Gestion durable de la réserve de biosphère de Dimonika : contribution à l'estimation de la quantité de carbone de la forêt modèle de Dimonika (république du Congo)( Télécharger le fichier original )par Bertrand Russel TSOUMOU Ecole Postuniversitaire d'Aménagement et Gestion Intégrés des Forêts et Territoires Tropicaux (ERAIFT/UNESCO) - DESS (Diplôme d'Etude Supérieure Spécialisée 2014 |
CHAPITTRE 1 : DEFINITION, CADRE CONCEPTUEL ET ANALYSEBIBLIOGRAPHIQUE1.1. Définition et clarification conceptuelleLa pertinence de cette étude réside dans la maîtrise et la compréhension de certains concepts à savoir : 1.1.1. Aires protégées On considère comme aire protégée, " les zones qui sont aménagées de façon à répondre à des objectifs de conservation spécifiques et compatibles"(Sournia, 1998). Ainsi, face aux nombreux problèmes de gestion des ressources naturelles et de conservation auxquels l'humanité est confrontée, la création d'aires protégées constitue une solution relativement simple. Ce type de solution s'inscrit dans la perspective de la protection de zones remarquables dont le début remonte à 1872 avec l'émergence du concept de Parc National (Maldague et al., 1997). La création d'un parc ou d'une réserve a pu priver les populations locales de terres dont elles étaient traditionnellement responsables. La non-association de ces populations riveraines à l'aménagement et à la gestion de l'aire protégée a entrainé de nouveaux conflits, parfois violents, entre l'administration des parcs et la zone périphérique. Depuis quelques années, une aire protégée est considérée comme un capital naturel exploité et contrôlé par diverses activités et acteurs (villageois, fonctionnaires, touristes etc.) partenaires de l'écodéveloppement rural (Heymans, 1999). Cependant, toute ressource requiert des objectifs de gestion spécifique ; c'est dans ce cadre que les aires protégées peuvent être classées en fonction des objectifs par lesquels elles sont gérées. C'est ainsi, l'UICN a définit les critères internationaux de classement des aires protégées. 1.1.2. Réserve de Biosphère Réserve nationale déclarée comme bien du Patrimoine Mondiale en raison de ses spécificités biologiques, écologiques, culturelles ou historique et dont la conservation est l'un des objectifs principaux. Les réserves de biosphère sont des sites désignés par les gouvernements nationaux et reconnus par l'UNESCO dans le cadre de son Programme sur l'Homme et la Biosphère (MAB) pour promouvoir un développement durable basé sur les efforts combinés des communautés locales et du monde scientifique. Ces réserves ont pour propos de concilier conservation de la diversité naturelle, culturelle, développement économique et sociale. Elles permettent de tester et développer des approches novatrices de développement durable du niveau local au niveau international. Les réserves de biosphères sont par conséquent considérées comme : ü des sites d'excellences où de nouvelles pratiques sont testées et développées pour une meilleure gestion des ressources naturelles et des activités humaines ; ü des outils pour aider les pays à appliquer les recommandations du sommet mondial sur le développement durable et notamment celles de la Convention sur la diversité biologique et son approche écosystémique ; ü des sites d'apprentissage dans le cadre de la Décennie des Nations Unies pour l'éducation au service du développement durable. Après leur création, les réserves de biosphères restent sous la juridiction souveraine des Etats mais elles échangent et partagent leurs expériences et leur savoir-faire au niveau régional, national et international au sein du Réseau mondial de réserves de biosphères. On dénombre actuellement 621 réserves de biosphères dans 117 pays couvrant plus de 400 millions d'hectares d'écosystème terrestres et aquatiques dont de nombreux représentant des forêts tropicales. Il y a 12 réserves de biosphères1(*) transfrontalières dont parmi lesquelles celle de Dimonika 1.1.3. Gestion durable La gestion durable signifie « la gestion et l'utilisation des forêts et des terrains boisés d'une manière et à une intensité telle qu'elles maintiennent leur diversité biologique. Aussi, leur productivité et leur capacité à satisfaire, actuellement et pour le futur, les fonctions écologiques, économiques et sociales pertinentes aux niveaux local, national et mondial et qu'elles