Histoire de la production du coton dans les cercles de la moyenne vallée du fleuve Sénégal de 1920à 1960.( Télécharger le fichier original )par Insa BA Université Cheikh Anta DIOP - Master 2 2014 |
Chapitre II : La crise agricole : 1931à 1934Les Etats Unis, ayant profité de la guerre, sont dans une période de grande prospérité économique .Dans le même temps, l'Europe entame sa reconstruction .L'euphorie économique entraine rapidement une crise de surproduction, qui entraine la saturation des marchés débouchant sur une crise boursière aux Etas Unis .Celle-ci se propage rapidement en Europe et dans le reste du monde avec des conséquences sur le plan économique et social. A partir de 1930, l'Afrique Noire enregistra un net recul de sa production agricole . Il en résulta de la dépression qui n'avait épargné aucun secteur de l'économie occidentale. II.1 : La genèse de la criseDurant la première moitié du XXe siècle, l'économie de l'Occident fut marquée par le développement de la production industrielle, l'accroissement des échanges commerciaux et l'imbrication des systèmes monétaires et bancaires. Ces mutations donnaient un nouvel aspect à la crise économique .En effet, liée à la surproduction industrielle, elle devenait plus longue et plus grave. Ce fut le cas en 1929. La crise débuta par un Krach149(*) sans précédent à la bourse des valeurs de New York qui provoqua la dépréciation des valeurs et la ruine des banques .Le marasme économique , monétaire et financier s'installa aux Etat Unis d'Amérique qui représentaient un impressionnant poids économique dans le monde avec une production industrielle estimée à 45%.Il se transforma en une crise internationale : « Au congrès des filateurs et des planteurs tenu à Atlanta(Géorgie),les planteurs des Etats du Sud qui forment l'élément prédominant de la production américaine firent connaitre aux industriels leur décision de se regrouper et de ne livrer le coton qu'au prix qui leur conviendrait .Ce groupement de producteur qui exigeait d'abord un prix de 15cent livre surgissait à une époque où, après une forte récolte de l'année précédente ,une récolte estimée abondante devait largement pourvoir le marché et alors que les hautes prévisions de la consommation mondiale ne se réalisaient pas .On sait la forte crise financière et économique qui survit aussitôt en Amérique et s'étendit au monde entier, amenant une dépression très grave sur le marché cotonnier »150(*). En 1931 , la fermeture du « Kreditanstalf » ,la plus importante banque de Vienne, entraina une crise monétaire en Europe qui avait jusqu'ici résisté comparativement à l'Amérique et le nouveau monde c'est-à-dire l'Australie et la Nouvelle Zélande151(*).Au début de la dépression économique , la France avait été soutenue par la solidité de sa monnaie .Il y avait eu l'afflux des capitaux et une croissance industrielle favorisée par une réorganisation de la production qui s'appuya sur la constitution d'un vaste marché .Mais , elle avait fini par être touchée à son tour par la crise . Son économie fut alors caractérisée par une diminution des profits industriels, provoquée par la baisse de la production et des prix. En France, 1200 industriels et 6 millions ouvriers environ peuvent être ruinés ou plongés dans la misère par l'arrêt de l'approvisionnement. En 1932, les exportations des cotonnades de la France passèrent de 30 000 à 17 000 tonnes. L'industrie textile ne parvenait à faire fonctionner que 63% des broches contre 70% pour les autres pays152(*) Tous les secteurs industriels, sans exception, firent, sans doute, durement atteints. Le revenu agricole, l'investissement et l'épargne, reculèrent considérablement avec la faillite de plusieurs établissements bancaires parmi lesquels figurait la Banque National du Crédit. La crise s'y manifesta également par un fléchissement de l'indice qui n'atteignait que 68 contre 100 .Malgré une réduction du temps de travail, le chômage progressa. Le nombre de chômeurs passa de 270 000 en 1932 à 500 000 en 1935.A la même année, les recettes budgétaires furent évaluées à 39 milliards alors qu'elles avaient atteint 50,7 milliards à 60 milliards153(*).Alors que le gouvernement décida de réduire de 10% les dépenses de l'Etat. La crise boursière qui éclata à Wall Street le 24 octobre 1929 (le jeudi noir)154(*), et se répercuta sur les autres places financières occidentales déboucha sur la plus grande crise économique que le monde ait jamais connue : faillites en cascades, effondrement des prix, notamment des matières premières agricoles, chute de la production industrielle. Désormais liés à l'économie européenne et mondiale, l'Afrique en général et le Sénégal en particulier n'ont pas put échapper aux effets de la crise : « courroie de transmission jouèrent à plein, sur le plan financier, avec la baise des capitaux disponibles et des difficultés d'investissements qui en découlèrent, et sur le plan commercial, du fait des problèmes de surproduction mondiale et de la chute des prix. Chaque colonie fut influencée par le marasme plus ou moins persistant dans sa métropole de tutelle ainsi que par les aléas des politiques, souvent inefficaces, mises en oeuvre pour assainir la situation »155(*) En résumé, la France connut le passage d'une phase de prospérité caractérisée par une intense activité économique à une phase de dépression. Sa situation économique sera redressée plus tard grâce à une relance des investissements, l'accroissement de la production, la maitrise de l'inflation, l'équilibre de la balance commerciale et la stabilité du franc. Des conséquences sans précédent vont se répercuter inlassablement dans la vallée du fleuve. * 149 Krach signifie en allemand 'bruit'' 'boucan'' et de manière métaphorique 'catastrophe' 'Le terme apparait lors de la chute des bourses de Viennes et de Berlin en &t& et en automne 1873.De fait, les prononciations Krax ou Krix sont usitées. Faisant généralement référence à la bourse, à l'inverse de la crise économique dont la portée est beaucoup plus large, l'expression Krach boursier semble un pléonasme ; toutefois, le terme originairement allemand désigne fréquemment une baisse brutale sur d'autres marchés. Les cours des actions ou des marchandises baissent brutalement, le nombre des vendeurs excédents largement le nombre d'acheteurs. Les vendeurs en arrivent à vouloir à vendre à n'importe quel prix, ce qui précipite la chute des titres. * 150 Ambrosi, (C.), Les grandes puissances du monde, Tome I et II, Delagrave, Paris, 1972, p261. * 151 En 1930, les effets de la crise économique les obligèrent à dévaluer leur monnaie à 50%. * 152 Ambrosi, (C.), Op. Cit. pp. 75-76. * 153 Il fut de l'ordre de 70 et 67 pour l'Allemagne et l'Angleterre. * 154 Le jeudi noir du 24 Novembre 1929, qui vit l'effondrement de la bourse de New York, signe précurseur de la grande dépression des années 30. * 155 Le Callennec, (S.) « Afrique Noire, histoire et civilisation », Paris, Hatier-Aupelf, Tome 2, 1992, p130. |
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