La Faculté des Sciences Juridiques et Politiques de
l'Université de Dschang n'entend donner aucune approbation, ni
improbation aux opinions émises dans les mémoires et
thèses. Ces opinions doivent être considérées comme
propres à leurs auteurs qui en assument l'entière
responsabilité.
DÉDICACES
À mes parents Papa KAPTCHOUANG Elie et Maman
KAPTCHOUANG Clémentine, je dédie ce travail en guise de
reconnaissance pour votre amour et vos sacrifices dans l'optique d'assurer mon
éducation.
Recevez ce mémoire comme le couronnement de tant
d'années de sacrifices que vous avez toujours consentis avec amour.
REMERCIEMENTS
Ce travail scientifique n'aurait pu être possible sans
le concours de plusieurs personnes auxquelles nous tenons ici à
exprimer toute notre gratitude :
Ø Au Seigneur Tout puissant dont le soutien
indéfectible nous a permis de travailler avec détermination et
courage quand nous songions à abdiquer ;
Ø Au Dr. Jean-Paul TCHOU-BAYO, qui a su guider nos
premiers pas dans l'apprentissage difficile de la recherche ;
Ø Aux enseignants de la Faculté des Sciences
Juridiques et Politiques de l'Université de Dschang pour les
précieux enseignements et conseils qu'ils ont apportés dans notre
vie éducative ;
Ø À toute notre famille notamment TCHOUANGUEP
Pierre Bertrand, NONO Marie Cécile, MEGAPTCHE Franck Junior, KETSEBOU
Thierry Cédric pour leur appui multiforme et leurs affectueux
encouragements ;
Ø À la famille TAMETONG, pour toute l'assistance
qu'elle nous a toujours accordée dans notre cursus
académique ;
Ø À nos amis particuliers, KEUTCHA TCHOUAMBIA
Roline Tatiana, PAHO YEPMO MEHELO Raïssa, TAMETONG NGUEMO TSIDIE Steve
pour leur soutien incommensurable et infaillible ;
Ø À nos camarades de promotion notamment NOUNAMO
KEMOGNE Donald, TALE TIOGKENG Elise Pascale, TEFOUET SOKENG Pauline
Aimée pour leur amitié, le sens du partage et de l'entraide;
Ø À tous nos frères dans la foi
chrétienne notamment les moniteurs de la Paroisse de l'Espérance
à NKONGSAMBA pour leur apport considérable dans notre vie
spirituelle ;
Ø À tous ceux qui, de près ou de loin,
ont contribué à l'élaboration et à la finalisation
de ce travail.
LISTE DES PRINCIPALES
ABRÉVIATIONS
AUPCAP : Acte Uniforme portant organisation des
Procédures Collectives d'Apurement du Passif.
AUPSRVE : Acte Uniforme portant organisation des
Procédures Simplifiées de Recouvrement et des Voies
d'Exécution.
AUS : Acte Uniforme portant organisation des
Sûretés.
Bull.civ : Bulletin civil.
CA : Cour d'Appel.
Cass.civ : Cour de cassation, chambre civile.
Cass.com : Cour de cassation, chambre commerciale.
CCMM : Code Communautaire de la Marine Marchande.
CEMAC : Communauté Économique et
Monétaire de l'Afrique Centrale.
Cf. : confer.
CPCC : Code de Procédure Civile et Commerciale.
DMF : Droit Maritime Français.
Éd. : Édition.
Obs. : Observations.
OHADA : Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du
Droit des Affaires.
Op.cit. : Opere citato.
PTPI : Président du Tribunal de Première
Instance.
TPI : Tribunal de Première Instance.
Trib.com : Tribunal commercial.
