CONCLUSION GENERALE
Les changements climatiques sont d'actualité depuis
plusieurs décennies. Plusieurs aspects flagrants rendent sans
équivoque l'existence de changements quoique les experts et les acteurs
du domaine du climat discutent encore sur la terminologie. Les changements
climatiques ont plusieurs impacts sur les populations, les biens et les
ressources naturelles dans le monde entier mais aussi le Maroc
particulièrement. Certaines mesures sont prises pour ce qui est du Maroc
tout comme dans nombre de pays pour lutter contre ce fléau.
Les forêts répondent à ce
phénomène par des migrations d'espèces aussi bien animales
que végétales, des régressions, etc. Les forêts sont
donc vulnérables aux effets des changements climatiques. Parmi les
méthodes les plus utilisées pour évaluer la
vulnérabilité, on peut citer les systèmes experts et
l'analyse spatiale multicritère.
La forêt de Maâmora située en bordure de
l'océan atlantique est caractérisée par un bioclimat
allant du semi-aride à l'est au subhumide à l'ouest. Les sols
sont en général de type sable sur argile, ce qui implique une
faible rétention en eau. L'activité anthropique est assez
importante dans la forêt. Tout ceci, rajouté aux changements
climatiques rend les écosystèmes de la forêt d'autant plus
vulnérables.
Cette forêt qui était à l'origine une
subéraie toute entière est maintenant à moitié
reboisée d'autres espèces comme l'eucalyptus, l'acacia et le pin
principalement. Ceci est le résultat des aménagements qui se sont
succédés depuis 1951. Très récemment, des efforts
de régénération du chêne liège surtout par
voie de semis de glands ont donné lieu à quelques
réussites.
La première partie de ce travail qui a concerné
l'évaluation de la dynamique de la forêt a consisté en une
classification d'images satellites avant d'étudier les changements de la
végétation. L'étude de la dynamique d'une forêt est
essentielle afin de faire le point sur la tendance de cette forêt et de
mettre en exergue les facteurs principaux qui sont la cause des changements
constatés. La deuxième partie a consisté en une analyse
spatiale multicritère qui a considéré les 4 groupes de
facteurs précédemment énumérés. Il n'est pas
à rappeler que les écosystèmes forestiers sont affaiblis
par divers facteurs, les uns les prédisposant naturellement aux effets
des autres.
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Les principaux résultats de notre étude sont comme
suit :
? L'étude de la dynamique de la forêt de
Maâmora ressort que cette dernière connait une grande dynamique.
Les principaux changements concernent surtout la diminution de la superficie du
chêne liège de 1987 (64461 ha) à 2000 (57000 ha) due au
remplacement du chêne liège par des espèces feuillues et
résineuses à croissance rapide, suivie d'une augmentation de
cette superficie jusqu'à maintenant (61500 ha en 2014) grâce
à une prise de conscience globale qui s'est matérialisée
par le rétablissement des essences autochtones, d'où la
régénération du chêne liège en Maâmora.
La superficie des autres principales espèces était comme suit en
1987 : 44719 ha pour les Eucalyptus, 5770 ha pour le pin et 3850 ha pour les
Acacia. Les changements observés entre 1987 et 2000 puis 2000 et 2014
varient selon les espèces. On peut citer la diminution de 11,6% de la
superficie du chêne liège entre 1987 et 2000 suivie d'une
augmentation de 4,6% entre 2000 et 2014 ; l'augmentation des superficies
reboisées en pins (73% sur la période 1987-2014), une
augmentation de 7,5% de la superficie des Eucalyptus entre 1987 et 2000 suivie
d'une diminution de 11% jusqu'en 2014 et une augmentation de 34% de la
superficie des Acacia entre 1987 et 2000 suivie d'une diminution de 41% entre
2000 et 2014.
Les aménagements ont joué un rôle
très important dans ces changements, sans oublier que c'est un certain
nombre de facteurs qui sont eux-mêmes à l'origine des
décisions des aménagements. On retient 4 groupes de facteurs: les
facteurs biophysiques, les facteurs climatiques, les facteurs
anthropozoogènes et les facteurs sylvicoles.
? L'étude de la vulnérabilité des
écosystèmes de la forêt de Maâmora permet de
prédire que ces écosystèmes sont différemment
vulnérables selon le groupe auquel ils appartiennent. En effet, on peut
retenir que les groupes les plus continentaux sont plus vulnérables face
aux changements globaux. Il n'est pas alors étonnant que ce soit dans
ces parties de la forêt (cantons D et E) que la subéraie ait le
plus régressé. Rien qu'en se projetant de 2010 à 2045, on
remarque le changement dans la vulnérabilité des
écosystèmes. Alors qu'en 2010, seulement un groupe (DGI)
était très vulnérable, en 2045, tous les groupes des
cantons D et E voire C (avec le scénario 2) passent à une
vulnérabilité élevée. Ces constats sont encore plus
frappants quand on passe à l'horizon 2070. Les groupes à
vulnérabilité faible
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représentaient 53% de la superficie de la forêt
en 2010 et seraient de 11% en 2045 avec le scénario 1. En 2045 avec le
scénario 2 et en 2070 indépendamment du scénario, tous les
groupes passeront à une vulnérabilité moyenne à
élevée.
Tout ceci ne signifie pas que les écosystèmes
forestiers disparaitront d'ici 2070. Ce travail attire toutefois l'attention
des gestionnaires sur la condition future de la forêt de Maâmora
afin que des dispositions soient prises dans le but d'atténuer les
impacts possibles des différents facteurs, notamment le facteur
climatique sur la forêt de Maâmora. Aussi, une prise de conscience
est requise en vue de continuer à assurer la production des biens et
services issus de cette forêt très importante pour les populations
riveraines, mais aussi pour toute la nation.
S'inspirant de ces résultats, On recommande ce qui
suit:
y' mettre en place et encourager les activités
génératrices de revenus, réglementer le parcours par des
mises en défens et le contrôle des quotas par usager, envisager
des alternatives à l'usage du bois de feu, tout ceci en vue de diminuer
l'activité anthropique sur la forêt pour favoriser la reprise de
la régénération naturelle sans quoi, les
écosystèmes forestiers ne peuvent être
pérennisés ;
y' réduire le reboisement des espèces autres que
le chêne liège et mettre l'accent sur le rétablissement de
la subéraie par des régénérations artificielles par
semis de glands dans les cantons les plus occidentaux (A, B et C) où le
chêne liège est encore plus ou moins bien
représenté, et le faire avec beaucoup plus d'attention dans les
cantons les plus à l'est (D et E) où les conditions biophysiques
mais aussi climatiques sont plus difficiles.
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