RESUME
xvi
Ce travail de thèse porte sur l'analyse thermique de la
conduction instationnaire dans les milieux poreux. Cette recherche s'articule
autour de trois objectifs principaux: Comprendre et modéliser le
transfert de chaleur dans les macros, micros et nanostructures; Prendre en
compte le caractère non-linéaire des propriétés
thermophysiques; Rechercher les caractéristiques nécessaires pour
une isolation thermique du bâtiment au Cameroun.
Le couplage de l'équation de conservation de
l'énergie aux relations constitutives du flux de Fourier et de
Cattanéo-Vernotte conduit à quatre équations fortement
non-linéaires et de complexité différentes : une
équation de diffusion et une équation de propagation de la
température, une équation de diffusion et une équation de
propagation de l'enthalpie. Ces équations sont résolues
numériquement par la méthode des volumes finis en
considérant différents types de conditions aux limites :
températures imposées et/où flux aux frontières.
Les résultats des expérimentations numériques montrent que
les équations de diffusion et de la température
généralement utilisées pour décrire la conduction
instationnaire présentent des limites lorsque les
propriétés thermophysiques du milieu dépendent de la
température et qu'il est préférable d'utiliser les
équations de diffusion et de propagation de l'enthalpie. La comparaison
des profils de la température dans trois milieux poreux réels
constitués de mousse de polystyrène, de fibre de silice (verre)
ou de bois montrent que les milieux en fibre de bois sont mieux adaptés
que les deux autres pour l'isolation thermique en climats tropicaux tels qu'au
Cameroun.
Mots-Clés: conduction instationnaire, milieux
poreux, mousse de polystyrène, fibre de silice, fibre de bois,
diffusion, propagation, enthalpie, température, flux, Fourier,
non-Fourier, Cattanéo-Vernotte, Temps de relaxation, méthode
numérique, volumes finis.
HEUGANG NDJANDA Audrey Steven
Thèse de Master of science, Option physique,
Spécialité Mécanique-Energétique/2012 Laboratoire
de Mécanique et de Modélisation des Systèmes Physiques,
Université de Dschang
INTRODUCTION
1
La protection thermique des systèmes physiques et des
équipements les plus divers tout autant que le confort thermique dans
les domaines du bâtiment, de l'automobile et de l'aéronautique;
les protections incendies; le conditionnement des cultures et des aliments dans
les domaines respectifs de l'agro-industriel et de l'agro-alimentaire;
l'irradiation des tissus biologiques à l'aide des lasers à
rayonnement thermique dans le domaine médical, l'amélioration et
la fabrication des nouveaux matériaux en science des matériaux ou
dans le traitement des pièces en ingénierie des matériaux;
la conception des réacteurs nucléaires et la diminution des
pertes d'énergie des processus qui s'y produisent... ont
été un souci constant de l'ingénieur, du chercheur, du
politique (Minkowycz et co-auteurs, 1999; Sacadura, 2011). Ces deux
dernières décennies, ces préoccupations se sont
accentuées avec les problèmes :
1. Du confort climatique dans nos pays tropicaux, en voie de
développement, où il fait de plus en plus chaud et où
l'urbanisation a suscité un accroissement considérable de la
demande énergétique.
2. De protection de l'environnement et de l'économie
de l'énergie. En effet, avec environ 35-40% des énergies
consommées dans le bâtiment (Laaly, 1995a; Kaemmerlen et
co-auteurs, 2010), la construction des bâtiments propres :
bâtiments avec une balance environnementale positive, c'est-à-dire
les impacts positifs sont plus importants que les négatifs; est un enjeu
considérable. La réduction de la consommation
énergétique dans les bâtiments permet un gain sur les
énergies non renouvelables utilisées pour la climatisation et/ou
le chauffage; et par conséquent permet une réduction de la
quantité de polluant rejeté dans l'atmosphère (Laaly,
1995b).
Le développement, l'utilisation et l'intégration
des isolants thermiques propres sont par conséquent des enjeux
importants dans l'architecture des bâtiments (Meukam, 2004. Ngohe-Ekam,
2005). Dans ce cadre, un grand nombre de travaux théoriques,
expérimentaux et de conception s'appliquent couramment dans les domaines
aussi variés. Ainsi :
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? Dans le domaine de la protection incendie un rideau d'eau sert
d'isolant thermique entre une cible à protéger et une source
d'incendie (Torvi et Dale, 1999 ; Collin, 2006).
Figure 0-1: Principe d'un dispositif de
protection incendie (Collin, 2006)
? Dans le bâtiment, le confort thermique dans les maisons
et bureaux, la conception des
fours et des chambres à combustion, la protection
thermique des engins spatiaux nécessitent une connaissance
préalable des isolants thermiques utilisés et des processus
thermiques qui s'y produisent (Doermann, 1995; Goyheneche, 1997; Kaemmerlen,
2009).