SOMMAIRE
INTRODUCTION
GÉNÉRALE.......................................................................1
PREMIÈRE PARTIE : L'ÉLAN
D'ORIGINALITÉ DE LA SAISIE DES
NAVIRES......................................................................................................................11
CHAPITRE I : L'ORIGINALITÉ
TIRÉE DE L'OUVERTURE DE LA SAISIE CONSERVATOIRE DES
NAVIRES...............................................................13
SECTION I : L'ORIGINALITÉ QUANT AU BIEN
SUSCEPTIBLE D'OUVERTURE DE SAISIE DES
NAVIRES.............................................13
SECTION II : L'ORIGINALITÉ QUANT À LA
CRÉANCE SUSCEPTIBLE D'OUVERTURE DE LA SAISIE CONSERVATOIRE DES
NAVIRES...............30
CHAPITRE II : L'ORIGINALITÉ
TIRÉE DE LA MISE EN OEUVRE DE LA SAISIE CONSERVATOIRE DES
NAVIRES....................................................53
SECTION I : L'ORIGINALITÉ DES PERSONNES
IMPLIQUÉES DANS LES OPÉRATIONS DE SAISIE CONSERVATOIRE DES
NAVIRES......................54
SECTION II : L'ORIGINALITÉ DANS LE
DÉROULEMENT DE LA SAISIE CONSERVATOIRE DES
NAVIRES.........................................................61
DEUXIÈME PARTIE : L'ADAPTATION DES
RÈGLES DE LA SAISIE DE DROIT COMMUN À LA SAISIE DES
NAVIRES.............................................80
CHAPITRE I : L'ADAPTATION DES RÈGLES
DE LA SAISIE CONSERVATOIRE DES BIENS MEUBLES CORPORELS À LA SAISIE
CONSERVATOIRE DES
NAVIRES...............................................................82
SECTION I : L'ADAPTATION QUANT AUX CONDITIONS OBJECTIVES
DE SAISIE DU
BIEN................................................................................82
SECTION II : L'ADAPTATION QUANT AUX CONDITIONS
SUBJECTIVES DE SAISIE DU
BIEN................................................................................93
CHAPITRE II : L'ADAPTATION DES RÈGLES
DE LA SAISIE IMMOBILIÈRE À LA SAISIE-EXÉCUTION DES
NAVIRES..................................................104
SECTION I : L'ADAPTATION QUANT AUX CONDITIONS DE
SAISIE.........105
SECTION II : L'ADAPTATION QUANT À LA
PROCÉDURE DE SAISIE........115
CONCLUSION
GÉNÉRALE........................................................................142
INTRODUCTION
GÉNÉRALE
« SUM CUIQUE TRIBUERE », rendre
à chacun sa part. Ce précepte d'origine romaine traduit au mieux
la réalité qui existe aujourd'hui dans nos différentes
sociétés en particulier celles qui sont marquées par une
kyrielle de relations organisant le plus souvent un déséquilibre
dans lesdites relations au profit de la partie qui est dans une certaine
position de force. Pour vaincre donc l'insolvabilité doublée de
mauvaise foi de cette partie, la réaction du droit a été
sans attente. C'est ainsi que sur le plan africain, une organisation à
vocation régionale a été mise en oeuvre dans le cadre du
Traité du 17 Octobre 19931(*), relatif à l'harmonisation du droit des
affaires en Afrique ; il s'agit de l'Organisation pour l'Harmonisation en
Afrique du Droit des Affaires2(*) qui est régie jusqu'à l'heure actuelle
par 09 Actes uniformes3(*)
parmi lesquels l'Acte uniforme portant organisation des Procédures
Simplifiées de Recouvrement et des Voies d'Exécution qui est donc
venu rendre homogènes les différentes règles des
États parties qui existaient en matière de voies
d'exécution particulièrement et régir ainsi certaines
saisies. Les saisies pour lesquelles le législateur OHADA n'a
prévu aucune règle sont nombreuses, peut-être par oubli ou
en vertu d'un choix législatif. On pense ainsi à la
saisie-contrefaçon4(*), à la saisie des créances
fiscales5(*), à la
saisie des aéronefs6(*) et à la saisie des navires. Cette attitude du
législateur peut faire l'objet de plusieurs
interprétations : soit il a insinué que ces saisies ont
disparu de l'espace OHADA ; cette interprétation prend appui sur
l'article 336 de l'AUPSRVE qui dispose que : « Le
présent Acte uniforme abroge toutes les dispositions relatives aux
matières qu'il concerne dans les États parties »,
soit il a voulu laisser la tâche aux législateurs nationaux de les
légiférer ; l'article 10 du traité OHADA est à
cet égard très significatif et moins radical par rapport à
l'article 336 ; cet article dispose : « Les Actes
uniformes sont directement applicables et obligatoires dans les États
