CONCLUSION GÉNÉRALE
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Au demeurant, il était question tout au long de ce
travail portant sur « la carte nationale d'identité dans
l'Adamaoua», d'examiner les attitudes des citoyens à l'égard
de la question d'identification. Au terme de ce travail, il ressort que la
carte nationale d'identité a été instituée d'abord
au Cameroun oriental indépendant en 1960, puis par la
concrétisation de productions législatives, elle a
été généralisée en 1964 après la
réunification. Avec l'unification des deux Cameroun cette pièce a
connu des modifications au niveau des énonciations. Elle est
passée d'une énonciation en français pour une
énonciation bilingue, justifiée par la promotion
l'identité culturelle camerounaise. Ce changement a marqué une
étape important pour la politique d'identification du Cameroun dans la
mesure où il s'agissait de mettre fin aux idées de double
nationalité qui animait certains citoyens du Cameroun Occidental. La
carte nationale d'identité dans son évolution est passée
de support papier (carton) en vigueur jusqu'aux années 2000 à un
support plus sécurisé (Teslin), pour ainsi résoudre le
problème de sécurisation de l'identité et de la
nationalité et de s'arrimer aux normes internationales
d'identification.
La carte nationale d'identité donne au citoyen sur le
territoire national une identité établie et véritable et
un signe d'appartenance à une communauté, à une nation
où le citoyen à sa place. Elle est la clé qui permet
d'accéder à certains services, comme par exemple des services
bancaires qui offrent une sécurité et une discrétion dans
les transactions. Elle garantit au citoyen pendant toute sa vie, le droit de
prendre part à la vie sociale et politique de son pays.
L'accent a été aussi mis l'évolution de
la structure administrative de l'Adamaoua. Cette évolution a eu un
impact sur la politique d'identification dans cette Région, notamment en
ce qui concerne la mise sur pied des postes d'identification. L'étude de
la mise en place des postes d'identification dans l'Adamaoua a permis de cerner
les pratiques d'identification. L'identification mieux, l'établissement
des cartes nationales d'identité de 1960 au début des
années 2000, se faisait uniquement dans les postes d'identification
répartis sur le territoire de l'Adamaoua. Dans l'Adamaoua, la politique
d'identification a été mise sur pied de manière
progressive, avec l'évolution de cette structure administrative. D'abord
présent dans les chefs-lieux de départements et d'arrondissement,
les postes d'identification furent multipliés à partir de 1995,
notamment avec la mise sur pied du système d'identification
biométrique. À partir des
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années 2000, il y a eu changement dans la politique
d'identification. Non seulement, à l'approche de chaque
échéance électorale les frais d'identification
étaient diminués et souvent même exemptés, mais les
équipes mobiles d'identification se déployaient dans les zones
qui ne disposent pas de postes d'identification pour identifier sur place les
citoyens. Ce fut une manière de permettre aux Camerounais de participer
à la vie politique de l'État et de sécuriser leur
identité et la nationalité camerounaise.
Avec la politique de campagne d'identification
(l'allègement des conditions d'établissement des cartes
nationales d'identité, exemption des frais d'identification)
débutée en 2002, il été révéler dans
ce travail, le déploiement des équipes mobiles d'identification
dans certains localités de l'Adamaoua, permettant aux populations de
Belel, Ngaoui, Yargbang, Gbatoua Godolé, Kombo Laka, Danfili, de Mbakaou
etc. de se faire identifier.
Par ailleurs, il s'agissait également dans ce travail
d'analyser les différentes réactions des populations de
l'Adamaoua à la question d'identification. Toutefois, il ressort de
cette analyse que dès son institutionnalisation, la carte nationale
d'identité n'a pas aussitôt été acceptée de
tous les citoyens. Les trente (30) premières années ont
été marquées par l'ignorance ou la réticence des
citoyens vis-à-vis de la carte nationale d'identité. Plusieurs
citoyens des zones rurales et même de centres urbains ont
été réticents vis-à-vis de la question de la carte
nationale d'identité à cause d'un manque de communication, de
sensibilisation ou d'information de la part du gouvernement. La carte nationale
d'identité fut introduite sans une consultation des citoyens
camerounais.
