A. La représentation proportionnelle
approchée
Cette technique qui est de beaucoup la plus répandue,
repartit les sièges dans le cadre de chaque circonscription d'abord
entre les listes et ensuite entre les candidats de ces listes.
a. La répartition des sièges entre les
listes
L'opération se fait en deux temps : la
répartition des sièges au quotient et la répartition des
sièges non-attribués.
- La répartition des sièges au
quotient
Le quotient électoral est le résultat de la
division du nombre des suffrages exprimés dans les circonscriptions par
le nombre des sièges à pouvoir.
En d'autres termes, on doit diviser dans chaque
circonscription, le nombre total des suffrages exprimés au nombre total
des députés à élire (le nombre total des
sièges à pouvoir). Le chiffre obtenu est appelé le «
quotient électoral ». Autant de fois ce quotient électoral
est contenu dans le chiffre de suffrage obtenus par une liste, autant de fois
celle-ci des candidats élus.
- La répartition des sièges
non-attribués au quotient
Cette répartition peut se faire selon trois
méthodes : le système du plus fort reste, le système de la
plus forte moyenne et le système de Hondt qui aboutit au même
résultat que le système de la plus forte moyenne.
Le système du plus fort reste, attribue les
sièges aux listes ayant les plus forts restes des suffrages non
utilisés.
Le système d'Hondt du nom de son inventeur est
également connu sous l'appellation du système de diviseur
électoral ou système du quotient rapproché. Dans ce
système, la procédure à suivre est la suivante :
41 E. Mpongo bokako, op.cit, p.228
[35]
Division du nombre des voix obtenues par chaque liste par 1,
2, 3, 4... jusqu'à concurrence du nombre de listes.
Classement des quotients dans l'ordre décroissant,
jusqu'à concurrence du nombre de sièges à pouvoir. Le
chiffre qui correspond au dernier siège est appelé «
dénominateur commun » ou le quotient approché ou encore le
diviseur électoral.42
Autant de fois que le dénominateur commun est contenu
dans le nombre des suffrages retenus par chaque liste, autant de fois celle-ci
aura un élu, c'est-à-dire un siège.
b. L'attribution des sièges aux candidats des
listes
Pour distribuer les sièges entre les candidats, on
utilise un système très simple puisque la liste est
bloquée légalement par la loi électorale et plus
compliquée lorsque le panachage et le vote préférentiel
sont autorisés. On examinera de manière successive :
- Le système des listes bloquées par la loi
électorale
- Le système du panachage et du vote
préférentiel et le blocage de fait des listes
- L'interdiction des élections partielles43
1. Le système des listes bloquées par la
loi électorale
Plus souvent les lois électorales interdisent le
panachage, le vote préférentiel ou les soumettent à des
conditions qui les paralysent. L'attribution des sièges est alors
facile.
Les candidats étant présentés sur chaque
liste dans un certain ordre, les sièges obtenus par les listes leurs
sont attribués selon cet ordre de présentation. Les
électeurs voient en conséquence sachant très bien que
seuls les premiers candidats de la liste peuvent être élus, car
aucune liste ne peut obtenir 100 pourcent des suffrages.
2. Les systèmes du panachage, de vote
préférentiel et le blocage de fait des listes
Il existe en théorie au moins, un système
inverse permettant aux électeurs de mélanger les candidats dans
divers listes présentées et de modifier l'ordre de
présentation de ses candidats établi par les partis grâce
au vote préférentiel. Mais, en pratique, il est très
difficile d'éviter que la liste ne soit en fait bloquée : les
partis recommandent souvent à leurs électeurs de voter pour la
liste entière et, en principe, la majorité d'entre eux respectent
leurs consignes.
3. L'interdiction des élections
partielles
Elle constitue une conséquence très regrettable
de la représentation proportionnelle. En effet, les élections
partielles en cours de législature ayant pour but de remplacer des
élus décédés ou démissionnaires ne
pourraient avoir lieu qu'au scrutin uninominal, c'est-à-dire
majoritaire. Ces scrutins ne pouvant que détruire la
proportionnalité de la représentation
42 E. Mpongo bokako, op.cit, , p.226
43 Ibidem, p. 229
[36]
sont les plus souvent interdits par la loi électorale.
Le remplacement d'un élu est assuré par le premier candidat non
élu de sa liste. C'est en particulier dans ce but que la loi
électorale exige presque toujours que les listes soient
complètes, autrement dit qu'elles contiennent autant de noms que de
sièges à pouvoir.
Le blocage des listes et l'interdiction des élections
partielles sont pourtant des défauts mineurs de la représentation
proportionnelle sous sa forme approchée, comparés aux redoutables
inconvénients de la représentation proportionnelle
intégrale.
2. La représentation proportionnelle
intégrale
Il importe avant tout de préciser la technique la
représentation proportionnelle, avant de présenter ses
risques.
a. La technique de la représentation
proportionnelle
Le pays divisé en circonscriptions élit d'abord
une partie de ses députés, la plus grande au quotient dans
chacune d'elles. Le quotient national approché (également
dénommé nombre uniforme ou nombre unique) est différent du
quotient de la représentation proportionnelle approchée mais joue
le même rôle selon la même technique. Il est normalement
fixé à l'avance d'après le nombre vraisemblable des
suffrages exprimés dans l'ensemble du pays.