ne causent pas de préjudices à d'autres écosystème » (FAO, 2004)2(*). La gestion des forêts tropicales humides implique une approche interdisciplinaire, globale et intégré, tant en ce qui concerne les programmes de recherche que les stratégies d'aménagement. La gestion des ressources forestières commence par la maîtrise des écosystèmes, de leur fonctionnement, en vue d'évaluer les potentialités et les possibilités d'exploitation qu'ils peuvent offrir, sans se dégrader, afin de satisfaire les besoins de génération actuelles et futures. Ces aménagements visent souvent à augmenter la productivité de ces écosystèmes. De nos jours, qu'il s'agisse de l'aménagement ou de l'élaboration des plans de gestion de ces milieux, l'implication des populations utilisatrices des ressources forestières est très importante. Cette implication est une donne fondamentale dans la mesure où elle facilite l'adhésion de toutes les parties prenantes aux objectifs de conservation et de même, comprendre ses différents enjeux y relatif. Il s'agit de la participation. « La gestion durable des forêts, en tant que concept dynamique et en évolution, elle vise à maintenir et à renforcer les valeurs économiques, sociales et écologiques de tous les types de forêts, pour le bien des générations présentes et futures (Belé et al., 2011)» 1.1.4. Forêt Modèle Quant aux Forêts Modèles, elles se définissent comme un partenariat volontaire entre les acteurs de développement local pour mettre en oeuvre la gestion durable, le développement intégré et la «bonne pratique» sur un territoire forestier multifonctionnel (Mariteuw, 2004)3(*). Elles sont des vastes territoires d'expérimentation, d'innovation et de diffusion des pratiques innovantes en matière de gestion durable des écosystèmes et de gouvernance forestière. Elles intègrent et permettent de penser puis de créer des synergies entre les différents acteurs de l'espace forestier, constituant, en outre, une plateforme de gouvernance territoriale et d'amélioration des conditions de vie des communautés locales à très grandes échelle et sur le long terme. Au plan local, les Forêts Modèles s'appuient sur une infrastructure institutionnelle de gouvernance participative, de facilitation du dialogue territorial et de collaboration entre les acteurs ayant des intérêts parfois divergents sur un espace forestier donné. 1.1.5. Approche systémique L'approche systémique est une méthode globale, intégrée et interdisciplinaire utilisée pour étudier des systèmes dans leurs complexité. Elle privilégie l'étude des interactions entre les composantes (ou éléments) d'un système et les appréhende, non pas isolement mais globalement, en tant que parties intégrantes d'un ensemble dont les différents composants sont dans une relation de dépendance (Lumande, 2013). Cette approche est située à l'opposé de la méthode analytique de Descartes qui analyse, isole les éléments, modifie les variables une à la fois, réduisant ainsi la complexité à des composants élémentaires. Son application est néanmoins essentielle si l'on veut réaliser un développement qui favorise le développement humain, en commençant par lutter contre la pauvreté, tout en assurant le maintien des équilibres de la nature (Maldague et al., 1997). C'est donc une approche intersectorielle et intégré qui prend en compte tous les secteurs qui se rapportent à la vie de l'individu et des groupes sociaux. Ainsi, face aux problèmes complexes qui se posent dans les aires protégées, celles-ci ne peuvent plus être examinées comme des îles ou des entités, isolés des territoires environnants. Il faut au contraire les appréhender dans le cadre de l'aménagement du territoire et suivant une approche systémique, l'aire protégée et ses alentours constituent des systèmes interdépendant, leur tout est un système interactif (Maldague, 1989). Dans le cadre du présent mémoire le problème relatif à l'environnement est tout complexe et cohérent. L'approche systémique parait la méthode la mieux indiquée. Car en effet, les problèmes de gestion de la réserve de biosphère de Dimonika, peuvent être résolus dans sa globalité en associant toutes les parties prenantes pour gérer les interactions mutuelles et les interactions dynamiques entre ses composants et d'identifier les différentes stratégies de gestion de la ressource naturelle ainsi que leur influence sur le développement des communautés locales. 