Conclusion partielle
Au terme de ce chapitre, nous pouvons dire que la RDC
présente plusieurs éléments fondamentaux de
l'émergence, notamment une relative stabilité
macroéconomique, une hausse des exportations, des réformes
libérales ayant favorisé une recrudescence des IDE dans le pays,
des infrastructures de base en cours de construction. Cependant, des efforts
colossaux restent encore à fournir pour atteindre la stabilité
institutionnelle et politique, véritables tremplins pour l'attrait des
investissements étrangers. Par ailleurs, la mise en place d'un
leadership politique transformationnel, la diversification des activités
économiques, l'industrialisation du pays, l'amélioration des
performances des entreprises publiques sont des défis à relever
pour atteindre l'émergence. Eu égard aux prévisions et aux
comparaisons effectuées entre les BRICS, les BENIVM et la RDC, il
apparaît évident que l'émergence en 2030 est une utopie,
à moins que ne s'opère un véritable miracle
économique. Il ressort de nos analyses que la RDC pourrait, en 2030, au
mieux atteindre le niveau des pays qui ont aujourd'hui des revenus
intermédiaires.
Conclusion
générale
Nous sommes arrivés au terme de notre travail. Dans le
premier chapitre, nous avons fait le point sur le phénomène de
l'émergence, afin d'en cerner la réalité. Dans le
deuxième chapitre, nous avons fait une présentation de la
République Démocratique du Congo, en mettant l'accent sur les
potentialités dont regorge le pays. Dans le troisième et dernier
chapitre, nous avons analysé les fondements de l'émergence de le
RDC et dressé la liste des obstacles à surmonter par le pays afin
d'atteindre l'objectif affiché de l'émergence économique.
L'émergence est un phénomène dont on ne
peut se passer aujourd'hui dans le débat sur le développement, et
qui ne passe pas inaperçu dans l'opinion publique, tant ses effets sont
visibles sur la répartition mondiale des richesses et la distribution
des rôles entre les pays et les régions. En effet, ce
phénomène multidimensionnel a entraîné une
sérieuse remise en question du processus de développement des
nations. Il est désormais clairement admis que pour tout pays pauvre
désireux d'améliorer les conditions de vie de ses populations, le
passage par le stade de l'émergence est une étape primordiale. Or
l'atteinte de l'émergence peut se révéler être un
réel parcours du combattant pour les pays pauvres. En effet, pour ces
pays trop longtemps minés par des querelles politiques menant parfois
à des problèmes sécuritaires comme en RDC (coups d'Etat,
sécessions, guerres tribales), par des incapacités dans la
gestion des affaires publiques, des programmes économiques douteux, la
sortie du tunnel ne se fera pas sans difficultés. Les structures
économiques, institutionnelles et même mentales ne sont pas
adaptées aux enjeux contemporains du développement. La solution
réside donc dans les changements qui doivent être
opérés dans ces pays pour qu'ils se mettent sur la voie du
développement, et qui constituent les fondamentaux de
l'émergence.
Après observation et analyse de l'émergence des
pays aujourd'hui considérés comme pays émergents,
notamment les dragons et tigres asiatiques et le groupe des BRICS, nous avons
pu mettre en exergue quelques caractéristiques qui leur sont communes et
ressortir les fondamentaux appliqués par ces pays à l'aube de
leur processus d'émergence. Il ressort de cette analyse que les pays
émergents sont ceux qui ont su se constituer en pôles d'attraction
des investissements, diversifier et accélérer durablement et
harmonieusement leur croissance économique, et qui se sont ainsi
intégré avec succès dans l'économie mondiale. Cela
n'a été possible que parce que ces pays ont mis en place un cadre
institutionnel incitatif pour les investissements, présenté une
stabilité politique et macroéconomique, et mis sur pied une
transformation structurelle de l'économie.
