VIII-PROBLEMATIQUE.
L'institution de la carte nationale d'identité au
Cameroun après l'indépendance, s'inscrit dans une logique de
construction de l'État. Cette pièce d'identité qui semble
entrer par effraction dans une société
hétérogène régie par les normes et les valeurs
traditionnelles a été, dès son avènement,
confrontée aux difficultés d'ordre social, politique et
administratif dans l'Adamaoua. Difficultés auxquelles les
autorités politiques et administratives n'ont pas jusqu'ici
trouvé de solutions adéquates. En outre, les années 1960,
1970 et 1980 sont caractérisées par une indolence des populations
de l'Adamaoua à l'égard de la carte nationale d'identité.
Contrairement, les années 1990 et 2000 sont marquées par une
précipitation des citoyens dans les postes d'identification. De ce
paradoxe, est née la question de l'acceptation de la carte nationale
d'identité dans l'Adamaoua. Quelles sont les raisons qui expliquent la
réticence des citoyens vis-à-vis de la carte nationale
d'identité pendant les trois premières décennies de son
institution et la quête d'une identité officielle à partir
des années 1990 dans l'Adamaoua ? Toutefois il sera question de
restituer quelques séquences de l'histoire du Cameroun à travers
la carte nationale d'identité. Un accent sera également mis sur
les éventuelles réactions de la population et les écueils
liés à l'établissement de la carte nationale
d'identité dans l'Adamaoua.
IX-OBJECTIFS DE LA RECHERCHE.
Le choix d'un sujet comme le nôtre répond
à des visées multiples et variées. Il se propose de
contribuer au débat sur l'identification officielle au Cameroun avec
pour perspective d'aborder une réflexion et des questions pouvant
surgir, face à la frustration éprouvée devant les sources
inexistantes ou très déficientes au Cameroun. Notre ambition,
dans une perspective pratique, consiste à tenter de comprendre le
présent à partir du passé relativement récent du
Cameroun. Plus spécifiquement, il sera question de :
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- Faire ressortir les repères historiques des
pièces d'identité au Cameroun tout en étudiant le contexte
d'avènement de la carte nationale d'identité et les
différentes modifications qu'a connu ce document.
- Étudier l'identification dans l'Adamaoua et analyser les
différentes réactions de la population.
-Faire un bilan de l'identification et relever les écueils
de la politique d'identification dans l'Adamaoua.
X-METHODOLOGIE.
Thuillier et Tulard relevaient61 : « Pas
d'histoire sans source... ». Nous n'avons pas failli à cette
tradition. Le sujet que nous étudions s'appuie amplement sur des sources
écrites et les sources orales.
En ce qui concerne les sources écrites, nous avons
exploité les documents qui ont un rapport plus ou moins étroit
avec le sujet en question. Les sources écrites sont essentiellement des
ouvrages, des thèses, des documents d'archives, des mémoires, des
lois et décrets, des articles, des rapports et certains journaux.
À cet effet, la recherche des documents écrits a
été réalisée dans les bibliothèques de
l'université de Ngaoundéré notamment à la
bibliothèque centrale, à la bibliothèque de la FALSH et au
programme Ngaoundéré-Anthropos. Dans la ville de
Ngaoundéré, nous avons consulté les ouvrages à la
bibliothèque de SawtuLinjila.
S'agissant des documents d'archives, la collecte des
données archivistiques s'est faite aux Archives Nationales de
Yaoundé, dans les postes d'identification les plus anciennement
créés de la Région de l'Adamaoua, dans les
sous-préfectures et dans les commissariats.
L'enquête orale a été menée dans la
région d'étude auprès des autorités
administratives, militaires, traditionnelles, des personnels des postes
d'identification et des populations. Cette catégorisation des
informateurs a facilité la collecte des données car,
auprès de chaque informateur, nous savions exactement sur quoi
conduire
61G.Thuillier et J. Tulard, 1986, La
méthode en histoire, Paris, PUF, p. 78.
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l'entretien. La collecte des informations était
réalisée à partir des entretiens et des interviews portant
sur des questions spécifiques. Cette démarche a un avantage dans
la mesure où, elle permet d'entrer en profondeur des problèmes
posés afin de saisir la substance du document à étudier.
Un autre avantage lié à l'entretien est celui de juger les signes
physionomiques de l'interlocuteur. Durant les entretiens, le mutisme des
informateurs sur certaines questions soit dit gênantes, permettait de
tirer certaines conclusions dans l'attente de leur vérification. Les
démarches d'entretien et d'interview étaient adaptées aux
stratégies de collecte des informations sur la question de la carte
nationale d'identité, les formes de résistances de certaines
personnes et les difficultés liées à
l'établissement et à l'obtention de cette pièce dans la
région de l'Adamaoua.
Une autre contrainte liée à l'adoption de la
démarche par échantillonnage est le temps insuffisant
accordé à la recherche de terrain. L'on n'a cessé de le
dire, le temps du Master est extrêmement court. La
péréquation entre le temps de recherche de terrain et l'espace
à parcourir est disproportionnée car, la région de
l'Adamaoua s'étend sur 63701km2 et compte 16 postes
d'identification. Il a été donc nécessaire de
procéder par échantillonnage pour réaliser ce travail.
