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Le droit de veto au conseil de sécurité des nations-unies entre gage juridique d'une paix internationale d'exclusion et blocage politique du règlement des conflits.

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par Xavier MUHUNGA KAFAND
Université catholique du Congo (UCC) - Licence en droit  2015
  

Disponible en mode multipage

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INTRODUCTION

Nous nous appesantirons ici sur la circonscription de la thématique auscultée (1), les motivations étayant l'option de ce travail (2), son présupposé ou énoncé de départ (3), les procédés utilisés en vue d'atteindre le résultat scientifique qu'il propose (4) et la description sommaire des parties qui le constituent (5).

1. Problématique

Le 11 février 1945 eut lieu une conférence à Yalta qui décida de l'armistice, mieux de la fin de la Seconde Guerre mondiale. Cependant, contrairement à l'entendement régulier de tout accord de cessez-le-feu qui est censé regrouper toutes les parties en conflit, cette conférence eut la particularité de ne réunir que les Puissances Alliées1(*) ; l'Allemagne nazie et les pays de l'Axe étant exclus de ces assises. Cette dimension unipolaire préfigurait déjà la part du lion qu'allaient s'arroger les Etats victorieux de la Seconde Guerre mondiale dans le cours de la politique internationale. Et la Charte des Nations Unies qui sera signée le 26 juin 1945 à San Francisco pour compenser les imperfections de la Société des Nations loge des dispositions2(*) très révélatrices de ce régime de faveur dont jouissent les vainqueurs de la Seconde Guerre mondiale et leurs alliés. Tel est le cas de l'article 23 de la Charte qui leur confère le statut de membres permanents au Conseil de Sécurité3(*) et de l'article 27 de la même Charte qui soumet l'adoption des décisions du Conseil de Sécurité sur toutes questions autres que celles de procédure à un vote affirmatif de neuf de ses membres dans lequel sont comprises les voix de tous les membres permanents, étant entendu qu'une partie à un différend s'abstient de voter, et ce, sous la férule des amendements dont a été l'objet la Charte de l'ONU4(*). En d'autres termes, le vote négatif5(*) de l'un des cinq membres permanents parmi les 15 membres du Conseil de Sécurité suffit pour bloquer l'adoption d'une décision ou une résolution sur des questions de paix et de sécurité et, partant, empiéter la résolution d'un conflit dans le cadre d'une action des Nations Unies. C'est cela le droit de veto au Conseil de Sécurité qui trouve encrage en l'article 27 alinéa 2 de la Charte. Celui-ci s'entend, en droit international public, du privilège de chacun des cinq Etats membres permanents du Conseil de Sécurité de l'ONU de paralyser les décisions de cet organe portant sur des questions autres que des questions de procédure6(*). Ce privilège découle de la règle selon laquelle la majorité requise pour ces décisions - 9 voix sur 15 - doit comprendre les voix de tous les membres permanents du Conseil7(*).

Le système du veto8(*) a été établi pour protéger les intérêts des membres fondateurs des Nations Unies qui étaient sortis victorieux de la Seconde Guerre mondiale. A la conférence de Dumbarton Oaks en octobre 1944 qui a prévalu à la création de l'ONU, il a été décidé que les représentants de la République de Chine, des Etats-Unis, du Royaume-Uni et de la France seraient membres permanents et, donc, titulaires du droit de veto. La France, même battue et occupée par l'Allemagne nazie, avait joué un rôle primordial en tant que l'une des figures de proue de la Société des Nations. En sus, elle était une puissance coloniale de première importance et les activités des Forces françaises libres aux côtés des Alliés leur ont permis de s'asseoir à la même table que les Quatre Grands.

Ainsi moulé, le droit de veto fut instauré, du point de vue formel, pour assurer la paix et la sécurité internationales, gage de développement, et préserver les générations futures du fléau de la guerre qui deux fois en l'espace d'une vie humaine a infligé à l'humanité d'indicibles souffrances9(*). Les rédacteurs de la Charte des Nations Unies ont voulu que cinq pays - la Chine, les Etats-Unis d'Amérique, la France, le Royaume Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord et l'Union des Républiques Socialistes Soviétiques (à laquelle a succédé la Fédération de Russie en 1990) - continuent de jouer un rôle de premier plan dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales, en leur accordant des sièges permanents au Conseil de Sécurité avec droit de veto, fort de la part essentielle qu'ils avaient prise à la création de l'ONU. Ce qui se veut à tous égards un objectif noble aux vertus indéniables.

Seulement voilà, la praxis de cette prérogative ou l'emploi du veto par les membres permanents du Conseil de Sécurité soulève des problèmes et contraintes pratiques dont la récurrence et l'ampleur dans la complexification des conflits qui surgissent sur la table des Nations Unies préoccupent au plus haut point les réflexions doctrinales, en droit international public, auxquelles s'affilie, non sans originalité, le présent mémoire.

Hubert VEDRINE constate qu'au fil des ans, l'identité principielle du droit de veto s'est foncièrement métamorphosée au point de relativiser les abus de l'usage de ce dernier tant du côté de ses utilisateurs que de celui de l'opinion publique internationale.10(*) Pour lui, le renforcement de l'efficacité de ce droit aujourd'hui passerait par la définition des restrictions à son exercice. Et Bruno TERTRAIS voit en l'usage de ce droit une arme de guerre occulte, entre les grandes puissances qui le détiennent, dont font les frais les Etats faibles11(*). Ainsi, préconise-t-il une réforme de ce droit dans le sens de l'élargissement du nombre de ses titulaires pour sortir de ce gouffre.12(*) Et Bernard EMIE de prévenir qu'un tel passage, tout en demeurant irréaliste, risquerait d'ouvrir fatalement la voie d'une « Troisième Guerre mondiale »13(*).

Notre dissertation juridique a la particularité de relever une autre dimension liée à ces problèmes et contraintes inhérents au droit de veto aujourd'hui. Il s'agit de celle s'identifiant principalement au dualisme du veto onusien qui s'apparente tantôt à un garde-fou contre des guerres incessantes en vue de garantir « une paix et une sécurité internationales d'exclusion »14(*), tantôt à un instrument au service du diktat impérialiste des Etats membres permanents du Conseil de Sécurité et devenant un blocage des règlements des conflits internationaux que ceux-ci sont pourtant chargés de gérer de manière à les enrayer15(*) . Dans ce dernier volet, l'usage du veto revêt aujourd'hui un visage utilitariste moderne. Il paraît tantôt comme un outil de positionnement géostratégique des membres permanents, tantôt comme une arme au service de leurs intérêts économiques, tantôt enfin telle une balance d'affirmation de leur puissance internationale.

Ce cliché nous pousse à situer le droit de veto au Conseil de Sécurité entre gage juridique16(*) d'une paix internationale d'exclusion et blocage politique du règlement des conflits internationaux. Gage d'une paix internationale d'exclusion, le droit de veto exercé entraine comme conséquence fréquemment manifeste la prévention de la propension des affres de la crise sécuritaire et de la rupture d'une paix quelque internationale, laquelle esquive s'accompagne généralement de l'isolement de facto, de l'aire d'Etats jouissant des bienfaits de ladite paix, de l'Etat ou des Etats directement en conflit ou engagés aux hostilités qui se voient comme mis en quarantaine au regard du bénéfice de la « paix » qui serait instaurée. Ceci voudrait dire en d'autres termes que les avantages de la paix défendue par l'exercice du veto ne profitent, in concreto, dans une large mesure qu'à l'Etat qui en fait usage au Conseil de Sécurité ainsi qu'aux Etats tiers ; l'Etat où se déroulent les hostilités demeurant en conflit. Le veto serait ici un outil qui protège moins la paix internationale que les intérêts et la sécurité des Etats titulaires de son droit17(*).

Ce droit de veto, asservi par les ambitions démesurées d'affirmation compétitive des tendances hégémoniques de ses titulaires-toujours en confrontation latente teintée des rapports hypocrites-, endosse le masque du blocage politique du règlement des conflits menaçant de briser la paix et la sécurité internationales en fondant son emploi moins sur le souci de faire le contrepoids des manoeuvres d'entrée en guerre arbitraires sous l'égide d'une action militaire des Nations Unies que sur la préservation des intérêts économiques et géostratégiques de ses utilisateurs, la capitalisation de leur crédit de développement ainsi que l'ardeur d'engraisser leur puissance dans le jeu des rapports des forces internationaux. C'est ce vacillement du droit de veto, toujours d'actualité, qui motive l'analyse de certains auteurs et la position de certains Etats dans le sens tantôt d'en opérer une réforme taillée, tantôt d'aller vers son abolition, tantôt encore de substituer une majorité qualifiée des voix des membres permanents à la règle, quelque peu discriminatoire, rigide et désuète, de l'unanimité des voix des membres permanents qui en est le socle18(*), tantôt enfin de revisiter la structure de la représentativité du Conseil de Sécurité19(*). La France chapeaute aujourd'hui un bloc d'Etats qui bataillent en faveur, à défaut d'une suppression totale du veto que la conjoncture politique internationale rend utopique, de l'adoption d'un « code de conduite » qui obligerait les Etats membres permanents du Conseil de Sécurité à renoncer par avance à faire usage de leur veto en face des « crimes de masse »20(*).

Par ailleurs, cette vapeur sombre qui plane sur la substance du veto oblige ses utilisateurs à rendre des comptes à l'opinion publique internationale sur le mode de fonctionnement du Conseil de Sécurité, sur le fondement juridique du veto et la légitimité de son exercice, postule Pierre Edouard DELDIQUE21(*).

Au rebond de cette approche, Géraldine LHOMMEAU estime que « le droit de veto n'est pas un privilège, mais une responsabilité »22(*).

A côté de la ventilation de toutes ces considérations attachées au droit de veto, notre dissertation juridique entend forger une analyse qui participe de sa perception telle une prérogative bipolaire, aux diapasons non moins ambigus. Cette approche, qui n'est rien de moins que la courroie de transmission de nos réflexions dans les arcanes de ce travail, cerne le droit de veto à la fois tel un garde-fou aux guerres arbitraires23(*) sous la bannière onusienne, mieux le gage juridique d'une paix et d'une sécurité internationales d' « exclusion »24(*) (Chapitre 1) et tel un verrou des voies de résolution des conflits armés qui se mesure en termes d'obstacle à la paix et à la sécurité internationales (Chapitre 2) et qui exige aujourd'hui d'être franchi (Chapitre 3).

Au demeurant, ce cliché soulève une ribambelle d'interrogations dont l'arrière-fond des réponses concourt à une meilleure appréhension des mécanismes fonctionnels et de l'originalité procédurale du droit de veto au Conseil de Sécurité des Nations Unies : Quelle est la ratio legis de ce droit - absent du Pacte de la Société des Nations - dans la Charte des Nations Unies ? Les membres permanents l'exercent-ils toujours au nom de la paix et la sécurité internationales, à des fins humanitaires par philanthropie et humanisme pour les populations civiles devant être préservées des affres des guerres ou bien en considération des pesanteurs beaucoup plus latentes ? Le fondement de ce privilège est-il démocratique ? Quel pourrait être le taux de son efficacité à résorber les crises internationales qui font l'objet de son usage ? Faut-il l'abolir aujourd'hui ?

Le présent travail s'assigne comme objectif notamment d'apporter lucidement, au terme d'une démarche qui ne fait pas lire mais fait penser, des éléments de réponse à ce questionnement. Ceci étant, l'intérêt du sujet examiné n'est certes pas moins avéré d'autant que son champ spatio-temporel ne s'en trouve pas moins déterminé.

2. Choix et intérêt du sujet

L'intérêt de cette étude s'enracine dans son effort à forger une réflexion autant courageuse que décomplexée sur une thématique à la fois délicate et d'actualité, savoir : la pertinence du droit de veto au Conseil de Sécurité de l'ONU qui conduit à s'interroger sur l'opportunité du maintien du statut de membres permanents dans cet organe onusien. Une autre dimension du mérite de ce travail est assurément son sens élevé d'interprétation et d'analyse « révolutionnaires » qui amènent à percevoir la face lacunaire du veto employé au Conseil de Sécurité en ce qu'il n'est souvent porteur que d'une paix « d'exclusion ».

Face, en outre, à la prolifération des conflits armés et aux difficultés, parfois de taille, d'y mettre fin tant par les belligérants impliqués que par les canaux du Conseil de Sécurité de l'ONU, il s'est avéré impérieux d'engager une étude d'un intérêt soutenu sur les propriétés du droit de veto au regard des crises sécuritaires qui se développent et se reproduisent sur la scène internationale afin de comprendre on ne peut mieux les facteurs sous-jacents liés à la nature complexe de ce droit - qui, plutôt que de toujours concourir au maintien de la stabilité, la sécurité et l'ordre internationaux en réglant pacifiquement25(*) les situations menaçant de rompre l'équilibre de la paix et la constance sécuritaire internationales, n'accouche souvent que d'une paix étanche dont un cercle réduit d'Etats seulement tient l'exclusivité du bénéfice et forme parfois une muraille dans la résolution de ces situations-problèmes - ainsi que la multitude de détonateurs circonstanciels qui, interagissant, activent son exercice.

La prise en compte de toutes ces indications adjointe au souci d'ausculter la valeur du droit de veto au Conseil de Sécurité, le bien-fondé de sa préservation aujourd'hui et sa portée tendant à bénir la poursuite des conflits qui font l'objet de son apposition ou à envenimer leur résorption érigent la quintessence à la fois de l'intérêt de ce travail et des raisons du choix du sujet qu'il aborde. Ainsi affirmé, l'intérêt de ce travail se trouve nourri par une chaîne de prémisses et considérations destinées à expliquer les faits et phénomènes qui seront étudiés en vue de vérifier l'exactitude des thèses résultant de l'observation et de l'analyse qui seront méthodiquement effectuées.

3. Hypothèse

Thomas KUHN26(*) faisait judicieusement remarqué qu'une hypothèse, pour être scientifiquement admissible, doit être réfutable, c'est-à-dire doit permettre des expériences qui la corroborent (la confirment) ou la réfutent (l'infirment). Et l'hypothèse du présent mémoire ne fait pas exception à cette règle d'or.

A la lumière des éléments de réflexion étayés par ce travail, nous estimons qu'un meilleur règlement des conflits et une judicieuse gestion des questions de paix et de sécurité internationales par le Conseil de Sécurité onusien, sans être l'hottage des intérêts épars des Etats, repose irrécusablement sur la substitution de l'unanimité des voix des membres permanents - sur des questions autres que celles de procédure - qu'implique le droit de veto par l'instauration d'une majorité qualifiée27(*) de leurs voix comme critère d'adoption des décisions de telle nature. Cette mutation du droit de veto devrait aller de pair, et tel est le voeu idéal, avec le dépassement mieux la rotation de la qualité de membres permanents28(*) du Conseil de Sécurité. Cette mise à jour aura la faveur de mieux refléter l'idéal d'égalité souveraine des Etats qui est l'un des principes au coeur même de la création de l'Organisation des Nations Unies29(*). Cependant, une telle entreprise semblerait un peu utopique compte tenu de la réalité des rapports des forces actuels hostiles à tout dépouillement par les membres permanents de leurs prérogatives ou encore à leur éventuel partage avec d'autres Etats, craignant de mettre en danger leurs intérêts immédiats.

Ainsi, l'enchainement de nos réflexions sera-il truffé des procédés et outils d'étude scientifique propres.

4. Méthodes et techniques

La nécessité d'énoncer l'arsenal des procédés qui président à la conduite de toute investigation scientifique est de mise étant donné que les résultats de toute recherche scientifique valent ce que valent les méthodes et techniques utilisées30(*). Ce faisant, nous nous attèlerons ici à passer en revue la quintessence de principales méthodes et techniques qui seront le vade mecum de nos analyses et à ressortir la pointe de la touche particulière que chacune d'elles entend apporter dans l'ossature de celles-ci.

4.1. Méthodes

Depuis ARISTOTE jusqu'aux théories contemporaines de la recherche scientifique via René DESCARTES et Karl POPPER, la méthode désigne « l'ensemble de canons guidant ou devant guider le processus de production des connaissances scientifiques, qu'il s'agisse d'observations, d'expériences, de raisonnements, ou de calculs théoriques »31(*). Elle est pour ainsi dire un ensemble ordonné de manière logique de principes, de règles, d'étapes permettant de parvenir à un résultat et à la connaissance d'une vérité32(*).

Ainsi, afin de mener à bon port l'étude que s'assigne comme finalité ce mémoire, nous emploierons :

4.1.1. La Méthode analytique : qui renvoie à l'auscultation d'un problème complexe afin de le diviser en sous problèmes plus simples pour mieux le comprendre et le résoudre. Énoncée par DESCARTES dans son Discours de la méthode, cette méthode permet de diviser chacune des difficultés à examiner en autant de parcelles qu'il se pourrait, et qu'il serait requis pour mieux les pallier33(*).

Appliquée au présent travail, cette méthode va nous permettre de segmenter la masse de facteurs, pièces et autres pesanteurs qui mettent les bâtons dans les roues de la mécanique, du fonctionnement et de l'objectif essentiel du droit de veto au Conseil de Sécurité de l'ONU, afin d'abord de porter un jugement explicatif assez pertinent de cette situation qui, de plus en plus, gèle la résorption des crises sécuritaires internationales, et ensuite d'établir la part de chacun des pions - apparents et voilés mais déterminants - dans les limites de l'usage du droit de veto à résoudre les conflits armés internationaux et dans sa tendance à les complexifier de nos jours.

4.1.2. La Méthode exégétique : figurant dans la chaine des méthodes de l'approche juridique, s'intéresse à la manière dont le droit positif entend solutionner une question posée ou soulevée34(*).Le recours à cette méthode permet ici de cerner, à la lumière de la ratio legis de l'article 27 alinéa 2 de la Charte des Nations Unies, la dimension préventive des menaces à l'équilibre de la paix et la sécurité internationales propre à l'exercice du droit de veto au titre de mécanisme normatif garantissant, dans la Charte de l'ONU, la stabilité et l'ordre sur la sphère internationale.

4.1.3. La Méthode hypothético-déductive : est une méthode scientifique qui consiste à formuler une hypothèse afin d'en déduire des conséquences observables futures (prédiction), mais également passées (rétro diction), permettant d'en déterminer la validité35(*). L'usage de cette méthode nous amènera d'une part à chercher, au travers de certains casus concrets dans l'histoire, des explications à l'attitude poussant, aujourd'hui, les Etats membres permanents du Conseil de Sécurité à se servir de leur droit de veto telle une arme de pression qui gèle, à ce jour plus que jamais, l'issue de nombreux conflits armés internationaux et autres crises humanitaires à portée internationale ; et d'autre part, à nous interroger sur la validité et l'opportunité de ce droit aujourd'hui, en faisant émerger le visage que nous estimons mieux adapté à ce dernier pour qu'il assure effectivement une meilleure gestion des conflits armés et soit un dispositif juridique prévenant au mieux les situations menaçant d'interrompre l'équilibre de la paix et la sécurité internationales.

4.2. Techniques

La technique de recherche en sciences sociales demeure le moyen d'atteindre un but- la collecte, le dépouillement et la présentation des données- qui se situe au niveau des faits concrets, c'est-à-dire au niveau des étapes pratiques de la recherche36(*). En effet, la méthode, au sens profond du terme, qui se situe au niveau d'une conception intellectuelle ordonnant un ensemble d'opérations vise l'explication scientifique des données du terrain, données observées et collectées, grâce à la technique utilisée. En ce sens, la technique se situe en amont, et la méthode en avale dans une démarche d'investigation scientifique voulant répondre aux critères de validité épistémologique. Ainsi, les principales techniques utilisées dans le cadre de cette réflexion sont l'observation scientifique et la technique documentaire37(*).

4.2.1. L'observation : est l'action de suivi attentif des phénomènes, sans volonté de les modifier, à l'aide de moyens d'enquête et d'étude appropriés38(*). L'observation est une technique de recherche sociologique qui consiste en un contact du chercheur avec son champ d'investigation scientifique. Nous l'utiliserons ici pour mieux étudier et comprendre les phénomènes qui écument tellement la société internationale au point d'affecter le fonctionnement intérieur du Conseil de Sécurité des Nations Unies et de conditionner l'usage du droit de veto par ses membres permanents sans en être forcément le postulat de droit.39(*)

4.2.2. La technique documentaire : consiste à fonder des opinions et positions scientifiques sur l'analyse méticuleuse des données, explications des faits et autres éléments d'analyse fouillés dans l'ossature des ouvrages et autres textes examinés. Elle nous permettra de cerner les documents à notre portée à la lumière de l'expérience des faits historiques en les passant au crible de la critique, suivant un enchaînement cohérent, en vue de contribuer à une meilleure connaissance et compréhension de notre objet d'étude.

5. Plan et division du travail

La toile de fond de notre travail est le postulat d'une réflexion juridique sur la pertinence du droit de veto et l'opportunité aujourd'hui du statut des membres permanents au Conseil de Sécurité onusien. Et cette démarche critique se réalisera sous le prisme d'une approche dialectique que vont structurer trois chapitres chargés chacun de décrypter un aspect spécifique de la question traitée. Le premier entend porter sur l'exploration des paramètres de la force du droit de veto à assurer la paix internationale avant d'exhumer la face boiteuse et précaire de celle-ci. Le deuxième se propose pour sa part de scruter les tentacules de l'usage abusif de ce droit de veto par ses titulaires qui a pour résultante fatidique l'enlisement des perspectives de sortie des conflits armés dans le cadre des Nations Unies, et pour fondement implicite, dans le chef des membres permanents du Conseil de Sécurité, l'élan de la quête effrénée de la défense de leurs intérêts économiques toujours tirés vers le haut, en plein contexte du capitalisme concurrentiel des marchés, en vue d'asseoir chacun sa suprématie étatique et sa puissance internationale. Et le travail sera étoffé par un troisième chapitre qui articulera à la fois notre contribution et position pour le façonnage d'un visage le moins scabreux et utilitariste possible du droit de veto en vue d'une meilleure et plus efficace gestion des conflits internationaux par le conseil de sécurité des Nations Unies.

CHAPITRE 1. LE VETO, UN DROIT INIQUE AU SERVICE DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES ?

Elaborée et adoptée au sortir de la Seconde Guerre mondiale, la Charte de l'ONU a pour toile de fond la recherche et le maintien de la paix et la sécurité internationales considérées comme prélude au développement plénier. La quasi-totalité de ses dispositions converge vers la matérialisation de ce postulat. Pour ce faire, la Charte dote l'ONU d'organes d'actions et de décisions dont le prééminent demeure le Conseil de Sécurité fondant sa notoriété, entre autres, sur les techniques spécifiques de son fonctionnement dans la prise des décisions. Le droit de veto, qui est ouvert aux cinq membres permanents du Conseil, leur conférant la possibilité d'assurer en fait la censure de grandes questions de la vie internationale, n'est pas étranger à ce penchant. Et L'usage de ce droit au sujet d'un conflit visé conduit parfois à empêcher la contagion de ce dernier d'une part ; et d'autre part, à faire barrière aux interventions onusiennes utilitaristes. On le constate certes, autant sous son étiquette de bouclier contre le risque du déversement des conflits armés nationaux sur les territoires de nombreux autres Etats du fait de leur entrée en danse dans les hostilités militaires que dans son costume de pourfendeur de toute manoeuvre d'instrumentalisation du Conseil de Sécurité des Nations Unies aux fins des campagnes militaires arbitraires et impérialistes par certains Etats, le droit de veto assure l'office de gardien de la paix et la sécurité internationales. Appelé à corriger les lacunes structurales de la Société des Nations dont le conseil était très pauvre en termes d'outils d'action de nature à résoudre efficacement et définitivement les conflits armés interétatiques et en l'occurrence son incapacité à prévenir, mieux à juguler la Seconde Guerre mondiale, le Conseil de Sécurité des Nations Unies est pourvu d'instruments et canaux de majeure envergure pour remblayer ce ravinement. A ce titre, le droit de veto au Conseil de Sécurité des Nations Unies est à la fois un outil novateur qui taille entre Etats membres un régime d'inégalité pointue sur une base juridique internationale40(*) et une marque de l'originalité normative de la Charte41(*) dans la conjonction des efforts de ses signataires à garantir au mieux la paix mondiale. C'est pourquoi Alain PELLET42(*) considère, non moins paradoxalement, le veto ainsi que le régime sournois de son usage comme relevant d'un droit des plus puissants Etats dont ils se servent pour préserver et porter toujours plus haut leurs intérêts partisans sur l'échiquier international. Dans l'autre sens, P. WEIL43(*) estime, pour sa part, que quoique paraissant discriminatoire, le droit de veto est de nos jours un rempart irremplaçable contre le regain du communisme et les assauts des alliances idéologiques de type féodal où le plus fort attire autour de lui les plus faibles qu'il protège et auxquels il assure une impunité généralisée44(*) en contre partie de leur allégeance. Delphine EMMANUEL ADOUKI45(*) affirme même que ce droit aura contribué au passage de l'homogénéité à l'hétérogénéité de la société internationale en s'érigeant en juste-milieu dans la délicate cohabitation des intérêts pluriels des Etats et en passerelle d'unité et de diversité dans le cours de la vie politique et normative internationale continuellement confrontée à de nouveaux défis.

A la confluence de ces opinions doctrinales, nous estimons, quant à nous, à la lumière des pesanteurs de la real politik et des signes des temps, que le veto parait un « droit inique » au service de la paix et la sécurité internationales.

Le décorticage de cette carapace que nous reconnaissons au droit de veto voudrait que l'on se penche d'abord, dans une première section, sur son analyse au double titre de prérogative novatrice de la Charte des Nations Unies dans l'optique de la consolidation de la paix générale et de mécanisme révélateur de la spécificité institutionnelle de l'Organisation des Nations-Unies comparativement à la Société des Nations dont le Pacte créateur souffrit d'une carence des moyens tant techniques que structurels efficaces de prévention et de règlement des conflits armés à portée internationale. Et nous nous appesantirons ensuite, dans une seconde section, sur l'examen de différents méandres inhérents aux motivations de l'usage de ce veto afin d'ausculter le fondement du caractère discrétionnaire qui l'environne de manière à déterminer le visage qu'il peut revêtir pour mieux éjecter le règne de l'arbitraire de la sphère internationale en faveur de l'intégration de l'ordre et la stabilité, fondés sur des relations pacifiques entre Etats.

SECTION 1. LE DROIT DE VETO, UNE SPÉCIFICITÉ INSTITUTIONNELLE DE L'ONU

Entre le 25 avril et le 25 juin 1945, les représentants de cinquante nations -- encore engagées dans la Seconde Guerre mondiale contre les puissances de l'Axe46(*) -- se réunissent en conférence à San Francisco, aux États-Unis. Ils doivent élaborer les statuts de la future organisation internationale, dont l'objectif est de réguler les conflits mondiaux et d'organiser la paix internationale. La Charte, signée le 26 juin 1945, est fondatrice de l'Organisation des Nations Unies (ONU). Celle-ci est une organisation internationale d'États nations fondée en 1945, sur le principe de l'égalité souveraine de ses membres, dans le but d'assurer la paix, la sécurité et la coopération internationales47(*).

Siégeant à New York, aux Etats-Unis, cette organisation se veut non un gouvernement supranational, mais un instrument flexible de collaboration et de coordination entre ses États membres, dont l'efficacité dépend plus de la volonté des gouvernements de chaque pays membre que de la structure de l'organisation elle-même, dépourvue d'une véritable autorité et d'une réelle indépendance48(*). C'est ce qui explique l'influence et le rôle fluctuants qu'exerce l'institution internationale sur les affaires du monde en fonction de l'état des relations internationales et, bon gré, mal gré, du rapport des forces : le droit de veto étant l'une des émanations de ce rapport des forces, plaçant les Etats membres permanents du Conseil de Sécurité qui en sont titulaires dans une haute posture. La consécration du droit de veto aux cinq membres permanents du Conseil de sécurité des Nations Unies reste, avions-nous fait remarquer, l'oeuvre de l'article 27, alinéa 2 de la Charte. Et il s'avère établi que la ratio legis, l'esprit et la lettre mêmes de cette disposition ont toujours indéniablement reposé sur la volonté d'instaurer et de maintenir permanemment la paix mondiale, mieux un certain ordre politico-économico-social comme prémisse du développement sur l'échiquier international voulu dépourvu de guerres ou autres formes de conflits armés. Ce portrait retrace on ne peut mieux la vocation initiale du droit de veto au titre de gage juridique de la paix internationale destiné à prévenir d'autres catastrophes humanitaires ou hécatombes à la mesure de ceux engendrés par les deux fléaux conflictuels les plus dévastateurs de l'histoire en termes de perte en vies humaines49(*). A ce sujet, le préambule de la Charte fait de la pratique de la tolérance, de la recherche de la paix entre Etats dans un esprit de bon voisinage et de l'union des forces des Etats membres pour maintenir la paix et la sécurité internationales les fins essentielles de l'Organisation des Nations Unies.

Ainsi saisi, le veto peut être exercé par un membre permanent du Conseil de Sécurité en solo ou collégialement avec d'autres afin d'assurer la paix internationale en ce sens qu'il viserait à empêcher la réalisation d'une action qui aurait eu pour conséquence de briser l'équilibre de la paix et de fracasser l'élan sécuritaire mondial, paix et sécurité internationales étant indissociables telles deux manches d'une même chemise. Cependant, il sied de remarquer que cette « paix internationale » préservée a souvent tendance, dans ses effets, à exclure du champ de son bénéfice l'Etat dont le territoire est théâtre du conflit considéré et à donner quitus implicite à la poursuite graduelle des hostilités. Ici, le veto prévient une destruction de la paix mondiale par contagion qui découlerait d'une action ou d'un recours à la force armée sur pied d'une résolution du Conseil de Sécurité mais ne règle pas totalement le conflit en cours. Tels ont été les cas d'abord du veto posé le 2 décembre 1994 par la Fédération de Russie contre un projet de résolution visant une mission de maintien de la paix en Bosnie-Herzégovine alors en proie à une guerre civile aux consonances sécessionnistes et génocidaires, puis de celui exercé conjointement, à trois reprises50(*), par la République populaire de Chine et la Fédération de Russie contre la condamnation de la répression en Syrie des protestations contre le régime du Président Bachar al ASSAD et enfin de celui brandi par les Etats-Unis d'Amérique le 18 février 2011 contre la proposition d'arrêt de l'implantation israélienne en Cisjordanie. Ces trois territoires ont vu les conflits qui les étrillaient continuer à faire libre cours et ne pouvaient dans ces conditions tirer profit de la fameuse paix internationale ayant pourtant constitué l'argument moteur des différents vetos mis en branle. Ce qui revient à remettre en cause une considération aprioristique de la généralisation de l'internationalité de ladite paix.

En revanche, un Etat membre permanent peut aussi faire usage de son droit veto pour bloquer le passage à un autre Etat, fût-il aussi membre permanent, qui tenterait malicieusement de concrétiser ses ambitions hégémoniques sous la casquette des Nations Unies à travers une intervention militaire arbitraire au service des intérêts particuliers. Le veto que la France menaça d'opposer à toute tentative américaine d'obtenir l'aval du Conseil de Sécurité des Nations Unies pour une intervention militaire en Irak en 2003, laquelle intervention fut néanmoins réalisée au mois de mars de la même année sous la férule d'une coalition américano-britannique -dont le leitmotiv caché était l'éviction de Saddam HUSSEIN et l'éjection de ses 24 ans d'autocratie prédatrice -, en donne une illustration topique51(*).

Il nous paraît ainsi non moins utile, en vue de mieux cerner l'ossature systémique et les facteurs déterminants des mutations de ce droit de veto, de nous faire une description laconique de la structure organique de l'Organisation des Nations Unies qui va être au coeur de toutes nos analyses (paragraphe 1) avant de jeter un regard croisé sur quelques instruments juridiques de différence entre le Pacte de la SDN et la Charte de l'ONU (paragraphe 2).