parties nonobstant toute disposition contraire de droit interne,
antérieure ou postérieure ». A contrario,
aussi longtemps qu'elles ne sont pas contraires à la législation
uniforme, ces saisies subsistent dans les législations nationales. Cette
position est soutenable dans la mesure où les biens qu'elles concernent
sont devenus presque consubstantiels à la vie des êtres humains,
comme à celle de l'économie. Il aurait été
impensable qu'ils fussent exclus de toute législation, eu égard
à leur implication dans les relations commerciales. Il n'est donc pas
étonnant que ces saisies soient toujours opérationnelles dans
l'espace OHADA, sur la base des législations qui leur étaient
applicables avant l'AUPSRVE ou qui ont été adoptées
postérieurement. On peut néanmoins regretter que le
législateur africain n'ait pas légiféré en la
matière, surtout quand on se rappelle de leur caractère
international très marqué7(*), et lorsque les objectifs tels qu'assignés
à l'OHADA pourraient se manifester dans sa plénitude sur l'une de
ces saisies particulières qui n'ont pas été
traitées par elle à savoir la saisie des navires qui implique un
gros déploiement textuel et une sécurisation juridique
extraordinaire. Il ne serait pas incongru de penser que la saisie conservatoire
des navires pourrait obéir aux dispositions de l'AUPSRVE notamment dans
celles sur la saisie conservatoire des biens mobiliers, objet des articles 64
à 72 ; mais un auteur déclare que la saisie conservatoire
des biens mobiliers corporels a vocation à être pratiquée
sur tous les meubles du débiteur détenus par lui-même ou
par un tiers, qu'il importe cependant de tenir compte des règles de
l'immobilisation par destination ou par attache à perpétuelle
demeure, et que de même8(*), ne sont pas concernés, les meubles
spéciaux à l'instar des navires, lesquels relèvent des
législations spéciales demeurées en dehors du champ
d'action de la réforme9(*), et cette saisie est là tout le point
névralgique conféré à cette étude qui est la
nôtre et qui sera dans la mesure du possible disséquée de
fond en comble afin de ressortir les disparités qui se dégagent
en la matière.
Déjà, la saisie est une voie d'exécution
forcée par laquelle un créancier fait mettre sous main de
justice les biens de son débiteur, en vue de les faire vendre aux
enchères publiques et se faire payer sur le prix10(*). Une saisie dans une voie
d'exécution forcée, quelle qu'elle soit, ne peut donc s'appliquer
que sur un bien qu'il soit mobilier ou immobilier, corporel ou incorporel.
C'est ainsi que l'objet sur lequel portera la saisie dans notre cadre
analytique est le navire. Cet objet est au coeur du droit maritime11(*) et est un instrument de
navigation indispensable à toute activité en mer. L'histoire nous
révèle que le plus ancien navire fut la barque de Chéops,
construit en bois de cèdre et bien avant l'ère
Jésus-Christ. Le navire est le fruit de l'ingéniosité de
l'Homme, construit pour faire face aux dangers de la navigation en mer et lui
permettre d'entreprendre les expéditions en mer et les transactions
maritimes afin de satisfaire ses besoins12(*). En l'absence d'une définition assez
concordante sur le plan international, on peut tout de même se
référer au droit communautaire CEMAC13(*), notamment au Code de la
marine marchande en son article 2 alinéa 37 qui dispose que le
navire est « tout bâtiment ou engin flottant de nature
mobilière quel que soit son tonnage ou sa forme, avec ou sans propulsion
mécanique, et qui effectue à titre principal une navigation
maritime ». Le navire est un élément d'une valeur
considérable pour le patrimoine de l'armateur puisque l'aventure
maritime nécessite un important investissement financier du fait
même de l'exposition aux dangers de la navigation en mer. Aussi, si les
navires sont des biens naturellement meubles, ils sont néanmoins soumis
à un régime dérogatoire réservé en principe
aux immeubles14(*). Les
navires pour ainsi dire, sont des embarcations affectées à la
circulation sur les mers et océans, à la différence des
bateaux qui ne sont affectés qu'à la navigation intérieure
c'est-à-dire sur les fleuves, canaux et rivières. Ils peuvent
être tout aussi encombrants que les immeubles au point que l'on
n'hésite pas à parler à leur propos de
bâtiment15(*).
