4.2.2 Résultats et discussion
4.2.2.1 Caractéristiques pédologiques du
substrat dans les bacs de culture
Les résultats des analyses pédologiques
indiquent que le substrat des bacs dans lesquels les Typha se sont
développés est à dominance de limon grossier. Il est
moyennement pourvu en matières organiques qui ne s'accumulent pas; la
minéralisation est rapide. Les taux élevés en Mg et Na ont
un effet dispersant sur les colloïdes (organiques et minéraux).
Le sol dans les bacs est faiblement acide à neutre. Il
est bien pourvu en bases. La capacité d'échange est faible
(texture sableuse). Il est moyennement pourvu en Ca et Mg. La teneur en
potassium est normale cependant l'absorption de cet ion peut être
entravée par l'excès relatif du Mg. En effet, la teneur en Mg
dépasse de loin la norme qui est d'environ 0,17 méq. Le taux de
sodium trouvé peut être relativement gênant pour les
plantes. La carence en phosphore est prononcée.
En définitive, le sol mis dans les bassins
d'expérimentation est à dominance de limons grossiers faiblement
acide à neutre et moyennement pourvu en matière organique,
saturé en bases. Il a une bonne saturation en Ca et K. Le sol est bien
pourvu en azote mais l'absorption de cet élément par les plantes
peut être entravée par le déficit relatif en phosphore. Il
s'agit d'un sol hydromorphe minéral sur matériau sableux
alluvionnaire.
4.2.2.2 Multiplication et croissance
Le nombre d'individus apparus est situé entre 110 et
250 plants par m2 dans les bacs. Le plus grand nombre a
été observé dans le bac où il y a eu
transplantation de rhizome. Cela confirme la rapidité et le potentiel de
la reproduction végétative par rapport à la reproduction
sexuée. Sur la base des chiffres obtenus on peut estimer la
densité potentielle du nombre d'individus par hectare entre 1 100 000 et
2 500 000. Bien entendu, dans la nature les densités sont beaucoup plus
faibles compte tenu de la compétition entre les individus
(compétition intraspécifique) et la concurrence d'autres
espèces (compétition interspécifique) la
disponibilité des nutriments et de l'eau indispensables au
développement des plantes.
Les densités varient entre trente (30) et soixante-dix
(70) individus par m2 soit 300 000 et 400 000 individus à
l'hectare dans les conditions naturelles lacustres où les peuplements
paraissent stabilisés. La densité des Typha est
très variable et dépend de la vigueur des individus qui
s'installent, de la permanence de l'humidité et de la
disponibilité des nutriments dans le sol.
143
Typha peut produire entre 70 000 et 700 000 fruits
par inflorescence (Yeo, 1964). Un akène de Typha domingensis
est présenté sur la Figure 74. La diaspore est pourvue d'un
faisceau de poils légers qui favorisent la dissémination
anémochore de la plante sur de grandes distances.
![](tude-de-la-flore-vasculaire-de-la-vegetation-et-des-macrophytes-aquatiques-proliferants-dans-l81.png)
144
Figure 27 - Typha domingensis Pers.
(a) Plante entière; (b)
Inflorescence: le gynécée se trouve en
dessous de l'androcée qui disparaît à la maturité de
l'épi ; (c) Fruit : un akène
145
Evans & Etherington (1991) ont rapporté que la
moyenne du poids d'une graine de T. latifolia est de 0.03 mg. Les
petites graines de Typha produites en abondance sont dispersées
sur de grandes distances par le vent.
Les graines ont souvent un pouvoir germinatif
élevé atteignant les 100% dans les bonnes conditions
d'humidité et de luminosité (Faye, 2004). Pour germer, les
graines ont besoin d'une humidité élevée du sol, d'une
température élevée et d'une intense luminosité
(Sifton, 1959 ; Lorenzen et al., 2000). Une intensité lumineuse
supérieure à 2500 lux est nécessaire pour une bonne
germination et un bon développement de la plantule (Sharma and Gopal,
1979b). Les graines ne germent pas sous une lame d'eau de 50 cm à cause
certainement d'un déficit en lumière (Gopal, 1982). Elles peuvent
demeurer viables pendant une longue période (Bedish, 1967). La
température optimale pour la germination de Typha se situe
entre 25 et 35 oC (Sifton, 1959). L'oxygène n'est pas nécessaire
à la germination (Sifton, 1959) ; en revanche, il est indispensable
à la multiplication végétative par les rhizomes. Le
pouvoir des graines à germer en anaérobiose constitue l'une des
raisons de la dominance de Typha dans les biotopes aquatiques
dulçaquicoles. La germination commence rapidement en milieu ouvert,
aéré, ensoleillé avec une humidité
élevée. Les conditions de luminosité et de
température optimales pour une bonne germination de Typha sont
remplies quasiment toute l'année dans la région du delta et le
lac de Guiers.