Paragraphe 1. Les principaux organes de l'ONU52(*)

L'Organisation des Nations Unies se compose de six organes administratifs qui supervisent l'activité d'un certain nombre de comités, d'agences spécialisées et de fonds. Bien que l'Assemblée générale contrôle en théorie l'activité des cinq autres organes administratifs, c'est en fait le Conseil de sécurité qui exerce au sein de l'Organisation l'influence la plus importante. En effet, le Conseil décide en dernier ressort des actions qui doivent être entreprises par les Nations Unies et de l'admission de nouveaux membres. La Charte prévoit six organes principaux : l'Assemblée générale, le Conseil de sécurité, le Conseil économique et social, le Conseil de tutelle, la Cour Internationale de Justice et le Secrétariat.

· L'Assemblée générale53(*) est l'organe de délibération de l'ONU. Tous les États membres y sont représentés, et chacun d'entre eux dispose d'une voix. L'Assemblée générale tient des sessions régulières annuelles et peut tenir des sessions extraordinaires. Sur les questions ordinaires, les décisions sont prises à la majorité simple, les décisions importantes devant être adoptées à la majorité des deux tiers. L'Assemblée n'a pas de pouvoir de contrainte : ses décisions sont simplement des recommandations faites aux États membres, qui demeurent souverains ; elles ont cependant un poids important sur l'opinion mondiale.

L'Assemblée générale est au centre de l'ONU : elle admet les nouveaux membres, approuve le budget, crée des agences et lance des programmes afin de mettre en oeuvre ses recommandations -- les plus importants sont le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) et la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED). Enfin, elle nomme le secrétaire général et les membres des différents programmes et agences, et coordonne leur action par l'établissement de comités

· Le Conseil de Sécurité54(*) est le principal organe de maintien de la paix et la sécurité internationales des Nations Unies. Il compte 15 membres, dont cinq -- la Chine, la France, le Royaume-Uni, la Russie et les États-Unis -- détiennent un siège permanent ; les dix autres membres non permanents sont élus par l'Assemblée générale pour des mandats non immédiatement reconductibles, d'une durée de deux ans. Ces sièges sont pourvus sur une base géographique : l'ensemble des pays d'Asie, d'Afrique et du Proche-Orient détient cinq sièges, les pays occidentaux et l'Amérique latine en détiennent chacun deux, et les pays d'Europe de l'Est en occupent un. La présidence du Conseil est assurée pour une durée d'un mois par chacun des membres, dans l'ordre alphabétique des pays selon leur dénomination anglaise.

Les décisions du Conseil de Sécurité sont prises à la majorité de neuf membres pour les questions de procédure. Aucune décision ne peut être prise si un membre permanent émet un vote négatif (droit de veto). En d'autres termes, le Conseil de Sécurité n'est effectif que si ses membres permanents parviennent à un consensus. Ses décisions, appelées « résolutions », sont exécutoires immédiatement. C'est le seul organe de l'ONU qui, en vertu du chapitre VII de la Charte, peut ordonner une action de maintien de la paix pouvant allier des sanctions économiques à des mesures militaires, après avoir constaté l'existence d'une situation d'agression ou de menace contre la paix.

En outre, le Conseil de sécurité adresse des recommandations à l'Assemblée générale concernant les admissions de nouveaux membres et la nomination du secrétaire général. Il participe à égalité avec l'Assemblée à l'élection des juges à la Cour Internationale de Justice. Le Conseil dispose de deux commissions permanentes et d'un comité d'état-major, qui n'est actuellement pas en fonction ; le Conseil peut également établir des organes ad hoc.

Quand le Conseil de sécurité est saisi d'une question menaçant la paix, il recommande aux parties de régler pacifiquement leur différend et il peut alors jouer le rôle de médiateur. Si le conflit a commencé, il s'efforce d'obtenir un cessez-le-feu. En l'absence de solution pacifique, le Conseil peut adopter des résolutions allant de sanctions économiques à une opération militaire collective. Il sied de relever que le Conseil de Sécurité est l'organe qui intéresse le plus notre étude d'autant que le droit de veto qui est l'objet central de celle-ci s'exerce en son sein.

· Le Conseil économique et social55(*) des Nations Unies, appelé également ECOSOC (Economic and Social Council, en anglais), est l'un des six principaux organes créés par la charte des Nations unies en 1945, chargé des questions économiques, sociales, culturelles, humanitaires et éducatives qui se posent sur le plan international.

Composé des représentants de 54 pays, dont 18 sont élus chaque année pour une période de trois ans, L'ECOSOC, fondé à l'origine pour venir en aide aux pays d'Europe et d'Asie après la guerre, s'occupe aujourd'hui principalement des problèmes des nations en voie de développement. Il soumet ses recommandations, prises à la majorité simple, à l'Assemblée générale des Nations unies sous l'autorité de laquelle il est placé, et coordonne les activités des institutions de l'ONU spécialisées dans les différents domaines de sa compétence. Le Conseil économique et social, qui se réunit deux fois par an, à Genève et à New York, opère principalement par l'intermédiaire de ses comités permanents et de ses commissions techniques et régionales.

· Le Conseil de tutelle56(*) des Nations Unies est chargé de l'administration et de la surveillance des territoires placés sous l'autorité du système de tutelle internationale. Son rôle consiste à assister ces territoires dans leur évolution vers l'autonomie ou c l'indépendance. Il est composé des États-Unis, seule puissance à exercer, quand il y a lieu, une mission d'administration effective, de la Russie, de la Grande-Bretagne, de la France et de la Chine, tous membres permanents du Conseil de sécurité, mais seuls les quatre premiers pays cités siègent effectivement, la Chine s'abstenant de prendre part aux travaux du Conseil. L'action du Conseil peut être considérée comme efficace, dans la mesure où, depuis la mise en place du système, les onze territoires administrés sont sortis du régime de tutelle. Certains de ces territoires ont fusionné avec un État voisin, d'autres ont rejoint les Nations unies après avoir accédé à l'indépendance. En 1990, seul le territoire de Belau restait placé sous tutelle ; devenu une république autonome associée aux États-Unis, il accéda à l'indépendance en 1994. Sa mission étant devenue sans objet, le Conseil de tutelle ne s'est pas réuni depuis 1994.

· La Cour Internationale de Justice57(*) des Nations Unies est le principal organe judiciaire des Nations unies, créé en 1945, selon les dispositions de la Charte des Nations unies, pour succéder à la Cour permanente de justice internationale. La Cour fonctionne conformément à un statut qui lui est propre, annexé à la Charte des Nations unies. Sa principale tâche consiste à statuer sur les différends d'ordre juridique entre nations ou Etats ; elle ne peut, de ce fait, être saisie d'une affaire par l'action d'un particulier. Tous les États membres de l'Organisation des Nations Unies (ONU) sont parties au statut de la Cour Internationale de justice, tout comme les trois États non membres de l'ONU que sont la Suisse, le Liechtenstein et Saint-Marin. Une nation qui n'est pas partie au statut de la Cour peut recourir à cette dernière si elle accepte, à titre général ou particulier, de se soumettre aux obligations d'un État membre des Nations unies.

Conformément à l'article 94 de la Charte des Nations Unies, il existe deux procédures permettant de porter un différend devant la Cour. La première consiste à recourir au protocole de soumission à la Cour du différend par l'ensemble des parties. La seconde concerne l'application unilatérale des obligations par une seule des parties impliquées dans un litige. Par exemple, un pays peut prétendre que son adversaire a été contraint par les termes d'un traité particulier à se plier, dans le cas d'un litige, à l'autorité de la Cour. Une clause stipulée dans le statut de la Cour peut également permettre -- sans obliger pour autant -- les États parties au statut à reconnaître par avance comme obligatoire la juridiction de la Cour dans certains différends internationaux. Si deux parties en conflit ont exprimé leur consentement en la matière et que le litige reste dans le cadre dudit accord, l'une ou l'autre des parties peut porter le différend devant la Cour.

En octobre 1985, Ronald Reagan, alors président des Etats-Unis, mit officiellement fin à la politique menée de longue date consistant à se plier automatiquement aux décisions de la Cour Internationale de Justice, ramenant ainsi à 43 le nombre de nations reconnaissant comme obligatoire la juridiction de la Cour. L'initiative américaine eut pour effet d'affaiblir la Cour, déjà handicapée par le refus de principales grandes puissances, parmi lesquelles l'Union soviétique, la Chine, la France, l'Allemagne de l'Ouest et l'Italie de se plier à son autorité. La Cour rend ses jugements selon les principes généraux du droit international reconnus par les nations civilisées ainsi que selon les droits coutumiers et règlements internationaux régissant les traités et conventions acceptés par les parties en litige. La Cour invoque également les décisions judiciaires antérieures et les conclusions d'experts en droit international qui ont contribué à établir la jurisprudence. Le jugement de la Cour, qui doit faire état des raisons de sa décision, est définitif et irrévocable, sans aucune possibilité de recours. Le Conseil de Sécurité de l'Organisation des Nations Unies est habilité à prendre des mesures afin de faire appliquer la décision de la Cour si les parties en litige refusent d'exécuter l'arrêt. En réalité, la Cour Internationale de Justice ne dispose que de peu de moyens pour faire exécuter ses décisions. À titre d'exemple, en 1980, lorsque la Cour ordonna à l'Iran de libérer 53 otages américains, son injonction resta sans effet.

Outre l'arbitrage des litiges entre nations, la Cour peut donner des avis consultatifs, sur des questions juridiques, à l'Assemblée générale, au Conseil de Sécurité, et à d'autres agences spécialisées, autorisées par l'Assemblée générale à solliciter ces avis. Dans ce cadre, on peut citer le jugement de la Cour en 1962, selon lequel les dépenses destinées à maintenir la paix dans la République populaire du Congo et au Moyen-Orient représentaient les « dépenses de l'organisation » à payer par les États membres, selon la répartition établie par l'Assemblée générale.

· Le Secrétariat58(*) assure le suivi du travail de l'ONU. Il est présidé par un secrétaire général, nommé par l'Assemblée générale, sur recommandation du Conseil de Sécurité, pour un mandat de cinq ans renouvelable. Le rôle du « plus haut fonctionnaire de l'Organisation » est central : il assiste aux réunions de l'Assemblée générale dont il peut attirer l'attention sur une situation qui mettrait la paix en danger. Il doit aussi mettre en oeuvre les décisions de l'Assemblée et du Conseil. Son influence réelle dépend cependant fortement de la personnalité même du secrétaire général et de la marge de manoeuvre que lui laissent les membres permanents.

Ces différents organes furent mis en place en vue, notamment, de corriger les lacunes et insuffisances du Pacte de la Société des Nations, incapables de prévenir la Seconde Guerre mondiale.

Tout compte fait, le Pacte de la Société des Nations s'étant révélé défectueux dans son élan de maintenir la paix et son efficacité s'étant vue considérablement amoindrie à cause, notamment, d'un côté, de sa non ratification par les Etats unis qui furent pourtant parrains de sa rédaction et, de l'autre, de sa vocation réduite au maintien de « la paix entre alliés », la nécessité de repenser un autre modèle d'organisation interétatique était plus que jamais de mise pour redonner un nouveau souffle à la vie internationale et, surtout, ouvrir des horizons plus prometteurs en termes de garantie de la paix et la sécurité internationales. Pour ce faire, les puissances victorieuses de la Seconde Guerre mondiale convinrent d'adopter un texte, la Charte des Nations Unies, en vue d'étendre la démocratie et la coopération pacifique aux relations internationales. Ainsi située, la Charte des Nations Unies -que de nombreux auteurs qualifient de « Constitution des Nations Unies »- fut conçue sur la base de la « Charte de l'Atlantique », texte élaboré en août 1941 par le président américain Franklin Delano ROOSEVELT et le Premier ministre britannique Wintson Leonard Spencer CHURCHILL, complété en 1943, puis en 1944 par les représentants de grandes puissances, pour être finalement adoptée, le 26 juin 194559(*). Soucieux d'étendre la démocratie aux relations internationales, le texte de la Charte énumère un ensemble de règles de conduite destinées à assurer la sécurité internationale et le maintien de la paix. A cet effet, la Charte regorge des mécanismes plus manifestes, plus solides et novateurs en matière du renforcement de la paix et la sécurité internationales60(*), lesquels en constituent la force et la suprématie comparativement à ceux mis en place par le Pacte de la Société des Nations.

Paragraphe 2. Quelques éléments sélectifs de différence structurelle entre la SDN et l'ONU à la lumière du Pacte et de la Charte les ayant respectivement instituées

Il s'avère que la Charte de l'ONU se voyait reposer sur la vocation de colmater les brèches structurales de la Société des Nations afin de réguler l'ordre international sur des bases nouvelles dont la paix serait la cheville ouvrière. Plus qu'un slogan, cette vocation peut se mesurer dans l'analyse de certaines des dispositions de la Charte comparativement à certaines autres du Pacte de la Société des Nations en vue d'aboutir à la mise a nu de la spécificité de celle-là en réponse aux « faiblesses » de celui-ci.

Ce faisant, la texture substantielle des intitulés de la majeure partie des Chapitres de la Charte dévoile la fresque topique de ce penchant pacifiste ou préventif, mieux régulateur des conflits armés internationaux. Cette orthodoxie apparaît déjà irrécusablement au Chapitre I qui pose les jalons des buts et principes de l'organisation focalisés de fond en comble sur l'impératif catégorique du maintien de la paix et la sécurité internationales dictant la nécessité de mettre sur pied des garde-fous aux abus de force et aux situations61(*), de caractère international, susceptibles de menacer ou de rompre l'équilibre de la paix mondiale62(*). Elle est ensuite difficile à occulter dans l'écriture des dispositions du Chapitre III qui tricotent une structuration organique dont la complémentarité des composantes et la finesse d'attributions se trouvent axées sur la préservation de la paix, la prévention des guerres et la consolidation des échanges économiques entre les Etats membres63(*).

Le Chapitre VI fait de ce dogme de la garantie de la paix et la sécurité internationales la clé de voûte de sa matière d'autant qu'il impose, à l'article 33, aux Etats qui seraient parties à un conflit d'envergure transfrontalière l'obligation de rechercher la solution, avant tout, par voie de négociation, d'enquête, de médiation, de conciliation, d'arbitrage, de règlement judiciaire, de recours aux organismes ou accords régionaux, ou par d'autres moyens pacifiques de leur choix et ce, soit sur leur propre initiative, soit sur invitation du Conseil de Sécurité.64(*) Le Chapitre VII, quant à lui, affirme avec acuité tel absolu ce postulat de la paix et la sécurité internationales en instituant un arsenal juridique de sécurité collective à faire prévaloir en face d'une menace contre la paix, d'une rupture de la paix ou d'un acte d'agression64(*). Cet arsenal juridique comprend deux axes dont le second est conditionné par l'échec ou l'insuccès du premier. Tout part du constat fait par le Conseil de Sécurité de l'existence d'une menace ou rupture de la paix ou encore d'un acte d'agression occasionné par un Etat - ce que Philippe MOREAU DESFARGES qualifie d'acte de délinquance condescendante des régimes belliqueux65(*) -, lequel constat peut, selon la nature et la gravité de la situation en présence, conduire le Conseil de Sécurité à prendre des mesures n'impliquant pas l'emploi de la force armée, en invitant les Membres des Nations Unies à appliquer ces mesures pour donner effet à ses décisions. Celles-ci peuvent comprendre l'interruption complète ou partielle des relations économiques et des communications ferroviaires, maritimes, aériennes, postales, télégraphiques, radioélectriques et des autres moyens de communication, ainsi que la rupture des relations diplomatiques, sous l'empire de l'article 41 de la Charte. Et si, par la suite, le Conseil de Sécurité estime que toutes ces mesures seraient inadéquates ou qu'elles se sont révélées telles, il peut entreprendre, au moyen de forces aériennes, navales ou terrestres, toute action qu'il juge nécessaire au maintien ou au rétablissement de la paix et la sécurité internationales. Cette action peut comprendre des démonstrations, des mesures de blocus et d'autres opérations exécutées par des forces aériennes, navales ou terrestres de Membres des Nations Unies. C'est ce qu'il ressort de l'article 42 de la Charte.

Le chapitre VIII, quant à lui, en promouvant la conclusion des accords régionaux entre Etats et le développement des organismes régionaux destinés à régler les affaires qui, touchant au maintien de la paix et de la sécurité internationales, se prêtent à une action de caractère régional, pourvu que ces accords ou ces organismes et leur activité soient compatibles avec les buts et les principes des Nations Unies66(*), n'aura pu s'émanciper de l'ouvrage de la paix internationale qui ne se veut rien de moins que le ciment structurel, opérationnel et fonctionnel de l'Organisation des Nations Unies.

Qu'il s'agisse enfin du chapitre IX - qui présente la coopération économique et sociale internationale tel le gage de la stabilité et du bien-être nécessaires aux relations pacifiques et amicales fondées sur le respect du principe de l'égalité des droits et des peuples en vue du développement économique et social des Etats67(*)- ; du chapitre X qui institue le Conseil économique et social comme organe doté des compétences très étendues pour oeuvrer à l'amélioration de l'unité économique des Etats ainsi qu'au respect effectif des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour tous ; ou du chapitre XIV qui instaure la Cour Internationale de Justice au titre d'organe judiciaire principal des Nations-Unies et, partant, juge des litiges entre Etats, l'on s'aperçoit on ne peut plus nettement de cet attachement indéfectible à la quête, à la sauvegarde de la paix internationale et à la préservation de la sécurité internationale comme fil conducteur de la Charte des Nations Unies68(*).

Au rebond de ce pèlerinage exégétique de l'esprit directeur de la Charte des Nations Unies, l'ombre de tout doute étant dissipé, il s'avère établi que l'objectif du maintien de la paix et la sécurité internationales, dans l'ossature opérationnelle des Nations Unies, se trouve scellé dans certains mécanismes d'action et de décision aux frontispices desquels figure le droit de veto accordé aux seuls cinq membres permanents du Conseil de Sécurité, privilège - d'autant plus problématique que la légitimité de son usage reste sujet à débat- qui heurte le principe sacré d'égalité souveraine des Etats69(*) et qui va retenir l'intérêt des analyses du troisième chapitre du présent mémoire. Il s'en suit que l'un des cinq membres permanents peut poser son veto pour faire échec à tout projet de recommandation ou de résolution du Conseil de Sécurité de nature à internationaliser ou à importer un conflit armé national, sur les territoires d'autres Etats, avec moins d'effets résolutifs dudit conflit que ceux de sa contagion et de sa propension70(*). C'est là une des marques de l'originalité de la Charte de l'ONU comparativement au Pacte de la SDN sur la gestion de la paix et la sécurité internationales.

Loin de prétendre lister avec exhaustivité tous les points de différence à ce sujet, nous reprendrons ici ceux se rapportant à l'épaisseur normative entre le Pacte et la Charte, la taille organique des deux organisations créées par eux, la nature des titres conférés aux membres de leurs organes exécutifs ou conseil, le degré d'aération ou de saturation des pouvoirs entre les acteurs de différents organes.

· Le premier axe de différence retenu entre la Charte des Nations Unies et le Pacte de la Société des Nations tient au volume du contenu de ces deux textes : la Charte de l'ONU compte 111 articles alors que le Pacte de la SDN ne s'articlait qu'autour de 26 articles ; laconisme qui ne pouvait, et nous n'en doutons point, prendre en charge tous les arsenaux de nature à préserver une paix durable ni porter avec acuité des moyens efficaces de dissuasion à l'égard des velléités bellicistes de certaines tendances nationalistes tantôt jalouses de la domination planétaire de la Rome antique qu'elles désiraient rééditer pour leur compte à l'époque contemporaine, tantôt vexées par le fardeau des sanctions que les vainqueurs de la Première Guerre mondiale infligèrent aux peuples vaincus sous le prisme du Traité de Versailles. C'est cette marge de manoeuvre ou largesse, du Pacte, qui servit notamment de parcelle à la montée du nazisme hitlérien et du fascisme mussolinien qui, coalisés, enclenchèrent la Seconde Guerre mondiale en septembre 193971(*) ;

· Le deuxième degré de différence est à situer à la configuration et au nombre d'organes à leur disposition. En effet, la Société des Nations n'était dotée que de trois organes sur pied de l'article 2 du Pacte l'ayant institué. Ces trois organes étaient l'Assemblée, le Conseil et le Secrétariat permanent. En revanche, l'Organisation des Nations Unies, elle, est composée de six organes : l'Assemblée générale, le Conseil de sécurité, le Conseil économique et social, le Conseil de tutelle, la Cour internationale de Justice et le Secrétariat, aux termes de l'article 7 de la Charte ; différences conceptuelle et numérique qui ne demeurent pas sans incidence sur les nuances vocationnelles de leurs missions ni sur l'étendue de leurs compétences d'attribution ni même sur leur champ d'action.

· L'article 4 du Pacte de la SDN disposait que le Conseil est composé de 9 membres désignés par l'Assemblée, sans leur conférer des statuts distinctifs72(*). Ce qui semble mieux consacrer le lustre d'égalité internationale et souveraine des Etats, cristallisée notamment par la consécration expressis verbis à chaque Etat membre d'une voix et un représentant ainsi que par la soumission de l'adoption des décisions73(*) à l'unanimité des membres. Pourtant, une lecture surplombant cette approche simpliste, que seule une interprétation rudimentaire peut préconiser, nous conduit à lever le voile d'une discrimination statutaire tacite dans les termes mêmes de l'article 4 du Pacte de la SDN.

En effet, en disposant : « Le Conseil se compose de Représentants des Principales Puissances alliées et associées, ainsi que de Représentants de quatre autres Membres de la Société », l'article susmentionné n'avait pas pu occulter, du moins à l'endroit des esprits avisés, la vive intention des Etats pactisant d'accorder un régime de préférence mieux de privilège aux vainqueurs de la Première Guerre mondiale, dont l'Acte final fut le Traité de Versailles en 1919, qui bénéficiaient ici même d'une qualification particulière74(*). L'article 4 du Pacte prévoyait en outre la possibilité d'une extension du nombre de membres du Conseil. Avec l'approbation de la majorité de l'Assemblée, le Conseil pouvait ainsi désigner d'autres Membres de la Société dont la représentation serait désormais permanente au Conseil, ouverture qui postule en faveur de son caractère souple et démocratique et qui inspire également, mutatis mutandis, notre thèse d'une mise à jour du cercle des membres permanents au Conseil de Sécurité des Nations Unies orientée dans ce sens même d'ouverture.

La Charte des Nations Unies, par contre, prévoit, sous l'égide de son article 2375(*), que le Conseil de sécurité est composé de quinze membres de l'Organisation avec distinction de statut : cinq des quinze se voyant dotés du statut de membres permanents76(*) et les dix autres de celui de membres non permanents. Ces derniers sont élus par l'Assemblée générale, chaque année par moitié, pour un mandat de deux ans, en considération de leur contribution, en tant que Membres de l'Organisation, au maintien de la paix et de la sécurité internationales et aux autres fins de l'Organisation, et aussi d'une répartition géographique équitable. L'intérêt de cette distinction réside dans l'appropriation du droit veto par les seuls membres permanents qui peuvent ainsi s'en servir pour bloquer le passage de certaines décisions77(*). La Charte organise cette différence de qualité entre les membres du Conseil de Sécurité sans fournir les motivations qui la fondent, laissant cette entreprise à l'oeuvre intellectuelle de la doctrine. Et celle-ci situe l'argument cardinal de la reconnaissance des cinq membres permanents dans la part prépondérante qu'ils tinrent dans la capitulation de l'Allemagne nazie le 08 mai 1945 et, partant, dans la fin de la Seconde guerre mondiale78(*).

Par ailleurs, l'article 4 du Pacte resta muet sur la durée du mandat des quatre membres remplaçables du Conseil. Il se bornait à disposer : « Ces quatre Membres de la Société sont désignés librement par l'Assemblée et aux époques qu'il lui plait de choisir. Jusqu'à la première désignation par l'Assemblée, les Représentants de la Belgique, du Brésil, de l'Espagne et de la Grèce sont Membres du Conseil ». En d'autres termes, l'opportunité et le moment de leur désignation demeurait tributaire des aléas du moment et des membres de l'Assemblée ; ce qui resta une condition rupestre quasi-irréaliste étant donné la divergence des intérêts souvent en concurrence de ceux-ci et constituait un contre-gage d'alternance ou de rotation des membres au Conseil de Sécurité.

En revanche, la Charte de l'ONU n'a pas cautionné ce quiproquo juridique tant elle fixe expressis verbis, à l'alinéa 2 de l'article 23, la durée du mandat des membres non permanents au Conseil de Sécurité à deux ans. Et, comme pour consumer toute étoffe de confusion possible, elle dispose en sus : « Lors de la première élection des membres non permanents après que le nombre des membres du Conseil de Sécurité aura été porté de onze à quinze, deux des quatre membres supplémentaires seront élus pour une période d'un an. Les membres sortants ne sont pas immédiatement rééligibles »79(*). Dans le même ordre, la Charte spécifie aussi les critères d'élection au Conseil de sécurité des membres non permanents par l'Assemblée générale. Ces critères se rapportent spécialement à la prise en compte, par l'Assemblée générale, « en premier lieu, de la contribution des Membres de l'Organisation au maintien de la paix et de la sécurité internationales et aux autres fins de l'Organisation, et aussi d'une répartition géographique équitable ».80(*)

· La SDN consacrait un cumul des pouvoirs concentrés entre les mains d'un seul. En effet, l'article 6 du Pacte affirmait : « Le Secrétaire général de la Société est de droit Secrétaire général de l'Assemblée et du Conseil ». Ce dernier ne pouvait être désigné qu'avec la bénédiction de Principales Puissances Alliées - au chevet desquelles figuraient les Etats-Unis d'Amérique avec les Etats influents du bloc occidental - dont il n'était voué à être, dans les faits, que l'homme de paille. Cette situation trahit une confusion organique à peine voilée au sein de la SDN et révèle l'état des crises de son émancipation des intérêts particuliers des Etats membres qui rendait difficile la distinction entre l'intérêt de l'organisation et celui des Etats considérés isolément.

Ce hiatus ne demeurait pas sans emporter des conflits d'intérêts entre ces deux camps (occidental et communiste). Ainsi, le tablier « impérial » que l'esprit et la lettre mêmes du Pacte de la Société des Nations Unies confectionnèrent pour les Etats unis d'Amérique, dont le Président se voyait attribué d'importantes prérogatives sur la conduite d'une organisation internationale entre Etats « égaux » comme le pouvoir de convoquer les premières réunions de l'Assemblée et du Conseil81(*), pouvait bien alimenter cet imbroglio. C'est pourquoi le refus du Congrès américain de ratifier ce Pacte aura largement handicapé la marche radieuse de la SDN et contribué à sa mort subite. La Charte a tenté d'y apporter des réponses en consacrant, notamment, le principe de la spécialité et de la subsidiarité au sein du fonctionnement des organes de l'ONU.

· L'esprit et le texte du Pacte de la SDN, inspiré des quatorze points définis en 1918 par le Président des États-Unis Thomas Woodrow WILSON82(*), visait plus à organiser la paix entre les Alliés qu'à poser la fondation d'une véritable organisation internationale de coopération et de coordination gouvernementale au sens classique du droit international public83(*). C'est cette tendance obstruée qui a sans doute conduit Mario BETTATI84(*) à dénoncer « l'enclos exigu » du cadre, de l'objet et des acteurs étatiques de la SDN auquel la Charte des Nations Unies remédie par sa casaque plus intégrationniste et son ouverture à tous les Etats sur la base des critères objectifs d'adhésion préétablis.

Véritable patrimoine de spécificité et d'originalité des dispositifs d'action du Conseil de Sécurité des Nations Unies, le droit de veto n'en demeure pas moins un mécanisme chargé d'assurer l'ordre, la paix et la sécurité sur l'échiquier international, but ultime du Conseil de Sécurité. A ce titre, il entend se colleter avec les velléités d'abus ou d'instrumentalisation du droit et en découdre avec les germes de l'arbitraire sur la scène internationale.

SECTION 2. LE DROIT DE VETO ET LA FONCTION DE GARDE-FOU CONTRE L'ARBITRAIRE DES ETATS

Monopolisé par les cinq membres permanents du Conseil de Sécurité, le droit de veto permet à ces derniers de bloquer toute résolution ou décision, quelle que soit l'opinion majoritaire. Les cinq membres permanents exercent ce droit quand ils votent négativement, mais une abstention ou une absence n'est pas considérée comme un veto85(*).

En effet, à la lumière des statistiques à notre disposition, sur les trente deux vetos posés, entre 1994 et 2014, un seul aura pu, nettement et objectivement, décanter la situation visée dans le sens d'une pacification avérée. Il s'agit du veto que la Fédération de Russie posa, le 21 avril 2004 par le truchement de son représentant au Conseil de Sécurité des Nations Unies, contre le projet de résolution se rapportant à la fin de l'intervention des forces onusiennes organisées dans le cadre de l'opération « UNFICYP » à Chypre. L'usage dudit veto dans cette crise aura permis le maintien des opérations de la mission des casques bleus dans cet Etat insulaire d'Europe du Sud et la stabilisation de ses institutions tant il est vrai que le rôle de ces derniers dans la préservation de la sécurité du territoire chypriote contre le danger sécessionniste qui l'épiait avait été prépondérant.

Au demeurant, autant l'ancienne Société des Nations que l'Organisation des Nations Unies auront émergé dans le sillage du courant dit idéaliste qui dominait les Relations internationales naissantes au sortir de la Première Guerre mondiale. Après avoir mesuré et souffert des conséquences affreuses de la Guerre tant sur le plan socio-économique que sur celui humanitaire, la communauté des Etats s'attachait désormais à l'idéal de la paix mondiale qui fonde l'ordre et la stabilité des rapports internationaux sur la coopération, le respect des valeurs morales et des règles du droit (conventions et traités internationaux) et la considération de la souveraineté des Etats86(*). La finalité majeure recherchée par ce courant idéaliste, et même par l'établissement de la discipline scientifique des Relations internationales, est la paix internationale. Il s'agit pour ainsi dire d'atteindre, d'instaurer et de maintenir la paix dans le monde entier, à travers des relations de coopération enracinées dans une coexistence pacifique entre Etats. Mais de quelle paix est-il vraiment question ? Quel sens faudra-t-il lui accorder ? (paragraphe 1) Quelles en sont la teneur et l'incidence au regard des translations politiques verticales et horizontales qui dictent les relations internationales et dont l'impact sur le cours du droit international reste non négligeable? (paragraphe 2).

Paragraphe 1. La paix et la sécurité internationales en droit international entre mondialisation et particularisme, intégration et exclusion

Au soir de la Première Guerre mondiale87(*), une série de traités internationaux furent adoptés qui faisaient de l'idéal de paix mondiale la clé de voûte du système juridique international. Ainsi, le traité de Versailles du 28 juin 191988(*), le traité de Saint-Germain-en-Laye du 10 septembre 1919, le traité de Neuilly du 27 novembre 1919, le traité de Trianon du 4 juin 1920 et le traité de Sèvres du 10 août 1920 eurent-ils pour conséquences majeures la formation de nouveaux Etats en Europe et au Moyen-Orient, les remaniements frontaliers, le changement de souveraineté dans divers territoires et la création de la Société des Nations89(*). Celle-ci trouva ses souches dans les 14 points de Woodrow WILSON, son initiateur, qui a proposé un ordre international fondé sur les principes de l'idéalisme90(*) au lendemain de la Première Guerre mondiale. L'idéalisme91(*) est une théorie explicative des relations internationales qui identifie la finalité de la politique étrangère au seul respect des valeurs morales et des droits de l'Homme dans le but de la paix. Il considère que pour éliminer la menace de guerre, il faut passer par une diplomatie ouverte, un libre-échange extensif et un désarmement général et que les conflits doivent être résolus par des procédures de règlement pacifique comme la négociation pour mettre l'humanité à l'abri des guerres atroces et préserver la paix internationale. Mais qu'est-ce vraiment la paix internationale ?

Deux idéologies vont nous aider à mieux comprendre l'acception de cette notion en droit international : l'approche dite globale et celle dite segmentale.