Figure 0-2:Brique de céramique
utilisée comme isolant dans les fours (BEE, 2005)
? Dans le domaine du développement des matériaux
avec par exemple les problèmes
de la cuisson du verre, du revêtement, du perçage
et de la coupure des pièces et objets divers et le domaine de la
nanotechnologie, l'analyse thermique permet de décrire les tensions
thermiques et les modifications profondes survenant au niveau même de la
microstructure du matériau. (Brorson et co-auteurs, 1987; Kar et
co-auteurs (1992); Tzou,
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1995; Gustavo et Tien, 1999; Vadasz, 2005). Un exemple de
dispositif de fabrication de matériau utilisant l'émission d'un
champ d'électron à partir d'une nano-sonde est donné
à la figure suivante.
Figure 0-3: Dispositif de fabrication et traitement thermique des
matériaux (Wong et co-auteurs, 2007).
Les milieux étudiés dans les différents
domaines cités plus haut et bien d'autres domaines encore, sont dans
leur grande majorité poreux : matériaux dont la matrice
solide comporte des pores ou cavités à travers lesquelles un
fluide peut s'écouler (Langlais et Klarsfeld, 1985). La
géométrie des pores est diverse et complexe. C'est ainsi qu'on
distingue les grands groupes de milieux poreux suivants: les isolants
granulaires (Figure 4.a), les matériaux en
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fibres de bois (Figure 4.b), la peau humaine (Figure 4.c) et les
céramiques (Figure 4.d).
a)-Echantillon de quartz contenant des bulles b)-Milieu en fibre
de bois
c) Peau humaine d) -Coupe transversale d'un échantillon
de
céramique de Zircone
Figure 0-4: Exemple de milieux poreux (Baillis et co-auteurs,
2007; Kaemmerlen, 2009; Sacadura, 2011; Dombrovski et co-auteurs, 2007)
Au sein de ces milieux poreux les phénomènes de
transfert de chaleur sont: La conduction à travers la matrice solide
mais aussi à travers le fluide interstitiel piégé ou
emprisonné dans les pores; la convection thermique naturelle du fait des
mouvements du gaz interstitiel dû aux différences de
températures entre les faces chaudes et froides de l'isolant; le
transfert radiatif faisant intervenir l'énergie du champ
électromagnétique dans le domaine des longueurs d'onde du
rayonnement thermique (Langlais et Klarsfeld, 1985; Tong et Tien, 1980). Les
principales questions de recherche en transferts thermiques des milieux
poreux concernent alors:
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> La modélisation des transferts de chaleur.
> La caractérisation thermique des matériaux,
par la détermination de leurs propriétés thermophysiques,
requérant un modèle théorique et expérimental
d'identification adéquat et aussi complet que possible.
> L'élaboration des matériaux nouveaux et
toujours plus performants, nécessitant le développement d'outils
d'analyse et de simulation fiables, performants et précis.
L'élaboration de matériaux poreux nouveaux
nécessitant des équipements de laboratoire lourds et couteux. Il
est par conséquent utile de développer des modèles
théoriques pour simuler le comportement thermique du matériau et
identifier leurs propriétés thermiques. C'est dans cette optique
que s'inscrit notre travail dont les objectifs sont
les suivants:
? La modélisation du transfert de chaleur par
conduction instationnaire aux échelles macroscopique, microscopique et
nano-scopique;
? L'analyse des transferts conductifs avec
propriétés thermophysiques variant avec la température;
? La recherche d'un isolant thermique adapté aux
climats tropicaux tels qu'au Cameroun.
Dans ce mémoire, nous examinons les transferts
thermiques par conduction en régime instationnaire, dans les
matériaux poreux. Le transport de chaleur sera modélisé
soit par la loi de Fourier traduisant la diffusion de chaleur aux
échelles macroscopiques soit par loi de Cattanéo-Vernotte
caractérisant la propagation de l'onde de chaleur au sein des
matériaux micro et nano structurés.
Pour cette étude, nous formulons les
hypothèses principales suivantes :
+ Les conditions de l'équilibre thermodynamique local
sont remplies. Ce qui suppose que la température de la phase solide est
la même que celle de la phase fluide
+ La conduction thermique dans le milieu poreux est
examinée; la convection négligée: le gaz interstitiel est
supposé immobile. On néglige également le transfert
radiatif: La porosité est supposée faible ou moyenne (<70%) et
le transfert thermique se fait à température ambiante.
+ La géométrie du matériau
étudié est supposée plane et le transfert thermique est
unidimensionnel.
+ Les frontières pouvant être soumises aux grands
flux ou aux brèves impulsions lasers.
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Le travail est organisé autour de trois chapitres.
Le premier Chapitre porte sur la formulation
mathématique des transferts conductifs instationnaires dans un milieu
poreux. Nous donnons un aperçu des équations à
étudier qui sont de types parabolique et hyperbolique et qui sont en
plus non-linéaires du fait que les propriétés
thermophysiques et les conditions aux frontières dépendent de la
température.