Typha domingensis se propage rapidement au moyen des
graines (Sharma & Gopal, 1979a). Des plants de Typha nés
des graines ont fleuri la seconde année (Yeo, 1964). La reproduction par
les graines paraît être limitée aux premiers stades de
l'installation de la plante; ensuite, la multiplication est surtout
végétative.
La multiplication végétative à partir des
rhizomes est prépondérante dans les peuplements
déjà en place alors que la colonisation de nouveaux espaces
s'effectue en grande partie par les graines qui sont produites en abondance
dans toute la région durant la longue saison sèche et
disséminées largement par les vents et les eaux. Des observations
similaires ont été effectuées dans des typhaies aux Etats
Unis. En effet, là également, les Typha colonisent les
nouveaux sites par la dispersion des graines (Grace, 1987).
Dykyjova & Kvet (1978) ont indiqué qu'après
la germination de Typha domingensis, la plante se multiplie par
rhizomes sur des superficies atteignant 60 m2 en l'espace de 2 ans.
McNaughton (1966) et Grace (1984) ont trouvé qu'après
l'occupation complète du milieu par Typha, la germination des
graines peut être inhibée, le peuplement se maintient alors par
multiplication
végétative. Les typhaies produisent de nombreux
rhizomes et une litière très dense ; ce qui réduit
l'opportunité pour d'autres plantes de s'établir ou de survivre
dans le même espace.
Ainsi, la reproduction sexuée est essentielle pour la
colonisation de nouveaux espaces mais les peuplements se maintiennent et
s'étendent ensuite principalement par multiplication
végétative. Un sol saturé d'eau, pauvre en oxygène
ne permettra pas le développement de nouveaux rhizomes à moins
que l'oxygène soit acheminé en profondeur par les feuilles (GTZ,
2001). Pour se développer les rhizomes de T. domingensis ont
besoin d'une humidité constante et un sol inondé pendant
plusieurs mois. La plante préfère une eau calme de 1 m de
profondeur environ (Adam, 1961). L'augmentation graduelle de la profondeur
favorise le développement des rhizomes (Gopal, 1982). Dans le fleuve et
le lac, la plante est rencontrée jusqu'à des profondeurs d'eau de
1,50 m.
S'il est vrai que le macrophyte disparaît des stations
trop acides, elle résiste bien à un degré de salure des
eaux ou du sol relativement élevé pourvu que les rhizomes soient
toujours dans un sol saturé d'eau; Trochain (1940) a trouvé des
Typha dans des eaux à 5,8 pour mille de Na Cl.
Différentes espèces de Typha sont connues comme
modérément tolérant au sel (McMillan, 1959 ; Lombardi
et al., 1996).
Quand les peuplements sont bien établis, la plante
tolère de conditions écologiques plus larges. Le
développement des Typha dans le delta et le lac de Guiers se
fait activement aussi bien par voie sexuée que par la voie
végétative.
Les hauteurs minimales, moyennes et maximales des plantes sont
indiquées dans le tableau 22.
Tableau 22- Hauteurs minimales, moyennes et maximales de
Typha dans les bacs de culture
|
Bac A
(rhizome Typha)
|
Bac B
(graine Typha)
|
Bac C
(graine Typha)
|
Hauteur moyenne (cm)
|
90
|
94,1
|
55
|
Hauteur minimale (cm)
|
20
|
18
|
13,5
|
Hauteur maximale (cm)
|
206
|
180
|
144
|
Ecart type
|
36,5
|
36,4
|
23,4
|
146
147
La hauteur maximale atteinte par Typha dans
l'ensemble des bacs a été de 2 m au bout de 248 jours (Figure
28). Celle-ci est bien en deçà des 3,5- 4 m, mesurés en
milieu naturel.