Pour la première approche, la paix internationale doit se mesurer et se manifester par l'absence de conflits armés ou confrontations militarisées sur le territoire de chacun des pays du monde. Autrement dit, c'est la sommation de paix nationales des Etats considérés isolément qui forme la paix internationale. A ce titre, la présence de la paix internationale présuppose le silence des armes dans tous les Etats, acteurs par excellence des relations internationales et sujets premiers du droit international. Dans cette logique de pensée, David MITRANY signifie qu'on ne pourrait parler de paix internationale aussi longtemps qu'un Etat, fût-il le seul, fait face à une guerre ou à un tumulte armé de quelque nature que ce soit. A cet égard, la chaîne de conflits armés qui ligote certains Etats aujourd'hui - la guerre en Syrie, les assauts terroristes islamistes de Boko Haram92(*) au Nigéria, la guerre contre le groupe Etat islamique93(*) en Irak, le conflit entre Israéliens et Palestiniens- constituerait à juste titre une véritable négation de toute considération de la paix internationale. Or, la communauté internationale mieux l'Organisation des Nations Unies considère que ces différentes situations ne constituent pas des facteurs menaçant la stabilité, la paix et la sécurité internationales mais qu'elles doivent être envisagées telles des crises internes qui doivent être réglées à l'interne. La non adoption par le Conseil de Sécurité d'une quelconque résolution chargée d'y mettre fin en est l'argument révélateur. Cette position de l'ONU se justifie en ce sens que s'il faille considérer la paix internationale comme l'absence totale de brouille dans tous les Etats, le Conseil de Sécurité se verrait contraint d'engager des interventions armées des casques bleus tous les jours dans toutes les régions du monde et il y n'aurait finalement plus de contingent onusien en réserve. Il s'agit ici d'une mondialisation de la paix qui incorpore dans son champ tous les Etats en tant que membres d'un même corps : la communauté internationale.

D'après cette école, la paix internationale est à la communauté internationale ce que la santé est au corps des êtres vivants. De cette analogie il ressort que de même que le corps, la communauté internationale ne pourrait connaître la paix aussi longtemps que ne serait-ce qu'un seul de ses membres - c'est-à-dire un Etat - vivrait une situation troublant l'ordre et la paix dans son territoire. On l'aura certes saisi, c'est donc une paix d'ouverture et d'intégration qui est promue par cette école.

Cependant, considérant la complexité du jeu de la géopolitique et de la géostratégie, de la défense de l'intérêt national et de l'accroissement de la puissance sur l'échiquier international qui dicte actuellement la politique étrangère des Etats et même leurs positions face aux différents conflits régionaux ou internationaux, il devient de plus en plus utopique de croire à une telle paix ou encore à l'absence générale, et à long terme, de tension, de conflit, de guerre. C'est dans cette optique que, se voulant plus réaliste, a émergé aujourd'hui une autre approche affiliée à l'école dite segmentale94(*).

La seconde approche, segmentale, défend la vision d'une paix s'inscrivant dans un élan de particularisation qui semble exclure de son bénéfice certains Etats. Pour cette doctrine, étant donné qu'il serait chimérique d'espérer une paix intégrant totalement tous les Etats du monde, la paix internationale devrait s'entendre d'une approche plus modérée et pragmatique. Il s'agit de considérer ladite paix non plus selon le critère de l'absence de tout conflit armé dans tous les Etats du monde comme le préconise l'école globale, mais plutôt en fonction de son effectivité dans la majorité des Etats, mieux d'une stabilité d'ensemble dans les différentes régions du monde telles que définies par l'ONU. Il s'agit d'une conception en vogue adoptée par les principaux acteurs des relations internationales et puissances de la communauté internationale. C'est aussi au nom de cette conception que le Conseil de Sécurité des Nations Unies estime aujourd'hui que la guerre en Syrie, en Libye et en Irak et même les actions terroristes du groupe Boko Haram au Nigéria, qui orchestre un nombre gigantesque de morts et d'importants dégâts collatéraux, ne constituent pas des menaces directes à la paix et la sécurité internationales suffisantes pour exiger l'adoption d'une résolution95(*) dans le sens de les régler dans le cadre onusien.

Cette conception segmentale a pour effet de défendre une paix internationale d'exclusion qui ferme les yeux à certaines crises et autres conflits armés qui peuvent déchirer un Etat donné dans la mesure où ils ne représentent pas un enjeu majeur pour les grandes puissances96(*) ni un danger à leur sécurité ou à leurs intérêts économico-politiques. Celles-ci n'hésitent pas à faire usage de leur veto contre les décisions du Conseil de Sécurité s'inscrivant dans le sens d'intervention militaire pour mettre fin aux conflits de ce genre qui éclatent dans les Etats ou régions du monde. Le recours au veto par les membres permanents du Conseil de Sécurité des Nations Unies ne préserverait ici en fait qu'une paix internationale imparfaite97(*) qui n'a de sens véritable qu'aux vues des hérauts de son option, en tirant seuls le bénéfice, l'Etat en conflit demeurant toujours en guerre. En effet, la mise en branle du droit de veto n'est en règle générale réalisée que parallèlement à un conflit armé en plein cours, circonscrit dans un périmètre donné98(*). Ainsi, la « paix » qui serait visée par l'exercice du veto aux tréfonds d'un tel contexte n'aurait qu'une épaisseur réduite et sa caractérisation « internationale » ne serait qu'imparfaite aussi longtemps que le veto ne déboucherait point sur l'éradication générale de la situation belliqueuse, aussi bien sur le territoire des Etats tiers que sur celui de l'Etat en conflit. Son mérite, du reste mineur et partiel, ne s'identifierait que par son effet préventif de la contagion des exactions, violations des droits humains et autres massacres drainés par ledit conflit qui, sommes toutes, ne serait pas du tout enrayé99(*). L'usage du veto ici est d'ailleurs motivé moins par l'élan de mettre fin au conflit que par la peur de sa propension et son esprit, fondé sur l'unanimité des voix des membres permanents, reste en contradiction avec le pari démocratique100(*) qui se trouve affirmé au coeur de la machine onusienne.

A la confluence des développements ci-haut articulés, il nous paraît judicieux de signifier une considération de taille sur la pertinence de ces deux modèles de conception de la paix internationale dans la dynamique contemporaine du garde-fou contre l'arbitraire des Etats sur la sphère internationale rattaché au droit de veto. A cet effet, prenant en compte la portée universelle de la paix conçue par le courant de l'approche dite « globale », nous pouvons affirmer avec Mario BETTATI que cette dernière est celle qui répond le mieux au défi du combat contre tout régime de droit et d'action qui, relevant d'une volonté unique, présente un caractère abusif et injuste. Cependant, la vérification d'une telle paix sur toute l'étendue de la planète s'apparente, remarque Charles de VISSCHER101(*), au domaine onirique.

Dans la même veine, le droit de veto, de par le prisme de sa teneur, de son contour et l'impact de son application fidèle au texte qui le crée, la Charte de l'ONU, se veut également porteur du même idéal de paix mondiale.

Paragraphe 2. Le droit de veto : portée, contour et incidences

Au coeur de plusieurs débats sur son opportunité, son éventuelle extension à d'autres Etats, l'assouplissement de sa règle de l'unanimité des voix positives, bref sur la possibilité de son adaptation à la nouvelle cartographie géopolitique internationale et aux enjeux de l'heure, le droit de veto est, souligne Olivier de FROUVILLE102(*), un privilège dont la légitimité était pleinement justifiée au regard du contexte particulier et des priorités de l'époque de sa consécration. Aussi, poursuit-il, ce droit paraissait-il telle l'expression juridique du refus de tous les Etats d'alors de s'embourber de nouveau dans un conflit militaire aussi destructeur de leurs économies et meurtrière de leurs populations que le fut la Seconde Guerre mondiale. Ce droit se veut également, du moins en théorie et dans la lettre de l'article 27 de la Charte de l'ONU, une barrière contre les abus du droit, la loi du plus fort et le règne de l'arbitraire. A cet égard, le droit de veto s'est toujours voulu à la fois un moyen de stabilité de l'ordre international sur une base de coopération et de cohabitation pacifiques entre Etats et un garde-fou contre la menace de l'instrumentalisation du droit international par un Etat pour attaquer militairement un autre aux fins arbitraires d'accroître sa puissance dans le rapport des forces international. Il s'enracine dans une règle d'or : le conditionnement des décisions du Conseil de Sécurité portant sur des questions autres que des questions de procédure par l'unanimité des voix des cinq membres permanents dudit Conseil, ses titulaires naturels et immuables jusqu'ici. La fixation de cette condition qui spécifie le contenu du droit qui la porte réussit à emporter le quitus de toutes les grandes puissances à une époque où la Guerre froide imposait l'équilibre de la terreur doublé de la peur réciproque entre le bloc de l'Est et le bloc de l'Ouest et où les aspirations démocratiques étaient très éloignées de la table des relations internationales. La majeure préoccupation de ces dernières demeurait, alors, la course antagoniste, sur le champ de nouveaux Etats indépendants et de ceux en quête d'une aide de reconstruction après la ruine subséquente à la Guerre de 40-45, du prosélytisme du bloc soviétique (pour l'expansion de l'idéologie communiste) et de la conquête du bloc occidental (pour capter le plus d'adhérents à la vision du capitalisme et du libéralisme). L'objectif commun était de monter une pyramide ou mieux un outil de contrepoids en charge de permettre à chacune des puissances mondiales d'après-guerre de bloquer et neutraliser les tendances outrancières des autres103(*). Et c'est dans cette optique que s'est inscrite l'idée d'accorder un droit de veto aux cinq membres permanents du Conseil de Sécurité des Nations Unies.

Il apparait clairement que ce droit heurte un peu hypocritement la substance des principes totémiques du droit international et des droits des peuples telles l'égalité souveraine des Etats et la liberté des peuples en ce sens qu'il se traduit par un privilège exclusif des cinq membres permanents dans un ordre juridique international forgé sur des bases inégales. Son schéma se rapproche plus du modèle dictatorial104(*) que des repères démocratiques105(*) au coeur de toute la dynamique politique et juridique internationale aujourd'hui.

A ce titre, il suffit qu'un membre permanent, titulaire de ce droit, en fasse usage généralement lors du vote d'un projet de résolution pour que toutes les chances d'adoption de celui-ci soient réduites au néant. Dès lors, l'effet de l'exercice du droit de veto est, dans une large mesure, sa capacité d'annihiler certaines décisions du Conseil de Sécurité recherchant tout compte fait la fin des conflits armés et, donc, la paix et la sécurité mondiales au nom de la sauvegarde des intérêts économiques, géostratégiques et parfois mêmes idéologiques de ses utilisateurs. Ici le droit de veto devient un bouclier chargé d'avaliser les violations du droit international par les Etats membres permanents du Conseil de Sécurité et une arme de protectionnisme en faveur des alliés de ces derniers quand ils se trouvent compromis par une conduite irrespectueuse de leurs engagements internationaux et qu'ils encourent, de ce fait, des sanctions assorties par l'ordonnancement juridique international. Ce faisant, ce droit assure une double protection à la fois directe et indirecte.

La protection directe vise à préserver à tout prix les intérêts socio-politico-économiques de ses usagers dans le flux de la mondialisation du libre-échangisme économique qui pousse les Etats à la conquête de nouveaux débouchés commerciaux où la concurrence et la compétitivité se veulent la courroie de transmission des échanges et marchés publics internationaux. Lorsqu'en 2011 la Russie et la Chine menacèrent d'opposer de concert leur veto à la proposition américaine d'une intervention des forces internationales en Libye pour résoudre la guerre civile suicidaire qui ravageait ce pays dans la foulée du Printemps arabe -ayant aboutit à l'assassinat de Muammar al-KADHAFI et à l'effritement de 42 ans d'autocratie-, la préservation des parts des marchés publics raflés aux Occidentaux à la faveur des conflits incessants opposant ceux-ci au régime de Tripoli l'avait emporté sur le sort humanitaire des populations civiles ou le souci d'apporter la paix et la sécurité sur le territoire libyen et les Etats voisins. De même, en faisant de nouveau front commun, réveillant un peu la nostalgie de la solidarité communiste qui les caractérisait durant la Guerre froide, pour opposer leur veto, trois fois de suite, aux projets de condamnation de la répression en Syrie des protestations contre le régime106(*) bousculé par une rébellion hétérogène depuis quatre années déjà, la Russie et la Chine, on s'en doute, ont eu à préconiser les recettes de la théorie réaliste107(*) des Relations internationales.

En effet, le régime syrien de Bachar al-ASSAD étant l'un des principaux fournisseurs en pétrole et en gaz de ces deux puissances mondiales, ouvrir les portes à une action militaire onusienne qui entrainerait la chute du régime en place serait néfaste pour les économies russe et chinoise qui verraient principalement leurs secteurs de production qui dépendent des hydrocarbures entrer en récession. Ainsi, la Russie et la Chine seraient-elles contraintes d'importer le pétrole et le gaz d'ailleurs à un coût défavorable et avec des taux d'intérêt assez importants. C'est pourquoi, fermant les yeux aux transgressions massives des droits de l'homme et à la menace de rompre la sécurité internationale que porte le conflit syrien, elles ont brandi leur veto à ce projet d'intervention onusienne officiellement au nom du respect du principe juridique de « non ingérence dans les affaires internes » d'un Etat et parce qu'elles estiment qu'une résolution efficace dudit conflit ne saurait faire abstraction d'un dialogue inter-syrien. Pourtant, l'ombre de la prévalence des intérêts économiques sino-russes sur toutes les considérations révérencieuses du droit international a du mal à se faire discrète dans la ligne de mire d'une analyse pointue de la crise syrienne.

Par ailleurs, la protection indirecte assurée par l'utilisation du droit de veto investit cette dernière de la vocation de rayer du giron du Conseil de Sécurité onusien toute mesure de sanction ou de condamnation des actes d'un gouvernement « allié stratégique», aussi répréhensibles soient-ils. Ce protectionnisme sélectif, que Philippe GOLUB108(*) identifie d'épée juridique de complaisance au service de l'arbitraire du droit international et que Michel-Cyr DJIENA WEMBOU qualifie de dispositif à géométrie variable109(*), vend la perception d'un régime de traitement de deux poids deux mesures dans une société internationale où quelques bévues et violations délibérées du droit sont cautionnées pour certains membres mais pas pour d'autres. A ce sujet, les Etats-Unis d'Amérique paraissent les plus doués et les plus habiles. En effet, ils ont eu, entre 1994 et 2014, à opposer onze fois sur quatorze leur veto aux projets de résolution ou de condamnation à l'encontre de l'Etat hébreux pour la défense duquel ils seraient prêts à vendre chèrement leur peau. De plus, il est de tradition dans la politique extérieure américaine que les Etats-Unis ne peuvent nullement laisser passer, au Conseil de Sécurité, un projet de résolution ou toute autre décision sur le conflit israélo-palestinien jugés contre les intérêts d'Israël, et ce, peu importe le rang politique du locataire de la Maison Blanche, qu'il soit Républicain ou Démocrate. Et il en a toujours été ainsi. Les Américains justifient constamment cette attitude par la ferme volonté d'empêcher la réédition de la Shoah ainsi que par l'impératif d'ériger une barrière contre la montée de l'antisémitisme dans le monde arabe qui, en vertu de son rapprochement croissant avec le front russo-chinois en pleine concurrence de leadership mondial avec les Etats-Unis, pourrait bien tirer profit d'un glissement vers l'arbitraire international.

De gré ou de force, l'usage du droit de veto au Conseil de Sécurité de l'ONU a pour vocation de droit de veiller au maintien de la paix et la sécurité mondiales. Cet état de paix et de sécurité général passe inexorablement par la suppression de l'impunité sur les violations des règles de droit international par les Etats et de l'arbitraire international. Ce dernier, souvent enflé par le zèle de propension hégémonique et de conquête de plus de zones d'influence de grandes puissances, est à la base du déclenchement de plusieurs conflits armés à travers le monde, lesquels sont tantôt catalysés, tantôt financés, tantôt commandités, tantôt menés par les Etats forts du monde selon qu'ils peuvent servir leurs intérêts.

Ceci nous pousse à remarquer que cette mission de faire échec aux tentatives d'actions ou d'interventions armées arbitraires dont est investi le droit de veto est, dans plusieurs situations, tenue pour une disposition de papier qui n'a pas toujours une force contraignante dans la pratique. En effet, lorsque la coalition des forces américano-britanniques110(*) enclenche l'offensive militaire contre l'Irak111(*), le 20 mars 2003, après l'expiration d'un ultimatum de 48 heures lancé par George W. Bush à Saddam Hussein, c'est tout le droit international qui est piétiné112(*). Non seulement cette opération baptisée « Liberté de l'Irak » avait pour véritable but, et nul n'en doute aujourd'hui, d'obtenir coûte que coûte la chute de Saddam HUSSEIN accusé depuis longtemps par les Américains de parrainer le terrorisme islamiste international, au lendemain des attentats du 11 septembre 2011 et des bombardements par Al-Qaida des tours jumelles du Word Trade Center qui obligeait les Etats-Unis à une riposte dissuasive à la hauteur de leur grandeur, mais elle fut également menée sur fond d'un lourd mensonge. Celui-ci avait consisté d'abord à présenter l'Irak comme la quatrième puissance militaire mondiale d'alors, ensuite à prêter à Saddam HUSSEIN l'intention de préparer une attaque imminente contre les Etats-Unis et enfin à l'accuser de posséder des armes de destruction massive les plus sophistiquées du monde113(*).

Cette attitude témoigne bien du spectre de l'arbitraire qui plane toujours sur la vie internationale, à travers des actions non fondées et positions partisanes des Etats membres permanents du Conseil de Sécurité en grande partie, en dépit de sa proscription par l'esprit du droit de veto. Ce faisant, les Etats titulaires de ce droit se doivent de transcender leur penchant de défense exclusive des intérêts égoïstes qui emprisonne parfois leurs positions sur la scène internationale afin de redonner à la mission de garde-fou contre l'arbitraire international, mission dont la Charte de l'ONU dote le droit de veto, ses lettres de noblesse. Pourtant, la réalité des rapports interétatiques que régente le droit international a du mal à s'émanciper de la soif qu'a chaque Etat d'accroître sa puissance et d'affirmer sa suprématie idéologique sur les autres114(*). La mise en oeuvre de ces tendances passe souvent par l'instrumentalisation du droit, laquelle préconise une interprétation taillée sur mesure et relative des règles juridiques, pourtant obligatoires, et débouche sur le développement d'un interventionnisme néocapitaliste115(*).

CHAPITRE 2. LE CONSEIL DE SÉCURITÉ, ENTRE IMPÉRIALISME NÉO-INSTRUMENTALISTE ET EXPANSIONNISME HÉGÉMONIQUE DES MEMBRES PERMANENTS : LE DROIT DE VETO Â L'AUNE DU BLOCAGE DE L'ISSUE DES CRISES

Le droit international, tel que moulé dans la fabrique institutionnelle des Nations Unies, organise des relations diplomatiques et commerciales entre Etats et où chacun se déploie prioritairement, mais sans trop le crier, à protéger ses citoyens à l'étranger, à assurer sa sécurité intérieure et extérieure, et, partant, à défendre son intérêt national.

Dans nombre de comités spéciaux ou organes de la structure onusienne, l'élaboration des règles du droit international a été parfois retardée ou bloquée pendant de nombreuses années, parce qu'un Etat ou un groupe d'Etats considérait que la norme juridique en cours d'élaboration pouvait porter atteinte à ses intérêts nationaux. Et dans si bien des cas, des délégués ont refusé de participer à l'oeuvre de codification et de développement du droit international engagée dans un organe politique de l'ONU, en invoquant, pour tout argument, des instructions qu'ils auraient reçues de leurs capitales. Comme on peut le voir, les Etats se déterminent sur l'échiquier international essentiellement en fonction des facteurs et des considérations de politique nationale. La défense de l'intérêt national demeure l'une des préoccupations majeures des Etats tout au long du processus normatif et du parcours d'adoption des décisions116(*). Par ailleurs, lorsqu'on prend en compte la sensibilité infiniment plus vive des représentants des Etats aux réalités de la solidarité nationale plutôt qu'à celles de la solidarité internationale, l'on peut bien partager l'opinion du Professeur Charles De VISSCHER selon laquelle : « la solidarité internationale est un ordre en puissance dans l'esprit des hommes, elle ne correspond pas à un ordre effectivement étatique »117(*). Cette sensibilité très développée aux réalités de la solidarité nationale émaillée d'un attachement implacable à l'intérêt national est de plus en plus au centre de l'utilisation du veto au Conseil de Sécurité et ne va pas sans retarder la fin de plusieurs crises d'envergure internationale (première section). Une stagnation qui stimule à réfléchir sur la pertinence du droit de veto au Conseil de Sécurité onusien et sur l'opportunité du maintien en l'état des membres permanents, dans un monde en mutation (deuxième section).

SECTION 1. LE DROIT DE VETO AUX TRÉFONDS DES FREINS AU RÈGLEMENT DES CONFLITS

Au Conseil de Sécurité, une majorité de neuf voix est requise pour l'adoption d'une résolution. Pour les décisions de procédure, ces neuf voix peuvent émaner de tous les membres, mais, pour toute autre question de fond, notamment celle concernant le maintien de la paix, le vote défavorable d'un seul des membres permanents du Conseil empêche l'adoption de la résolution, même si celle-ci a recueilli neuf votes favorables. Cette possibilité de rejeter une résolution, conférée à chacun des cinq membres permanents du Conseil, leur accorde en fait un droit de veto, dont l'existence même constitue un point de controverse permanent depuis la création de l'ONU. L'utilisation du droit de veto par l'ex-Union soviétique, mais également par la France, la Grande-Bretagne, les États-Unis ou la Chine nationaliste, provoqua à plusieurs reprises le blocage de l'institution. En 1950, en pleine guerre froide, la volonté de surmonter les conséquences de l'attitude soviétique conduisit à l'adoption de la résolution 377, qui stipule que l'Assemblée générale acquiert une compétence pour assurer le maintien de la paix lorsque l'absence d'unanimité paralyse l'action du Conseil de Sécurité. Depuis lors s'est installée une pratique extra legem d'interprétation subjective et relativiste de la Charte onusienne (paragraphe 1), laquelle pratique se rend, de facto, complice de l'impunité de certains crimes et actes en violation des droits humains perpétrés à la faveur d'un contexte de conflit armé international laissé pour compte (paragraphe 2).

Paragraphe 1. La Charte de l'ONU à l'épreuve d'une interprétation extensive aux fins de légitimation de sa transgression: le droit de veto, une arme de protection d'intérêts nationaux de ses titulaires

En principe, le Conseil de Sécurité prend des décisions qui s'imposent à tous118(*), au nom de l'ensemble des Etats membres119(*), pour tout ce qui touche au maintien de la paix et à la sécurité internationale. Mais la capacité de décider du Conseil dépend en réalité de la capacité de ses membres à forger un consensus. Or le droit de veto octroyé aux cinq membres permanents constitue une véritable entrave à la capacité de décision du Conseil, qui se trouve hors d'état d'intervenir dès lors que son action ne conviendrait pas à un membre permanent, quelles que soient par ailleurs les menaces ou les atteintes à la sécurité internationale. Les Etats qui disposent du droit de veto « peuvent donc rester en marge de la Charte et de ce fait, si le Conseil n'a aucun moyen de passer outre le veto d'un de ses membres permanents, à l'inverse ceux-ci peuvent se démarquer de la position commune du Conseil »120(*). Tel a été le cas lorsque les Etats-Unis et la Grande-Bretagne ont décidé d'intervenir en Irak.

Il est donc clair que le droit de veto affirme la suprématie de quelques intérêts nationaux sur l'ensemble, dans la mesure où il n'en est pas fait usage pour le bien de la communauté internationale, mais au regard des intérêts de ses détenteurs. L'ONU ne peut donc agir quand les intérêts des grandes puissances sont en jeu, d'où son incapacité à traiter par exemple de la Corée du Nord, d'Israël ou encore de la Tchétchénie. Ce que les Etats consentent à donner à l'ONU est fonction de leur perception de l'utilité de ses actions, et cela est illustré par les moyens militaires mis à la disposition de l'organisation par ses Etats membres.

Henry KISSINGER, Secrétaire d'Etat Américain de 1973 à 1977, sous les présidents Richard NIXON et Gerald FORD, disait : « la politique étrangère des Etats-Unis d'Amérique est pragmatique. Elle est dictée par l'intérêt américain »121(*). Ces propos furent corroborés, plusieurs années après, par John KERRY, Secrétaire d'Etat lui aussi, dans l'administration OBAMA, qui, relevant le caractère dynamique et réaliste de la politique étrangère américaine, préconisait d'associer le président Bachar Al-ASSAD dans les négociations pour mettre fin au conflit armé en Syrie122(*). La poursuite de l'intérêt national que Hans MORGENTHAU identifie à l'accumulation de la force reste, d'après les thèses du courant réaliste des Relations internationales, la boussole des décisions, positions, actions et orientations des Etats dans leurs rapports avec d'autres123(*). Dans ce sens, les Etats-Unis par exemple, ayant perçu le manque à gagner en continuant à soutenir en Syrie une guerre qui ne cesse de s'enliser dans le gouffre d'hécatombe et semble profiter au développement des factions terroristes, ont décidé aujourd'hui d'assouplir leur opposition directe et sectaire au régime syrien, en vue de préserver leur intérêt national - notamment en minimisant la part d'aide et de financement allouée aux rebelles - . Ce faisant, les Relations internationales qui sont la mise en action du droit international résident foncièrement dans la recherche de la puissance et la défense de l'intérêt national dans le champ frontal international, rappelle on ne peut plus judicieusement Mario BISTELA124(*). Et pour le courant réaliste-traditionnaliste125(*), l'intérêt national est la variable déterminante d'explication et de prise de décisions en politique étrangère. Cet intérêt national est constitué de la quête effrénée de la puissance, la sécurité, la prospérité et la sauvegarde des valeurs culturelles et morales garantes du prestige et de l'identité nationale d'un Etat126(*). La puissance se réfère ici à la volonté de contrôle d'un acteur sur d'autres, au renforcement de sa capacité d'influence et d'inflexion de leurs actions et décisions127(*). La sécurité, quant à elle, est conçue comme bouclier physique qui garantit l'autonomie d'une volonté, celle gouvernementale, qui permet la recherche d'une identité propre. Cette dernière, note Jean BARRIA, sera principalement d'ordre culturel, religieux ou idéologique au regard de ce que l'environnement local fait valoir128(*). La sécurité au titre de donnée de l'intérêt national vise principalement l'intégrité du territoire national, la stabilité des institutions politiques et la préservation des attributs régaliens de l'Etat. La prospérité recherchée entend, pour sa part, améliorer le niveau de vie social, accroître le capital économique national et développer une politique d'échanges commerciaux profitable à l'Etat considéré. Et la sauvegarde des valeurs morales et culturelles renvoie à la promotion des idéologies, croyances et idéaux qui fondent l'essence et la survie mêmes d'un peuple.

La question de l'interprétation de la Charte ne fait pas consensus dans la doctrine. En effet, certains considèrent que les principes qu'elle contient doivent être interprétés de manière évolutive et flexible, qu'une interprétation extensive est nécessaire au regard de l'évolution du contexte international, des nouveaux acteurs et défis du monde contemporain, tandis que d'autres au contraire défendent avec ferveur une interprétation restrictive.

Au sujet par exemple de l'interprétation extensive de l'article 51 de la Charte - et donc du principe de la légitime défense - qui a justifié l'action militaire américaine contre l'Afghanistan, déjà dans l'esprit des gouvernants américains, le recours à la légitime défense visait ici, en plus de frapper et de punir les responsables des attentats de New York du 11 septembre 2001, à prévenir d'autres actes du même genre. De même, en ajoutant le terme « préventive » à la légitime défense pour qualifier et justifier la guerre contre l'Irak en mars 2003, les Etats-Unis ont fait d'une notion traditionnellement défensive et exceptionnelle, un concept offensif érigé en règle.

C'est essentiellement autour de la qualification d'agression armée, autour de la distinction entre acte illicite de soutien, non constitutif d'une agression armée et un véritable acte d'agression qui permet la mise en oeuvre de la légitime défense, qu'il existe des divergences. En effet, pour les partisans d'une interprétation extensive de la Charte, suivre les dispositions de la Charte dans une acception restreinte, ne permet pas de couvrir les éventuelles agressions par des groupes privés autonomes à l'insu de l'Etat. Dans une telle hypothèse, l'Etat attaqué doit-il subir sans riposte ? Pierre Michel EISEMANN estime que dans la mesure où « l'invocation d'un état de nécessité n'est plus, aujourd'hui, aucunement justificative de l'emploi de la force armée, seul le recours au concept de légitime défense appliqué à des actes n'impliquant pas l'intervention d'un Etat »129(*) pourrait permettre de répondre négativement à cette question. Refuser à un Etat le droit de s'opposer par les armes à une attaque de même nature conduirait, selon lui, à le désarmer et donc à le soumettre à l'agresseur. Les partisans d'une interprétation extensive ont argué du caractère novateur et profondément original des attentats du 11 septembre pour démontrer le caractère lacunaire et inadapté du droit international existant130(*). C'est d'ailleurs sur le fondement de cette lacune qu'ils ont cru pouvoir affirmer la légalité de la guerre antiterroriste. Toutefois, toute inadaptée et lacunaire que puisse être la Charte, rien n'empêche de la modifier par le biais de négociations multilatérales afin de la rendre plus appropriée aux réalités d'aujourd'hui, relève très justement Géraldine LHOMMEAU131(*).

Mais entre-temps, le droit existant doit s'appliquer à sa juste valeur pour éviter tout détournement. En effet, comme l'affirment les défenseurs de la Charte, on ne peut combler les lacunes de celle-ci en élargissant l'exception au détriment de la règle, sans en dénaturer l'esprit et l'intention des rédacteurs et sans que cela ne présente un risque d'instrumentalisation des règles internationales au gré des intérêts particuliers.

Pour mieux percevoir la pointe de ce vecteur d'interprétation utilitariste de la Charte, nous nous proposons de tenter de cerner l'herméneutique que les Etats-Unis s'en sont faits en rapport aux notions du droit de la légitime défense et du droit de la responsabilité internationale pour engager leur guerre contre le terrorisme en attaquant l'Afghanistan et l'Irak.

A propos du droit naturel de la légitime défense, la Charte des Nations Unies a réaffirmé l'illégalité de la guerre en interdisant le recours à la force armée entre Etats132(*) ; Il existe néanmoins une limite à ce principe : la légitime défense133(*). Toutefois, celle-ci reste l'exception à la règle et demeure soumise à conditions. Ces conditions se ramènent principalement à l'établissement sans équivoque d'une agression armée imputée à un Etat et à l'exigence d'une riposte proportionnée et nécessaire. Pourtant, non seulement l'action militaire américaine en Afghanistan ne saurait se fonder parfaitement sur l'argument de légitime défense dans la mesure il est difficile, aujourd'hui encore, de prouver, juridiquement, un lien évident entre le gouvernement afghan de l'époque et le groupe Al Qaida, auteur des bombardements des Twin Towers134(*), pour attester que le second avait agi au nom du premier, mais elle s'illustra également par l'emploi des moyens militaires colossaux, disproportionnés et une campagne de démonstration des forces durant plusieurs années. Et quant à la guerre contre l'Irak, elle pèche sur la fourniture des preuves d'une agression armée préalable des forces régulières irakiennes ou de leurs mercenaires contre les Etats-Unis et ne pourrait être fondée sur l'impératif d'une riposte qui, en droit international public, ne peut viser qu'une agression qui a déjà eu lieu, et non prévenir des agressions futures135(*) qui, par essence, sont éventuelles et donc incertaines. Il s'agit donc dans ces deux cas de figure d'une interprétation abusive de la notion du droit exceptionnel de la légitime défense des Etats.