Dans les rapports du propriétaire ou de son exploitant
avec ses créanciers, le navire représente à la fois
l'élément essentiel, sinon unique de leur droit de gage, mais
aussi un élément particulièrement fuyant de ce droit de
gage, en ce qu'il est très souvent affecté à un commerce
international, l'amenant à naviguer dans les eaux ne relevant de la
souveraineté d'aucun État ou des eaux étrangères.
Le recouvrement des créances contre les armateurs est donc difficile et
incertain en raison de la nature physique et de la fonction du navire. Il est
donc nécessaire de munir les créanciers de moyens
d'exécuter et surtout de garantir le recouvrement de leurs
créances contre les exploitants du navire16(*). La saisie de navire a donc
été prévue et est une procédure spéciale
pour saisir conservatoirement ou provoquer la vente forcée d'un navire.
Le navire peut être considéré comme ayant
une nature juridique mobilière mais avec un régime juridique
s'apparentant à celui d'un immeuble. De ce fait, le navire est un meuble
spécial, raison pour laquelle le droit commun des saisies incarné
par l'AUPSRVE ne saurait en principe lui être applicable. L'étude
de la saisie des navires séparément des autres biens meubles
pourrait conduire nos interlocuteurs et nous à nous poser une
série de questions : quelle est la particularité de la
saisie des navires par rapport à la saisie des biens meubles
corporels ? Cependant et comme il a été signalé, la
saisie des navires n'est qu'une dérogation et non une exception à
la saisie de droit commun ; et en tant que telle, une nécessaire
conciliation devrait être faite et la tâche serait pour nous
d'identifier dans quelle mesure le droit commun des saisies incarné par
l'AUPSRVE pourrait accorder une certaine adaptation à ce mode
particulier de saisie.
Des questions pullulent, les opinions doctrinales divergent
et les solutions fournies par la jurisprudence parfois contradictoires, parfois
hésitantes, ne sont pas de nature à étancher la soif de
l'analyste dans la quête d'une réponse cohérente et
satisfaisante à l'évidente disparité constatée
à travers les diverses législations existantes en la
matière, surtout lorsqu'il y a de la peine à identifier de
façon significative la véritable législation applicable
à telle ou telle situation juridique. De la sorte, quelle réponse
devrait-on apporter à un créancier qui se trouve dans une
situation d'ambiguïté juridique ne lui permettant pas de
réaliser sous quel empire législatif il doit agir, afin de ne pas
se confronter aux conséquences désastreuses qu'implique
l'application d'une loi qui pourrait s'avérer inappropriée au cas
d'espèce ?
L'étude de la saisie des navires nous permet
également de faire recours au droit comparé, afin de mieux
apprécier la réglementation interne incarnée par notre
Code communautaire de la marine marchande. Notons par ailleurs que celle-ci (la
saisie des navires) est l'une des rares matières à avoir fait
l'objet de plusieurs Conventions internationales, même s'il faut dire
qu'une seule d'entre elles soit applicable17(*). Dans tous les cas, ceci montre à juste titre
que la question intéresse au plus haut point les acteurs internationaux,
d'autant plus que la saisie des navires peut être un moyen pour favoriser
l'activité maritime internationale. On voit bien que le critère
économique n'est pas neutre dans la réglementation de ladite
saisie.
Une telle étude pourrait aussi s'avérer
importante sur un tout autre terrain car un navire est toujours beau; plus
exactement, aucun navire ne manque jamais d'exercer sur qui aime
l'élément marin un pouvoir intense de fascination que l'on
imagine lié à la principale fonction du navire: permettre aux
hommes d'ouvrir les portes du monde qui leur sont inconnues, de l'autre
côté du rivage ou jusqu'aux confins du monde ; cette
fascination a sans doute incité les gens de mer à attribuer
au « bâtiment de mer », selon la formule
adoptée par le droit maritime français, un caractère qui
lui est propre, une personnalité, un nom. Cependant, un navire est
également une chose, un bien meuble susceptible de faire l'objet d'une
évaluation financière et qui représente souvent une valeur
économique importante, voire colossale. Dès lors, la valeur
marchande du navire attire immanquablement mais à juste titre,
l'intérêt pour ne pas dire la convoitise des personnes physiques
ou morales à la recherche du désintéressement des
créances dont elles peuvent être titulaires. Gage de recouvrement
des créances, la valeur économique d'un navire est par ailleurs
un gage d'autonomie dudit navire lancé dans son périple, sa
traversée, dans son aventure maritime. En effet, la valeur du
navire détermine le crédit que peuvent lui accorder les
éventuels avitailleurs ou prestataires de services, dont l'intervention
permettra au navire d'arriver au terme de l'expédition maritime.
