3. Les limites de la politique d'identification du
Cameroun.
La question sur l'amélioration de la
sécurité des documents et la carte d'identité nationale
pour tous les Camerounais demeure jusqu'ici un domaine en friche. Depuis
l'institution de cette pièce, aucun débat n'a été
ouvert pour saisir les enjeux et les problèmes que connaissent la
politique d'identification au Cameroun. La présente partie devrait
contribuer à une meilleure connaissance des limites de la politique
d'identification des citoyens camerounais.
Il n'y avait pas assez de documentation, de recherche ou de
directives pour guider les personnes intéressées à
examiner cette question d'importance nationale. L'examen de cette question
exige soit un niveau de connaissance élevé du système
actuel de documents d'identité gouvernementaux, soit une connaissance de
l'industrie biométrique de pointe ou une connaissance du succès
ou de l'échec des programmes actuels d'identification du gouvernement
camerounais, des travaux de recherche sur l'expérience des autres pays
où il existe une carte nationale d'identité ainsi qu'une
connaissance des problèmes de sécurité liés
à la collecte de données biométriques du gouvernement.
Le débat sur la carte nationale d'identité
soulève en même temps un débat sur une politique nationale
sur l'identité. Étant donné que la carte nationale
d'identité ne représente qu'une méthode possible
d'établir une politique nationale, il fallait élaborer et
établir la politique avant d'examiner toute mesure de mise en
application. Le Parlement devait adopté une politique nationale sur
l'identité ainsi que des principes directeurs fondamentaux après
avoir demandé l'opinion de la population et de l'avoir consultée,
avant que toute stratégie particulière de mise en place ne soit
examinée, y compris la mise en oeuvre d'une carte nationale
d'identité.
151
Au cours de la période d'élaboration d'une
politique nationale sur l'identité, le gouvernement n'a pas
proposé les différentes stratégies d'identification aux
citoyens. En introduisant le système d'identification biométrique
aucune mesure n'a été prise pour expliquer clairement aux
Camerounais pourquoi ce changement est nécessaire et pourquoi le
système actuel répond à la politique
élaborée à l'échelle internationale.
Le Cameroun doit être en mesure d'établir
l'identité des Camerounais, même à l'échelle
internationale. Le gouvernement est signataire d'ententes et d'engagements
internationaux qui exigent que les Camerounais qui voyagent et désirent
entrer dans d'autres pays puissent être identifiés. Au Cameroun,
les départements ministériels se partagent la
responsabilité d'émission des documents d'identité : les
certificats de naissance et de décès par exemple relèvent
de la compétence du ministère de l'administration territoriale et
de la décentralisation alors que les cartes nationales d'identité
et les cartes de résidence sont émises par la
délégation générale à la sûreté
nationale. Différents documents d'identité ont différentes
raisons d'être, et les renseignements à fournir en vue d'obtenir
chaque document correspondent à la finalité intrinsèque de
ce document. Toutefois, on devrait élaborer une politique nationale
uniforme sur les documents d'identité fondée sur des principes
fondamentaux.
L'objectif et la conception d'un système
d'identification nationale camerounaise devraient être à l'image
de la population camerounaise, et non motivés par des pressions
internationales.
L'identité est personnelle à chaque personne.
Avant que le gouvernement n'intervienne en vue d'établir une politique
nationale sur l'identité, qui concerne tous les citoyens, il devait
expliquer clairement le but de l'identification. Étant sans doute le
plus important détenteur de renseignements personnels, le gouvernement
camerounais a reconnu l'importance de la protection de la vie privée des
Camerounais en établissant un commissariat de police qui veille à
la protection des citoyens et de leur vie privée. Ce commissariat doit
prendre le devant en ce qui concerne la protection des renseignements
personnels en introduisant, en faisant promulguer et en mettant en application
la loi sur la protection des renseignements personnels et les documents
d'identité.
152
De plus, la politique d'identification devrait participer
activement à éliminer les préoccupations en matière
de sécurité nationale et internationale au Cameroun et non
permettre aux acteurs de l'insécurité d'avoir illicitement la
carte nationale d'identité, lors de opérations foraines
d'identification.
Toutefois, pour répondre aux préoccupations sur
la réticence et l'ignorance de certains citoyens camerounais en ce qui
concerne la question d'identification, le gouvernement devrait expliquer
ouvertement et honnêtement les obligations que le Cameroun tente de
respecter en apportant tout changement aux politiques d'identification. Les
citoyens sont en droit de connaître l'étendue de cette politique
d'identification.
Le gouvernement camerounais n'a jamais ouvert un débat
public sur des questions touchant les valeurs fondamentales, notamment
l'identification des Camerounais, ou encore présenté un livre
blanc afin de connaître les points de vue de citoyens sur la politique
d'identification qui, pourront permettre de fournir les renseignements
appropriés. C'est souvent à l'approche des
échéances électorales que les politiques présentent
souvent l'importante question d'identification nationale. Toutefois aucune
documentation, des travaux de recherche ou un objectif clairement défini
n'est présenté au public. Il est important d'informer le public
à ce sujet et lui donner l'occasion de s'exprimer sur des questions
capitales comme celle-ci. C'est le moins que l'on puisse faire pour garder la
confiance du public tout au long du processus.
Une politique sur l'identité nationale devrait
renforcer la sécurité nationale. Cette politique devrait
être élaborée par et pour les Camerounais. Elle doit
inspirer une fierté quant à la nationalité et à la
citoyenneté camerounaises. Cela ne veut pas dire que l'État du
Cameroun ne doit pas tenir compte des obligations et des engagements
internationaux. Cela ne veut pas dire également que le gouvernement
camerounais ne doit pas consulter ses alliés et ses voisins pour
connaître leurs préoccupations lorsqu'ils tentent d'identifier et
de trouver des Camerounais ou qui voyagent à l'étranger. Cela
signifie toutefois que la politique et les méthodes mises en oeuvre
soient probablement mieux adaptées pour satisfaire les Camerounais.
153
En clair, Il était question dans ce chapitre d'analyser
l'évolution des productions des cartes nationales d'identité.
Ainsi, il ressort de cette analyse que dans l'Adamaoua, au cours des trois
premières décennies de l'institution de la carte nationale
d'identité,les postes d'identification ont connus un taux de demandes
relativement faible. Par ailleurs, depuis le début des années
2000, les postes d'identification de l'Adamaoua enregistrent chacun de nombres
important de demandes de cartes nationales d'identité. Cependant,
malgré les efforts du gouvernement, l'identification dans l'Adamaoua
fait face à plusieurs difficultés dont les principales sont
d'ordre politique, économique, professionnel, infrastructurel etc.
|