Le droit de la responsabilité internationale souffre, lui aussi, d'une interprétation abusive. Si l'argumentation pour justifier la guerre contre l'Afghanistan ne peut se fonder sur les règles spécifiques définissant l'agression, elle ne peut pas non plus s'appuyer sur les règles plus générales relatives à la responsabilité de l'Etat. Il suffit pour s'en convaincre de se référer à l'interprétation que les Américains en avaient en imputant les actes terroristes commis par un groupe d'individus, personnes physiques de droit privé, à la responsabilité de l'Etat afghan, personne morale de droit public136(*). Les Etats-Unis et les autres grandes puissances agissent généralement sur la scène internationale dans le but de défendre leurs intérêts économiques et géostratégiques personnels, restant persuadés que ce qui est important pour eux l'est aussi pour l'ensemble du monde. En intervenant militairement en Afghanistan, puis en Irak, les Etats-Unis entendaient forcément vendre l'image qu'ils se sont investie depuis l'instauration d'un système international unipolaire d'avoir « la mission sacrée d'assurer le progrès politique, économique et social des populations ». La promotion de leur sécurité nationale l'avait nettement emporté sur la volonté de se montrer respectueux de la légalité internationale.

A. La paix et la sécurité internationales sacrifiées par la primauté de l'intérêt sécuritaire national de grandes puissances

Fort de leur puissance, les Etats membres permanents du Conseil de Sécurité parviennent à s'imposer sur la scène internationale et à s'émanciper progressivement de tout formalisme juridique international pour préserver leur propre sécurité. Il s'agit, là encore, d'une sécurité d'exclusion, ne bénéficiant seulement qu'à une puissance ou à une caste réduite au mépris d'autres Etats. Ce désaveu de l'ordre mondial caractérisé par un unilatéralisme137(*) grandissant se double progressivement d'un dessein impérialiste138(*). Les Etats-Unis d'Amérique incarnent une figure paradigmatique à ce sujet.

En effet, depuis l'administration CLINTON jusqu'à ce jour, la politique extérieure américaine se traduit par un total mépris pour les règles et les institutions internationales. Les contraintes du Droit international public ne semblent alors s'imposer qu'aux autres Etats et les Etats-Unis, se situant au dessus de toute la communauté internationale, s'estiment fondés à lui imposer certaines lois. La stratégie américaine, basée sur l'élimination de toute menace à la sécurité nationale non forcément à celle mondiale, affiche clairement, dans la continuité de la politique de Bill CLINTON, la volonté de se soustraire du cadre multilatéral contraignant et refuse tout enfermement dans le cadre de la légalité internationale - qui n'offrirait pas des garanties confortables de pleine sécurité des institutions, du territoire et du peuple américains - . Cette politique considère que « la sécurité du pays ne doit dépendre d'aucune contrainte extérieure », comme le rappelait madame Condeleezza RICE, alors secrétaire d'Etat dans l'administration George W. BUSH 2. Il s'agit donc pour les Etats-Unis de restreindre la compétence des Nations Unies à des fonctions subordonnées à leur paix, leur sécurité et leur prospérité nationales. Et Colin POWELL, secrétaire d'Etat américain sous l'administration George W. BUSH 1, déclarait que « les Etats-Unis avaient le droit souverain d'engager une action militaire chaque fois qu'ils seront convaincus d'un danger guettant leur sécurité interne », revendiquant ainsi un pouvoir souverain de recourir à la force, même en solo s'il le faut, pour garantir leur sécurité nationale, et ce au mépris des principes fondamentaux du droit international.

Pour s'en convaincre, il nous parait utile d'opérer une rétrospection historique pour se rendre compte des écarts entre la stratégie de la politique extérieure américaine et le droit international, lesquels permettent de constater que depuis les années 1990, les Etats-Unis ne cessent de démanteler l'architecture internationale de sécurité et remettent en question l'ensemble des accords internationaux qui régulaient jusqu'alors la sécurité du globe139(*).

En effet, le nombre de traités fondamentaux non ratifié par les Etats-Unis est à la fois impressionnant et significatif. A titre d'exemple, on peut citer le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels de 1966 ; les Protocoles additionnels aux conventions de Genève de 1949, respectivement relatifs à la protection des victimes des conflits armés internationaux et à la protection des victimes des conflits armés non internationaux ; la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer de 1982 ; la Convention des Nations Unies sur les droits de l'enfant de 1989 ; le Protocole de Kyoto sur les changements climatiques en 1997 ; le Statut de la Cour Pénale internationale en 2002, etc. Dans le domaine des armes conventionnelles, les Etats-Unis et la Chine ont refusé de ratifier la Convention d'Ottawa de 1997 sur les mines antipersonnel dans le but de protéger leurs forces stationnées sur la ligne militarisée entre les deux Corées et de préserver l'exploration des mines mixtes.

Ce tableau et la preuve éloquente de l'instrumentalisation du droit international, dans une tendance de « double jeu » qui consiste à y recourir dans la mesure où il pourrait caresser dans le sens du poil l'intérêt national de la puissance étatique considérée et à s'en détourner lorsqu'il parait un facteur contre-productif au regard de cette finalité. Ainsi, les grandes puissances mondiales, titulaires du droit de veto au Conseil de Sécurité onusien, n'hésitent pas à faire usage de ce droit contre tout projet ou toute proposition de résolution visant à régler un conflit armé donné, au moyen d'une intervention des casques bleus140(*), lorsqu'elles redoutent qu'une telle intervention ou que pareil règlement dudit conflit considéré dans toutes ses particularités mettrait gravement en péril leurs intérêts économiques et sécuritaires. Dès lors, ce droit est, dans le rythme de son exercice, réduit au rôle très peu élogieux d' « instrument d'hégémonie expansionniste et de prosélytisme de saucissons »141(*).

B. Le flux d'utilisation du droit de veto au Conseil de Sécurité

Depuis la création de l'ONU, la majorité de vetos au Conseil de Sécurité a été exercée par l'Union Soviétique. Depuis la chute du Mur de Berlin, les Etats-Unis ont été ceux qui ont le plus fréquemment utilisé ce droit de veto. En effet, entre 1946 et 2006, on constate une inversion entre les Etats-Unis et l'Union Soviétique (puis la Russie) puisque dans les trois premières décennies les premiers ont utilisé ce moyen seulement douze fois - dont aucune fois dans les deux premières -, contre cent treize fois pour les seconds, alors que dans les trois dernières décennies les premiers en ont fait usage soixante-dix fois, contre dix fois pour les seconds, dont deux dans la dernière décennie142(*).

Après la victoire de la révolution communiste en Chine, en octobre 1949, les Etats-Unis ayant imposé le maintien de l'ancien gouvernement nationaliste, au Conseil de Sécurité, la délégation de l'Union Soviétique pratiqua en signe de protestation la politique de la « chaise vide ». L'abstention avait alors valeur de veto. Mais les quatre autres grands lors du déclenchement de la guerre de Corée, en juin 1950, n'en tinrent pas compte et considérèrent que c'était au nom des Nations Unies que l'administration TRUMAN intervenait. Quand l'URSS décida quelques mois plus tard de reprendre son siège pour opposer catégoriquement son droit de veto, les Américains contournèrent la difficulté en faisant voter l'assemblée générale où ils détenaient la majorité. La France, pour sa part, a souvent pratiqué la politique de « la chaise vide » entre 1956 et 1964, pour diverses raisons.

Toutefois, la réalité ne colle pas tout à fait à la lettre de la Charte puisque selon elle, tous les membres permanents doivent voter de manière affirmative pour qu'une résolution soit adoptée. Dans la pratique, depuis la guerre de Corée, seul le vote négatif est considéré comme un veto. L'abstention ou l'absence d'un membre permanent lors d'un vote au Conseil de Sécurité a dans les faits valeur d'approbation. Ceci a l'avantage inattendu de permettre à un membre permanent d'exprimer son désaccord sur une décision sans pour autant la bloquer par son abstention.

En quinze ans - entre 1989 et 2004 -, dix-neuf vetos ont été mis dont :

Les Etats-Unis : treize fois - onze fois pour ou par rapport à Israël, une fois par rapport à la Bosnie-Herzégovine, une fois par rapport au Panamá - ;

L'Union Soviétique devenue la Russie : trois fois - deux fois par rapport à Chypre, une fois par rapport à la Bosnie-Herzégovine -.

Jusque fin février 2011, le veto a été utilisé 264 fois avec, par ordre d'importance143(*) :

· 124 fois par l'Union Soviétique/Russie ;

· 82 fois par les Etats-Unis ;

· 32 fois par le Royaume-Uni ;

· 18 fois par la France ;

· 6 fois par la Chine.

Jusque fin février 2014, le veto a été utilisé 267 fois avec, par ordre chronologique :

· 1945-1955 : 33 fois ;

· 1956-1965 : 60 fois ;

· 1966-1975 : 37 fois ;

· 1976-1985 : 13 fois ;

· 1986-1995 : 8 fois ;

· 1996-2005 : 83 fois ;

. 2006-2012 : 31 fois ;

. 2013-2014 : 2 fois.

A la lisière de ces détails sur le rythme dynamique de l'usage brut du droit de veto au Conseil de Sécurité à travers l'histoire, une analyse segmentée tenant compte des aspects particuliers de chaque Etat usager de ce droit s'avère utile pour une meilleure approche de la réalité à ce sujet.

1. L'URSS/ la Fédération de Russie

Dans les premières années des Nations Unies, le commissaire de l'URSS et futur ministre des Affaires étrangères, Viatcheslav MOLOTOV, avait tellement bloqué de projets de résolution qu'il était surnommé « Monsieur veto ». Dans les faits, l'Union soviétique est responsable de près de la moitié de vetos dans l'histoire des Nations Unies, dont 79 dans les dix premières années (soit plus du tiers de la totalité). Il voulait empêcher l'admission de nouveaux membres car les Etats-Unis et les autres membres de l'ONU refusaient d'admettre les Républiques socialistes soviétiques. Depuis la chute de l'Union soviétique, la Russie a utilisé son veto très sporadiquement.

2. Les Etats-Unis

Les Etats-Unis utilisaient pour la première fois leur droit de veto en 1970 à propos de la crise en Rhodésie. Et la première fois qu'ils utilisèrent seuls leur droit de veto fut en 1992, pour éviter une résolution censurant Israël. Depuis lors, les Etats-Unis sont devenus le plus important utilisateur du veto, principalement contre des résolutions critiquant la politique d'Israël. C'est une cause de friction continuelle entre l'Assemblée générale et le Conseil de Sécurité.

3. Le Royaume-Uni

En 1956, avec la France, le Royaume-Uni utilisait pour la première fois son veto contre une résolution sur la crise du canal de Suez. Ils finirent par se retirer de la zone après que les Etats-Unis eurent provoqué une session d'urgence de l'Assemblée générale, comme le prévoit la Résolution 377 de l'Assemblée générale. Le Royaume-Uni a également utilisé unilatéralement son veto à 7 reprises à propos de la Rhodésie.

4. La France

La France utilise son droit de veto de manière sporadique. Elle l'a utilisé seule pour la dernière fois en 1976 sur la question de l'indépendance des Comores, quand l'île de Mayotte resta sous souveraineté française grâce à un référendum local. Elle l'a utilisé pour la dernière fois collectivement, avec les Etats-Unis et le Royaume-Uni, ses traditionnels alliés, en 1989 sur la question de l'invasion de Panama par les Etats-Unis. La menace d'un veto français contre une nouvelle résolution sur l'Irak en 2003 et une entrée en guerre a été une source de brouille diplomatique et politique entre la France et les Etats-Unis.

5. La Chine

Entre 1946 et 1971, le siège chinois au Conseil de Sécurité est occupé par la République de Chine, exilée à partir de 1949 sur l'île de Taïwan. Une seule fois le veto fut utilisé par la Chine, pour s'opposer à l'admission de la Mongolie aux Nations unies. La République de Chine considérait que la Mongolie faisait partie intégrante de la Chine. Du fait de la pression soviétique, la Mongolie finit par entrer à l'ONU en 1960. Et après l'expulsion de la République de Chine en 1971, suite à la Résolution 2758 de l'Assemblée générale des Nations unies, le premier veto de la République populaire de Chine sera exercé le 25 août 1972 contre l'admission du Bangladesh aux Nations unies. La République populaire s'est servie cinq fois de son droit de veto.

Il sied de remarquer que l'utilisation de la plupart de ces vetos aura eu la conséquence commune de bloquer soit la résolution directe d'un conflit armé dans le moule du droit international, soit le dépassement d'une crise sociopolitique tentaculaire, soit encore l'autodétermination des peuples de certains Etats et l'admission de ces derniers aux institutions internationales, dans une allure isolationniste. Revêtant un visage nouveau, l'utilisation du veto participe aujourd'hui, dans une fréquence non moins considérable, à assurer une « impunité gratuite » au non respect des règles de droit international par les membres permanents du Conseil de Sécurité ou par leurs alliés fidèles ainsi qu'un feu vert complice à la perpétration des violations ignobles des droits humains dans les zones de conflits armés aux seules fins de servir les intérêts de grandes puissances144(*).

Paragraphe 2. Le droit de veto, source d'impunité et de mainmise des membres permanents et d'une lâcheté complice des violations des droits humains dans les zones en conflit

L'auscultation des conflits syrien et ukrainien, tous deux en cours, tâchera de démontrer jusqu'à quel point une crise de paix et de sécurité internationales peut être instrumentalisée et son issue embourbée dans un cercle international vicieux où chaque puissance étatique cherche à tirer la couverture du côté qui servirait le mieux ses intérêts et son prestige. Cette obstination dans la sauvegarde des intérêts nationaux et de la puissance étatique sur la scène internationale sera illustrée par le veto que la Chine et la Russie ne se cachent d'opposer, en sachant à l'avance qu'elles ne rendraient des comptes à nul organe, aux tentatives d'adoption des résolutions destinées à mettre fin, par le biais de l'ONU, à ces deux conflits armés dont l'envergure met gravement en péril la stabilité de la paix et la sécurité internationales. En outre, la possession du droit de veto enfle ses titulaires d'une perception d'impunité par les organes onusiens en cas de violation de leurs engagements internationaux et semble leur procurer, à eux-mêmes ou à leurs alliés selon le cas, une « immunité de fait » contre les sanctions internationales qu'ils devraient mériter lorsqu'ils brillent dans l'irrespect des traités et accords internationaux dûment ratifiés145(*). Ainsi, l'exercice du droit de veto ne va-t-il pas sans bloquer le règlement onusien des guerres en Syrie et en Ukraine dont la complexité - liée à l'implication dans le conflit de plusieurs factions ramifiées ainsi que des mouvements intégristes nationaux et étrangers, de la confrontation des enjeux et du conflit d'intérêts géostratégiques au Proche et Moyen-Orient - constitue l'autre paire de manche des entorses à leur résolution.

A. Le droit de veto et la guerre civile syrienne

Le 15 mars 2011 débutent des manifestations concomitamment anti-régime et pro-régime en Syrie. Au départ pacifique, le mouvement se transforme rapidement en conflit opposant deux camps armés au milieu des populations civiles à la suite des répressions sanglantes des services de sécurités syrien.

Face à l'armée régulière et à ses supplétifs - notamment Moukhabarat et les miliciens du Hezbollah146(*) - se constitue et se structure progressivement en 2011 une « armée syrienne libre » (ASL), sur la base d'un noyau de déserteurs et de citoyens en majorité issus de la communauté sunnite et, en partie, de combattants étrangers islamistes financés par l'Arabie saoudite et le Qatar. Tandis que le gouvernement syrien est soutenu par l'Iran, le Venezuela, l'Algérie, la Chine et la Russie, la rébellion est soutenue par la Ligue arabe et certains pays occidentaux147(*), et l'ASL peu à peu soutenue et armée par la Turquie, l'Arabie saoudite et la Qatar, et dispose de l'aide d'agents de la CIA opérant à partie de la Turquie.

Aujourd'hui, l'armée syrienne libre (ASL) est supplantée, sur terrain, par des mouvements islamistes, rendant ainsi hétéroclites les forces d'opposition au régime. Devant cette situation d'une opposition sans leader et surtout de plus en plus caractérisée par la volonté d'imposer un régime totalitaire, « takfiri », détruisant au passage les vestiges archéologiques et les lieux saints religieux, les pays occidentaux réduisent progressivement leur soutien. D'autres analystes estiment que le régime syrien, se sentant asphyxié, a délibérément favorisé l'émergence de ces groupes, notamment en libérant, au début de la révolte, des djihadistes qui avaient combattu en Irak et en s'abstenant de bombarder les zones sous leur contrôle, dans le but de conforter l'image de la lutte contre l'islamisme utilisé par le régime et de provoquer un conflit avec les autres rebelles modérés148(*).

En se prolongeant dans le temps, le conflit syrien est devenu à la fois guerre civile, guerre énergétique, guerre par procuration et aussi guerre sainte. Début juin 2014, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), près de 250 000 personnes avaient été tuées depuis le début du conflit (dont plus de 53 978 civils, parmi lesquels 8 607 enfants). 61 170 membres des forces du régime et 42 701 combattants rebelles ont également perdu la vie, dans un contexte où la paix est distante des horizons. Et l'ONU estime à plus de 2,8 millions le nombre de refugiés, et 6,5 millions de personnes auraient été déplacées à l'intérieur du pays149(*).

La principale raison qui motive, du moins officiellement, le veto sino-russe est l'incertitude de la survivance de l'Etat syrien après le départ de Bachar Al-ASSAD eu égard à l'extension de l'influence des djihadistes salafistes150(*) qui ne cessent de ravir, jour après jour, des territoires à l'armée syrienne libre (ASL)151(*), principale force de l'opposition démocratique. Cette situation serait au coeur des craintes « prudentes » de la Chine et la Russie qui, tirant les leçons du cas libyen où la chute forcée de Muammar al- KADHAFI a emporté avec elle l'effritement des attributs régaliens de l'Etat au sens du droit constitutionnel et même du droit international public. Aussi, l'éviction précipitée de Bachar Al-ASSAD et de son régime, qui reste un grand rempart contre l'islamisme fondamentaliste et le salafisme djihadiste dans la sous-région, risquerait-elle d'accorder une passe en or à Daesh qui guette les régions arabes en conflit et n'attend qu'une situation favorable pour s'y cafouiller et y implanter un califat. A ce titre, cet argument semble, en tout état de cause, probant dans sa conception virginale, en dehors de toute dénaturalisation politicienne qui se trouve souvent, implicitement, au coeur des vetos posés contre les résolutions du Conseil de Sécurité relatives aux conflits de ce genre. Cette considération pourrait se vérifier mutatis mutandis dans le glissement complexe de la guerre à l'Est de l'Ukraine.

B. Le droit de veto et le conflit russo-ukrainien

Les relations russo-ukrainiennes sont tendues, notamment à propos de la Crimée et de Sébastopol qui, abritant la Flotte de la mer Noire, ont été annexées par la Russie à la suite d'un référendum de façade et de la marine russe mais aussi en raison de la mer d'Azov partagée entre les deux Etats, et se détériorent grandement à la suite de la Révolution orange152(*) pro-occidentale de 2004 et des crises gazières de 2006 et de 2008. Moscou a tenté, cependant, entre 2010 et 2014, de renouer avec des relations plus amicales avec l'Ukraine, sur le plan économique, politique et social.

La crise ukrainienne dans sa configuration actuelle remonte à la fin de l'année 2013. Alors qu'un accord devait être signé entre l'UE et l'Ukraine, la Russie essaie de faire pression sur Kiev pour le faire changer d'avis, notamment en restreignant certains produits, en revoyant les prix du gaz et en envisageant d'imposer aux citoyens ukrainiens un passeport étranger. Moscou craint en effet que cette union se fasse à son désintérêt, alors que Vladimir POUTINE ambitionne en même temps un rapprochement avec les pays anciennement soviétiques. Pourtant, de l'avis de l'analyste politique Vladimir FESSENKO : « en mettant ainsi la pression, la Russie ne fait que pousser l'Ukraine dans les bras de l'Europe »153(*). En novembre 2013, l'Ukraine décidait finalement, en raison de pressions russes, de refuser l'accord avec l'Union européenne et de relancer un dialogue actif avec Moscou. Ce revirement avait entraîné d'importantes manifestations pro-européennes à Kiev rassemblant au moins 100 000 personnes, l'occupation de la place Maïdan et de la mairie, avec comme mot d'ordre la démission du Président Viktor IANOUKOVYTCH. Le 23 février 2014, IANOUKOVITCH fuit en Russie et l'opposition prend le pouvoir. Débute alors une crise entre les deux pays et l'occupation par des troupes pro-russes de la Crimée et des manifestations dans les villes russophones de l'est de l'Ukraine (telles que Donetsk et Lougansk), la Russie ne reconnaissant pas la légitimité du nouveau gouvernement ukrainien, sous la présidence de Petro POROCHENKO, qualifiant son accession au pouvoir de coup d'Etat. Le 24 mars 2014, l'Ukraine signe le volet politique du Partenariat oriental avec l'Union européenne, dont le rejet par Viktor IANOUKOVYTCH avait déclenché les manifestations d'Euromaïdan. Cet acte est considéré comme l'huile jetée au feu de la guerre du Donbass entre l'armée ukrainienne et les séparatistes pro-russes. Ces derniers, engagés à émanciper les territoires de Donetsk, Lougansk et Slaviansk de la tutelle de Kiev, bénéficient du ravitaillement en matériel militaire et de l'aide stratégique et financière de Moscou.

Considérables en Ukraine, depuis l'époque de l'Union soviétique, les intérêts économiques russes contrôlent des parts de marché dans le secteur de l'énergie et dans celui des médias. L'essentiel des installations industrielles et infrastructures servant à la macro-production économique mécanisée et concentrée pour la transformation des matières premières qui alimentent les poumons de l'économie russe sont situées sur le territoire ukrainien et n'ont pas pu être délocalisées depuis l'effritement de l'URSS.

Sur le plan purement politique, la Russie a soutenu de nombreux hommes politiques ukrainiens lui étant favorables dans le but de contrer le jeu diplomatique des Etats-Unis et d'éviter que l'Ukraine ne rejoigne l'OTAN et l'UE. En 2008, la détérioration des relations russo-ukrainiennes se poursuit à l'occasion de la guerre entre la Géorgie et la Russie. Le Président Ukrainien d'alors Viktor IOUCHTCHENKO avait, en effet, déclaré que l'Ukraine est l'alliée de la Géorgie. Kiev reconnaissait même avoir livré des armes à Tbilissi. Une enquête a, d'ailleurs, prouvé que des volontaires ukrainiens avaient été envoyés auprès des Géorgiens lors du conflit. L'Ukraine avait également menacé de restreindre militairement les activités de la base navale russe de Sébastopol et de la fermer au croiseur lance-missiles Moscova, de retour des rivages abkhazes.

Il découle des développements ci-haut réalisés que le conflit ukrainien qui oppose, depuis mars 2014, le régime de Kiev aux séparatistes qui, tout concourt à le croire, sont la masse de paille qui tend à dissimuler une véritable agression russe assoiffée d'annexion des territoires de l'Est de l'Ukraine, illustre cette mainmise des puissances mondiales, complice des crimes de guerre, dans des confrontations instrumentalisées. A ce sujet, la Russie poursuit deux objectifs, l'un de nature politique et l'autre aux consonances économiques154(*). Le premier vise à maintenir l'Ukraine dans le giron de l'influence géostratégique russe et cherche à écarter toute possibilité d'intégration de l'Ukraine à l'Union européenne jugée tel un « asservissement de la souveraineté » par Moscou. Pour ce faire, il faut rendre l'Ukraine ingouvernable, déstabiliser ses institutions politiques et rendre son environnement économique incertain et terrorisant à l'égard des investisseurs. Le second, quant à lui, entend faire mains basses sur les ressources naturelles du sous-sol ukrainien et accentuer la dépendance énergétique de l'Ukraine vis-à-vis de la Russie. Cette dimension du conflit est à la série des conflits gaziers qui opposa les deux Etats limitrophes entre 2006 et 2009.

Un premier conflit gazier, soulignant la dépendance énergétique de l'Ukraine vis-à-vis de la Russie, débute en mars 2005 pour culminer le 1er janvier 2006. Gazprom, une firme publique russe, refusant d'alimenter les gazoducs ukrainiens à la suite d'un désaccord sur le prix de transit par les gazoducs ukrainiens. Le groupe étatique russe exige alors que Kiev paie le prix du marché mondial pour le gaz naturel. Le refus catégorique de Kiev aboutit à une suspension des fournitures de cette ressource stratégique. Le conflit se résorba toutefois le 4 janvier 2006 à la suite d'une entente préliminaire entre la Russie et l'Ukraine aboutissant à une nouvelle formule de prix, le gaz russe au tarif international étant mélangé avec celui des pays de l'Asie centrale, sensiblement moins cher. Moscou tente d'opérer par la suite une reprise avec Kiev de l'entente amicale en termes économique, politique et social, sur une base pragmatique.

Une autre crise gazière majeure avec l'Ukraine éclatait le 2 janvier 2009, à la suite d'un différend entre l'Ukraine et Gazprom sur le prix à payer en 2009 et faute de paiements d'une partie de livraisons de 2008, Gazprom a réduit, puis stoppé les livraisons de 2008 du gaz naturel à l'Ukraine. Le résultat : des pays membres de l'Union européenne reçoivent moins de gaz naturel en provenance du réseau gazier de Gazprom, lequel transite en grande partie par l'Ukraine. La Russie accusait ainsi l'Ukraine de siphonner le gaz destiné à l'Europe pour compenser les coupures des approvisionnements qu'elle subit et tente d'augmenter le débit des oléoducs qui transitent par la Biélorussie et la Turquie. De son côté, la Premier ministre ukrainienne d'alors Ioulia TYMOCHENKO accusait certains hommes d'affaires de son pays d'être corrompus par les milieux d'affaires voire politiques russes, entre autres ceux liés au schéma controversé de livraison du gaz russe via un intermédiaire opaque.

Toutes ces pesanteurs géostratégiques alliées aux enjeux énergétiques et à la rivalité légendaire d'influence, de puissance et d'hégémonie sur la scène internationale avec l'Occident sont au coeur du refus de la Russie de voir s'enclencher une démarche de résolution dudit conflit à l'occidentale155(*) dans le cadre onusien. Le veto exercé par la Russie, au Conseil de Sécurité des Nations Unies, contre les projets de résolution de la crise ukrainienne est révélateur de refus même si, officiellement, Moscou étaye sa position en se fondant sur le principe de « non ingérence dans les affaires internes d'un Etat » 156(*), arguant que les problèmes de l'Ukraine ne pourraient trouver une meilleure solution que par un dialogue et une action inter-ukrainiens. La conséquence immédiate en est le blocage du règlement de ladite crise et la continuité de tout ce qu'elle occasionne comme dégâts, ralentissement de l'activité économique du pays, massacres des populations civiles, violations massives des droits humains, pertes inestimables en vies humaines157(*). Au regard des tragédies auxquelles peut parfois donner lieu l'usage du veto et en considération des obstacles qu'il glisse dans les méandres de résolution de certains conflits menaçant l'équilibre de la paix et de la sécurité internationales, l'on est en droit de s'interroger sur la pertinence de cette prérogative conférée par la Charte aux membres permanents du Conseil de Sécurité ainsi que sur l'opportunité du statut de ces derniers.

SECTION 2. DE LA PERTINENCE DU DROIT DE VETO ET DE L'OPPORTUNITÉ DU MAINTIEN EN L'ÉTAT DU STATUT DES MEMBRES PERMANENTS

Le droit international est né de la volonté des Etats d'établir entre eux des rapports fondés sur un ensemble de normes obligatoires158(*) et impersonnelles destinées à organiser la société internationale en vue de consolider des relations pacifiques entre nations. Conscient du fait que toutes les guerres à portée internationale que l'humanité a connues l'auront moins portée au développement que l'enfoncée davantage dans l'abîme du désarroi, de l'hécatombe et de la dégradation économique159(*). C'est dans cette optique que la Charte des Nations Unies a mis sur pied une panoplie de mécanismes juridiques chargés de promouvoir des relations pacifiques basées sur la coopération et le libre-échange entre les Etats et les peuples et de préserver l'humanité des guerres et autres conflits de nature à mettre à mal la paix et la sécurité internationales. Parmi ces mécanismes juridiques figure le droit de veto accordé aux cinq membres permanents du Conseil de Sécurité des Nations Unies. Pourtant, dans les faits et les effets produits, l'exercice de ce droit entraîne souvent des conséquences diamétralement contraires à la mission lui assignée. En effet, il s'accompagne généralement d'un faisceau de facteurs qui tendent à volatiliser les chances de sortie de crise ou à envenimer davantage le conflit visé ; bref à bloquer le règlement du conflit dans le carré régulier des Nations Unies.

Pour s'en convaincre, nous reprenons sur la page qui suit, à titre illustratif, dans un tableau synoptique, suivant l'ordre annuel décroissant, la liste des vetos utilisés de 1989160(*) à 2012 -soit collégialement soit en solo-, la date à laquelle ils l'avaient été, les Etats membres permanents du Conseil de Sécurité qui les ont utilisés et la thématique ou la question à laquelle chacun d'eux se référait. Toutefois, il sied de signaler qu'après 2012 le veto a été utilisé jusqu'ici deux fois en 2014 ; 2013 n'ayant pas connu de veto. Il s'agit d'abord du veto utilisé le 15 mars 2014 par la Russie à propos du respect de l'intégrité territoriale de l'Ukraine, puis de celui exercé le 22 mai 2014 par la Chine et la Russie au sujet de la saisie de la CPI par l'ONU concernant les crimes de guerre en Syrie.

Projets de résolutions ayant fait l'objet d'un véto au Conseil de sécurité161(*)

Date

Projet de résolution

Procès-verbal

Question

Membre(s) permanent(s) ayant voté contre

19 juillet 2012

S/2012/538

6810

La situation au Moyen-Orient - Syrie

Chine, Fédération de Russie

4 février 2012

S/2012/77

6711

La situation au Moyen-Orient - Syrie

Chine, Fédération de Russie

4 octobre 2011

S/2011/612

6627

La situation au Moyen-Orient

Chine, Fédération de Russie

18 février 2011

S/2011/24

6484

La situation au Moyen-Orient, y compris la question de Palestine

États-Unis

15 juin 2009

S/2009/310

6143

Géorgie

Fédération de Russie

11 juillet 2008

S/2008/447

5933

Paix et sécurité - Afrique (Zimbabwe)

Chine, Fédération de Russie

12 janvier 2007

S/2007/14

5619

Myanmar

Chine, Fédération de Russie

11 novembre 2006

S/2006/878

5565

La situation au Moyen-Orient, y compris la question de Palestine

États-Unis

13 juillet 2006

S/2006/508

5488

La situation au Moyen-Orient, y compris la question de Palestine

États-Unis

5 octobre 2004

S/2004/783

5051

La situation au Moyen-Orient, y compris la question de Palestine

États-Unis

21 avril 2004

S/2004/313

4947

La situation à Chypre

Fédération de Russie

25 mars 2004

S/2004/240

4934

La situation au Moyen-Orient, y compris la question de Palestine

États-Unis

14 octobre 2003

S/2003/980

4842

La situation au Moyen-Orient, y compris la question de Palestine

États-Unis

16 septembre 2003

S/2003/891

4828

La situation au Moyen-Orient, y compris la question de Palestine

États-Unis

20 décembre 2002

S/2002/1385

4681

La situation au Moyen-Orient, y compris la question de Palestine

États-Unis

30 juin 2002

S/2002/712

4563

La situation en Bosnie-Herzégovine

États-Unis

14-15 décembre 2001

S/2001/1199

4438

La situation au Moyen-Orient, y compris la question de Palestine

États-Unis

27-28 mars 2001

S/2001/270

4305

La situation au Moyen-Orient, y compris la question de Palestine

États-Unis

25 février 1999

S/1999/201

3982

La situation dans l'ancienne République yougoslave de Macédoine

Chine

21 mars 1997

S/1997/241

3756

La situation dans les territoires arabes occupés

États-Unis

7 mars 1997

S/1997/199

3747

La situation dans les territoires arabes occupés

États-Unis

10 janvier 1997

S/1997/18

3730

Amérique centrale : efforts de paix

Chine

17 mai 1995

S/1995/394

3538

La situation dans les territoires arabes occupés

États-Unis

2 décembre 1994

S/1994/1358

3475

La situation dans la République de Bosnie-Herzégovine

Fédération de Russie

11 mai 1993

S/25693

3211

La situation à Chypre

Fédération de Russie

31 mai 1990

S/21326

2926

La situation dans les territoires arabes occupés

États-Unis

17 janvier 1990

S/21084

2905

Lettre datée du 3 janvier 1990, adressée au Président du Conseil de sécurité par le Nicaragua

États-Unis

23 décembre 1989

S/21048

2902

La situation au Panama

États-Unis, France, Royaume-Uni

7 novembre 1989

S/20945/Rev.1

2889

La situation dans les territoires arabes occupés

États-Unis

9 juin 1989

S/20677

2867

La situation dans les territoires arabes occupés

États-Unis

17 février 1989

S/20463

2850

La situation dans les territoires arabes occupés

États-Unis

11 janvier 1989

S/20378

2841

Lettres datées du 4 janvier 1989, adressées au Président du Conseil de sécurité par la Jamahiriya arabe libyenne et le Bahreïn

États-Unis, France, Royaume-Uni

Notons que jamais les Etats-Unis, la France ou le Royaume-Uni n'ont émis un veto commun avec la Chine et la Russie à cause de la rivalité de leurs intérêts entretenue dans une tension glaciale mais vivace. Cette situation traduit parfaitement l'état de conflit ou d'antagonisme latent entre les grands décideurs des questions se rapportant à la paix et la sécurité internationales. Ce qui est, d'un côté, un danger permanent pour la stabilité de l'ordre mondial ; et de l'autre, une chance pour la stabilité pour autant que parfois, cela crée un certain équilibre.