Au plan de la hauteur maximale atteinte par les plantes, il
n'apparaît pas de différences significatives entre les bacs
ensemencés et non ensemencés avec Typha.
200 180 160 140 120 100
|
|
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|
|
|
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Hauteur A (cm)
Hauteur C (cm)
|
80 60 40 20
0
|
|
|
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26-Fév 6-Mar 12-Mar 5-Avr 15-Avr 4-Jun 14-Jun
19-Jun
4-Jul 14-Jul 2-Aoû 10-Aoû 15-Sep 30-Sep
15-Oct
|
|
|
|
Figure 28 - Evolution de la hauteur maximale de T.
domingensis dans les bacs A et C
Durant les 8 premiers jours après la germination, les
plantes croissent peu. Il s'agit sans doute d'une période d'adaptation
aux conditions expérimentales. Jusqu'au 20ème jour la
croissance est relativement faible. A partir de cette date, les plants se
développent rapidement (près de 1 cm par jour). Elles restent
cependant chétives dans les bacs car elles se développent
uniquement à partir des réserves contenues dans le substrat qui
s'épuisent progressivement. De nombreux individus meurent avant
l'âge adulte.
Les mesures biométriques effectuées sur 10
individus suivis dans le bac C où les Typha proviennent
uniquement des graines contenues dans le substrat ont donné les
résultats présentés sur les graphiques ci-après
:
Le nombre moyen maximal de feuille par individu a
été de 9,8 (Ecart type 1,9) (Figure 29)
148
|
|
|
y = 0,0142x - 490,86
R2 = 0,6201
|
|
|
|
|
|
|
|
nombre de feuilles
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
jours
Moyenne tendance
|
|
Figure 29 - Evolution moyenne du nombre de feuilles par individu
de Typha du bac C
Il y a de grandes disparités entre les individus. La
moyenne est de 10 feuilles par individus à l'âge adulte. Elle
parait fort variable.
![](tude-de-la-flore-vasculaire-de-la-vegetation-et-des-macrophytes-aquatiques-proliferants-dans-l84.png)
y = 0,7115x - 24997
R2 = 0,8653
moyenne Linéaire (moyenne)
jours
longueur moyenne des feuilles
Figure 30 - Evolution moyenne de la longeur maximale des feuilles
de Typha du bac C
La moyenne des longueurs maximales a été de 157,5
cm (Figure 30). Elle présente une bonne corrélation dans le
temps.
La largeur maximale des mêmes feuilles a été
de 8,43 mm (Ecart type 3,37) (Figure31). Elle est atteinte rapidement et
ensuite elle varie faiblement au court du temps
149
|
|
|
y = 0,0482x - 1691,3
R2 = 0,5722
|
|
|
largeur moyenne des feuilles
|
|
|
|
|
|
|
Moyenne tendance jours
|
|
Figure 31 - Evolution de la largeur moyenne des feuilles de
Typha du bac C
Le diamètre moyen à la base des individus de
Typha est de 26,8 mm (Ecart type 6,7) (Figure 32). Il s'accroit au fur
et à mesure du développement des plantes. Il est fortement
corrélé à l'âge de la plante.
y = 0,0935x - 3274,7 R = 0,9486
![](tude-de-la-flore-vasculaire-de-la-vegetation-et-des-macrophytes-aquatiques-proliferants-dans-l86.png)
Moyenne tendance jours
Diamètre moyenne à la base des feuilles
Figure 32 - Evolution moyenne du diamètre à la base
de Typha du bac C
De façon générale, il y a une grande
similarité dans l'évolution des paramètres de croissance
des différentes parties suivies L'accroissement le plus rapide a
été observé au niveau de la longueur des feuilles, suivie
du diamètre à la base des plantes. Les feuilles atteignent
rapidement leur largeur maximale et ensuite celle-ci varie faiblement. La
richesse du substrat en éléments
150
nutritifs et l'humidité sont des facteurs importants
qui permettent au potentiel de croissance de la plante de s'exprimer.
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