Les restes inutiles dans les circonscriptions sont ensuite
additionnés par chaque parti au niveau national : on attribue alors
à chacun autant des sièges que ses restes contiennent ce
quotient.44
Les sièges sont attribués dans les
circonscriptions aux candidats de chaque liste selon le système de la
représentation proportionnelle approchée. En revanche, au niveau
national, ils sont attribués par les partis aux candidats de leurs
listes nationales ou bien à leurs candidats battus des circonstances
dans l'ordre de leurs échecs, c'est-à-dire de leurs
pourcentages.
b. Les dangers de la représentation
proportionnelle intégrale
Les très graves dangers de la représentation
proportionnelle intégrale sont même si sérieux que ses
rares partisans cherchent à les atténuer par des dispositions qui
finissent par détruire le caractère intégral de sa
proportionnalité. Il s'agit de l'attribution des sièges nationaux
par les états-majors des partis aux candidats des listes nationales
établis par eux et la multiplication presque illimitée des partis
politiques.45
1. L'attribution des sièges nationaux par les
états-majors des partis
Des nombreux élus sont ainsi désignés
discrétionnairement par les partis et non par le peuple. Même si
ces candidats sont classés dans l'ordre des pourcentages obtenus dans
leurs
44 E. Mpongo bokako, op.cit, p. 231
45 Ibidem, p. 231
[37]
circonscriptions, leurs places dans les lignes de
circonscription sont normalement fixés par la direction nationale du
parti.46
2. La multiplication presque illimitée des partis
politiques
Elle fait éclater la représentation nationale
en interdisant toute constitution de majorité. Les groupements les p lus
infirmes, les plus étrangers, les plus fantaisistes et les plus
inquiétants pour la paix publique peuvent toujours réunir un
quotient national ou deux pour s'offrir un ou deux sièges, puisque
même avec le scrutin majoritaire ces sortes de candidats
réunissent des voix.
On peut lutter contre ce danger majeur en interdisant toute
représentation aux parties n'obtenant pas un certain pourcentage ou
quelques sièges au quotient ou ne présentant pas suffisamment des
candidats et en exigeant des cautions non remboursables au dessous d'un
pourcentage des voix décent. Mais tous ces palliatifs sont, soit
inopérants, soit destructeurs de la représentation
proportionnelle intégrale.
Au total, la représentation proportionnelle
intégrale doit être acceptée avec ses inévitables
inconvénients ou refusée au profit de la représentation
proportionnelle approchée. En effet, s'ils sont beaucoup moins graves
dans le cadre de la représentation proportionnelle approchée,
leurs effets restent pourtant redoutables. C'est pourquoi, une très vite
controverse oppose les partisans et les adversaires de la représentation
proportionnelle en ce qui concerne ses conséquences.
3. Les conséquences de la représentation
proportionnelle des listes
Les avantages de la représentation proportionnelle sont
évidents : la justice mathématique des résultats
immédiatement vérifiables quelle que soit la technique,
même au niveau de circonscription. Les diverses forces en présence
sont représentées avec équité. Au niveau national,
la proportionnalité de la représentation des partis est presque
parfaite à 1 ou 2 pourcents près pour l'ensemble.
L'exagération des majorités et de sous-représentassions
des minorités issues des sanctions majoritaires sont supprimées.
Tel est le but primordial de la représentation proportionnelle
(RP).47
A coté de ces effets bénéfiques, la
représentation proportionnelle présente des inconvénients
pourtant lourds. En effet, la représentation proportionnelle agit de
manière déterminante sur le nombre et la structure des formations
politiques : elle conduit nécessairement à la multiplication des
partis politiques ; en donnant à chacun une structure monolithique
extrêmement hiérarchisée et disciplinée sous
l'autorité des dirigeants nationaux même lorsque ceux-ci sont
démocratiquement élus. La technique de la représentation
proportionnelle approchée ou intégrale est la cause essentielle
de ce phénomène qui subordonne les élus aux échecs
du parti de manière autoritaire et très excessive.
46 E. Mpongo bokako, op.cit, p. 232
47 Ibidem, p. 233
[38]
Cette discipline interne extrêmement stricte et pesante
est la conséquence du système des listes inévitablement
bloquées en droit ou en fait, l'élection des parlementaires
résulte en effet, autant de leur rang sur la liste que des
électeurs, car seuls les premiers candidats de la liste peuvent
être élus dans la proportion des voix obtenus par le parti.
Cette représentation proportionnelle déforme
dangereusement l'opinion lorsque les divisions de celle-ci sont trop
accentuées. En effet, il suffit pour cela que des crises graves secouent
le pays ou que des extrémistes puissants rendent précaire
l'unité de la nation. La justice mathématique est alors
remplacée par une caricature. Les partis politiques accentuent leurs
divisions en alimentant celles-ci de toute difficulté de l'heure : aucun
parti n'ayant besoin des autres puisque le vote utile et des coalitions
électorales sont dépourvus d'intérêt
électoral. La formation de l'opinion devient impossible ; elle est
paralysée puisque toute majorité nationale est interdite par le
mode de scrutin. Les divisions artificielles des partis détruisent
même toute construction antérieure de ce genre et cette initiative
pour y revenir. La représentation proportionnelle qui doit en principe
photocopier l'opinion n'en fournit alors qu'une image
brouillée.48
Comme le souligne Edouard MPONGO BOKAKO « Les bons
résultats de la représentation proportionnelle en Europe du nord
et en Suisse montrent les conditions et les limites de son utilisation. Elle
réussit dans les pays de petites dimensions ayant une longue habitude de
la démocratie, parvenus à un haut degré de
développement et à des solutions perfectionnées de leurs
problèmes sociaux qui ne connaissent aucune forme d'extrémisme
sinon des dimensions négligeables et libérés de toute
responsabilité internationale importante.49
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