En outre, on l'aura certainement remarqué, la quasi-totalité de ces vetos émis aura moins hissé les crises ciblées au faite de leur résorption que creuser davantage l'abime du blocage des perspectives de leur règlement au moyen des mécanismes du droit international ad hoc. La litanie des vetos américains en rapport au conflit israélo-palestinien, qui date de plusieurs décennies déjà sans voir une lueur d'issue, en donne une illustration parfaite.

L'ONU, on ne le dira jamais assez, est née en 1945, à l'initiative du Président Américain Franklin ROOSEVELT, pour succéder à la SDN, dans un contexte d'après-guerre. La Charte qui la créa désigne à son article 23 les cinq membres permanents du Conseil, qui sont en fait les grands vainqueurs de 1945 : la Chine, les Etats-Unis, la France, la Grande Bretagne et la Russie. Cette composition du Conseil de Sécurité ne reflète plus les réalités actuelles de la communauté mondiale162(*). Pourtant, force est de constater que l'ONU est restée inchangée dans ses structures et ses modes de fonctionnement depuis 50 ans, alors que le contexte international est fort différent et que la donne géopolitique mondiale a été bouleversée à la fin de guerre froide. Cette constatation a grandement contribué à remettre en cause la pertinence du droit de veto, dans son pourtour actuel de plus en plus en décalage avec la réalité des relations internationales, et la légitimité du conseil de sécurité 163(*) (paragraphe 1) tant est vrai que la marque de l'anachronisme du portrait de sa composition influe sur l'efficacité de ses instruments juridiques d'action (paragraphe 2).

Paragraphe 1. La remise en cause de la légitimité du Conseil de Sécurité

Toute la flopée de vetos, exercés au Conseil de Sécurité, ayant considérablement obstrué le règlement, dans l'encadrement du droit international, de plusieurs conflits et crises armées à géométrie internationale alimente le débat sur la légitimité de l'organe exécutif de l'ONU.

Sous la bannière du Chapitre VII de la Charte, le Conseil de Sécurité est la seule instance internationale qui puisse légaliser et légitimer le recours à la force armée. Mais l'augmentation des interventions multinationales menées sur autorité ou avec le blanc-seing du Conseil a accentué l'idée que celui-ci n'était plus un passage obligé pour les actions armées.

La principale critique concernant le Conseil de Sécurité tient à sa composition qui repose sur un principe d'efficacité mais n'assure pas une représentativité de la communauté internationale. Le principe même du Conseil, composé de membres permanents détenteurs d'un droit de veto est directement issu de l'analyse faite par les Américains, les Britanniques et les Soviétiques, des causes de l'échec de la SDN, et ce, avant même la fin de la Seconde Guerre mondiale. Mais aujourd'hui, la communauté internationale doit faire face à de nouveaux défis, de nouveaux enjeux auxquels le Conseil n'est pas préparé. En effet, sur fond de mondialisation, de nouveaux acteurs non étatiques ont fait leur apparition sur la scène internationale : ONG, multinationales, individus et, dans un autre registre, les réseaux terroristes. En outre, le Conseil de Sécurité n'a pas les moyens d'assurer l'exécution de ses décisions, et l'effectivité des actions de l'ONU dépend en définitive de la bonne volonté de ses membres164(*). Ce qui pose la nécessité d'une reforme d'envergure de cet organe exécutif de l'Organisation des Nations Unies.

L'organe central des Nations Unies est le Conseil de Sécurité. La réforme doit donc en premier lieu s'attacher à résoudre les lacunes et problèmes inhérents à ce dernier. Toutefois, la réforme ne doit pas se contenter d'un simple remaniement de la composition et des missions du Conseil, elle doit également s'opérer en profondeur dans tout le système onusien. La critique porte avant tout sur le nombre de membres du Conseil. Un organe de 15 membres ne pourrait donner une image exacte de la société internationale dans ses diverses composantes, il faudrait donc en remanier la composition. Mais, au-delà de la composition, il faudrait repenser le droit de veto, déterminant dans les orientations du Conseil.

Depuis un peu plus d'une décennie, la France mène une démarche qui entend militer pour la réforme du droit de veto au Conseil de Sécurité en cas de « crimes de masse » par l'entremise d'un code de conduite général au Conseil de sécurité auquel seraient soumis même les membres permanents. Et le non respect de ce code entraînerait de plano iure la suspension de ce droit165(*). En cas de crimes de masse la France veut permettre d'éviter toute paralysie à l'ONU afin de pouvoir agir dans le pays concerné. Cette réforme a-t-elle des chances d'être adoptée ? Le Président François HOLLANDE a tenté de relancer, le 25 septembre 2014, le débat sur la limitation du droit de veto des membres permanents du Conseil de l'ONU en cas de « crimes de masse ». Qu'impliquerait cette réforme ?

Une telle réforme impliquerait que des pays tels la Chine ou la Russie, généralement hostiles à l'adoption d'une résolution contraignante par le Conseil de Sécurité, qui peut conduire à une action sans accord du gouvernement concerné, renonceraient à ce droit de veto ne pourraient donc pas empêcher une telle action. Quels types de « crimes » seraient concernés ?

L'exemple le plus récent est bien entendu celui de la Syrie dans la mesure où la Chine et la Russie ont opposé plusieurs fois leur veto à des résolutions concernant ce pays.

Plus généralement, cette proposition s'inscrit dans le fil du principe de la responsabilité de protéger, consacré par l'ONU à plusieurs reprises166(*). Ce principe suppose qu'un pays a le devoir de protéger sa propre population, faute de quoi d'autres pays pourront le faire à sa place. Toute difficulté réside cependant dans la définition de ce qu'est un « crime de masse ». Quelle pourrait être cette définition ?

Juridiquement, cette expression serait différente du génocide ou du crime contre l'humanité dans la mesure où il n'y a pas forcément intention génocidaire et puisqu'il n'y a pas forcément de crime de masse dans un crime contre l'humanité. Il s'agirait alors d'une définition politique et on ne peut pas imaginer qu'un chiffre soit fixé à l'avance. En outre, de nombreuses difficultés pourraient être rencontrées dans l'ébauche d'une telle définition. Par exemple, une opération telle que celle qui s'est déroulée récemment à Gaza, entre juillet et août 2014, baptisée « bordure protectrice »167(*), ne manquerait pas d'être qualifiée à tort par certains membres de l'ONU comme un crime de masse.

Il convient de considérer les deux termes « crimes » et « masse ». Il s'agirait d'actions commises délibérément contre les populations civiles, ce qui n'est pas le cas des interventions militaires menées par les pays occidentaux ; même si certains bombardements peuvent conduire à la mort de populations civiles, ce n'est pas le but recherché. Concernant le deuxième terme, il s'agit de définir à partir de quel nombre on peut parler de crime de masse. Quelques dizaines de personnes ne relèveraient pas forcément d'un tel type de crime. A partir de plusieurs centaines, on serait assurément dans ce que la France entend par ce terme, note Sybille De LAROCQUE. Dans l'histoire récente, on peut citer des exemples allant de la Bosnie jusqu'au Rwanda.

Une telle réforme du droit de veto pourrait-elle être dangereuse ? Bruno TERTRAIS169(*) pense qu'une pareille entreprise ne porterait au danger si les membres permanents renoncent de leur propre chef à ce droit de veto, et s'ils gardent une certaine flexibilité pour définir un crime de masse. Au contraire, poursuit-il, ce pourrait être bénéfique pour les populations concernées. Toutefois, conclut-il, cette proposition n'a sans doute aucune chance d'être adoptée. Seuls les Etats-Unis et le Royaume-Uni semblent prêter oreille aux propositions françaises de réforme, la Russie et la Chine y demeurent farouchement opposées. Pourtant une réforme de cette envergure requiert impérativement l'unanimité des voix des cinq membres permanents au Conseil de sécurité de l'ONU. Cette remise en cause de la légitimité du Conseil de Sécurité est aussi alimentée par son anachronisme qui, à en croire plusieurs analystes de droit international, contribue aujourd'hui à l'inefficacité de la machine onusienne toute entière170(*).

Paragraphe 2. De l'anachronisme de la composition du Conseil de Sécurité à l'inefficacité du droit de veto

Le Conseil de Sécurité et le droit de veto paraissent aujourd'hui inefficaces parce qu'anachroniques. En effet, il y a soixante-dix ans, les Nations unies ont été crées dans le but de « préserver les générations futures du fléau de la guerre ». Si l'on observe ce qu'il se passe dans le monde aujourd'hui, le moins que l'on puisse dire est qu'elles n'ont pas complètement atteint cet objectif. Du Nigéria à l'Afghanistan et à l'Ukraine en passant par le Moyen-Orient, des millions de personnes meurent de ce fléau ou en subissent une menace imminente, et l'ONU, à travers le Conseil de Sécurité, semble impuissante à les sauver171(*). Une grande partie du problème est liée au fait que le Conseil de Sécurité, qui est censé préserver la paix et la sécurité dans le monde au nom de tous les Etats membres, n'impose plus le respect, que ce soit assurément aux insurgés armés menant des opérations transfrontalières, mais aussi aux propres membres de l'ONU.

Le droit de veto fut institué à l'époque où la société internationale était foncièrement bipolaire, en considérant la domination concurrente du bloc occidental et du bloc soviétique, et/ou pluri-polaire si on ajoute à la considération précédente des groupes d'apparition sporadique à l'instar des Non alliés. Pourtant, le paysage de la société international est devenu unipolaire à la suite de l'effritement de l'URSS à l'aube de la décennie 1990. L'unipolarité qui caractérise la société internationale se traduit sur le plan juridique par les initiatives prises par l'hyper-puissance américaine en vue e façonner unilatéralement le contenu du droit international à l'image de ses prétentions et d'y introduire de nouvelles normes impératives172(*).

Dans le monde entier, et en particulier dans l'hémisphère Sud, des personnes s'efforcent de comprendre pourquoi, jusqu'en 2015, le Conseil est toujours dominé par les cinq puissances qui ont remporté la Seconde Guerre mondiale. Elles sont de plus en plus enclines à remettre en cause son autorité et la légitimité de ses décisions. Les temps ont changé depuis 1945 et le Conseil doit s'adapter.

Dans son rapport annuel de 2014, l'ONG Amnesty international qualifie cette année de catastrophique pour les victimes civiles. Soulignant notamment l'inefficacité de l'ONU, l'ONG appelle les membres du Conseil de Sécurité « à renoncer à leur droit de veto qu'ils ont rendu caduc par son usage prolixe et prolifique tel un expédient hégémonique ».

Aujourd'hui, l'encadrement de l'usage du veto s'est vidé de son sens originel. Le veto est utilisé intempestivement et, bien souvent, à des fins plus partisanes et sectaires que visant l'intérêt de toute la communauté mondiale173(*). Pourtant, le veto n'avait pas été conçu tel un privilège, ni même un droit. Il correspond au compromis trouvé pour que les membres permanents entrent dans le jeu de la sécurité collective. Cette prérogative implique des devoirs. A l'inverse, son abus mine les fondements du pacte de 1945 accepté par tous à travers la Charte des Nations Unies. Et Clément ATTLEE, Premier ministre du Royaume-Uni de 1945 à 1951, le rappelait en revenant sur la rédaction de la Charte en 1945 : « À San Francisco, nous considérions tous le droit de veto comme quelque chose dont il ne serait fait usage en dernier ressort que dans des cas exceptionnels où les grandes puissances pourraient se trouver en conflit. Nous ne l'avons jamais conçu comme un expédient dont il serait fait constamment usage toutes les fois qu'une puissance déterminée ne serait pas complètement d'accord avec les autres », s'indignait-il.

Expression éloquente des limites et obstacles à l'efficacité du Conseil de Sécurité, cet usage récurrent et même récursif finit par vendre l'image d'une « banalisation » de la force du droit de veto dans le règlement des différends internationaux et relance le débat sur la nécessité d'actualiser les mécanismes de fonctionnement du Conseil de Sécurité onusien. Pour sortir de bourbier, la France, elle-même victime plusieurs fois du blocage des vetos russe et chinois contre ses projets de résolution174(*), propose notamment l'adoption d'un code de conduite pour l'encadrement de l'usage du veto est ainsi plus que jamais d'actualité. Ce code de conduite consisterait en un accord des cinq membres permanents (P5) pour s'abstenir de recourir au veto dans les situations d'atrocités de masse. Il s'appliquerait lorsque sont commis des crimes de génocide, des crimes contre l'humanité ou des crimes de guerre sur une grande échelle. Quoique salué par un très grand nombre d'Etats qui y voient une lueur de garantie contre l'arbit175(*)raire et les iniquités du système international, la certitude de l'unanimité des membres permanents du Conseil pour son adoption est loin d'être acquise.

Quoiqu'il en soit, les mécanismes d'action et de décision du Conseil de Sécurité, éreintés, ont dévoilé leurs limites à résoudre de nouvelles formes de conflit d'après la Guerre froide. Il s'agit des conflits qui se caractérisent notamment par leur nature intra-étatique, la diversité des acteurs qui y participent, le type de violence mobilisée, qui n'est pas nécessairement la violence classique, l'inadéquation des modes de résolution employés, etc. D'où la nécessité de définir des modes appropriés de résolution des crises contemporaines en opérant un réajustement rationnel de ceux existant, dont le droit de veto. Un tel exercice, on le voit, tient à déblayer la voie de la pose des pistes de solution devant permettre de surmonter l'étiquette de « blocage du règlement des conflits » qui se greffe à la substance du droit de veto au Conseil de Sécurité onusien.

CHAPITRE 3. QUELQUES PERSPECTIVES D'ISSUE DU BLOCAGE TERNISSANT LE DROIT DE VETO

L'urgence et la nécessité de réformer au fond le Conseil de Sécurité en vue de le rendre plus apte à faire face aux réalités nouvelles d'un monde en mutation, où la paix et la sécurité internationales doivent faire face à des embuches d'apparition tout aussi récente, ne sont plus à prouver. Au rebond de cette fresque et conscientes de cette réalité, plusieurs considérations doctrinales préconisant des voies de sortie de ce bourbier ont émergé non sans controverses bouillantes. Et dans le sillage de ces diverses opinions prend corps notre considération mieux notre conception pour dégager la machine onusienne de l'étreinte que le droit de veto fait subir au règlement des conflits armés. Il s'agit d'une piste de solution à double manche, l'une se rapportant à un pèlerinage rationnel doublé d'une démarche de réflexion sur le caractère impérieux du recadrage à opérer dans le chef du patrimoine des mécanismes juridiques d'action et de décision du Conseil de Sécurité (première section) et l'autre, propose d'aller vers un dépassement de la règle rigide de l'unanimité, aujourd'hui lacunaire, qui caractérise le procédé juridique du veto pour l'instauration de la majorité qualifiée des voix des membres permanents du Conseil de Sécurité (deuxième section).

SECTION 1. RÉFLEXIONS SUR LA NÉCESSITÉ DE LA RÉFORME DU CONSEIL DE SÉCURITÉ DE L'ONU

Souvent qualifiée de « tigre de papier », l'ONU apparaît désormais comme une instance internationale dépassée par ses ambitions et par les Etats qui la composent176(*). L'organisation est peu à peu tombée en désuétude, se révélant inefficace dans la sauvegarde de la paix et la sécurité internationales, cela encore plus depuis la rupture de l'ordre bipolaire dans les années 1990. Aussi, depuis quelques décennies, les maux qui rongent l'ONU se sont-ils proliférés : l'ONU est très dépendante de ses membres, ses décisions restent tout aussi soumises aux Etats membres et ses opérations tributaires de moyens accordés par ceux-ci si bien que le thème de la réforme de l'ONU est à l'ordre du jour depuis plus de dix ans, sans pour autant arriver à s'imposer, les divergences sur la question étant trop importantes177(*).

Néanmoins, la question de la réforme de l'ONU se pose des toutes façons car il serait insupportable de n'avoir le choix qu'entre le statu quo avec toutes ses insuffisances et l'unilatéralisme. D'où la nécessité d'une réforme rapide du Conseil de Conseil de Sécurité et de son élargissement afin d'accroître sa représentativité, son efficacité et sa légitimité aux yeux de tous dans le monde ». Cette réforme se veut d'autant plus nécessaire que l'obsolescence des Nations Unies exige de redéfinir un système de sécurité mondiale178(*).

En effet, au cours des dix dernières années, l'ONU a été de plus en plus discréditée, son impuissance révélée au grand jour à chaque nouvelle crise. Les fondements mêmes de l'organisation sont aujourd'hui désuets et l'ONU est trop dépendante de ses membres pour être efficace. A titre illustratif, l'article 23 de la Charte désigne les cinq membres permanents du Conseil de Sécurité, qui sont en fait les grands vainqueurs de 1945 : la Chine, les Etats-Unis, la France, le Royaume-Uni179(*) et la Russie. Pourtant, cette composition du Conseil ne reflète plus les réalités actuelles de la communauté mondiale. Mais force est de constater que l'ONU est restée inchangée dans ses structures et ses modes de fonctionnement depuis 50 ans, alors que le contexte international est fort différent et que la donne géopolitique mondiale a été bouleversée à la fin de la guerre froide.

Eu égard à cette multiplicité d'entraves, la réforme du Conseil de Sécurité onusien doit s'inscrire dans le sens de la définition d'un nouveau système de sécurité mondiale. Ce nouveau système devra se charger d'atténuer à défaut de transcender la suprématie américaine aux Nations Unies. En effet, l'un des défis majeurs pour l'ONU depuis la guerre froide consiste à contenir la puissance américaine sans se l'aliéner. Un tel réaménagement systémique requiert préalablement une harmonisation des conceptions du rôle qui revient à l'ONU. Celles-ci se rapportent à deux principales visions : la conception hégémonique américaine et celle démocratique européenne. La première se fonde sur l'idée que les Etats-Unis ont réussi à mettre l'organisation au service de leur politique et du relai de leur idéologie mondiale. Et la seconde, jugée plus démocratique, plus coopérative et plus respectueuse de la souveraineté de chaque Etat180(*), tendrait, à ce titre, à une redistribution des richesses entre les peuples. Il serait ainsi nécessaire, relève Serge SUR181(*), d'opérer un rapprochement entre ces deux conceptions avant d'envisager une réforme organique de l'ONU. La réforme ainsi perçue procède, avant tout, d'un côté de la formulation d'un portrait des modalités, adéquates et adaptées aux contraintes de l'heure, chargées d'environner et de conditionner l'utilisation du droit de veto (paragraphe 1); et de l'autre, de la perspective d'un étirement des sièges permanents au Conseil de Sécurité onusien jusque-là sujette à caution (paragraphe 2).

Paragraphe 1. La nécessaire définition des conditions d'exclusion du recours au droit de veto et des circonstances de son usage obligatoire

L'illustration analytique des dessous des cartes de la Guerre du Golf au début des années 1990 va permettre d'étayer le caractère impérieux de la détermination de la catégorie thématique ou des dispositions préalables à l'exercice du veto au Conseil de Sécurité de l'ONU. Et l'examen des méandres du drame humain ancré dans le génocide des Tutsi du Rwanda lèvera le voile sur l'impératif de fixation des conditions d'exclusion de l'exercice du veto en présence des tragédies de ce genre qui sont antinomiques avec la mission du maintien de la paix mondiale et de la promotion de la sécurité internationale, but ultime du Conseil.

Ainsi, dans l'histoire des résolutions adoptées au Conseil de Sécurité, il apparait que nombreuses d'entre elles se sont détournées de leurs esprit et but initiaux. Pour s'en rendre compte, il n'est pas inutile de faire le tour d'horizon de la résolution 678 adoptée par le Conseil de Sécurité le 29 novembre 1990, dans une série de résolutions visant à libérer le Koweït de l'occupation irakienne, en application du chapitre VII de la Charte, qui autorise pour la première fois un groupe d'Etats à recourir à la force contre un Etat membre pour le contraindre à respecter les décisions du Conseil. L'examen des conditions d'adoption de la résolution 678 et de ses implications sociopolitiques permet de comprendre comment et pourquoi les objectifs définis dans ladite résolution furent dévoyés. En effet, l'objectif recherché par le Conseil de Sécurité en adoptant cette résolution et celles qui la précédait sur le conflit du Golfe était de libérer le Koweït, et donc de mettre fin à l'agression irakienne. Mais comme le fait remarquer à juste titre Ignacio RAMONET, « à peine les hostilités engagées, cet objectif unique et clair -le seul légitime d'ailleurs- fut pourtant relégué au second plan et remplacé, au nom de prétendus impératifs militaires, par deux autres : le renversement du régime de Saddam HUSSEIN et destruction de l'Irak182(*) ». Comme l'avait observé le Président des Etats-Unis le 17 janvier 1991, l'action du Conseil avait pour but de faciliter la construction d'un nouvel ordre mondial, « un monde où le droit et non la loi de la jungle, gouvernera la conduite des Nations »183(*).

La noble mission ainsi définie découlant du droit élaboré par le Conseil dans les douze résolutions adoptées sur la question, et que toutes les nations se devaient de faire appliquer. Mais en fait l'autorisation accordée par l'ONU a servi de prétexte à certains Etats pour réaliser d'autres buts de guerre conçus dès le 2 août 1990184(*), à tel point que l'on peut s'interroger, avec Richard FALK, sur le degré d'autonomie de l'ONU par rapport aux Etats-Unis, sa crédibilité, sa fidélité à sa propre Charte et aux fins de justice et de paix pour lesquelles elle a été créée185(*).

La mobilisation générale observée à l'ONU, et notamment au Conseil de Sécurité, avant le lancement de l'opération « Tempête du désert »186(*), avait théoriquement pour but de garantir le respect du droit. « La France, avait déclaré le Président MITTERRAND, ne poursuit pas d'autres objectifs que ceux définis avec précision par le Conseil de sécurité, et d'abord, la libération du Koweït. Le Président Américain George BUSH devait renchérir le 17 janvier en précisant que « notre but n'est pas la conquête de l'Irak, c'est la libération du Koweït »187(*).

Trois jours après le déclenchement des bombardements alliés sur l'Irak, d'autres buts de guerre, sensiblement différents de ceux de l'ONU, ont été définis par les responsables des pays membres de la coalition, sans consultation avec l'Organisation et en violation du mandat reçu : dès le 19 janvier, les autorités américaines déclaraient que « l'Irak doit être détruit militairement, indépendamment du fait qu'il se retire du Koweït »188(*). Dans son discours sur l'état de l'Union, le Président des Etats-Unis réaffirmait que son pays cherchait à « détruire la capacité de l'Irak à soutenir une guerre » et à l'occasion d'une rencontre avec la presse, le Président de la République française admit « qu'il faut naturellement détruire le potentiel militaro-industriel de l'Irak »189(*).

Au lendemain du déclenchement des hostilités, l'objectif fixé par la Maison Blanche n'était plus le respect du droit international et des résolutions de l'ONU, mais la destruction des « infrastructures militaires, des usines d'armements, de sites de missiles et autant de tanks, d'avions et de pièces d'artillerie que possible »...afin « de rendre ce pays incapable de projeter sa force au-delà des frontières dans les prochaines années »190(*).

On le voit, il y a là un détournement manifeste des buts de l'action, pourtant autorisée par l'ONU, au profit des objectifs de politique étrangère d'un seul pays puissant et de ses alliés. L'usage excessif et démesuré de force brute effectué dans le Golfe par les Etats-Unis visait en fait sous couvert de la défense du droit international, à écraser l'Irak et à asseoir le rôle futur de l'Amérique dans le monde.

C'est ce que confirmaient clairement les propos du Secrétaire à la défense de ce pays de l'époque :

« Nous pensons que les Etats-Unis ont des exigences durables. Nous devons maintenir notre capacité à contrôler les océans du monde, à remplir nos engagements en Europe et dans le Pacifique, à être capables de déployer des forces, que ce soit en Asie du Sud-ouest ou au Panama, pour faire face aux imprévus afin de défendre les vies et les intérêts américains »191(*).

De plus, on ne saurait être plus clair sur le sens à donner à l'impressionnante démonstration des forces qui eut lieu dans le Golfe ; il s'agit comme le souligne Ignacio RAMONET « d'un message d'ambition hégémonique »192(*). C'est d'ailleurs ce qui expliquait, selon l'Amiral SANGUINETTI, qu'au prétexte de limiter les pertes américaines, les militaires ont poursuivi, pendant plus d'un mois, et au risque d'un anéantissement de l'Irak, une campagne de bombardements dévastateurs, quand la libération du Koweït suggérait l'application, d'emblée, de la doctrine « Air Land Battle », une guerre moins coûteuse193(*).

Tout porte à croire, et les analyses ci-dessus ont pu le démontrer certes, que certaines guerres peuvent être instrumentalisées par la volonté cachée de neutraliser et de défaire une puissance jugée hostile et menaçant les intérêts de l'Etat qui l'attaque. A travers la guerre du Golfe par exemple, les Etats-Unis, autoproclamés gendarme international, ont démontré qu'ils demeurent prêts à défaire - et non à négocier - toute puissance du Tiers-Monde susceptible de menacer les intérêts américains, de modifier son paysage stratégique ou de remettre en question l'ordre établi. Ainsi, devant un tel spectre d'arbitraire qui est un danger pour l'ordre et la légalité internationale, nous estimons qu'il convient de limiter le cadre thématique d'exercice du droit de veto afin que de telles interventions manipulées et taillées sur mesure ne puissent avoir d'aval international. Cette définition des conditions d'exclusion de l'usage du veto en face de certaines crises particulières devrait s'accompagner des sanctions à infliger au titulaire du droit de veto qui se plierait à cette restriction. Une intervention, dans le cadre du droit international, qui ne viserait pas le maintien de la paix et la sécurité internationales - mais rechercherait la défense de l'intérêt national et de la puissance particulière d'un Etat ou d'un groupe d'Etats seulement- mérite d'être annihiler par le veto. Les titulaires de ceux-ci devraient mêmes être obligés d'en faire usage devant une situation de ce genre au nom du bon sens et de leurs engagements internationaux....

Par contre, le veto ne devrait être brandi à une initiative d'intervention visant à voler au secours aux populations victimes sans défense de la guerre ou à mettre fin à une crise humanitaire194(*) régionale ou à mettre fin à un conflit militaire aux consonances contagieuses ou encore à soutenir l'action de la majorité du peuple contre un régime prédateur et meurtrier. Pourtant, dans le cas de certaines tragédies prototypiques tel le génocide des Tutsi du Rwanda, pire qu'un veto opposé, le Conseil de Sécurité de l'ONU s'en est rendu complice par son silence et son inertie incompréhensible195(*).

En effet, d'avril à juillet 1994, le Rwanda a été le théâtre d'un génocide qui a emporté la quasi-totalité des membres du groupe ethnique Tutsi vivant dans ce pays en 1994. On n'a pu vraiment comprendre comment ce génocide a pu longuement se préparer et se consommer avec la présence au Rwanda des casques bleus de l'ONU, censés être des soldats de la paix, sans la moindre intervention, ni pour le prévenir, ni pour l'arrêter. Pire, lorsque le génocide commence dans la nuit du 6 au 7 avril 1994, l'ONU qui disposait au Rwanda d'une force de 2500 hommes dans ce qui était la Mission des Nations-Unies pour l'Assistance au Rwanda196(*) (MINUAR), n'a pas voulu adapter le mandat de cette force aux nouvelles circonstances et d'en augmenter le nombre. Au contraire, le Conseil de Sécurité s'est hâté de mettre à l'abri ses militaires, abandonnant les victimes à la merci de leurs bourreaux197(*).

Dans ce climat sociopolitique très bouillant et controversé, la MINUAR envoya sur rapport pour demander l'autorisation de procéder des dispositions préventives et des équipements efficaces pour faire face à la situation. Dans cette atmosphère troublée, l'attentat du 6 avril 1994198(*), non élucidé, fut l'occasion de déclencher le massacre des responsables démocrates Hutu favorables aux accords d'Arusha199(*), et simultanément le génocide des Tutsi. Dix casques bleus belges de la MINUAR furent massacrés par la garde présidentielle rwandaise dès le 7 avril 1994. Les « résolutions » prises par le Conseil de Sécurité de l'ONU du 21 avril 1994 au 22 juin 1994 furent très controversées et donnèrent lieu à ce que les rescapés du génocide, et de nombreux analystes, appelèrent « l'abandon (ou la lâcheté) de la communauté internationale ».

Quoiqu'il en soit, les Nations Unies ressentent toujours, 20 ans après le génocide, la « honte de ne pas avoir empêché les massacres de 1994 au Rwanda »200(*). S'illustrant par sa passivité, le Conseil de Sécurité, recroquevillé sur les intérêts de grandes puissances qui ne jugèrent guère utile d'intervenir au Rwanda, souffre toujours de l'imputation d'un silence coupable. Bien pire que l'exercice d'un veto, aucun Etat membre au Conseil de Sécurité n'eut le courage de porter à la table de celle-ci un projet de résolution chargé de régler cette crise et de contribuer, de ce fait, au maintien de la paix internationale tant vantée. Tant d'obstacles qui enchevêtrent, dans une fréquence tout aussi considérable, la résorption par le truchement onusien de nombreuses crises dans le monde et paralyse au même moment la perspective d'un élargissement des sièges permanents au Conseil de Sécurité.

Paragraphe 2. L'extension des sièges permanents à l'épreuve des obstacles à l'option de nouveaux critères unanimes d'attribution du droit de veto

L'ouverture du Conseil à de nouveaux membres permanents est une voie de solution qui nourrit de plus en plus les débats doctrinaux dans le sens de renforcer l'harmonie de la communauté internationale dans un climat de paix et sécurité communes. Tout le monde ou presque réclame un élargissement du Conseil de Sécurité pour inclure de nouveaux membres permanents. Cependant, depuis des décennies, les Etats sont incapables de se mettre d'accord sur le choix de ces nouveaux membres ou de décider si, à l'instar des membres existants, les nouveaux membres doivent avoir le droit d'opposer leur veto aux accords conclus par les autres membres. Autant dire que cette proposition n'émerge pas sans entorses. Nous étudierons ici les entorses d'ordre politique et celles du rang juridique.