Les raisons d'une politique nationale d'identification des
citoyens n'avaient pas été clairement explicitées aux
Camerounais. L'inefficacité des contrôles d'identité,
l'inadaptation et la méconnaissance des lois relatives à
l'identification par les citoyens de l'Adamaoua sont quelques raisons
importantes qui expliquent les faibles taux d'établissement des cartes
nationales d'identité dans l'Adamaoua au cours des périodes 1960
; 1970 et 1980. Les périodes 1990 et 2000 ont été
marquées par une ruée des citoyens dans les postes
d'identification de l'Adamaoua. Cette ruée est liée à
l'ouverture démocratique du Cameroun, à l'implantation des
services bancaires et surtout aux contrôles systématiques
d'identité dans cette Région qui accueille de nombreux
immigrés centrafricains, tchadiens et nigérians. Toutefois,
l'allègement des conditions
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d'identification et les opérations foraines
d'établissement des cartes national d'identité ont permis
d'établir et délivrer des milliers de cartes nationales par les
postes d'identification de la Région de l'Adamaoua. À la suite de
ces opérations, de nombreuses cartes nationales d'identité ont
été abandonnées dans les postes d'identification. Il a
été question dans ce travail de mettre en lumière, les
mobiles qui expliquent l'abandon des cartes dans les postes d'identification.
Ces raisons découlent de la mobilité des titulaires d'une part et
d'autre part de l'ignorance du mécanisme d'identification par certains
citoyens.
Le bilan d'identification dans l'Adamaoua renseigne sur
l'évolution de demandes des cartes nationales. Ce bilan a permis de
souligner les disparités entre les postes d'identification de
l'Adamaoua. Les données collectées dans les postes
d'identification ont permis de conclure que le poste d'identification de
Ngaoundéré produit plus de cartes que les autres postes
d'identification de la Région de l'Adamaoua. Bien que la politique
d'identification ait permis à plusieurs citoyens de l'Adamaoua d'avoir
une identité officielle et de participer à la vie politique, il a
été question de souligner l'impact de l'identification sur le
plan sociopolitique.
Par ailleurs, les fraudes qui font le quotidien de certains
postes d'identification et de l'Adamaoua et les opérations foraines
d'identification ont permis aux étrangers (immigrés) en
présence dans l'Adamaoua d'acquérir illicitement la
nationalité camerounaise fragilisant et rendant ainsi faillible le
système de sécurisation de la nationalité camerounaise.
Étant un document incontournable dans les services
administratifs du Cameroun, elle a permis à plusieurs citoyens de se
faire inscrire sur les listes électorales. Le pourcentage des inscrits
sur les listes électorales dans l'Adamaoua, a considérablement
évolué à cause de la campagne d'identification gratuite
instituée par le chef de l'État dès 2002.
Un travail sur la carte nationale d'identité dans
l'Adamaoua ne pouvait se faire sans analyser les écueils qui plombent la
politique d'identification dans cette Région. Les obstacles de la
politique d'identification dans l'Adamaoua sont d'ordres administratif,
politique, économique, infrastructurel, professionnel et
géographique. Sur
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le plan administratif, le népotisme, le
clientélisme et l'inertie caractérisent les postes
d'identification de l'Adamaoua. Le manque de volonté des politique de
développer les infrastructures notamment les bâtiments pouvant
abriter les postes d'identification et les routes reliant les localités
enclavées de l'Adamaoua participe à rendre plus difficile la
tâche aux citoyens et rend également pénible la pratique
d'identification dans l'Adamaoua. Le manque de professionnalisme des personnels
d'identification demeure un problème dont le gouvernement doit apporter
des solutions, en organisant par exemple des séminaires de formation, de
remise à niveau ou de recyclage. Cela permettra à ceux-ci de
faire moins d'erreur sur les formulaires de demandes de cartes nationales
d'identité.
En fin il a été question de souligner les
manquements de la politique d'identification. La politique d'identification du
Cameroun, bien qu'elle ait évolué présente des limites.
D'emblée, dès l'institution, le gouvernement n'a pris aucune
disposition pour informer les citoyens sur les véritables raisons de la
mise sur pied de la carte nationale d'identité. L'une des raisons de la
mise sur pied du système d'identification biométrique
était de lutter contre le vol d'identité et l'acquisition
illicite de la nationalité camerounaise. L'on constate que dès la
mise en la place du nouveau système d'indentification, les postes
d'identification clandestins ont automatiquement disparu laissant place aux
nouvelles stratégies de vol d'identité et d'acquisition de la
nationalité. Tout se passe comme si les autorités administratives
ignoraient ce qui se passe dans les centres d'état-civil et dans les
postes d'identification où les documents d'identité sont souvent
délivrés frauduleusement aux étrangers. Ce qui remet en
cause les objectifs de la politique d'identification au Cameroun qui sont entre
autres, protéger et sécuriser l'identité des citoyens
camerounais et sécuriser la nationalité camerounaise.
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