Quand il quitte son port d'attache, le navire fait route vers des ports dans
lesquels il fera escale et à proximité desquels demeurent les
personnes qui ont pu permettre l'accomplissement de son précédent
voyage. Dès lors qu'ils ne sont pas
désintéressés de leurs créances, les
créanciers du navire trouvent avantage à exercer leurs droits
directement sur ledit navire, plutôt que de tenter de recouvrer leurs
créances auprès d'armateurs ou d'affréteurs situés
à l'étranger et dont la solvabilité et même
l'identité peuvent leur être inconnues. La pratique maritime a
donc imaginé très tôt des solutions afin de permettre aux
créanciers du navire d'exercer leurs droits ou de se faire attribuer un
gage sur le navire. Tendant à conférer aux
créanciers un droit réel sur le navire, ces instruments
juridiques font de tout bâtiment de mer un « patrimoine
d'affectation ». D'inspiration germanique et
anglo-saxonne, la théorie du « patrimoine
d'affectation » est ignorée du droit
français. La notion même de « patrimoine
d'affectation » ne peut qu'être qualifiée
d'aberration juridique au regard du droit français qui ne
reconnaît au patrimoine qu'un caractère personnel18(*), unique19(*) et indivisible20(*). Or, l'analyse des origines
d'institutions fondamentales du droit maritime telles que la limitation de
responsabilité du propriétaire de navire et celle du transporteur
maritime révèle qu'à maints égards, le navire
constitue un patrimoine affecté à l'aventure maritime. En
effet, les mécanismes de limitation de responsabilité sont
fondés sur l'idée selon laquelle l'armateur-exploitant du navire
ne saurait assumer seul l'ensemble des risques induits par l'aventure maritime
qui doivent dès lors être partagés par tous ceux qui
trouvent un intérêt à l'accomplissement du voyage.
À l'origine, le risque que subissait l'armateur était
limité au navire; l'armateur pouvait perdre son navire ou sa valeur au
gré des aléas rencontrés lors de l'expédition
maritime. Si face à l'augmentation de la valeur des navires, la
pérennité du transport maritime a exigé d'abandonner un
système de limitation à hauteur de la valeur du navire, la
limitation de la responsabilité de l'armateur fait encore aujourd'hui
référence à la jauge du navire, de même que la
limitation de la responsabilité du transporteur maritime puisqu'elle est
calculée selon le poids des marchandises chargées à bord
ou selon le nombre de colis embarqués. Les marchands et autres
négociants acceptaient quant à eux de perdre le solde de leurs
créances puisqu'ils s'interdisaient d'en poursuivre le règlement
sur les autres biens composant le patrimoine de l'armateur21(*). Ainsi, comme nous aurons
à le voir par la suite, la convention de Bruxelles du 10 mai 1952, pour
l'unification de certaines règles sur la saisie conservatoire des
navires de mer et le Code communautaire de la marine marchande dans ses
dispositions sur la saisie des navires, permettent donc de saisir un navire
à titre conservatoire afin d'obtenir la garantie d'une créance
maritime se rapportant au navire. La convention confère ainsi une
action contre le navire, une action in rem, institution fondamentale
du droit anglo-saxon. Or, de même qu'il ignore la théorie du
patrimoine d'affectation, le droit français ne permet pas d'exercer un
quelconque droit contre une chose mais seulement contre une personne
(« action in personam »). C'est ainsi que des
disparités naîtront lorsque la nécessité sera pour
nous d'examiner les conditions d'ouverture de la saisie des navires qui
revêt un intérêt tout à fait particulier par rapport
au droit interne des saisies des biens meubles corporels dont aurait pu faire
partie la saisie des navires.