Politiquement, les cinq Etats membres permanents du Conseil de Sécurité et, partant, gendarmes du monde, voient très mal l'éventuelle réalisation d'un tel étirement qui, les plaçant dans une concurrence avec d'autres Etats « vautours »201(*), non seulement leur ôterait leur mainmise sur le cours des événements mais émousserait aussi la prépondérance de leur puissance internationale du fait de la rivalité à venir. En effet, le Professeur Michel-Cyr DJIENE WEMBOU202(*) note que les cinq puissances occidentales victorieuses de la Seconde Guerre mondiale n'ont cessé d'être animées par une perception de « tacite réticence » et de méfiance mesurée à l'égard de leurs anciens ennemis de Guerre autrefois baptisés « puissances de l'Axe » toujours vus tels habités par le virus de la traitrise, réticence et méfiance alimentées par la peur justifiée de les voir tramer à tout moment un guet-apens de guerre nouvelle contre leurs intérêts. Un tel état d'esprit ne saurait concourir à une ouverture du Conseil de Sécurité à d'autres membres permanents. D'ailleurs, le Japon et l'Allemagne, pressentis comme candidats sérieux à l'intégration du Conseil dans l'hypothèse de son ouverture à d'autres membres permanents, figurent en avant-plan de la liste noire où l'on classe des Etats considérés comme traitres tels que le sont les vautours dans le monde animal. Aussi, poursuit-il, l'un de plus grands regrets de la France aujourd'hui est d'avoir scellé en 1984 la réconciliation avec l'Allemagne qui a su en tirer profit jusqu'à devenir aujourd'hui la première puissance économique et, donc maitresse, de l'Union européenne dont toutes les orientations et décisions majeures nécessitent son quitus.

Fortement diminuée par cette place de seconde zone dans l'UE, la France n'envisage pas de laisser derechef à l'Allemagne la possibilité de lui damer le pion au Conseil de Sécurité de l'ONU où le droit de veto reste l'unique chaire où elle peut lui exercer la pression. Le droit de veto reste à ce jour la seule arme de contrepoids dont dispose la France vis-à-vis de l'Allemagne qui lui a déjà raflé la primauté et le leadership au sein des institutions de l'Union européenne. Il demeure pour ainsi dire autant l'unique et ultime levier d'influence qu'a la France pour infléchir les positions de l'Allemagne jugées outrancières et la contraindre au dialogue ou à la négociation que le garde-fou le plus efficace contre les tendances de celle-ci à rééditer son zèle belliqueux international qui l'amena à déclencher, en l'espace d'une vingtaine d'année seulement, les deux Guerres mondiales.

Dans cette optique, l'extension du droit de veto à d'autres Etats devient une menace à la paix et la sécurité internationales chèrement acquises et qui se situent au coeur de toute la mécanique des Nations Unies ; et le statu quo, un gage incontournable de la paix et la stabilité mondiales.

En revanche, le pilier d'entorses juridiques se réfère aux difficultés de taille sur la définition des critères d'attribution des sièges permanents qui pourraient être créés203(*).

Les cinq membres permanents ne représentant évidemment plus à eux seuls le monde de 2015, l'impératif de repenser la composition du Conseil de Sécurité dans le sens de la création de nouveaux sièges permanents ou de la recherche de nouveaux membres permanents vaut son pesant d'or. Mais sur quels critères les choisir et dans quelles limites ? Les Etats les plus peuplés ? Les plus grands ? Les plus capables? Les plus démocratiques ? Les plus riches ? Ou bien faudra-t-il tenir compte d'autres variables telle la fréquence de contribution des Etats candidats, par leurs actions et décisions, au maintien de la paix et la sécurité tant régionales que mondiales, leur étendue géographique ou le capital de leurs ressources ?

Tant de données qui divisent les points de vue, encore que la détention du droit de veto rime avec l'attribution aux Etats titulaires de ce droit des responsabilités et obligations de plus en plus lourdes sur la scène internationale consistant notamment à imprégner celle-ci de l'empreinte d'une paix constante et d'une sécurité tout aussi stable, et à tirer de la fosse de déliquescence les Etats de toutes les régions du monde assaillis par les catastrophes socio-humanitaires et autres crises insurmontables. En effet, les Etats membres permanents au Conseil de Sécurité, et, partant, titulaires du droit de veto, sont les plus grands contributeurs au budget de l'ONU et de principales institutions internationales gouvernementales. En outre, lorsqu'une crise humanitaire, tel un tsunami ou une épidémie de haute envergure, surgit quelque part, toutes les mains sont tendues à ces dernières, toutes les voix les appellent à intervenir diligemment et le premier réflexe des autorités étatiques faisant face à cette tornade événementielle « irréversible » est de s'en remettre aux grandes puissances mondiales qui se trouvent être en même temps membres permanents du Conseil de Sécurité onusien. Elles n'hésitent pas de les appeler de tous leurs voeux à leur voler au secours, un peu comme si ces grandes puissances avaient l'obligation conventionnelle de résoudre toutes les grandes crises mondiales, en droit international. En cas de crise politique de haute portée - tel un conflit postélectoral découlant d'une contestation des résultats pouvant conduire à une guerre civile ou une rébellion - éclatant ici et là, les révolutionnaires, les putschistes ou les nouveaux maîtres du jeu se hâtent d'engager les tractations de nature à solliciter la reconnaissance de leur régime ou l'approbation de leur légitimité par les grandes puissances pour assurer la longévité à leur pouvoir. Il suffit, pour s'en convaincre, de constater l'empressement avec lequel ceux-ci se tournent vers celles-là lorsque de telles bourrasques les submergent.

Les Etats qui prétendent aujourd'hui au statut de membres permanents au Conseil de Sécurité avec droit de veto, sont-ils capables d'assumer toutes les obligations de conscience, charges et autres responsabilités incombant au rang de leur aspiration? Seraient-ils à la hauteur du rôle régulateur des distorsions et fluctuations qui écument la sphère internationale ? Sans doute devraient-ils, tout compte fait, y penser sérieusement.

D'autres auteurs, à l'instar de Linos-Alexandre SICILIANOS204(*) et Richard PERLE,205(*) estiment que l'idée de l'extension de nouveaux membres permanents (non vainqueurs de la Guerre) au Conseil de Sécurité semble inconcevable, au stade actuel, et n'irait pas sans porter un choc catastrophique à la structure de la mécanique de tout le système international, parce que les Etats victorieux de la Seconde Guerre mondiale ne laisseraient nullement d'autres Etats venir leur damer le pion dans ce qu'ils considèrent comme un acquis de gestion et de régulation du jeu qui rythme les méandres du système international, acquis symbolisant le prix de leur triomphe sur les puissances de l'Axe. Et parce que cette hypothèse aboutirait inéluctablement à l'établissement d'un nouvel ordre mondial qui postule la soumission de grandes puissances actuelles à un nouveau guide.

Fonctionnant suivant un ordre monarchique fondé sur une certaine aristocratie - des 5 membres permanents -, le Conseil de Sécurité se veut l'organe principal de l'ONU chargé de maintenir l'ordre et la stabilité internationaux aux antipodes de la loi du plus fort. C'est pourquoi Hubert VEDRINE206(*) considère que sa refonte dans le sens de l'extension des sièges permanents conduirait inexorablement à la « Troisième Guerre mondiale » parce que l'équilibre des forces s'en trouverait décongelé et la communauté internationale serait désormais fondée sur la directive des Vainqueurs de la supposée Guerre qui définirait une nouvelle configuration de puissance, pourvu que ceux-ci soient d'autres Etats que ceux siégeant aujourd'hui en permanence au Conseil de Sécurité.

Il semble qu'un certain consensus se soit dégagé pour que l'Allemagne et le Japon acquièrent la qualité de membres permanents du Conseil de Sécurité, à une réserve près, celle des pays en développement qui sont peu enclins à creuser le déséquilibre au profit des pays industrialisés207(*). Le poids de l'Allemagne sur la scène internationale ne fait plus l'ombre d'un doute. Il suffit de constater le rôle incontournable qu'elle joue dans la résolution des conflits et dans les négociations sur les grandes questions de sécurité internationale. En effet, les puissances membres permanents du Conseil de Sécurité, garants privilégiés de la préservation de la paix et la sécurité internationales, se voient aujourd'hui obligées de l'associer aux discussions visant le règlement des conflits armés dans le monde et ce, sans pour autant qu'elle soit membre permanent du Conseil. Les représentants du gouvernement allemand sont présents, au titre de médiateurs, aussi bien aux discussions de Lausanne entre les grandes puissances, constituées au sein du groupe des 5+1208(*), et les membres du régime iranien sur l'abandon du développement du programme nucléaire iranien en contrepartie d'un relâchement des sanctions internationales qu'aux pourparlers des accords de Minsk sur la résolution de la crise ukrainienne entre le régime de Kiev209(*) et les rebelles séparatistes dits « pro russes »210(*).

Une autre tendance de la communauté internationale soutient plutôt l'idée de l'intégration des Etats émergents faisant partie de la plate-forme dite « BRICS211(*) » à la composition du Conseil de Sécurité en faveur de l'élargissement des sièges permanents eu égard d'une part à la vitalité de leurs PIB et PNB qui, additionnées, transcendent le capital économique des Etats-Unis d'Amérique et, d'autre part, à l'ampleur des efforts démocratiques considérables conjugués par la plupart d'entre eux en vue de la consolidation de l'Etat de droit et de la bonne gouvernance. Les BRICS ont également la vertu d'incarner une représentativité géographique suffisamment probante de chacune de principales régions du monde. Au demeurant, il serait donc judicieux, souligne Géraldine LHOMMEAU212(*), de créer également trois nouveaux sièges de membres permanents attribués à trois grands ensembles géographiques en voie de développement : l'Afrique, l'Asie et l'Amérique Latine. Il reste cependant à identifier les Etats qui pourraient représenter ces ensembles.

Tout compte fait, l'élargissement du Conseil de Sécurité de l'ONU est un sujet à l'ordre du jour depuis très longtemps. Il s'agit plus précisément d'accroître le nombre de membres permanents puisque le nombre de membres non-permanents a déjà augmenté au cours de l'histoire213(*). C'est un débat qui a, à l'instar de celui sur la limitation du droit de veto des membres permanents du Conseil de Sécurité de l'ONU en cas de « crimes de masse », très peu de chances d'aboutir dans la mesure où le reste de la communauté n'arrive pas à s'entendre sur l'identité des pays qui pourraient rejoindre le Conseil de Sécurité en tant que membres permanents214(*).

Ainsi, dans le schéma politique international actuel, les Etats qui auraient la plus forte légitimité de rejoindre ce Conseil de Sécurité sont ceux qui combinent plusieurs critères. D'abord « leur importance économique puis leur disposition à participer activement, à la fois financièrement et militairement, au système de maintien de la paix, qui est la raison pour laquelle le Conseil de Sécurité a été créé »215(*). A partir de là, on peut imaginer que des pays tels que l'Allemagne, le Japon et l'Inde seraient particulièrement légitimes pour devenir membres permanents. Cependant, ce Conseil élargi ne verra sans doute jamais le jour, estime la quasi-totalité d'experts et auteurs, notamment parce que certains des membres permanents ne veulent pas voir leurs rivaux accéder au Conseil. Pour la Chine, par exemple, l'accession de l'Inde ou du Japon n'est pas concevable. Et les Etats-Unis, la France et le Royaume-Uni voient en un éventuel accès au Conseil par l'Allemagne un cautionnement international de la Shoa et une exposition à la menace d'une « Troisième Guerre mondiale »216(*).

Conscient de ces difficultés à relever la pente de ces discordes afin de renforcer l'efficacité du Conseil de Sécurité au regard des objectifs lui assignés par la Charte des Nations Unies, Kofi ANNAN217(*), qui fut Secrétaire général des Nations Unies de 1997 à 2006 puis médiateur de l'ONU et de la Ligue arabe en Syrie de février à août 2012, met en avant quatre propositions assez pertinentes qui rejoignent à pic les pistes de solution que nous préconisons pour rendre l'ONU plus forte et plus efficace.

Il s'agit en premier lieu d'une idée visant à sortir de cette impasse. Au lieu de nouveaux membres permanents, il convient d'adopter une nouvelle catégorie de membres ayant un mandat bien plus long que celui des membres non permanents et qui seraient éligibles à une réélection immédiate. Autrement dit, ils seraient « permanents », à condition de conserver la confiance des autres Etats membres. Ne serait-ce pas plus démocratique ?

En second lieu se trouve l'appel lancé aux cinq membres permanents actuels à prendre un engagement solennel consistant à ne plus laisser leurs désaccords déboucher sur une absence d'action du Conseil, qui plus est lorsque les populations sont menacées de crimes atroces, comme c'est le cas actuellement en Syrie. Les cinq membres permanents devraient s'engager en outre à ne jamais utiliser leur veto simplement pour défendre leurs intérêts nationaux, mais uniquement lorsqu'ils craignent sincèrement que l'action proposée soit plus néfaste que bénéfique pour la paix dans le monde et les populations concernées. Dans ce cas, ils devront expliquer pleinement et clairement la solution alternative qu'ils proposent, comme moyen plus crédible et plus efficace de protéger les victimes. Que l'idéal du consensus passe au devant des intérêts partisans.

En troisième lieu, nous proposons, en accord avec Kofi ANNAN, que le Conseil puisse écouter plus attentivement ceux qui sont touchés par ses décisions. Plutôt que de décider derrière des portes closes, sans écouter ceux qui sont directement affectés par leurs décisions, les membres permanents et le Conseil entier devraient donner aux groupes représentant les populations dans les zones de conflit une réelle possibilité d'apporter des informations et d'influencer leurs décisions.

En dernier lieu figure l'idée suivant laquelle le Conseil et, en particulier, ses membres permanents devraient s'assurer que l'ONU désigne le type de chef dont elle a besoin.

Quoi qu'il en soit, la nécessité d'opérer un réaménagement adéquat au Conseil de Sécurité, précisément dans l'optique d'assouplir la rigide condition de l'unanimité des voix des membres permanents pour l'adoption des décisions majeures, est aujourd'hui une aspiration universellement indéniable218(*).

SECTION 2. VERS UN DÉPASSEMENT DE L'UNANIMITÉ POUR L'ÉTABLISSEMENT DE LA MAJORITÉ QUALIFIÉE DES VOIX DES MEMBRES PERMANENTS

L'observation concrète des faits et du comportement des Etats au sein des organes politiques de l'ONU, notamment ceux qui sont impliqués dans l'élaboration du droit international, révèle qu'au-delà des procédures prescrites, le s traits dominants du processus normatif demeurent la prépondérance de la souveraineté, l'hypocrisie des Etats et une acceptation calculatrice de la notion de communauté internationale avec ses ambiguïtés.

Tout au long du processus d'élaboration des normes internationales, les organes politiques de l'ONU doivent faire face à de nombreuses difficultés qui sont créées par les Etats dans le but d'orienter la production normative en fonction de leurs intérêts nationaux. Comme l'a si bien démontré le Professeur VIRALLY, « L'intérêt politique, tel qu'il est conçu par celui qui s'en prévaut, dirige de façon souvent tyrannique, le comportement des Etats, c'est-à-dire les gouvernements qui agissent pour leur compte »219(*). En effet, « la politique étrangère des Etats n'a qu'un seul objectif : la protection et la promotion de l'intérêt national, ce qui recouvre... une multitude d'intérêts les plus divers, mais qui méritent tous, finalement, le qualificatif de politiques, mêmes s'ils sont économiques, culturels ou autres »220(*). Le droit international est perçu par chaque Etat selon ce qu'il considère comme étant l'intérêt national.

Au long du processus normatif et même décisionnel au sein des organes des Nations Unies en général et au Conseil de Sécurité en particulier, les Etats à l'oeuvre se soucient peu de la morale politique ou du bien-fondé de la décision moins encore de la qualité de la règle élaborée ou de son degré de normativité. Ce qui importe, ce qu'elle ne puisse pas porter atteinte à leurs intérêts politiques ou économiques. Sans doute, les Etats, surtout les plus puissants, conçoivent-ils le droit international onusien, en tant que système normatif et facteur de la vie internationale, d'abord sous l'angle des intérêts politiques et accessoirement, sous celui des idéologies221(*). La résultante de cet état des choses est l'éreintement même du système de production normative et le dépérissement de la machine décisionnelle de l'ONU en général et celle du Conseil de Sécurité en particulier. Le levier principal de ce dysfonctionnement est la mutation du régime juridique du veto dans le sens de l'assouplir en l'adaptant aux nouvelles donnes de la Realpolitik afin de réduire sa tendance à obstruer la résolution des conflits et même, quelque fois, à verrouiller les voies d'issue des crises internationales sous la huppe des Nations Unies222(*). Il s'agit précisément de passer de la rigide condition de l'unanimité des voix des membres permanents du Conseil de Sécurité à l'exigence beaucoup plus pragmatique de la majorité qualifiée des voix de ceux-ci (paragraphe 1), majorité qualifiée dont les recettes présentent d'arguments probants de capitalisation du crédit de maintien de la paix internationale (paragraphe 2).

Paragraphe 1. Portée, enjeu et particularité juridiques de la majorité qualifiée

Du latin major, plus grand, la majorité est le plus grand nombre, la majeure partie. En droit constitutionnel et en science politique, la majorité désigne le plus grand nombre des suffrages exprimés qui permet d'arrêter une décision ou l'attribution de mandats électoraux. C'est un système de vote dans lequel le nombre de voix nécessaires pour l'emporter est fixé par la loi et supérieur à la moitié des suffrages exprimés.

 
 

On distingue généralement la majorité qualifiée de la majorité simple et la majorité absolue et de celle relative. La majorité absolue est composée de la moitié des voix plus une. La majorité relative correspond au plus grand nombre de voix obtenues par un candidat comparativement à ses concurrents ou au plus grand nombre de voix réunies sur une décision donnée. La majorité relative, c'est la majorité que détient un(e) candidat(e) ou une proposition qui recueille plus de voix que les autres même si cette majorité n'est pas absolue (c'est-à-dire que la majorité relative peut être inférieure à la moitié plus un)223(*).

La majorité qualifiée, elle, est une majorité importante qu'une loi ou un traité se charge de préciser, par exemple une majorité des deux tiers (2/3), ou des trois cinquièmes (3/5). La majorité qualifiée est un terme juridique qui désigne une majorité renforcée, plus importante que la majorité simple des votants concernés. Notamment utilisée, par exemple, au sein de certaines instances de l'Union européenne, des assemblées générales d'associés ou d'actionnaires des sociétés ou des assemblées de copropriétaires, la majorité qualifiée est généralement exigée pour des décisions importantes comme certaines modifications statutaires, certains travaux, etc. Exemple : la majorité qualifiée des 2/3 des voix des actionnaires présents ou représentés lors d'une Assemblée Générale Extraordinaire d'une société anonyme.

La majorité simple comprend la moitié du pourcentage total des voix plus un, de même que la majorité absolue. Pour être précis, on utilise le terme majorité absolue par opposition à la majorité relative, tandis qu'on utilise le terme majorité simple par opposition à celui de majorité qualifiée.

En France, le Président de la République est désigné au suffrage universel direct. Les deux candidats ou candidates qui obtiennent la majorité relative au premier tour (c'est-à-dire les deux candidats ou candidates qui ont le plus de voix) peuvent accéder au second tour. Si un des candidats(es) obtient la majorité absolue (50 % +1) dès le premier tour il (elle) est directement élu (e) et il n'y a pas de deuxième tour. Dans le cas contraire, il y a un deuxième tour entre les deux candidats ayant obtenu le plus de voix et il y a forcément un(e) candidat(e) qui obtient la majorité absolue parce que les votes blancs ne sont pas comptabilisés.

Le terme de majorité qualifiée traduit à la fois la pondération de chacun des suffrages exprimés et le nombre de voix nécessaires pour obtenir la majorité et/ou faire adopter une décision. C'est cette dernière acception qui sera retenue dans l'approche de notre analyse. Le vote à la majorité qualifiée y est perçu tel un nombre de suffrages exigés (souvent 2/3 ou 3/5 des voix) pour que le vote soit acquis. La majorité qualifiée correspond au nombre de voix qui doit être atteint, au sein d'une structure ou d'une organisation, pour qu'une décision soit adoptée224(*).

Dans cette perspective, nous proposons que la majorité qualifiée des voix des membres permanents au Conseil de Sécurité soit substituée à l'unanimité au moyen, bien entendu, d'un amendement de la Charte dans cette perspective. Un tel ajustement aura la faveur de briser le mur du blocage faisant obstruction au règlement des conflits sous le label onusien que draine la condition de l'unanimité des voix des membres permanents, condition au coeur du veto. Ainsi, pour toutes les questions autres que celles de procédure, qui exigent l'unanimité des voix des cinq membres permanents pour être adoptées, il suffirait qu'une majorité des 3/5 soit dégagée ou que trois membres sur les cinq émettent un vote positif pour que la décision passe. Ce faisant, le droit de veto impliquerait non plus l'unanimité des voix des cinq membres permanents pour l'adoption des décisions visées à l'alinéa 3 de l'article 27 de la Charte de l'ONU mais bien une majorité qualifiée de leurs voix. Le droit de veto aurait donc pour condition procédurale de fond la majorité qualifiée de 3/5 des voix des membres permanents dans l'approbation des décisions envisagées.

Sous l'empire de l'unanimité, le veto mêle rigidité et opacité en ce sens que les décisions du Conseil de Sécurité sur toutes autres questions que celles de procédure ne peuvent être prises que par un vote affirmatif de neuf de ses membres dans lequel sont comprises les voix de tous les membres permanents, étant entendu qu'une partie à un différend s'abstient de voter. Or, au regard des conflits d'intérêt et de la rivalité hégémonique qui sous-tendent les rapports hypocrites entre eux, il est très difficile et très rare de réunir les votes affirmatifs de tous les cinq membres permanents sur les grands sujets internationaux. En revanche, sous le régime de la majorité qualifiée, le droit de veto ne se fonderait plus sur l'unanimité mais reposerait désormais sur l'exigence d'une majorité des 3/5 des voix des membres permanents pour qu'une décision autre que celle de procédure soit adoptée. Ce qui tendrait à assouplir le régime du veto au Conseil de Sécurité.

Le côté positif du veto est qu'il prend en compte toutes les positions, y compris celle qui est farouchement opposée à la décision ciblée, les autres parties, constituant la frange majoritaire, étant appelées à tenter activement de trouver un compromis pour éviter le blocage qui se veut son côté négatif.

Le vote à la majorité qualifiée regorge de l'avantage d'avoir des conséquences importantes et positives sur la nature des négociations entre Etats membres du Conseil de Sécurité. Grâce au vote à la majorité qualifiée, les délégations sont plus ouvertes à des propositions de compromis, sachant qu'il n'est plus possible de bloquer une prise de décision avec un veto.

Paragraphe 2. La majorité qualifiée et la résolution des crises par le Conseil de Sécurité : pour quelle incidence dans l'équilibre de la paix et la sécurité internationales ?

Le droit international étant l'ensemble de normes juridiques qui règlent les relations internationales, il constitue un « ordre normatif » et un « facteur d'organisation sociale »225(*). D'où la nécessité de veiller à l'efficacité des normes en vigueur en les adaptant incessamment à l'évolution de la société internationale. L'appel à la réforme du droit de veto au Conseil de Sécurité mérite d'être appréhendé sous cet angle.

Il n'existe pas, à proprement parler, de droit de veto dans la Charte des Nations Unies : pour qu'une résolution soit adoptée par le Conseil de Sécurité, il est prévu que la majorité qualifiée (9 voix sur 15) comprenne « le vote de ses cinq membres permanents » (article 27). Cela signifie que, lorsque l'un des « cinq » (Etats-Unis, Russie, Chine, Royaume-Uni, France) s'abstient, la résolution est rejetée. En contradiction avec la Charte, la pratique admettra plus tard que l'abstention d'un membre permanent n'empêche pas l'adoption d'une décision, créant ainsi de facto un droit de veto formel. Ce « droit » ne joue qu'à l'intérieur du Conseil de Sécurité, donc dans les matières où ce n'est pas l'Assemblée générale qui décide. Il s'en suit que lorsque l'un des cinq membres permanents exerce son droit de veto sur une question donnée, celle-ci reste pendante. Ainsi, le veto n'est pas un refus de voter ni un vote blanc mais il est plutôt un vote négatif que l'un des membres permanents peut émettre à la fois pour manifester sa désapprobation de la décision majoritaire et empêcher l'adoption de cette dernière. Cette casquette du veto, reposant sur l'unanimité des voix des membres permanents, est aujourd'hui responsable de la dégénérescence de l'équilibre de la paix et la sécurité internationales à travers l'enlisement de plusieurs crises et conflits armés internationaux du fait de l'inertie de la communauté internationale.

Règle dépassée pour certains auteurs et épineuse pour d'autres, l'unanimité des voix devrait, soulignent plusieurs doctrinaires de droit international dont nous épousons l'opinion à ce sujet précis, laisser place à une autre technique de vote au sein du Conseil de Sécurité. Considérant la portée réaliste de son procédé et ses résultats probants dans le décantage des situations autrefois insurmontables au sein de certains organes de l'Union européenne depuis qu'il y a été instaurée, nous estimons que le mode électoral de la majorité qualifiée est la piste de solution la plus plausible pouvant permettre une meilleure libération de ce barbelé de blocage.

A l'heure actuelle et depuis des années déjà, le sujet brûlant de la réforme du droit de veto n'avance pas malgré les multiples propositions et force est de constater qu'une quelconque réforme dans le sens de son abolition semble hors de portée par ce qu'utopique et même onirique. Mais s'il y a peu de chances pour que les Etats-Unis226(*) principalement, acceptent un jour une réforme qui amenuiserait leur pouvoir au sein de l'ONU, certains optimistes continuent à penser que « les partisans de la réforme (...) doivent rester mobiliser et redoubler d'efforts pour promouvoir (...) les conditions politiques qui aboutiront à une réforme en profondeur des Nations Unies dans le sens de l'instauration d'un gouvernement global et démocratique au sein du système onusien » 227(*). Ils veulent croire que les Etats-Unis sur le territoire desquels ont vu le jour le président WILSON - père de la SDN - et le président ROOSEVELT - père des Nations Unies - sauront donner le jour à un homme « riche de la volonté de créer une organisation des Nations Unies apte à répondre aux besoins de l'Humanité, d'encourager un dialogue Nord-Sud renouvelé et de créer les conditions pour la démocratisation de la mondialisation avant que la mondialisation ne dénature la démocratie »228(*).

Ceci étant, la principale conséquence juridique, mieux l'incidence la plus manifeste et même la plus évidente sera certainement si non l'éradication du moins la résorption de l'écueil du blocage qui, à travers le veto, gèle le dépassement des conflits armés sous l'égide onusien. Ainsi, l'effet majeur de la rotation vers la majorité qualifiée des 3/5 visée par la présente analyse sera-t-il sans doute la consolidation de la paix et la sécurité internationales à la faveur de l'instauration d'un mode de vote plus consensuel, comparativement à la condition de l'unanimité des membres permanents qui, disons-le, est difficile à observer eu égard aux déchirures et tensions subséquentes aux conflits de suprématie planétaire et querelles d'expansion d'influence politique dissimulés sous le tapis des rapports hypocrites.

Toutefois, l'on pourrait à raison s'interroger sur l'efficacité réelle de la majorité qualifiée des 3/5 à relever ce défi du blocage tant on sait que les membres permanents sont, dans les faits, rangés en deux blocs, depuis la période de la Guerre froide et que le bloc occidental comprend lui seul trois Etats sur les cinq. Ce qui pourrait conduire à voir en l'éventuelle institutionnalisation de la majorité qualifiée avec un tel seuil des 3 voix sur 5 une brèche de laxisme que le droit international offrirait sur un plateau d'or à l'alliance occidentale des Etats-Unis, la Grande Bretagne et la France pour toujours faire passer au Conseil de Sécurité leurs décisions, fussent-elles arbitraires ou injustes, au détriment du bloc de la Russie et de la Chine au risque de sacrifier l'équilibre international dont le maintien requiert absolument la présence d'une action de contrepoids. Cette peur ne présente, à notre égard, qu'un minime intérêt car bien qu'étant alliés, Etats-Unis, Grande Bretagne et France n'ont pas toujours partagé la même position sur toutes les questions de sécurité internationale présentées sur la table du Conseil de Sécurité. Plus d'une fois leurs divergences n'ont su être tues et ont fini par être étalées sous forme soit de refus par l'un des trois Etats de superposer son veto à celui de son allié pour renforcer ainsi l'image pernicieuse que ce dernier désire délivrer à l'opinion internationale sur la question visée, soit de veto directement brandi -ou de menace de veto- contre un projet de résolution de l'un de ses deux alliés.

Au sujet du conflit israélo palestinien, par exemple, les Etats-Unis ont toujours opposé leur veto à tous les projets de résolutions jugés défavorables à l'Etat hébreux alors que la France s'est toujours montrée partisane d'une démarche incluant les revendications politiques de l'autorité palestinienne en vue de résoudre ce conflit sexagénaire. La politique internationale de la Grande Bretagne, quant à elle, n'accorde que très peu d'intérêt à cette question. Il suffit de se rendre compte que les Etats-Unis ont toujours émis leur veto en solo, sans réussir à rafler les voix de leurs alliés, au sujet de la crise israélo-palestinienne pour percevoir les traces de cette divergence de taille. En outre, le veto exercé collégialement à deux reprises par la France et la Grande Bretagne contre les projets de résolution S/3713/Rev.1 et S/3710 du 30 octobre 1956 portant sur l'adoption des indications de la Lettre datée du 29 octobre 1956, adressée au Président du Conseil de Sécurité par les États-Unis au sujet de la question de Palestine démontre que dans les relations internationales et même dans la politique internationale les Etats n'ont pas d'amis mais que des intérêts à préserver. Si l'on se rappelle l'opposition du gouvernement français, sous Jacques CHIRAC, à l'intervention des forces américano-britanniques en Irak en mars 2003, allant jusqu'à menacer d'opposer son veto à toute initiative tendant à conférer à une telle intervention le quitus du Conseil de Sécurité onusien, l'on comprendrait sans l'ombre d'un doute que l'instauration de la majorité qualifiée au Conseil de Sécurité n'est pas un gage absolu du triomphe effréné des décisions et de l'idéologie de l'Occident, comme bloc en front commun, que le reste du monde aurait à subir.

Toutefois, ne nous méprenons pas ! La majorité qualifiée n'est pas une baguette magique pour détoner d'un trait tous les obstacles à la résolution des conflits par le canal de l'ONU. Elle est plutôt une technique à même de contribuer, par sa nature plus proche du consensus que celle de l'unanimité, à l'amoindrissement du spectre du blocage du règlement des crises qui semble être devenu le propre de l'usage du veto au Conseil de Sécurité. En ce sens, elle permettrait également de transcender les clivages d'intérêts nationaux des membres permanents du Conseil de Sécurité, lesquels handicapent considérablement les horizons de sortie des crises ou pire donnent implicitement quitus à la poursuite des massacres dans les zones en conflit du fait du statu quo subséquent à l'absence d'intervention internationale.

CONCLUSION

Le droit de veto, au titre de prérogative conférée aux cinq membres permanents du Conseil de Sécurité des Nations Unies, qui leur permet de s'opposer à toute question autre que de procédure, est autant instrument juridique d'une paix et une sécurité internationale quelque fois de façade que facteur d'obstruction des voies de sortie des conflits armés qui ravagent l'échiquier mondial et saturent le droit international dans la moule des relations internationales à la fois complexes et hypocrites.