1.1.6. Séquestration du carbone Selon la convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques, le stock de carbone se définit comme la quantité totale de carbone contenue à l'intérieur d'un système doté de la capacité d'accumuler ou de libérer du carbone à un moment spécifié (FAO, 1997). On peut décliner sa compréhension à deux niveaux : a) Puits de carbone En 2010, le GIEC a définit le puits de carbone comme « tout processus ou mécanisme qui absorbe un gaz à effet de serre, tels le CO2 et le CH4 [...] présent dans l'atmosphère ». Le concept de puits de carbone s'est diffusé avec le Protocole de Kyoto créé dans le but de réduire les concentrations croissantes de CO2 atmosphériques et de lutter ainsi contre le réchauffement climatique. La séquestration du carbone (piégeage, ou emprisonnement), désigne le processus d'absorption du dioxyde de carbone (CO2) de l'atmosphère terrestre et de leur stockage dans des puits de carbone. L'écosystème forestier séquestre et emmagasine plus de carbone que tout autre écosystème terrestre (Gibbs et al., 2010). Il accumule d'énorme quantité de carbone dans le bois, les racines, le sol et l'écosystème via la photosynthèse (Pignard et al., 2004). Un puits à pour contraire une source qui consiste en une émission du CO2 ou GES dans l'atmosphère et la variation entre ces deux entités constitue le flux. Cependant les réservoirs ou pools de carbone désignent les Unités physiques capables de stocker du carbone, suite à une action de puits (par exemple la séquestration par les arbres) ou de captage (par exemple dans une formation géologique). Cependant, la quantité de carbone accumulée dans un réservoir désigne un stock. b) Cycle de carbone Dans les écosystèmes forestiers les flux de carbone les plus importants sont causés par la photosynthèse (fixation de carbone) et la respiration (émission de carbone) (Giasson, 2005). Les plantes assimilent le CO2 atmosphérique et le transforme en sucres. La majorité de la photosynthèse se fait dans le feuillage mais aussi (très peu) dans les tiges, les branches, l'écorce, les cotylédons, les bourgeons et les fruits (Waring et al., 1998). L'équation chimique qui décrit la photosynthèse est la suivante : nCO2+ 2nH2O+ lumière (CH2O)n+nO2+nH2O (Salisbury et Ross, 1978a)4(*) En général, plus de 35 à 60 % de carbone fixé est réémis sous forme de CO2 par la respiration liée à la croissance et à l'entretien des tissus des végétaux, la moyenne étant d'environ 50 % (Waring et al., 1998). La respiration est le processus métabolique qui permet à l'arbre de libérer et d'utiliser l'énergie emmagasinée dans les glucides synthétisés durant la photosynthèse. L'équation de la respiration est la suivante : C6H12O6 +6O2 6CO2+ 6H2O+ énergie (Salisbury et Ross, 1978b). La différence entre la quantité de carbone fixée en photosynthèse et celle émise par la respiration des plantes constitue la production primaire nette (PPN), c'est-à-dire la quantité de carbone contenue dans les branches, feuilles, racines et réserves énergétiques produites (Waring et Running, 1998). La matière organique morte produite par les plantes sert quant à elle à alimenter une multitude d'animaux et de microorganisme, entrainant une émission de CO2 dans l'atmosphère (Waring et Running, 1998). Sur une base annuelle, les écosystèmes forestiers non perturbés constituent généralement des puits de carbone, c'est-à-dire que la quantité de carbone fixée est supérieure à celle émise (Giasson, 2005a)5(*). Ces écosystèmes peuvent toutefois constituer des sources de carbone au cours de certaines années (Lindroth et al., 1998). D'un autre côté, au sein des écosystèmes récemment perturbés, les émissions de carbone dépassent habituellement la séquestration, transformant ces sites en sources de carbone (Giasson, 2005b). Ce bilan, qui inclut également les pertes directes de carbone survenues lors de la perturbation (matière organique brûlée ou mangée), est appelé production nette (PN) de l'écosystème. * 1 www : http://www.unesco.org/new/fr/natural-sciences/environment/ecological-sciences/ biosphere-reserves/world-network-wnbr/ * 2 « FAO, 2004 cité par Belé et al., 2011 » * 3 «Mriteuw Diaw C., 2004 cité par CIFOR, 2005» * 4 « Salisbury et Ross, 1978 cité par Tayo, 2014 » * 5 « Giasson, 2005, cité par Tayo, 2014 » |
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