Loin d'avoir la prétention de fournir à notre
lecteur une solution définitive, péremptoire, la présente
étude s'efforcera d'examiner les principales questions nées de la
particularité du droit de la saisie des navires, avant de dresser
l'état des réponses supra-légales, législatives,
jurisprudentielles et doctrinales sur ces questions. Ce qui voudrait par
là signifier que le fondement méthodologique de notre recherche
sera basé autour de deux axes principaux qui intègrent d'une part
l'exégèse fondée sur l'étude des textes juridiques
y afférents et d'autre part, la méthode comparative qui
intègre la particularité de la saisie des navires par rapport aux
saisies de droit commun tout en y faisant des adaptations.
En tentant d'apporter à notre lecteur les fondements et
les justifications de chaque réponse, nous constaterons que nombre de
solutions appellent d'autres interrogations, d'autres problèmes,
d'autres difficultés tout autant redoutables que les questions
initiales, de sorte que nous n'aurons point de vergogne à exciper tout
au long de cette étude, le fameux adage, « à
l'impossible nul n'est tenu ». Ceci étant, nous allons
dans un premier mouvement prendre en considération les aspects
particuliers de la saisie des navires par rapport au droit commun des voies
d'exécution en montrant un certain élan d'originalité de
la saisie des navires (PARTIE I), et dans un deuxième temps, nous
montrerons que le droit commun des voies d'exécution pourra dans
certains cas s'appliquer à la saisie des navires, ceci se fera par
adaptation (PARTIE II).
PARTIE I: L'ÉLAN
D'ORIGINALITÉ DE LA SAISIE DES NAVIRES
La saisie des navires est née de la
nécessité de créer un instrument spécifique au
crédit maritime, ceci à travers sa procédure
spécifique de recouvrement des créances. Les législateurs
communautaires de l'OHADA l'ont bien compris en excluant du champ d'application
matériel des voies d'exécution mobilières des biens ayant
pourtant une nature reconnue mobilière tels les navires 22(*), la spécificité
d'un tel bien découlant certainement de son caractère
particulièrement mouvant et international. C'est la raison pour laquelle
la communauté internationale s'est mobilisée et a pris en la
matière un texte sur la saisie conservatoire : il s'agit de la
convention internationale pour l'unification de certaines règles sur la
saisie conservatoire des navires de mer signée le 10 mai 1952 à
Bruxelles, laquelle convention étant destinée à être
remplacée dans un avenir proche par la convention internationale de
Genève sur la saisie conservatoire des navires, signée le 12 mars
1999. À côté de ces textes internationaux, la
communauté CEMAC s'est elle aussi déployée et a
uniformisé le régime de la saisie des navires dans l'espace
communautaire considéré23(*). Ces conventions internationales et ce Code
communautaire, décèlent les originalités de cette saisie,
celle conservatoire particulièrement, comparativement à ce qui a
cours en droit commun de la saisie conservatoire mobilière de droit
commun incarné par l'AUPSRVE dans ses articles 64 et suivants.
Ce particularisme de la saisie conservatoire des navires
découle de son originalité qui s'observe aussi bien lors de
l'ouverture de ladite saisie (CHAPITRE I) qui est d'un formalisme beaucoup plus
poussé et contraignant par rapport à ce qu'on observe en droit
commun de la saisie des biens meubles.
Cette originalité se prolonge également dans la
mise en oeuvre de cette saisie (CHAPITRE II) qui fait intervenir des
autorités typiques et originales, propres au droit maritime.
CHAPITRE I :
L'ORIGINALITÉ TIRÉE DE L'OUVERTURE DE LA SAISIE CONSERVATOIRE DES
NAVIRES
L'ouverture de la saisie conservatoire des biens meubles de
droit commun ne pose généralement pas de difficultés
majeures surtout lorsqu'on sait que pour qu'une telle saisie soit
pratiquée, il faut juste désigner un bien mobilier quelconque sur
lequel portera la saisie dès lors qu'il est allégué une
créance paraissant fondée dans son principe et si cette personne
justifie de circonstances de nature à en menacer le
recouvrement24(*).
Or en droit maritime, seul le navire est susceptible
d'être saisi selon les règles qui en sont issues, ce qui fonde
l'originalité quant aux biens susceptibles de donner lieu à la
saisie des navires (SECTION I), laquelle saisie ne pourrait être
enclenchée que pour une créance propre au domaine maritime et que
l'on appelle créance maritime ; cette créance maritime, en
fonction de la législation applicable devrait paraître ou pas
forcément fondée en son principe, ce qui soulève
l'originalité de la saisie conservatoire des navires quant à la
créance à garantir (SECTION II).