Prérogative de droit au service de l'ordre et de la stabilité mondiale, l'exercice du veto contre un projet de résolution au Conseil de Sécurité visant le règlement sous l'égide onusien d'un conflit armé précis s'est avéré être plus d'une fois porteur d'une paix et d'une sécurité internationales restreintes, exclusives dans leurs effets les plus concrets en ce sens qu'il préserve, dans les faits, des ouragans déstabilisateurs de la paix non l'ensemble de tous les Etats du monde mais une frange d'entre eux seulement, laissant l'Etat directement en proie à la guerre ou au conflit dont la décision de résolution par le Conseil de Sécurité se serait vue ainsi paralysée, et même ceux de la sous-région qui le comprend, à la merci des atrocités et autres massacres inhérents à ce genre de crises. C'est là la quintessence même de ce que nous qualifions de paix internationale d'exclusion, n'accordant son bénéfice sécuritaire en termes d'abri aux hostilités qu'à la puissance utilisatrice du veto et à d'autres Etats éloignés de la scène des combats, la zone théâtre du conflit se voyant abandonnée à son sort macabre.

L'usage abusif du droit de veto est étayé par la course vers l'affirmation de puissance dans l'espace international à travers la querelle de leadership mondial entre les titulaires dudit droit au Conseil de Sécurité des Nations Unies. Ce clivage d'intérêt épris d'une rivalité d'hégémonie parée de relations de coopération économique et diplomatique hypocrites est en fait un héritage de la Guerre froide consacrant un état des relations conflictuelles entre les États-Unis et leurs alliés229(*) et l'ensemble des nations sous contrôle de l'Union soviétique, aujourd'hui la Russie, aux lendemains de la Seconde Guerre mondiale, sans donner lieu à l'éclatement d'une confrontation armée directe entre les deux superpuissances230(*). Cela s'est traduit également par une intense course aux armements tant conventionnels que nucléaires qui a débouché rapidement sur un équilibre de la terreur, ainsi que par une multiplication de conflits locaux, où les deux blocs se sont affrontés par pays alliés interposés. Des intérêts divergents ont conduit les deux groupes à une suspicion et à une hostilité de plus en plus intenses, dans un climat de rivalité idéologique croissante. Depuis cette période, chacune des puissances titulaires du veto au Conseil de Sécurité s'est toujours illustrée en présence de chaque conflit armé international par une position toute pesée, parfois ambigüe, favorable ou non à la prise des mesures convenables en vue d'y trouver une solution urgente selon le degré de sa docilité à servir au même moment le prosélytisme idéologique de l'Etat qui fait usage du veto et à l'affaiblissement du potentiel hégémonique de ses puissances rivales.

D'autre part, la quête effrénée des intérêts nationaux, souvent antagonistes, des Etats membres permanents et l'interférence des pesanteurs de leur politique interne dans la vie internationale contribuent également à émousser le caractère international de la paix qui est brandie par l'usage du veto contre une résolution visant la fin d'un conflit armé donné. Ici, l'Etat utilisateur du veto est plus préoccupé par les effets qu'une intervention armée dans le schéma des Nations Unies pourraient avoir sur la préservation de sa sécurité interne et sur les projections de sa croissance économique ou encore sur l'équilibre de sa balance commerciale au regard des flux ou reflux des activités découlant de la mondialisation de l'économie. S'il s'avère qu'une telle intervention onusienne transférerait des conséquences néfastes sur les données économiques et sécuritaires de l'utilisateur, ce dernier n'hésiterait pas à lui opposer son veto, au-delà du fait que l'Etat ou même la région où se déroulent les combats continueraient à tirer le diable par la queue dans un conflit catastrophique sans issue. Le veto semble être devenu instrument de propagande hégémonique et facteur de stimulation de croissance économique des puissances mondiales qui prennent en otage certains conflits armés internationaux pour réaliser cette fin.

Assimilé de plus en plus à un facteur de blocage du règlement des crises et conflits armés internationaux, le veto au Conseil de Sécurité n'épargne guère des instrumentalisations qui en font un outil plus au service de la doctrine et des objectifs politiques des Etats membres permanents qu'à la recherche d'une paix et une sécuritaire équitablement communes et profitables à l'ensemble des Etats membres de la « communauté internationale ». Cet enfermement dans un carcan isolationniste basé sur l'assouvissement des intérêts particuliers des Etats, non sur l'intérêt commun de tous, est aujourd'hui au coeur des barrières à la résolution de plusieurs problèmes sécuritaires à travers le monde et conduit même à l'enlisement de certains conflits231(*). Les conflits armés et guerres civiles aux effluves géo-hégémoniques, parfois avec l'intrusion des groupes djihadistes et terroristes islamistes, en Syrie, en Irak et en Ukraine sont l'illustration actualisée de cette situation d'enlisement.

Ce profil sombre de la figure et même de l'incidence du veto sur la configuration des crises et conflits mondiaux au sujet desquels il s'exerce véhicule plus que jamais l'anachronisme et l'inefficacité de ce droit que d'aucuns jugent « discriminatoire » d'une part, et appelle, d'autre part, à sa réforme judicieuse dans le sens de l'adapter aux réalités de la politique extérieure, du droit et des relations internationales en présence, qui ne sont plus exactement les même que ceux qui ont immédiatement suivi la fin de la Seconde Guerre mondiale232(*).

A ce sujet, le gouvernement français a fait une fois de plus, le 25 septembre 2014, une proposition de limitation du droit de veto des membres permanents en cas de « crimes de masse ». Mais, l'initiative de Paris, déjà soutenue en 2013, a reçu peu d'écho chez ses partenaires. « Nous avons des comptes à rendre à l'opinion publique. Nos populations ne comprennent pas le mode de fonctionnement du Conseil de Sécurité », a estimé le ministre Français des affaires étrangère, Laurent FABIUS. « Le droit de veto n'est pas un privilège, c'est une responsabilité », a renchéri son homologue mexicain José Antonio Meade KURIBENA, en marge de l'assemblée générale de l'ONU à New York consacrée à cette question.

La proposition française vise à obtenir un engagement des cinq membres permanents du Conseil de Sécurité à ne pas recourir au veto lorsque des crimes de masse sont commis (génocide, crime contre l'humanité et crime de guerre). Il s'agit d'éviter la paralysie, soulignent les autorités françaises qui s'appuient sur l'exemple syrien pour pousser leur initiative. En effet, depuis le début de la guerre en Syrie, qui a fait plus de 20 000 morts en quatre ans, Russie et Chine ont opposé à quatre reprises leurs vetos aux résolutions prévoyant des sanctions contre le régime de Bachar Al-ASSAD. Toutefois, le réalisme mesuré fait prendre conscience qu'une telle initiative ne saura aboutir, à court terme, eu égard à la muraille des réticences des partenaires de la France, favorables au maintien du statu quo. Seul un travail de longue haleine au prix de pression et de conviction pourra faire émerger une telle lueur dans ce sens.

Certains auteurs, mettant en avant-plan des considérations pratiques de la fonction publique internationale, proposent quatre pistes pour sortir du gouffre du blocage du règlement des conflits armés par le fait de l'opposition du veto233(*).

La première porte sur l'adoption d'une nouvelle catégorie de membres ayant un mandat bien plus long que celui des membres non permanents et qui seraient éligibles à une réélection immédiate. Autrement dit, ils seraient « permanents », à condition de conserver la confiance des autres Etats membres.

La deuxième se trouve circonscrite dans un appel lancé aux cinq membres permanents actuels à prendre un engagement solennel consistant à ne plus laisser leurs désaccords déboucher sur une absence d'action du Conseil, qui plus est lorsque les populations sont menacées de crimes atroces, comme c'est le cas actuellement en Syrie. Les cinq membres permanents devraient s'engager en outre à ne jamais utiliser leur veto simplement pour défendre leurs intérêts nationaux, mais uniquement lorsqu'ils craignent sincèrement que l'action proposée soit plus néfaste que bénéfique pour la paix dans le monde et les populations concernées. Dans ce cas, ils devront expliquer pleinement et clairement la solution alternative qu'ils proposent, comme moyen plus crédible et plus efficace de protéger les victimes. Que l'idéal du consensus passe au devant des intérêts partisans.

La troisième voudrait que le Conseil puisse écouter plus attentivement ceux qui sont touchés par ses décisions. Plutôt que de décider derrière des portes closes, sans écouter ceux qui sont directement affectés par leurs décisions, les membres permanents et le Conseil entier devraient donner aux groupes représentant les populations dans les zones de conflit une réelle possibilité d'apporter des informations pouvant éclairer les lanternes leurs décisions234(*).

La quatrième enfin se rapporte à l'idée suivant laquelle le Conseil et, en particulier, ses membres permanents devraient s'assurer que l'ONU désigne le type de chef dont elle a besoin.

La particularité analytique de nos axes de réflexion tassés dans ce travail, outre la notion de la paix internationale d'exclusion entraînée parfois par l'usage du veto, réside dans la recette de la majorité qualifiée des 3/5 des voies des membres permanents qui, proposée en subrogation à l'unanimité jusque là de mise telle la règle d'or pour l'adoption des décisions autres que celles de procédure au Conseil de Sécurité, pourra être la porte de sortie de cette impasse du blocage. Ce basculement à la majorité qualifiée des 3/5 aura le mérite, autant par la souplesse de son arsenal juridique privilégiant l'efficacité des résultats que par sa vocation favorable au consensus, de contribuer à transcender les rivages des confrontations d'intérêts entre membres permanents235(*) et, par ricochet, à baisser le taux du blocage des voies de sortie des conflits armés voués à s'internationaliser. Une telle contribution, l'on s'en sera rendu compte, concourra sans conteste à raffermir incessamment l'équilibre de la paix et la sécurité internationales, but ultime du Conseil de Sécurité des Nations Unies.

Quel qu'en soit le visage, cette mise à jour devra inscrire la règle de vote mieux celle d'adoption des décisions au Conseil de Sécurité dans la ligne d'un consensus qui concilie politique avec droit dans une mixture de tempérance mutuelle afin de réduire la fréquence du blocage du règlement des conflit générée par le rude critère de l'unanimité des membres permanents propre au veto.

A travers une approche analytique, exégétique et hypothético-déductive enracinée dans les techniques d'observation et documentaire, notre dissertation juridique a opéré à l'endroit du droit de veto au Conseil de Sécurité onusien une double critique : à la fois tel le véhicule d'une paix et une sécurité internationales imparfaites et telle une barrière à la résolution des crises sécuritaires internationales. Ce droit y a été démasqué tour à tour comme une spécificité aux diapasons nébuleux de la Charte de l'ONU, un garde-fou utile contre l'arbitraire des Etats et un instrument de prosélytisme hégémonique de ses titulaires qui immolent souvent la résolution des situations menaçant de briser l'harmonie de la paix et la sécurité internationales sur l'autel de leurs intérêts nationaux. En outre, la réflexion sur la pertinence du droit de veto et du statu quo de la qualité de membres permanents, sur la légitimité du Conseil de Sécurité et les perspectives de sa réforme ainsi que sur la possibilité de réajuster le régime du droit de veto y a été méthodiquement menée pour aboutir à la préconisation de la substitution de la majorité qualifiée des 3/5 à la règle quelque peu rigide et anachronique de l'unanimité des voix des membres permanents pour l'adoption des décisions autre que celles de procédure au Conseil de Sécurité.

Le maintien de la paix et la sécurité internationales appelle aujourd'hui des dispositifs tant juridiques qu'extra-juridiques, à divers horizons, que le droit de veto seul ne saurait garantir. Aussi, le développement incessant des industries d'armement lourd dans le cadre d'une économie capitaliste qu'entretiennent les multinationales ne saurait-il mener à un monde exempt de guerre, où règne la paix et la sécurité promues par les instrumenti de iure de l'ONU. Bien plus, aussi longtemps que la fabrication industrielle d'armes de guerre se perpétuera et que le génie de la technologie militaire et des stratégies de combat ne cessera de faire preuve de plus de créativité destructrice, qui pis est avec l'aval onusien, la paix et la sécurité à l'échelle mondiale, au sens global, ne relèveraient que du stade discursif.

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b. Sites internet consultés

1. http://www.aceproject.org//le-vote-à-la-majorité-qualifiée-694268-html, page consultée le 17 mars 2015 à 15h43'.

2. http://www.droitinternational.org//le-droit-de-la-sécurité-à-l'onu-436785-html, page consultée le 30 mars 2015 à 10h54'.

3. http://www.globalpolicy.org, page consultée le 23 octobre 2014 à 19h 45'.

4. http://www.un.org// les-organes-de-l'onu-478357-html, page consultée le 30 novembre 2014 à 16h 07'.

5. http//www.m.nouvelobs.com//le-droit-de-veto-et-les-conflits-armés-263895-html, page consultée le 2 janvier 2015.

TABLE DES MATIÈRES

ÉPIGRAPHE........................................................................................................................................................I

DÉDICACE...........................................................................................................................................................II

REMERCIEMENTS..............................................................................................................................................III

LISTE DE PRINCIPALES ABRÉVIATIONS..........................................................................................................IV

INTRODUCTION.................................................................................................................................................1

1. État de la question.............................................................................................................................1

2. Choix et intérêt du sujet...................................................................................................................5

3. Hypothèse...........................................................................................................................................6

4. Méthodes et techniques..................................................................................................................7

5. Plan et division du travail................................................................................................................10

CHAPITRE 1. LE VETO, UN DROIT INIQUE AU SERVICE DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES ?.............................................................................................11

SECTION 1. LE DROIT DE VETO, UNE SPÉCIFITÉ INSTITUTIONNELLE DE L'ONU...................................12

Paragraphe 1. Les principaux organes de l'ONU..............................................................................15

Paragraphe 2. Quelques éléments sélectifs de différence entre l'ONU et la SDN à la lumière du Pacte et de la Charte les ayant respectivement instituées......................................................19

SECTION 2. LE DROIT DE VETO ET LA FONCTION DE GARDE-FOU CONTRE L'ARBITRAIRE DES ÉTATS....................................................................................................................................25

Paragraphe 1. La paix et la sécurité internationales en droit international en entre mondialisation et particularisme, intégration et exclusion...........................................................26

Paragraphe 2. Le droit de veto : portée, contour et incidences...................................................30

CHAPITRE 2. LE CONSEIL DE SÉCURITE ENTRE IMPÉRIALISME NÉO-INSTRUMENTALISTE ET EXPANSIONNISME HÉGÉMONIQUE : LE DROIT DE VETO A L'AUNE DU BLOCAGE DE L'ISSUE DES CRISES...........................................................................................................36

SECTION 1. LE DROIT DE VETO AUX TRÉFONDS DES FREINS AU RÈGLEMENT DES CONFLITS...........37

Paragraphe 1. La Charte de l'ONU à l'épreuve d'une interprétation extensive aux fins de légitimation de sa transgression : le droit de veto, une arme de protection d'intérêts nationaux..............................................................................................................................................37

Paragraphe 2. Le droit de veto, source d'impunité et de mainmise des membres permanents et d'une lâcheté complice des violations des droits humains dans les zones en conflit...........47

SECTION 2. DE LA PERTINENCE DU DROIT DE VETO ET DE L'OPPORTUNITÉ DU MAINTIEN EN L'ÉTAT DU STATUT DES MEMBRES PERMANENTS............................................................53

Paragraphe 1. La remise en cause de la légitimité du Conseil de Sécurité.................................57

Paragraphe 2. De l'anachronisme de la composition du Conseil de Sécurité à l'inefficacité du droit de veto.........................................................................................................................................60

CHAPITRE 3. QUELQUES PERSPECTIVES D'ISSUE DU BLOCAGE TERNISSANT LE DROIT DE VETO.....63

SECTION 1. RÉFLEXIONS SUR LA NÉCESSITÉ DE LA RÉFORME DU CONSEIL DE SÉCURITE DE L'ONU....................................................................................................................................63

Paragraphe 1. La nécessaire définition des conditions d'exclusion du recours au droit de veto et des circonstances de son usage obligatoire................................................................................65

Paragraphe 2. L'extension des sièges permanents à l'épreuve des obstacles à l'option de nouveaux critères unanimes d'attribution du droit de veto........................................................69

SECTION 2. VERS UN DÉPASSEMENT DE L'UNANIMITÉ POUR L'ÉTABLISSEMENT DE LA MAJORITÉ QUALIFIÉE DES VOIX DES MEMBRES PERMANENTS.........................................................75

Paragraphe 1. Portée, enjeu et particularité juridiques de la majorité qualifiée.....................76

Paragraphe 2. La majorité qualifiée et la résolution des crises par le Conseil de Sécurité : pour quelle incidence dans l'équilibre de la paix et la sécurité internationales ?..........................78

CONCLUSION.................................................................................................................................................82

BIBLIGRAPHIE SÉLÉCTIVE.............................................................................................................................87

TABLE DES MATIÈRES...................................................................................................................................92

* 1 En l'occurrence les Etats Unis d'Amérique, l'Union des Républiques Socialistes Soviétiques et le Royaume Uni.

* 2 L'esprit et la lettre mêmes de ces dispositions de la Charte de l'ONU heurtent le principe de l'égalité souveraine des Etats membres indispensable pour assurer la coopération internationale, principe pourtant proclamé par la Charte.

* 3 Article 23, alinéa 1er de la Charte des Nations Unies. Cet article énumère les cinq pays membres permanents du Conseil de Sécurité. Il s'agit de principales Puissances Alliées : La République de

Chine, la France, l'Union des Républiques socialistes soviétiques, le Royaume-Uni de Grande-

Bretagne et d'Irlande du Nord et les Etats-Unis d'Amérique.

* 4 En effet, l'architecture formelle actuelle des articles 23 et 27, qui nous intéressent ici, est la résultante des amendements adoptés par l'Assemblée générale le 17 décembre 1963 et entrés en vigueur le 31 août 1965. L'amendement à l'article 23 a porté de onze à quinze le nombre des membres du Conseil de Sécurité. L'amendement à l'article 27 dispose que les décisions du Conseil de Sécurité sur des questions de procédure sont prises par un vote affirmatif de neuf membres (précédemment sept) et que ses décisions sur toutes autres questions sont prises par un vote affirmatif de neuf de ses membres (précédemment sept) dans lequel sont comprises les voix des cinq membres permanents du Conseil. Pour plus de détails, lire utilement la Note Liminaire de la Charte des Nations Unies.

* 5 Distinct de l'abstention qui, elle, n'empêche pas forcément l'adoption du projet de décision considéré.

* 6 DEBARD T. et GUINCHARD S., Lexique des Termes Juridiques, 19ème édition, Paris, Dalloz, 2012, p. 886.

* 7 PELLET, A., Les Nations Unies-Textes fondamentaux, Paris, PUF, 1995, pp. 57-59.

* 8 Le veto peut se référer également à la prérogative par laquelle une autorité, généralement dotée du pouvoir exécutif, peut s'opposer à un texte voté par le pouvoir législatif. Historiquement, le veto était la formule employée par les tribuns, représentant le peuple, pour s'opposer à un décret du Sénat romain. Aujourd'hui, le veto est l'un des attributs de l'exécutif dans les régimes présidentiels, tel celui des États-Unis, où le président peut opposer son veto à une loi votée par le Congrès, lequel peut toutefois passer outre en votant l'annulation à la majorité des deux tiers. L'utilisation du veto par le président reflète souvent un désaccord avec un Congrès dont la majorité est de couleur politique différente.

* 9 Lire à ce propos le Préambule de la Charte des Nations Unies.

* 10 VEDRINE, H., « Réflexions sur la réforme de l'ONU », in Pouvoirs n°109, 2004, pp. 4-6.

* 11 TERTRAIS, B., La guerre sans fin : l'Amérique dans l'engrenage, Paris, l'Harmattan, 2004, p. 32.

* 12 TERTRAIS, B., « Vers une réforme du droit de veto au Conseil de Sécurité de l'ONU ? », http://www.jolpres.com//droit, page consultée le 29/09/2014 à 07h 19'.

* 13 EMIE, B. « Le droit de veto à l'ONU », http//www.voltairenet.org, page consultée le 24 juin 2014.

* 14 Une paix dont la mesure est parfois minime et le bénéfice restrictif telle que va tenter de le démontrer la monture de la présente réflexion qui considère la paix et la sécurité internationales comme deux gamètes univitellins d'une même cellule et, partant, indissociables.

* 15 DUPUY, P.-M., Droit International Public, Paris, Presse Ancienne, 1993, p. 42.

* 16 Le costume juridique imputé à la paix qu'est destiné à garantir le droit de veto réside dans sa consécration normative par la Charte des Nations Unies du 26 juin 1945 tel qu'amendé à ce jour.

* 17 COT, J.-P. et PELLET, A., La Charte des Nations Unies (commentaire article par article), Paris, Economica, 1ère Edition, 1985, p. 214.

* 18 CHEMAIN, R., La Charte des Nations Unies, Constitution mondiale ?, Paris, Pedone, 2006, pp. 123-125.

* 19 DE FROUVILLE, O., « Droit de veto à l'ONU : vers l'abolition d'un privilège », http://www.lemonde.fr, page consultée le 15 septembre 2013 à 14h35'.

* 20 Cette position réformiste de la République française a été réaffirmée par le Président François Hollande à la tribune de l'Assemblée générale des Nations Unies au sommet des Chefs d'Etat et de gouvernement en septembre 2014.

* 21 DELDIQUE, P.E., Faut-il supprimer l'ONU ?, Paris, Hachette Littératures, 2003, p. 41.

* 22 LHOMMEAU, G., Le droit international à l'épreuve de la puissance américaine, Paris, L'Harmattan, 2005, pp. 154-163.

* 23 Versant qui tend à préserver une certaine paix internationale mais qui paraît limitée tant elle ne profite pas équitablement à tous les Etats.

* 24 En ce sens que les avantages de la paix et de la sécurité défendues par l'exercice du veto ne profitent, in concreto, dans une large mesure qu'à l'Etat qui en fait usage au Conseil de Sécurité ainsi qu'aux Etats tiers ; l'Etat sur le territoire duquel se déroulent les hostilités demeurant en conflit. Le veto serait ici un outil qui protège moins la paix internationale que les intérêts et la sécurité des Etats titulaires de son droit. C'est une considération que nous entendons développer et élucider dans le cadre du présent mémoire.

* 25 En faisant barrière au recours de la force pour préconiser la voie de négociation, d'enquête, de médiation, de conciliation, d'arbitrage, de règlement judiciaire, de recours aux organismes ou accords régionaux, ou par d'autres moyens pacifiques du choix des protagonistes au conflit, conformément à l'article 33 de la Charte de l'ONU.

* 26 KUHN, Thomas, La structure des révolutions scientifiques, Paris, Connaissances et savoir, 2008, pp 5-6.

* 27 En abolissant naturellement le critère de l'unanimité des voix des cinq membres permanents sur les questions autres que celles de procédure en faveur si non de l'exigence d'un vote affirmatif de neuf membres sur toutes les questions, du moins de l'instauration d'une majorité qualifiée des voies des membres permanents.

* 28 Par opposition à la qualité de membres non permanents, distinction qui parait quelque peu discriminatoire.

* 29 Article 1er, alinéa 1 de la Charte des Nations Unies.

* 30 RAMUNNI, Girolamo, Les lieux des erreurs scientifiques, Le Cavalier Bleu, 2012, pp. 24-26.

* 31 Idem, p. 33.

* 32 DELATTRE, Pierre, Interdisciplinaires, Paris, Encyclopedia Universalis, 2006, p. 43.

* 33 GINGAS, Yves, Les dérives de l'évaluation de la recherche, Paris, Raison d'agir, 2014.

* 34 ESAMBO KANGASHE, J.-L., La Constitution congolaise du 18 février 2006 à l'épreuve du constitutionnalisme. Contraintes pratiques et perspectives, Bruxelles, Bruylant, 2009, pp. 31-32

* 35 BACON, Roger, On expérimental Science, Londres, C. Hurst, 1268, p. 82.

* 36 MWENE BATENDE, G., Les Enquêtes sociologiques et anthropologiques, Kinshasa, Editions MES, 2011, p.19.

* 37 Fondée essentiellement sur les documents écrits, officiels, privés et même chiffrés.

* 38 , NICOLLE, Jean-Marie, Histoire des Méthodes Scientifiques, du théorème de Thalès au clonage, Paris, Breal, 2006, pp. 35-37.

* 39 CIBOIS, P., Les méthodes d'analyse d'enquête, Paris, PUF, 2007, p. 34.

* 40 De nombreux auteurs tels Pierre Marie MARTIN, TRUYOL SERRA, Henry KISSINGER, etc. estiment en effet que l'article 27 de la Charte des Nations Unies, en accordant à cinq Etats le droit de veto au Conseil de Sécurité après que l'article 23 s'était chargé de conférer aux mêmes Etats le statut de membres permanents au dit Conseil, aura largement restreint les droits et libertés des dix autres membres. C'est ce constat qui postule le veto, renchérissent-ils, tel un droit inique.

* 41 Comparaison au Pacte de la Société des Nations de 1919.

* 42 PELLET, A., Art du droit et « science » des relations internationales, Paris, Economica, 1993, p. 353.

* 43 WEIL, P., « Vers une normativité relative du Droit International », in RGDIP, 1982, p. 5.

* 44 Laquelle situation d'impunité garantie par un Etat à un autre peut bien, en étant actualisée, s'appliquer à l'état de protection internationale que les Etats unis d'Amérique assurent à Israël pour lequel ils ne se cachent pas de prendre partie dans le conflit sexagénaire qui l'oppose à la Palestine dont il occupe illégitimement les territoires.

* 45 EMMANUEL ADOUKI, D., Droit international public. Tome 1 : Les sources, Paris, L'Harmattan, 2002, p. 313.

* 46 Coalition des pays opposés aux forces alliées pendant la Seconde Guerre mondiale, composée de l'Allemagne, de l'Italie et de leurs alliés. Cette coalition naquit de l'accord secret signé le 23 octobre 1936, connu sous le nom d'axe Rome-Berlin entre l'Allemagne national-socialiste dirigée par Adolf Hitler et l'Italie fasciste de Benito Mussolini. Une alliance militaire, le pacte d'Acier, fut signée en 1939. La coalition fut élargie avec l'adhésion du Japon, en septembre 1940, lors de la conclusion du pacte tripartite auquel furent incitées à se joindre les petites puissances de l'Europe sud-orientale : la Bulgarie, la Croatie, la Hongrie, la Roumanie et la Slovaquie. De plus, le Danemark, la Finlande, l'Espagne et les gouvernements pro japonais du Mandchoukouo et de Nankin, en Chine, furent intégrés à la coalition en tant que membres du pacte Antikomintern, signé par l'Allemagne et le Japon en 1936. À la fin de l'année 1944, l'Axe se trouva réduit à l'Allemagne et au Japon (avec des gouvernements fantoches au Mandchoukouo et à Nankin) et à quatre États partiellement libérés par l'Armée rouge, les forces anglo-américaines et les résistances intérieures (Hongrie, Croatie, Slovaquie et Italie). L'Axe disparut officiellement avec la ratification par les Alliés de la reddition sans condition de l'Allemagne le 8 mai 1945.

* 47 ROULAND, N., Aux confins du droit, Paris, Odile Jacob, 1991, p. 23.

* 48 TRUYOL SERRA, M., Histoire du droit international public, Paris, PUF, 1996, pp. 23-29.

* 49 Allusion faite aux deux Guerres mondiales dont la fréquence de décimation humaine et les horreurs des persécutions génocidaires cristallisées notamment par la Shoah ou l'Auschwitz en ont fait les plus sombres et suicidaires crises de portée internationale que l'humanité ait connues.

* 50 Respectivement le 4 octobre et le 04 février 2011 ainsi que le 19 juillet 2012.

* 51 Lire utilement à ce sujet CHARVIN, R., « La guerre anglo-américaine contre l'Irak et le droit international », in Actualité et droit international, avril 2003, pp. 16-21.

* 52 http//www.un.org// les-organes-de-l'onu-478357-html, consulté le 30 novembre 2014 à 16h 07'.

* 53 http//www.un.org// les-organes-de-l'onu-478357-html, consulté le 30 novembre 2014 à 16h 07'.

* 54 Idem.

* 55 http//www.un.org// les-organes-de-l'onu-478357-html, consulté le 30 novembre 2014 à 16h 07'.

* 56 http//www.un.org//, les-organes-de-l'onu-478357-html, consulté le 30 novembre 2014 à 16h 07'.

* 57Idem.

* 58 http//www.un.org//les-organes-de-l'onu-478357-html, consulté le 30 novembre 2014 à 16h 07'.

* 59 La Charte des Nations Unies a été approuvée le 25 juin 1945, à la fin de la Conférence des Nations Unies pour l'Organisation internationale, et signée le lendemain. Elle est entrée en vigueur le 24 octobre 1945, après avoir été ratifiée par la majorité de ses signataires. Composée de 111 articles, elle fixe les buts et les principes de l'ONU, énumérés plus particulièrement dans les articles 1 et 2. Le Statut de la Cour internationale de Justice fait partie intégrante de la Charte.

* 60 DELMAS-MARTY, M., « Le droit international en débat, ordre juridique et paix positive », in Le Monde diplomatique, juillet 2003, pp. 4-5.

* 61 GUEHENNO, J-M, « Maintien de la paix : les nouveaux défis pour l'ONU et le Conseil de sécurité », in Politique étrangère, n° du 3 avril 2003, pp. 5-9.

* 62 Lire utilement l'article 1er de la Charte des Nations Unies.

* 63 BANNALIER, CORTEN, CHRISTAKIS et DELCOURT, Le droit international face au terrorisme, Cedin Paris I, Pedone, 2002, pp. 19-23.

* 38 Article 33 de la Charte des Nations Unies.

* 64 Article 39 de la Charte des Nations Unies.

* 65 MOREAU DESFARGES, P., Un monde d'ingérence, Paris, Presse de sciences politiques, 2ème édition, 1997, pp. 43-55.

* 66 Article 52 de la Charte des Nations Unies.

* 67 Article 55 et suivants de la Charte des Nations Unies.

* 68 BEN ACHOUR, R., « L'ONU et l'Irak », in Actualité et droit international, avril 2003.

* 69 MALONE, D., « Le Conseil de Sécurité dans les années 90 : essor et récession », in Politique étrangère, 2/2002, pp. 8-13.

* 70 VAISSE, M., Les relations internationales depuis 1945, Paris, Armand Collin, 9ème édition, 2004, pp. 31-35.

* 71 BERTRAND, M., « L'ONU et la sécurité à l'échelle planétaire », in Politique étrangère, février 2000, pp. 21-25.

* 72 Sans les identifier comme membres permanents et non permanents tel que le fait la Charte de l'ONU.

* 73 Qu'il s'agisse des résolutions, des déclarations, des condamnations ou même des recommandations.

* 74 Le texte du Pacte de la SDN les désignait sous le vocable de « Principales puissances alliées et associées ». Il s'agissait des Etats-Unis d'Amérique, de 1'Empire Britannique, de la France, de 1'Italie et du Japon.

* 75 L'article 23 de la Charte a consacré le passage du nombre de membres du Conseil de sécurité de 11 à 15 à la faveur de l'amendement dont il fit l'objet par l'Assemblée générale le 17 décembre 1963 et lequel entra en vigueur le 31 août 1965.

* 76 La Chine, les Etats-Unis, la France, le Royaume Uni et la Russie.

* 77 MARTIN, P.M., Les échecs du droit international ; Que sais-je ?, Paris, PUF n°3151, 1996, pp. 19-25.

* 78 SUR, S., « Le Conseil de Sécurité : blocage, renouveau et avenir », in Pouvoirs n° 109, 2004, pp.18-25.

* 79 Article 23, alinéa 2 de la Charte des Nations Unies tel qu'amendé par l'Assemblée générale le 17 décembre 1963.

* 80 Article 23, alinéa 1 de la Charte.

* 81 Article 5 in fine du Pacte de la Société des Nations incorporé au Traité de Versailles du 28 juin 1919.

* 82 Lui-même s'étant inspiré des théories philosophiques de  « révolution copernicienne » d'Emmanuel KANT au XVIIIème siècle.

* 83 Lire à ce sujet DUPUY, P.M., Droit international public, Paris, Précis Dalloz, 5ème édition, 2000, p. 66.

* 84 BETTATI, M., « L'usage de la force par l'ONU », in Pouvoirs n° 109, 2004, pp. 21-24.

* 85 Néanmoins, il existe dans la lettre même de la Charte des garde-fous contre l'exercice arbitraire ou abusif du droit de veto telle l'astreinte faite à un membre du Conseil de Sécurité, fût-il permanent, à ne pas prendre part au vote lorsque celui-ci porte sur un différend auquel il est partie.

