Participation des bénéficiaires aux actions de lutte contre la pauvreté infantile au Togo: cas des parents du CDE Kadès de Kousségbé-Légbanou (préfecture de Vo)( Télécharger le fichier original )par Hodénou ALOGNON KPENOU Ecole Nationale de Formation Sociale (E.N.F.S.) - Cadre Supérieur de Développement Social (C.S.D.S.) Option : Développement Local Participatif (D.L.P.) / Licence pro 2016 |
2.1.3. La pauvreté infantile, un phénomène purement multidimensionnel et à caractère prioritairement non monétaireSelon Jeandidier et Albiser (2002), la littérature francophone appréhende rarement la pauvreté en retenant l'enfant comme unité d'analyse ; à l'inverse, une littérature anglo-saxonne relativement abondante aborde ce sujet sans doute parce que la pauvreté infantile est beaucoup plus importante aux USA et en Grande Bretagne que dans les pays de l'Europe Occidentale. Pour le cas spécifique de l'Afrique, cette littérature est moins récente et insuffisante. Gordon et al. (2003) furent les premiers à mener une étude empirique scientifique pour analyser la pauvreté infantile sous l'angle de la privation. Pour ce faire, ils se sont inspirés des idées del'économiste Indien Sen (2000) qui définit la pauvreté comme étantavant toutune privation des capacités les plus élémentaires ; tout en reconnaissant que cette définition ne vise en aucune manière à nier l'évidence : un revenu faible constitue bien une des causes essentielles de la pauvreté, pour la raison, au moins que l'absence de ressources est la principale source de privation des capacités d'un individu. Djoké et al. (2006), ont accepté cette idée de leurs devanciers d'analyser la pauvreté infantile sous l'angle de la privation, à travers leur étude basée sur l'analyse comparative du profil de la pauvreté infantile dans cinq (05) pays14(*) de l'UEMOA, dont le Togo.En effet, ils pensent que « contrairement à la pauvreté des ménages qui est d'ordre monétaire et multidimensionnel, la pauvreté infantile apparaît plus être un phénomène essentiellement multidimensionnel ».(Djoké et al., 2006, p. 2). Lekeumo (2007), de son côté, a conforté le caractère multidimensionnel de la pauvreté infantile, en justifiantà sa manière le fait que le critère monétaire soit moins considéré dans l'analyse du phénomène. D'après l'auteur, très souvent, le niveau de vie des enfants est perçu d'un point de vue monétaire car appréhendé à partir du niveau de vie du ménage auquel il est rattaché. L'on considère alors ici un enfant pauvre comme une personne vivant dans un ménage pauvre et la plupart des études définissant le profil de pauvreté retiennent le critère monétaire.Il poursuit son analyse en estimant que cette considération conduit nécessairement à assimiler l'état des parents à celui des enfants sans toutefois tenir compte des spécificités des uns et des autres. Or les parents sont généralement altruistes et dans les ménages altruistes, les enfants souffriraient moins de la pauvreté que les parents. L'auteurprécise que la situation inverse peut également exister :« L'irresponsabilité parentale peut amener les parents à ne point se soucier du bien-être de l'enfant quand bien même ces parents bénéficieraient d'un revenu conséquent. »Par ailleurs, pour Lekeumo, la pauvreté d'un enfant, même si elle est étroitement liée à la situation du ménage auquel il est rattaché, doit s'affranchir de la pauvreté de ce ménage. Ainsi, dit-il,« la pauvreté infantile apparaît beaucoup plus comme un phénomène multidimensionnel et doit s'analyser du point de vue des privations. »Dans ce contexte, l'illustration donnée par Asselin (2005)éclaire plus d'un sur le caractère non monétaire de la pauvreté des enfants. En effet, selon cet auteur, un enfant de huit ans qui ne va pas à l'école est individuellement pauvre même s'il vit dans un ménage monétairement non pauvre : il est privé d'un bien essentiel qui est l'éducation. L'UNICEF (2005) ne méconnaît pas la prépondérance de l'approche non monétaire dans la perception du phénomène de pauvreté infantile. La définition provisoire suivante des enfants vivant dans la pauvreté, proposée par ledit organisme en dit long : Les enfants vivant dans la pauvreté sont privés des ressources dont ils ont besoin sur les plans matériels, spirituel et affectif pour survivre, se développer et s'épanouir, ce qui les empêche de jouir de leurs droits, de donner la pleine mesure de leurs capacités ou de participer à la vie de la société en tant que membres à part entière et à parts égales. (Unicef, 2005, p. 18). Djoké et al. (op. cit) ont pris le soin d'expliquer et commenter cette définition de l'Unicef. Selon eux, « il ressort de cette définition que les dimensions de la pauvreté dont les enfants font l'expérience avec leurs mains, leur esprits et leur coeur sont interdépendantes »(Djoké et al., 2006, p. 4). La pauvreté matérielle - par exemple, commencer la journée sans un repas nourrissant ou être contraint d'accomplir un travail dangereux - entrave la capacité cognitive aussi bien que la croissance physique. Ils continuent en disant que le fait de vivre dans un milieu peu stimulant ou dans lequel l'enfant ne reçoit guère de soutien affectif peut annuler en grande partie l'effet positif d'une enfance passée dans une famille matériellement aisée. En entravant de façon discriminatoire leur participation à la vie de la société et en paralysant leurs potentialités, la pauvreté non seulement est une source de souffrance pour les enfants, mais leur retire tout moyen d'action. * 14 Côte d'Ivoire, Sénégal, Niger, Guinée-Bissau et Togo. |
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