§3 Le modèle d'Israel (1991)
L'approche d'Israel (1991) cité par Harris et Raviv
(1991) est similaire à celle de Stulz (1988) . L'augmentation du
taux d'endettement accroît les gains potentiels pour les actionnaires de
la cible, mais réduit la probabilité d'OPA . La raison qui fait
que l'augmentation du taux d'endettement accroît les gains
anticipés pour les actionnaires de la cible est différente de
celle évoquée par Stulz . Israel observe qu'il y a une part des
gains issus du rachat (fixée contractuellement ) qui revient aux
créanciers. Le management de la cible et l'acquéreur
négocient seulement la fraction des gains qui ne revient pas aux
créanciers. La plus grosse partie des gains revient aux
créanciers, les actionnaires de la cible et de l'acheteur se partagent
le reste. Ceux qui récupèrent la plus petite partie des gains
issus du rachat sont les actionnaires de l'acheteur.
Cependant, les actionnaires de la cible ont la
possibilité de s'approprier les gains revenant aux créanciers de
la cible lorsque l'emprunt est contracté. Ainsi, ils s'approprient tous
les gains qui ne vont pas aux actionnaires de l'acheteur. Puisque la dette
réduit les gains des actionnaires de l'offreur, les gains des
actionnaires de la cible augmentent avec le taux d'endettement (si le rachat a
lieu). Le taux d'endettement optimal est déterminé par
l'équilibre entre cet effet et la réduction de la
probabilité d'OPA résultant du fait que plus la cible est
endettée plus la part des gains qui revient aux actionnaires de
l'acheteur est faible.
Le modèle d'Israel peut être résumé
comme suit : on suppose qu'un rachat peut générer un gain
total G (augmentation de la valeur de la firme) mais qu'il correspond
à un coût T . Supposons que la firme a contracté un
emprunt d'un montant D ; dans l'hypothèse d'un rachat la valeur de
cette dette augmente de (D ,G). Si le rachat a lieu, l'acquéreur et
les actionnaires de la cible peuvent se partager le gain net restant GT .
Supposons que les actionnaires de la cible obtiennent une part 1 de ce gain net
et que les actionnaires de l'acheteur obtiennent le reste ( peut être
perçu comme une mesure du pouvoir de négociation de l'acheteur).
Ainsi un rachat aura lieu si et seulement si :
(G T) 0 ou G
(D ,G) T
La probabilité d'un rachat correspond à la
probabilité de réalisation des conditions ci dessus, elle est
notée ( D,T ). En plus, quand les obligations sont émises les
actionnaires de la cible capturent aussi les gains attendus par les
détenteurs d'obligations .
Par conséquent, les gains totaux attendus par les
actionnaires de la cible sont :
Y (D) = E [{(1 [G(D,G)T] + (D,G)} G (D,G) T] (D,T)
=E[{(1) [GT] + (D,G)} G( D,G) T] (D,T)
Comme on peut le voir grâce à cette
dernière expression, les actionnaires de la cible s'approprient une
fraction 1 du total des gains nets issus du rachat plus une fraction des gains
des créanciers de la cible. Le niveau d'endettement optimal est obtenu
en maximisant Y(D). Cela implique que les gains supplémentaires faits
aux dépens des actionnaires de l'acheteur compensent la diminution de la
probabilité pour que le rachat ait lieu.
Israel obtient plusieurs résultats de statique
comparative intéressants :
Premièrement : Si le coût
d'organisation d'une OPA augmente, cela se traduit par une diminution du taux
d'endettement de la cible et par une augmentation de la valeur des actions de
la cible si un rachat a lieu .
Deuxièmement : Si la
répartition des gains potentiels change, le taux d'endettement de la
cible augmente. Un tel changement peut résulter d'une diminution de la
compétence du management en place.
Troisièmement : Plus le pouvoir
de négociation du rival augmente plus le taux d'endettement optimal
augmente. La probabilité de rachat et les gains pour les actionnaires de
la cible (en cas de rachat) diminuent avec le pouvoir de négociation du
rival .
En définitive, on constate que les trois modèles
concluent que les cibles augmenteront leur taux d'endettement en moyenne et que
cela sera accueilli favorablement par les marchés financiers.
Les trois papiers trouvent qu'en moyenne, plus le taux
d'endettement est élevé plus la probabilité de
succès de l'OPA diminue .
Concernant la relation entre la prime versée aux
actionnaires de la cible et le taux d'endettement, Stulz et Israel obtiennent
des résultats opposés.
Chez Stulz, la prime payée aux actionnaires de la cible
augmente avec le taux d'endettement de la cible . Chez Israel, lorsque le
pouvoir de négociation des actionnaires de la cible diminue, le taux
d'endettement optimal de la cible augmente et la fraction des gains issus du
rachat qui revient aux actionnaires de la cible diminue.
Israel montre que les cibles qui sont les plus coûteuses
à racheter sont moins endettées mais que leurs actionnaires
s'approprient une plus grande partie des gains si le rachat a lieu .
Israel prédit aussi que les firmes dont le rachat est susceptible de
procurer des gains importants seront plus endettées .
Les théories que nous venons d'étudier dans
cette section doivent être vues comme des théories traitant de
changements à court terme dans la structure du capital de l'entreprise,
initiés en réponse à une menace de rachat imminente .
Ainsi la structure du capital optimale
préconisée dans ces modèles doit être
considérée comme une réponse à la menace
d'OPA . Ces théories n'ont rien à voir avec la structure
à long terme du capital des firmes.
Venons en maintenant aux différents paiements
défensifs et à leurs conséquences .
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