Néanmoins, les données orales collectées auprès des
informateurs ont été essentielles pour la rédaction de ce
mémoire de Master.
Du point de vue de l'analyse des données, nous avons
mis en exergue l'approche diachronique et synchronique. L'approche synchronique
a consisté à organiser les informations ou les données
collectées sur le terrain en centre d'intérêt. Ce qui a
facilité dans une certaine mesure la compréhension, l'explication
et l'interprétation des faits. Un autre mérite de cette
démarche synchronique est qu'elle permet de simplifier les variables
pour retenir comme vérité historique, le noyau dur des
informations recueillies. Conscient également du fait que, la question
de l'identification est un champ culturel, la démarche synchronique a
permis de comparer les informations autour d'un centre d'intérêt
pour ne retenir que les informations concordantes.
L'approche diachronique a permis de situer chaque fait dans
son contexte historique afin de dégager la dynamique de
l'établissement des cartes nationales d'identité dans la
région de l'Adamaoua. Cette analyse évolutive de l'identification
a permis de placer les faits recensés dans leur contexte. De plus, nous
avons également associé à la démarche
susmentionnée, une approche pluridisciplinaire et
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interdisciplinaire. Les travaux de la sociologie,
d'anthropologie, de la science politique, de la géographie et du droit
ont été consultés et associés à ce
travail.
Au chapitre des difficultés rencontrées dans la
réalisation de ce travail, nous avons été confronté
aux problèmes de la langue car, nous ne maîtrisons pas le
fufuldé qui est la langue principale de communication dans la
Région de l'Adamaoua. Pour pallier cette difficulté, nous avons
souvent sollicité l'aide d'un interprète. Dans les centres de
documentation de la région, il y a un manque criard d'ouvrages
spécifiques portant sur l'identification officielle au Cameroun.
Quelques travaux académiques, trouvés à
Ngaoundéré-Anthropos, portent essentiellement sur
l'état-civil. Pour surmonter cette difficulté, les données
écrites ont été renforcées par les enquêtes
orales réalisées auprès des acteurs de l'identification et
auprès des autorités administratives de la région de
l'Adamaoua.
L'identification des Camerounais est assurée par la
police camerounaise. Dans l'acception commune, la police est un corps muet qui
ne se livre pas facilement au jeu de question/réponse qui anime tout
chercheur en sciences sociales. Il a été particulièrement
difficile de recueillir les informations auprès de la police car, pour
qu'un agent parle, il faut au préalable, une autorisation de sa
hiérarchie. Tout au départ, on envisageait passer par voie
formelle, c'est-à-dire passer par voie hiérarchique notamment les
commissaires de police, les chefs de poste d'identification afin qu'ils
puissent mettre à notre disposition, les éléments
susceptibles de nous renseigner sur les questions essentielles pour la
réalisation de ce travail.
Face à cette difficulté, nous avons
réorienté notre stratégie de collecte des données
en interrogeant ces personnels en dehors de leurs services et de façon
individuelle. C'est ainsi qu'on a pu interroger, les agents operateurs de
photographie et les chefs des postes d'identification. Une autre
difficulté, pas de moindre est celle du manque des moyens de transport
dans certains localités de la Région de l'Adamaoua. Ce qui rend
particulièrement difficile les déplacements pour la recherche. Le
mauvais état des routes reliant certaines villes de la Région et
le nombre insuffisant des véhicules font en sorte que, le chercheur ne
peut maîtriser son calendrier de recherche car il est soumis aux caprices
des automobilistes. C'est ainsi que, nous avons mis deux jours sur le
tronçon
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Tibati/Banyo. Le piteux état des véhicules,
combiné au mauvais état des routes rendent la recherche
tortueuse.
Ce travail réalisé à partir des
enquêtes orales et la collecte des sources écrites, souffre du
manque des données iconographiques et des synthèses de production
des postes d'identification. Cependant, malgré le mauvais état
dans lequel se trouvaient certaines archives, nous nous sommes quand même
imprégné de leurs contenus.
Toutefois, les données collectées à
partir des sources écrites et orales ont été suffisantes
pour la réalisation de ce travail. Pour mieux appréhender les
données collectées sur le terrain, nous les avons
organisés autour de trois chapitres :
Le premier chapitre porte sur l'institutionnalisation de la
carte nationale d'identité au Cameroun. Il analyse le contexte
d'avènement de la carte d'identité au Cameroun tout en soulignant
les différentes modifications qu'a connues ce document
d'identité. L'analyse met en relief les procédures et les acteurs
d'identification
Le deuxième chapitre porte sur l'identification dans la
Région de l'Adamaoua. Il analyse les pratiques d'identification dans
l'Adamaoua. Ces pratiques sont conjoncturelles et dépendent de
l'évolution de la structure administrative de l'Adamaoua. Ils
dépendent également de la politique d'identification au
Cameroun.
Le chapitre trois en définitive aborde le bilan de
l'identification dans l'Adamaoua. Il analyse l'impact de l'identification dans
l'Adamaoua et soulève les questions liées à la politique
d'identification.
CHAPITRE I:
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