur et la place
accordée à l'environnement 19
A/ La réponse à l'appel d'offres 19
B/ La marge de manoeuvre de l'aménageur pendant la
durée du contrat 20
Chapitre 2 La conception et la réalisation de
l'opération 23
Section 1 La phase de conception 23
I Le choix de la maîtrise d'oeuvre urbaine 23
A/ Une intervention tardive dans le projet 24
B/ Les modalités de prise en compte de l'environnement
dans le marché de maîtrise d'oeuvre 24
II La place de l'expert environnemental 26
A/ Les missions de l'expert environnemental 27
B/ Les relations de l'expert environnemental avec les
différents acteurs du projet 29
Section 2 La réalisation des ouvrages 30
I L'implication des différents intervenants : la
maîtrise d'oeuvre de travaux et les
entreprises 30 A/ La gestion environnementale : une
mission supplémentaire pour la maîtrise d'oeuvre en phase
de travaux 30
B/ Les critères environnementaux dans le choix des
entreprises 31
1. Les références à la protection de
l'environnement dans les textes applicables 31
2. L'application des textes dans la passation des contrats
de travaux 33
II La gestion des déchets de chantier 34
A/ Les textes applicables à la gestion des déchets
de chantier 35
B/ Les méthodes et moyens d'application à la
disposition du maître d'ouvrage 36
Conclusion 59 / 59
PARTIE 2 LA PÉRENNISATION DES ENGAGEMENTS EN
FAVEUR DE
L'ENVIRONNEMENT PRIS DANS LE CADRE DE L'OPÉRATION
39
Chapitre 1 La Relation avec les
acquéreurs/constructeurs des parcelles 40
Section 1 La cession de parcelle en ZAC 40
I Le CCCT : un document contractuel entre l'acquéreur
et l'aménageur 40
A/ L'intégration de prescriptions environnementales dans
le CCCT 41
B/ La portée du CCCT : des limites importantes 41
1. L'opposabilité contestée du CCCT aux
demandes de permis de construire 42
2. Les conditions d'application aux terrains non acquis par
l'aménageur 43
3. La caducité du CCCT à la suppression de la
ZAC 43
II Les autres moyens dont dispose l'aménageur
43
A/ Le concours promoteur-architecte 43
B/ L'accompagnement des acquéreurs dans leur projet 44
Section 2 La cession des lots composant le lotissement 45
I Le règlement du lotissement : un support pour les
prescriptions environnementales 45
A/ Les caractéristiques du règlement : un document
d'urbanisme prescriptif 45
B/ La pérennisation des dispositions du règlement :
conditions de modification et caducité 46
1. Les conditions de modification du règlement du
lotissement 46
2. La caducité du règlement du lotissement
47
II Le cahier des charges du lotissement 47
A/ Les caractéristiques du cahier des charges : un
document contractuel entre colotis 48
B/ La pérennité du cahier des charges : un moyen
détourné de maintenir des règles d'urbanisme
particulières 48
Chapitre 2 Le transfert des espaces/équipements
publics aux gestionnaires 49
Section 1 La relation avec les futurs gestionnaires 49
I La complexité du jeu d'acteurs local 49
A/ La distinction entre la maîtrise d'ouvrage et les futurs
gestionnaires 49
B/ L'identification des interlocuteurs et la définition
des rôles 50
II Les modalités du transfert de
propriété 51
A/ Les règles applicables en lotissement : 51
1. Constitution d'une association syndicale 51
2. Transfert des équipements dans le domaine public
52
B/ Le régime de la ZAC : la souplesse 52
Section 2 Les DOE : des documents mobilisables au service de
l'environnement 53
I Le DOE : un outil dans le transfert des ouvrages aux
gestionnaires 53
II L'utilisation des DOE au service de l'environnement
54
Conclusion 55
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