* 86 VOIGT, K., « Les perspectives du partenariat transatlantique pour l'Allemagne et les Etats-Unis et l'avenir du droit international », in Note du cerfa n° 7, IFRI, décembre 2003, p. 9.

* 87 Qui dura du juillet 1914 au 11 novembre 1918, soit 4ans, 3 mois et 2 semaines.

* 88 Elaboré au cours de la conférence de Paris, le traité de Versailles est un traité de paix signé le 28 juin 1919, dans la galerie des Glaces du château de Versailles et promulgué le 10 janvier 1920. Il annonça la création d'une Société des Nations et détermina les sanctions prises à l'encontre de l'Allemagne et de ses alliés. Celle-ci, qui n'était pas représentée au cours de la conférence, se vit privée de ses colonies et d'une partie de ses droits militaires, amputée de certains territoires et astreinte à de lourdes réparations économiques.

* 89 VOIGT, K., « Les perspectives du partenariat transatlantique pour l'Allemagne et les Etats-Unis et l'avenir du droit international », op.cit., p. 5.

* 90 Ses principaux auteurs et tenants furent Alfred ZIMMERN, David MITRANY, James SHOWTWELL, Gilbert MURRAY et Graham WALLAS.

* 91 Ce courant est dit « idéaliste » d'autant que, eu égard à la real politique internationale, il paraît simplement utopique de fonder la stabilité internationale sur la présomption juris tantum du respect du droit et des valeurs morales par des Etats dont les préceptes juridico-culturelles ne sont pas toujours convergentes et même un peu naïf de croire qu'il suffit qu'un Etat signe ou ratifie un traité international pour qu'il s'y soumette en toutes circonstances de son ordre. Et le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale fut l'illustration de la défaillance de la Société des Nations dans sa mission de préserver la paix dans le monde et, partant, de l'anachronisme de la doctrine idéaliste. Aussi, la théorie réaliste prit-elle le dessus dorénavant.

* 92 Créé en 2002 par Mohamed YUSUF, Boko Haram est un groupe sunnite pour la prédication et le djihad. De sa dénomination abrégée en haoussa, Boko Haram peut être traduit par « l'éducation occidentale est un péché », le mot « Boko » étant une déformation de book, « livre » en anglais et « Haram » signifiant « interdit » ou « illicite ». L'éducation occidentale serait ainsi contraire aux prescrits du prophète d'Allah. C'est pourquoi les actions de Boko Haram s'en prennent principalement aux intérêts, aux ressortissants occidentaux et aux symboles de la civilisation occidentale au Nigéria, au Cameroun, au Niger et au Tchad. Classé comme organisation terroriste par le Conseil de Sécurité des Nations Unies et parfois qualifié de secte, le groupe est un mouvement salafiste djihadiste du Nord du Nigéria ayant pour objectif d'appliquer la charia dans l'ensemble du pays et d'y instaurer un califat. Ayant fait allégeance à l'Etat islamique en 2015, le groupe, dirigé par Aboubacar SHEKAU, est aujourd'hui confronté à une coalition des forces camerounaises, nigériennes et tchadiennes aux côté de l'armée nigériane qui vise son éradication. Ses exactions ont occasionné plus de 15000 morts au Nord du Nigéria.

* 93 Désigné parfois par son acronyme arabe Daech ou Daesh, l'Etat islamique est une organisation armée salafiste djihadiste, d'obédience sunnite, fondée le 13 octobre 2006 par le Conseil consultatif des Moudjahidines en Irak sous l'empire idéologique du salafisme djihadiste, du panislamisme, de l'antichiisme et de l'antioccidentalisme. Dans l'ordre de ses objectifs figurent l'établissement d'un califat dans le monde musulman et l'instauration de la charia. Ses actions portent principalement sur la lutte armée, la guérilla, son mode opératoire demeure les attentat-suicides et les prises d'otages et ses sources de financement sont la vente de ciment, l'exploitation agricole, le pillage de banques, les rançons et les donations privées. Initialement lié à Al-Qaïda, il s'en est progressivement franchi, pour s'en séparer tout à fait en 2013. L'essor de cette organisation a été favorisé par les déstabilisations géopolitiques dues à la guerre irakienne puis celle syrienne. Elle y demeure d'ailleurs la force négative majeure. Et depuis août 2014, une coalition internationale de 22 pays intervient contre cette organisation.

* 94 BADIE, B., La pratique du droit international entre éthique et volonté de puissance, Paris, Fayard, 2002, pp. 43-49.

* 95 L'adoption d'une telle résolution demeure bloquée par le veto sino-russe au Conseil de Sécurité.

* 96 Principalement les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU.

* 97 Que nous considérons telle une paix « d'exclusion ».

* 98 Lequel périmètre peut être situé dans le territoire d'un Etat ou se trouver à cheval sur l'espace de deux ou plusieurs Etats, auquel cas le conflit en présence revêtirait, au sens des Nations Unies, la qualification de « conflit international ».

* 99 Il serait à ce stade faux d'affirmer que l'usage du veto aura assuré la «  paix internationale »dans la mesure où l'Etat constituant le théâtre du conflit n'en sera pas moins délié, seuls les Etats tiers se verraient exemptés d'en subir l'extension, la paix internationale présumant la cessation du conflit, mieux l'absence de la guerre sur l'ensemble des territoires de tous les Etats.

* 100 Requérant la majorité simple, absolue ou qualifiée, selon le cas, non l'unanimité, dans la prise des décisions.

* 101 De VISSCHER, C., Théories et réalités, Paris, Vème édition, Pedone, 1970, pp. 26-30.

* 102 De FROUVILLE, O., « Droit de veto : vers l'abolition d'un privilège », http//www.un.org/french, page consultée le 24 septembre 2014 à 14h35'.

* 103 MITTERAND, F., Réflexions sur la politique extérieure de la France, Paris, Fayard, 1986, pp. 216-220.

* 104 A vrai dire, l'un des effets factuels de ce droit est de servir à l'imposition du dictat et de la prédation des puissances mondiales qui le possèdent sur le cours de la vie internationale.

* 105 Reposant notamment sur la règle de la majorité (simple, absolue ou qualifiée selon le cas) qui est l'antithèse de l'unanimité posée par le droit de veto pour l'adoption des décisions qu'il vise.

* 106 Ces projets furent présentés au Conseil de sécurité par les Etats-Unis soutenus par la France et la Grande Bretagne, respectivement le 04 février, le 04 octobre 2011 et le 19 juillet 2012.

* 107 Développée par Hans MORGENTHAV en 1948, la théorie réaliste est l'un des courants qui organisent les relations internationales. Opposé au courant idéaliste qui fonde la paix et l'ordre internationaux sur la croyance, trop facile pour être toujours appliquée par les Etats aujourd'hui, au respect des règles de droit et des valeurs morales, le courant réaliste soutient que la stabilité internationale repose essentiellement sur l'équilibre des forces qui vise la défense de l'intérêt national et de la puissance étatique sur l'échiquier mondial.

* 108 GOLUB, P., « Les dynamiques du désordre mondial, tentation impériale », in Le Monde diplomatique, octobre 2002, pp. 8-9.

* 109 DJIENA WEMBOU, M.-C., Le droit international dans un monde en mutation, Paris, L'Harmattan, 2003, p. 61.

* 110 Il s'agit d'une opération menée à titre privé par les Américains et les Britanniques, sans l'aval des autres membres du Conseil de Sécurité qui annoncèrent à l'avance d'opposer leur veto à une telle initiative jugée non fondée et arbitraire.

* 111 Considéré par Georges W. BUSH comme faisant partie, avec l'Iran et la Corée du Nord, de « L'axe du mal ».

* 112 En effet, cette intervention aura délibérément fait fi des principes sacro-saints de non ingérence dans les affaires internes des Etats, d'égalité souveraine des Etats et de non recours à la force contre un autre Etat, conformément au Pacte Briand-Kellogg du 27 août 1928, sous réserve des mesures de sécurité collective circonscrites aux articles 39 à 42 de la Charte. Le pacte Briand-Kellogg est aussi appelé pacte de Paris, et plus officiellement pacte de renonciation générale à la guerre. Il renvoie au traité multilatéral signé à Paris le 27 août 1928 par quinze nations, puis ratifié par soixante-trois pays. Le pacte était patronné par le ministre des Affaires étrangères français Aristide Briand et par le secrétaire d'État américain Frank B. Kellogg.

* 113 NGUYEN ROUALT, F., « L'intervention armée en Irak et son occupation au regard du droit international », in RGDIP, 2003, p. 4.

* 114 NOVOSSELOFF, A., « L'ONU après la crise irakienne », in Politique étrangère, mars-avril 2003, pp. 5-8.

* 115 BERTRAND, M., « L'ONU et la sécurité à l'échelle planétaire », op.cit., p. 9.

* 116 CARREAU, D., Droit international, Paris, Pedone, , 1988, p.464.

* 117 De VISSCHER, C., Théories et réalités en droit international public, Paris, Pedone, 1985, pp. 56-43.

* 118 Article 24, alinéa 1 de la Charte des Nations Unies.

* 119 Idem.

* 120 LHOMMEAU, G., Le droit international à l'épreuve de la puissance américaine, op.cit., pp. 195-197.

* 121 KISSINGER, H., La nouvelle puissance américaine, Paris, Fayard, 2003, p. 34.

* 122 John KERRY fit cette déclaration le 14 mars 2015, suscitant un tollé général de plusieurs pays occidentaux dont la France et la Grande Bretagne.

* 123 KISSINGER, H., op.cit., p. 43.

* 124 BISTELA, M., Théories des relations internationales, Paris, Ed. Science politique, 1995, pp 43-50.

* 125 Les thèses du courant réaliste-traditionnaliste relatives à la compréhension de la prise de décisions en relations internationales s'opposent à celles du courant scientifique. Celui-ci focalise l'éventail de ses pistes explicatives des décisions en politique étrangère sur la rationalité, l'environnement sociologique, le schème cognitif, la configuration de l'institution gouvernementale et tant d'autres facteurs intuitu personae du décideur.

* 126 BARRIA, J., Théories des relations internationales, Paris, Editions Science politique, 2002, pp. 17-21.

* 127 BARRIA, J., Théories des relations internationales, op.cit., pp. 17-21.

* 128 Idem.

* 129 EISEMANN, P.M., « Attaques du 11 septembre et exercice d'un droit naturel de légitime défense » in Actualité et droit international, janvier 2002, pp. 239/248.

* 130 BANNALIER, K., CORTEN, O., CHRISTAKIS, T., DELCOURT, B., Le droit international face au terrorisme, Cedin Paris I, cahiers internationaux n°17, Pedone, 2002, pp. 45-52.

* 131 LHOMMEAU, G., Le droit international à l'épreuve de la puissance américaine, op.cit., p. 73.

* 132 Article 2, paragraphe 4 de la Charte des Nations Unies.

* 133 Article 51 de la Charte des Nations Unies.

* 134 Le 11 septembre 2001, deux avions civils détournés percutent chacun des deux plus haut gratte-ciel de l'île de Manhattan (à New York), les tours jumelles (Twin Towers) du World Trade Center. Affaiblie par la violence de l'impact et par la propagation du feu, la tour Sud s'effondre 56 minutes après la collision, emportant avec elle ses occupants ; la tour Nord résiste 1 h 42' avant de s'effondrer elle aussi. Au total, près de 3 000 personnes (employés, visiteurs, secouristes et passagers des vols) disparaissent avec les tours jumelles du World Trade Center.

* 135 L'offensive militaire contre l'Irak, ayant été motivée par la thèse d'une guerre préventive, reste incompatible avec tout argument valable d'une riposte dans le cadre de la légitime défense.

* 136 DUPUY, P.M., « 40 ans de codification de droit de la responsabilité internationale des Etats, un bilan », in RGDIP, 2003-2, pp. 7-8.

* 137 L'unilatéralisme en droit international se caractérise par un mépris du droit et des institutions internationales et se fonde sur le primat du droit interne sur le droit international dont le triomphe représente le multilatéralisme.

* 138 GREENPEACE, « Le droit international et la guerre contre l'Irak », http://greenpeace.org//, le 20 avril 2003 à 08h 10'.

* 139 KISSINGER, H., La nouvelle puissance américaine, op.cit., pp. 45-48.

* 140 C'est-à-dire en application des dispositions du Chapitre VII de la Charte.

* 141 LAGHMANI, S., « Du droit international au droit impérial ? Réflexions sur la guerre contre l'Irak », in Actualité et droit international, avril 2003, p. 6.

* 142 http://www.un.org//utilisation-du-veto-à-l'onu-879052-html, page consultée le 30 novembre 2014 à 16h 07'.

* 143 http://www.globalpolicy.org//le-droit-de-veto-au-conseil-de-sécurité-de-l'onu-246477,html, page consultée le 23 octobre 2014 à 19h 45'.

* 144 De VISSCHER, C., Théories et réalités en droit international public, op.cit., pp. 54-56.

* 145 The Washington Post, « Où mène le mépris des lois internationales », in Courrier international n° 705, du 6 au 12 mai 2004, p. 24.

* 146 En arabe, « parti de Dieu », le Hezbollah est un parti politique chiite libanais et groupe militaire prônant l'établissement d'une république islamique au Liban. Le Hezbollah est désigné comme un mouvement terroriste par de nombreux pays occidentaux. Fidèle à Bachar al-ASSAD, le Hezbollah s'est engagé dans la guerre en Syrie officiellement pour protéger la frontière libanaise et les lieux saints chiites menacés de destruction par el Daech, sunnite. Ainsi, a-t-il augmenté le nombre de ses combattants en Syrie, passant de 5000 à 8000 de mars à juin 2015.

* 147 Ce cliché démontre éloquemment la divergence des intérêts et la rivalité tacite entre le bloc occidental américano-franco-britannique capitaliste et celui oriental sino-russe d'idéologie communiste, quoique présumés poursuivant les mêmes finalités en vertu de la qualité de membres permanents du Conseil de Sécurité qu'ils ont en commun.

* 148 http://www.m.nouvelobs.com//la-syrie-face-au-djihadisme-433356.html, page consultée le 2 janvier 2015.

* 149 http://www.lexpress.fr/.../la-syrie-en-guerre-989289.html, page consultée le 6 juin 2015 à 21h 32'.

* 150 Regroupés au sein du Front al-Nosra, branche officielle d'Al-Qaïda en Syrie et de l'Etat islamique en Irak et au Levan (EIIL). Ce dernier contrôle, depuis le 27 mai 2015 et la prise de la ville de Palmyre, près de 50% du territoire syrien.

* 151 L'ASL que les partisans d'une intervention militaire onusienne en Syrie considèrent comme interlocuteur crédible incarnant la légitimité du peuple syrien.

* 152 La révolution orange renvoie à une série de manifestations politiques ayant eu lieu en Ukraine à la suite de la proclamation le 21 novembre 2004 du résultat du deuxième tour de l'élection présidentielle, que de nombreux Ukrainiens perçoivent comme truqué par le gouvernement de Viktor IANOUKOVYTCH et par le puissant clan de Donetsk, dont l'oligarque Rinat AKHMETOV, pro-russes. Le résultat immédiat de la Révolution orange fut l'annulation par la Cour suprême du scrutin et l'organisation d'un nouveau vote le 26 décembre 2004 qui vit la victoire de Viktor IOUCHTCHENKO, qui réunit 52% des voix contre 44% pour son rival Viktor IANOUKOVYTCH ; sa présidence fut cependant entachée de crises politiques multiples avec les gouvernements successifs. D'un point de vue géopolitique, la Révolution orange aura marqué un rapprochement de l'Ukraine avec l'OTAN et avec l'Union européenne, aux dépens bien entendu de la Russie.

* 153 FESSENKO, V., « La Russie tente d'empêcher les noces entre l'Ukraine et l'UE », http:///www.viepublique.net, page consultée le 7 avril 2014 à 10h 17'.

* 154 FREMONT, Anne-Laure, « Conflit ukrainien : ces petites phrases aux relents de guerre froide », http://www.mondediplomatique.fr, page consultée le 6 août 2014 à 15h 32'.

* 155 Ce qui ne servirait pas comme il se doit les intérêts de la Russie en Ukraine et même dans la région de l'ancienne union soviétique qui prendrait une allure de rapprochement avec l'Occident.

* 156 Pourtant, ce principe n'est plus absolu ; il se trouve tempéré aujourd'hui par le droit et le devoir d'ingérence humanitaire en cas de violation massive des droits de l'homme. Créé en 1979 par le Philosophe Jean-François REVEL, le terme « droit d'ingérence » se veut la reconnaissance qu'ont une ou plusieurs nations de violer la souveraineté nationale d'un autre Etat, dans le cadre d'un mandat accordé par l'autorité supranationale. Dans la pratique, au nom de l'urgence humanitaire, il n'est pas rare que le mandat soit fourni rétroactivement. Le devoir d'ingérence, pour sa part, est l'obligation qui est faite à tout Etat de veiller à faire respecter le droit humanitaire international. Refusant ainsi aux Etats membres de l'ONU tout « droit à l'indifférence », cette obligation n'ouvre toutefois aucun droit à l'action de force unilatérale. Elle doit plutôt être comprise comme une obligation de vigilance et d'alerte à l'encontre de telle ou telle exaction qu'un gouvernement serait amené à connaître.

* 157 Nous faisons notamment allusion à la tragédie du 17 juillet 2104 qui vit un avion de ligne malaisien, le Boeing MH17 de la Malaysia Airlines, s'écraser dans l'Est de l'Ukraine, près de la frontière russe, dans une région théâtre de violents combats entre l'armée ukrainienne et les séparatistes prorusses depuis plusieurs mois. L'hypothèse la plus probante et probable est que l'appareil de Malaysia Airlines, qui assurait la liaison entre Amsterdam et Kuala Lumpur sur le vol MH17 et transportait 298 personnes à son bord, dont 283 passagers et 15 membres de l'équipage, tous morts, a été abattu par un missile sol-air. On compte parmi les victimes 193 Néerlandais, 43 Malaisiens, 27 Australiens, 12 Indonésiens, 10 Britanniques, 4 Belges, 4 Allemands, 3 Philippins, 1 Canadien et 1 Néozélandais ; multitude de nationalités qui traduit le caractère international du drame causé par un conflit armé aux tentacules tout aussi internationaux.

* 158 En tant que règles de droit, ces normes sont contraignantes en ce sens qu'elles sont assorties de sanctions en cas de non respect. Toutefois, l'applicabilité de toute sanction véritablement répressive à l'encontre d'un Etat reste encore un mur que le droit international doit escalader pour atteindre la cime de sa réalisation. Le défaut d'indépendance totale des instances judiciaires ``internationales'', censées assurer l'application et l'exécution de ces sanctions, vis-à-vis des Etats puissants et l'impossible mise en oeuvre des règles de la responsabilité internationale des Etats restent de principales causes de ce hiatus.

* 159 BARRIA, J., Théories des relations internationales, op.cit., pp. 23--27.

* 160 1989 demeure une année de mutations profondes de la donne du droit international et des relations internationales. 1989 marque, en effet, la chute du mur de Berlin et du rideau de fer qui symbolisaient la Guerre froide, chute qui fut autant le prélude à l'effondrement du communisme en Europe de l'Est et en Union soviétique - dont les Républiques proclamèrent, dès 1991, les unes après les autres leurs indépendances au point de disloquer l'URSS - que le présage de l'instauration d'un système international unipolaire qui consacre, aujourd'hui encore, le règne de l'Occident parrainé par les Etats-Unis d'Amérique. C'est pour ainsi dire en vertu de sa position historique à mi-chemin des événements qui auront assurément bouleversé le paysage international et conduit à sa configuration actuelle que nous avons choisi l'année 1989 comme point de départ de l'énumération qui suit.

* 161 Pour voir en entièreté la liste de tous les vetos utilisés de 1946 à ce jour, voir http://www.un.org//liste-de-tous-les-vetos-au-conseil-de-sécurité-831614-html, page consultée le 12 décembre 2014 à 13h 46'.

* 162 L'expression « communauté internationale » ou mondiale parait, à en croire le Professeur José BARUANI SALEH, mieux porter l'idée d'un faisceau commun d'objectifs et d'intérêts dictant le système des relations interétatiques au sein d'organisations internationales que celle de « société internationale » qu'il trouve descriptive d'un cadre où, dispersés, rivalisent des intérêts concurrents, antinomiques.

* 163 LHOMMEAU, G., Le droit international à l'épreuve de la puissance américaine, op. cit., p. 194.

* 164 LAGHMANI, S., « Faut-il rire du droit international ou le pleurer ? » in Actualité et droit international, février 2003, pp. 7-9.

* 165 De LAROCQUE, S., « Le droit de veto au Conseil de Sécurité : vers la fin d'un privilège ? », http://www.mondediplomatique.fr//, page consultée le 29-09-2014 à 16h 43'.

* 166 LAGHMANI, S., « Faut-il rire du droit international ou le pleurer ? », op.cit., p. 5.

* 167 Il s'agit de l'offensive militaire israélienne sur la bande de Gaza, déclenchée le 08 juillet 2014, dans la foulée de l'opération « bordure protectrice »168, entrainant plus de 1500 victimes palestiniennes et faisant périr 32 militaires Israéliens, ayant réduit en ruine l'essentiel du patrimoine infrastructurel gazaouis sans épargner des zones humanitaires dont une école de l'ONU et trois mosquées qui servaient d'abris aux populations civiles palestiniennes et poursuivant ses frappes même en période déclarée de « trêve humanitaire ».

* 169 TERTRAIS, B., « Vers une réforme du droit de veto au Conseil de Sécurité de l'ONU ? », http://www.jolpres.com//droit, page consultée le 29/09/2014 à 07h 19'.

* 170 DUPUY, R., J., La communauté internationale entre le mythe et l'histoire, Paris, Econumica, 1986, p. 16.

* 171 DJIENA WEMBOU, M.-C., Le droit international dans un monde en mutation, op.cit., pp. 34-36.

* 172 BENCHIKH, CHARVIN et DEMICHEL, Introduction critique au droit international, Lyon, Presses universitaires de Lyon, 1996, p.20.

* 173 EMIE, B. « Le droit de veto à l'ONU », http://www.voltairenet.org, page consultée le 24 juin 2014 à 09h 23'.

* 174 L'exemple le plus récent est le cas survenu le 22 mai dernier, où la résolution portée par la France pour autoriser la Cour pénale internationale à se saisir de la situation en Syrie s'est heurtée aux vetos de la Russie et de la Chine, en dépit du soutien public de 65 États, de 100 organisations non gouvernementales et du vote favorable des 13 autres membres du Conseil de Sécurité des Nations Unies.

* 175 ALBALA, N., « Maudit droit de veto », http://wwwmonde-diplomatique.fr, page consultée le 10 février 2015 à 18h 44'.

* 176 DELMAS-MARTY, M., « Du désordre mondial à la force du droit international », in Actualité et droit international, avril 2003, p. 8.

* 177 LHOMMEAU, G., Le droit international à l'épreuve de la puissance américaine, op.cit., p. 191.

* 178 BOUTROS GHALI, B., « Peut-on réformer les Nations Unies ? », in Pouvoirs 109, 2004, p 7.

* 179 Composé de la Grande-Bretagne et de l'Irlande du Nord.

* 180 Considération qui mérite d'être nuancée dans ses conséquences dans la mesure où chaque agit surtout en fonction de ses intérêts propres et qu'il existe de multiples divisions au sein même de l'UE.

* 181 SUR, S., « Le Conseil de Sécurité : blocage, renouveau et avenir », op.cit., p. 6.

* 182 RAMONET, I., « Nouvel ordre », in Le Monde diplomatique, n°444, mars 1991, p.1.

* 183 VIRALLY, M., « Panorama du droit international contemporain », in RCADI, 1995, p. 32.

* 184 Comme le démontrent pertinemment Pierre SALINGER et Eric LAURENT dans leur ouvrage, Guerre du golfe, le dossier secret, Paris, Olivier Orban, 1991, les véritables buts de guerre des Etats-Unis avaient été décidés au cours d'une réunion tenue à la Situation Room à la Maison Blanche.

* 185 FALK, R., « Les Nations-Unies sous la coupe de Washington », in Le Monde diplomatique, février 1991, p. 3.

* 186 C'est ainsi que furent baptisés les bombardements aériens de cibles militaires en Irak et au Koweït déclenchés par la coalition multinationale dans les 24 heures suivant l'expiration de l'ultimatum des Nations unies.

* 187 International Herald, 17 janvier 1991.

* 188 New York Times, 20 janvier 1991.

* 189 Voir le Monde diplomatique, n°443, février 1991, p. 1.

* 190 FRIEDMAN, T.L., « When War is Over: Planning and US Rote in Enforcing it » in International Hreald Tribune, 21 janvier 1991.

* 191 Voir la déclaration de M. Dick CHENEY, citée par le Monde diplomatique, 6 février 1991.

* 192 RAMONET, I., « Nouvel ordre », op.cit., p. 1.

* 193 Voir l'interview de l'Amiral SANGUINETTI parue dans le Monde diplomatique, n°444, mars 1991, p. 7.

* 194 A la faveur du droit d'ingérence humanitaire.

* 195 IYAKAREMYE, J.-B., La faillite de l'ONU devant le génocide des Tustsi du Rwanda : Des causes de l'échec et des leçons à en tirer, Paris, L'Harmattan, 2001, p. 5-7.

* 196 Elle fut mise en place au soir de l'année 1993 afin de veiller à l'application des Accords d'Arusha entre les exilés du Front Patriotique Rwandais et le gouvernement rwandais afin d'aboutir à terme à un cessez-le-feu, puis à une série de dispositions politiques et militaires pour intégrer dans la société rwandaise les exilés de la diaspora rwandaise et conduire au départ des troupes françaises à partir d'août 1992. N'ayant pas intégré l'aile dure de l'opposition aux négociations de paix, ces Accords n'améliorèrent point la situation sur le terrain.

* 197 IYAKAREMYE, J.-B., La faillite de l'ONU devant le génocide des Tustsi du Rwanda : Des causes de l'échec et des leçons à en tirer, Idem loco.

* 198 Il s'agit de l'attentat perpétré contre le Président du Rwanda, Juvénal HABYARIMANA. Cet attentat s'est soldé par la mort de celui-ci, ainsi que de toutes les personnes qui ont pris place dans l'avion, dont le Président du Burundi, Cyprien NTARYAMIRA. Cet attentat marque la première phase d'un coup d'Etat qui déclenche le massacre des partisans des accords d'Arusha et le génocide des Tutsi.

* 199 De juin 1992 à 1993.

* 200 C'est ce que déclara Ban Ki-moon, lundi 7 avril 2014 à Kigali, lors du lancement des cérémonies officielles de commémoration du génocide.

* 201 DJIENA WEMBOU, M.-C., Le droit international dans un monde en mutation, op.cit., p. 177-189.

* 202 Idem loco.

* 203 CAUBET, C., « Dans les méandres des officines onusiennes », http//www.monde-diplomatique.fr//, page consultée le 2 décembre 2014 à 15h 32'.

* 204 SICILIANOS, L-A., « L'autorisation par le Conseil de Sécurité de recourir à la force : une tentative d'évaluation », in RGDIP, 2002-1, pp. 5-9.

* 205 PERLE, R., « La chute de l'ONU », in Le Figaro, le 11 avril 2003.

* 206 VEDRINE, H., « Réflexions sur la réforme de l'ONU », op.cit., p.3.

* 207 SUR, S., « Le Conseil de Sécurité : blocage, renouveau et avenir », in Pouvoirs n°109, op. cit., pp.7-8.

* 208 C'est-à-dire les cinq membres permanents du Conseil de Sécurité de l'ONU plus l'Allemagne.

* 209 Mené par le Président Petro POROCHENKO et soutenu par les Américains et les Etats membres de l'Union européenne dont l'Allemagne est aujourd'hui la colonne vertébrale.

* 210 Bénéficiant du financement et de l'armement en provenance du régime de Moscou.

* 211 BRICS étant la combinaison des initiales du Brésil, de la Russie, de l'Inde, de la Chine et de l'Afrique du Sud. Ces pays amassent 20% du PIB mondial et contrôlent 43% des réserves mondiales.

* 212 LHOMMEAU, G., Le droit international à l'épreuve de la puissance américaine, op. cit., p. 205.

* 213 L'amendement de la Charte de l'ONU adopté par l'Assemblée générale le 17 décembre 1963 et entré en vigueur le 31 août 1965 porte de onze à quinze le nombre des membres du Conseil de Sécurité. En fait, il s'agit du nombre de membres non-permanents qui est passé, à la suite de cet amendement, de six à dix. Celui des membres permanents étant resté à cinq.

* 214 TERTRAIS, B., « Vers une réforme du droit de veto au Conseil de Sécurité de l'ONU ? », op.cit., page consultée le 29/09/2014 à 07h19'.

* 215 TERTRAIS, B., « Vers une réforme du droit de veto au Conseil de Sécurité de l'ONU ? », op.cit., page consultée le 29/09/2014 à 07h19'.

* 216 EMIE, B., « Le droit de veto à l'ONU », op.cit., page consultée le 24 juin à 09h 23'.

* 217 ANNAN, K., « Il faut limiter le droit de veto des cinq membres permanents au Conseil de Sécurité de l'ONU », http://www.voxmonde.com//, page consultée le 09 février 2015 à 18h 26'.

* 218 CHEMILLIER-GEANDREAU, M., « Pour une organisation de la communauté mondiale », http://www.monde-diplomatique.fr//, page consultée le 13 octobre 2014 à 08h 07'.

* 219 VIRALLY, M., « Panorama du droit international contemporain », op.cit, p. 29.

* 220 Idem.

* 221 De LACHARRIERE, Guy, La politique juridique extérieure, Pedone, Paris, 1983, pp. 13-16.

* 222 CASSESE, A., Le droit international dans un monde divisé, Paris, Economica, 1995, pp. 17-52.

* 223 DJOLI ESENG'EKELI, J., Droit constitutionnel. Tome 1. Principes structuraux, Kinshasa, E.U.A., 2010, p.264.

* 224 http://www.aceproject.org//le-vote-à-la-majorité-qualifiée-694268-html, page consultée le 17 mars 2015 à 15h43'.

* 225 GUEGEN HEIM, P., Traité de droit international public, Tome 1, 2ème édition, Genève, 1967, p.1.

* 226 Les Etats-Unis sont l'un des plus grands massacreurs du droit international : leurs interventions militaires en Afghanistan et en Irak - en violation du principe de non recours à la force, mais au nom et à la faveur d'une interprétation extensive de l'exception pour cause de légitime défense qui pourtant suppose une attaque armée préalable à laquelle elle riposte - sont là pour le démontrer.

* 227 LHOMMEAU, G., Le droit international à l'épreuve de la puissance américaine, op. cit., p. 216.

* 228 BOUTROS GHALI, B., Peut-on réformer les Nations Unies ?, op.cit., pp. 5-13.

* 229 Dont font partie la France et la Grande Bretagne, tous deux membres permanents du Conseil de Sécurité.

* 230 VOIGT, K., « Les dispositifs juridiques d'action des organes de l'ONU et les contraintes de l'heure », in Note du cerfa n°9, IFRI, 2004.

* 231 FAVOREU, L., La politique saisie par le droit, Paris, Economica, 1988, p. 123.

* 232 http://www.droitinternational.org//le-droit-de-la-sécurité-à-l'onu-436785-html, page consultée le 30 mars 2015 à 10h54'.

* 233 ANNAN, K., Il faut limiter le droit de veto des cinq membres permanents au Conseil de sécurité de l'ONU, op.cit.

* 234 ETIEN, R., Initiation au droit public, Paris, Ellipses, 1998, pp.20-26.

* 235 Qui se disputent la suprématie culturelle, politique, militaire, technologique et même philosophique et pour avoir gain de cause, ils recourent à l'usage, parfois abusif, de tous les instruments de droit dont ils disposent, y compris le droit de veto.






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