Le deuxième Chapitre est consacré
à la résolution des équations de diffusion et de
propagation thermique établies au chapitre précédent. Nous
envisageons l'approche numérique. La méthode des volumes de
contrôle est utilisée pour discrétiser les équations
de diffusion et de propagation non-linéaires et les conditions aux
limites.
Au troisième Chapitre nous utilisons les
théories développées dans les chapitres
précédents pour analyser le comportement thermique des
matériaux. L'influence du type de matériaux sur le transfert
thermique est étudiée. Les résultats obtenus sont
présentés.
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TRANSFERT CONDUCTIF INSTATIONNAIRE EN MILIEU
POREUX
Les objectifs de ce chapitre sont de décrire les
mécanismes de conduction thermique aux échelles macroscopiques et
microscopiques, et de les modéliser c'est-à-dire de donner la
formulation mathématique du problème de conduction thermique dans
les milieux poreux. Pour ce faire, nous développons :
ô ô Q
f f ô
QdV = dV
ô t V V t
? L'équation de base qui traduit les mécanismes du
transfert de chaleur dans les
matériaux poreux par conduction en régime
instationnaire: L'équation de
conservation de l'énergie.
? Les relations constitutives du flux de chaleur.
? Les conditions aux limites associées.
est l'énergie thermique volumique, Q ?
?CpT
la température
I-1.EQUATION DE CONSERVATION DE L'ENERGIE
Soit un volume élémentaire d'étude de notre
milieu délimité par une surface . On
suppose que le volume et sa frontière sont
indéformables, fixes, continus et semi-
transparents au cours du transfert thermique. L'accroissement de
l'énergie thermique par
échauffement dans ce volume vaut :
? ?
? ? ?
? ? ? ?
? ? ?
? C ( T ) T
( r , t ) dV
? C ( T ) T
( r , t )
dV
V ?? ? t V
?? ?? ? t ??
chaleur massique
masse volumique
(I.1)
soit
p
(I-
2)
où
Cla
p
? la
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Deux situations peuvent provoquer cet accroissement :
1- La présence d'une source (ou d'un puits) dans le
milieu. Mais dans cette étude, nous supposerons qu'il n'y a pas
création d'énergie.
2- L'énergie thermique peut être transportée
d'un point du milieu vers un autre du même milieu que nous
considérons dans cette étude.
Le transport est alors caractérisé par le vecteur
courant thermique total . Le flux de
chaleur qui traverse l'élément de volume
s'écrit alors :
(I-3)
Le théorème d'Ostrogradski nous permet
d'écrire
(I-4)
Le premier principe de la thermodynamique sur la conservation de
l'énergie qui s'énonce : L'augmentation de l'énergie
interne au cours du temps (à pression constante) dans un volume de
contrôle du milieu donné, doit être égale à la
somme algébrique des énergies générée (s'il
existe des sources d'énergie au sein du milieu) et libérée
(sortant) par un mode donné de transfert thermique à travers la
surface qui délimite le volume de contrôle.
· f [ ? = ·f _
? ? ?
C ( T ) T
( r , t ) dV div
( q ) dV
V ?? ? t V
L'application de ce principe en supposant qu'il n'y a pas
création d'énergie, donne :
t
??
(I-5)
soit
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(I-6)
La conservation étant vérifiée quelque soit
le volume de contrôle considéré, on a:
où
a C ( T ) aT a
T
T + C(T)
= -- div q c q r
aT a t a t
(I-7)
En remplaçant le flux total par son expression, on
obtient:
( + )
(I-8)
soit encore
(I-9)
Etant donné que la capacité calorifique
dépend implicitement du temps puisque la
?T + C ( T
)? = div q c q r
( + )
? a T ?a t
température dépend du temps, l'équation
(I-9) s'écrit encore:
T ? T
? C(T)
( a C ( T ) ? a
T
soit
(I-10)
(I-11)
Dans le cas où le premier terme du membre de gauche
de la relation (I-11) est
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C(T
négligé devant le deuxième terme du
même membre, l'équation (I-8) s'écrit aussi:
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(I-12)
Les équations (I-8) et (I-12) peuvent finalement
s'écrire respectivement:
? ? ? ? ? ?
(I-13a)
(I-13b)
10
avec
est le terme source (radiatif) additionnel Nous nous
intéresserons dans cette étude aux équations (I-13) de
conservation de l'énergie. La conservation de l'énergie
exprimée par l'équation (I-13a) est très répandue
dans la littérature. L'équation (I-13b), n'est par contre, pas
très utilisée dans la littérature (Murthy et Mathur
(1998), Yuen et co-auteurs (2003) et Dorcak et co-auteurs (2010)).
Le problème désormais de cette formulation
mathématique est d'expliciter le flux de
conduction en fonction de la température .
qc (i, t) k T (
i , t )
|