L'on est alors en mesure de déterminer les fondements
de l'émergence, partant de l'expérience des pays
émergents : une vision à long terme déclinée
en un plan stratégique national et en actions opérationnelles
(vision politique) ; une communication forte permettant l'appropriation de
la vision par les populations, ainsi qu'un consensus national autour de
l'objectif d'émergence, de sorte que les populations et les acteurs
politiques, qu'ils soient de l'opposition ou de la majorité, travaillent
tous pour la réussite de l'émergence (leadership politique
transformationnel) ; un partenariat étroit entre l'Etat et le
secteur privé qui met en oeuvre la vision politique sur le plan
économique ; la mise à niveau du secteur public qui doit
être efficace pour élaborer et mettre en oeuvre un cadre
institutionnel de qualité (administration publique au service du
développement) ; le changement de mentalités, l'adoption au
niveau national de nouvelles valeurs propices à l'émergence
(lutte contre la corruption, la gabegie financière, le laxisme,
promotion de la recherche effrénée de la performance, de
l'intégrité, la discipline, la rigueur dans le travail) surtout
dans le service public qui doit garantir la qualité du cadre
institutionnel et la bonne gouvernance.
La situation en RDC est caractérisée par des
forts taux de croissance depuis 2002, une relative stabilité sur le plan
macroéconomique, des exportations et des investissements directs
étrangers entrants qui ont cru respectivement de 16% et 22% entre 2005
et 2015. Des résultats économiques obtenus au prix d'efforts et
de réformes visant notamment à améliorer
l'attractivité du pays. On peut remarquer l'existence d'une vision
politique à long terme déclinée en un plan
stratégique national et des actions opérationnelles depuis 2001
avec les différents programmes économiques du gouvernement, qui
visaient d'abord la stabilité politique, le rétablissement de la
paix et de la sécurité, la stabilité
macroéconomique, la reconstruction, la réduction de la
pauvreté, etc. (DSRP, DSCRP 1, DSCRP 2), et qui visent maintenant
l'atteinte de l'émergence (PAG 2012-2016, PNSD 2017-2021 et 2022-2030).
En outre, la mise à niveau du service public est en oeuvre, notamment
avec les projets de renforcement des capacités des acteurs du secteur
public (PRC-GAP en 2011), la réforme des entreprises publiques mise en
oeuvre par le COPIREP, la formation de nouveaux cadres et agents de l'Etat
à travers l'Ecole Nationale d'Administration, l'administration publique
étant chargée d'assurer l'élaboration, la mise en oeuvre
et le suivi du cadre institutionnel garant de la bonne gouvernance.
Cependant, beaucoup reste encore à faire, notamment en
ce qui concerne la stabilité politique, car les querelles politiques
semblent interminables en RDC. Ces tensions politiques empêchent la
création d'un consensus national autour de l'émergence, et
l'appropriation par les populations de la vision, de sorte que chaque leader
politique cherche à imposer sa vision au détriment d'une vision
de développement qui se doit d'être nationale. Le climat politique
tendu influe aussi sur les flux d'investissements étrangers, car
personne ne veut investir dans un pays où tous les cinq ans plane
l'ombre d'un chaos, à cause des échéances
électorales. De plus, l'opinion publique congolaise n'est pas assez bien
renseignée sur le phénomène d'émergence. Ce dernier
reste un concept étranger et lointain pour la majorité des
congolais. En outre, la faiblesse du leadership politique, qui du reste n'est
pas transformationnel, entrave l'adoption par la communauté nationale
des valeurs clés pour la réussite du processus d'émergence
que sont la recherche de la performance, la discipline et la rigueur dans le
travail. La faible diversification des activités économiques, la
faiblesse des infrastructures de base, la faible industrialisation du pays,
sont autant de défis qu'il faut relever pour voir la RDC devenir un pays
émergent.
Enfin, l'objectif affiché par le gouvernement congolais
d'atteindre l'émergence en 2030, apparaît non réaliste au
vu des prévisions et des comparaisons effectuées, qui montrent
clairement que la RDC ne pourrait atteindre à cet horizon que le niveau
des futurs émergents d'aujourd'hui, donc au mieux être un pays
à revenu intermédiaire. Quoi qu'il en soit, les jalons de
l'émergence ont été posés, et il appartient
à chacun d'accompagner le processus par le travail et la discipline. Le
processus d'émergence est un travail de longue haleine, qui demande un
effort national conséquent. Mais comme le dit une sagesse populaire bien
connue, « un voyage de 1000 kilomètres commence par un
pas ».
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