SECTION I :
L'ORIGINALITÉ QUANT AUX BIENS SUSCEPTIBLES D'OUVERTURE DE SAISIE DES
NAVIRES
La particularité du navire par rapport à la
majorité d'objets mobiliers ordinaires, est qu'il est susceptible de
détachement, car constitué d'accessoires qui, pris
individuellement, forment également une valeur patrimoniale colossale,
raison pour laquelle, il serait nécessaire de déterminer les
biens qui sont inclus dans la procédure de saisie des navires, ceci
à travers son assiette (Paragraphe 1).
Tout aussi, la saisie conservatoire des navires telle qu'elle
est organisée par les textes nous fait ressortir une originalité
aussi remarquable due à l'étendue des navires pouvant être
saisis (Paragraphe 2) car outre le navire fautif ou causal, l'on se rendra
compte de la possibilité de saisir d'autres navires dans certaines
conditions bien précises.
Paragraphe 1 : La
détermination de l'assiette de la saisie des navires
La saisie conservatoire des navires, naturellement a pour
cadre d'application le navire (A). L'intérêt de cette
précision tient au fait que le navire est constitué de plusieurs
accessoires à régimes différents dont certains, pris
isolément se verront appliquer les règles de la saisie des
navires et d'autres par contre seront sous le couvert des règles de
droit commun des voies d'exécution, ce qui soulève la
problématique de l'application des règles de la saisie
conservatoire des navires à la saisie des accessoires du navire (B).
A- La détermination
évidente de l'assiette de la saisie : le navire, seul bien
susceptible de saisie
Comme il a été signalé dans nos propos
introductifs, le navire est une notion très difficile à
cerner ; ceci est très nettement perceptible à travers
l'absence de définition concordante sur le plan international. Ceci dit,
ni la convention de Bruxelles, ni celle à venir de Genève ne
donnent de définition du navire sur lequel sera appliquée la
saisie conservatoire qui forme pourtant leur objet. En l'absence d'une telle
définition, le droit interne peut être un appui
intéressant ; ce droit interne en la matière est
incarné par le CCMM CEMAC. Ceci étant, le droit maritime de la
CEMAC entend par navire tout « bâtiment ou engin flottant
de nature mobilière, quel que soit son tonnage ou sa forme, avec ou sans
propulsion mécanique, et qui effectue à titre principal une
navigation maritime »25(*). Cet article, tout en définissant le navire,
fixe ses critères déterminants, et rompt avec les
définitions qui prennent en compte le tonnage du navire26(*).
Par l'expression « nature
mobilière », se confirme la classification du Code civil
qui fait du navire un meuble27(*), même si cette classification, face au statut
juridique du navire laisse quelque peu perplexe28(*). Le navire est en réalité un meuble
particulier, qui possède une individualisation comparable à celle
d'une personne : « il naît (sur la cale de
construction), possède un nom, une nationalité, un domicile (son
port d'attache), des pièces d'identités (papiers de bord), une
activité lucrative ou de plaisance. Il travaille, vieillit, meurt de
mort violente (perte par événement de mer) ou lente (par
dépècement) »29(*).
La navigation maritime quant à elle renvoie à
celle « pratiquée en mer, dans les ports et rades, sur les
étangs salés et dans les estuaires et fleuves
fréquentés par les navires de mer, jusqu'au premier obstacle
à la navigation maritime fixée par l'Autorité maritime
compétente »30(*). En d'autres termes, la navigation est maritime
lorsqu'elle expose le bâtiment aux risques de mer31(*).
Avec la définition du navire, le législateur
communautaire opère une véritable avancée de notre droit
maritime. Non seulement il adopte une définition
« supposée être la plus porteuse » et
complète du navire, mais à travers elle, pose également
les jalons nécessaires à la distinction entre navire et autres
engins de mer ou bâtiments semblables32(*). Dès lors, le critère de distinction
entre navire et autres engins de mer réside dans l'aptitude à la
navigation maritime ; une bouée ne pouvant être par exemple
considérée comme un navire.
Toutefois, cette complémentarité entre navire et
navigation maritime peut susciter quelques interrogations : le bateau de
rivière qui fera de la navigation en mer prendra-t-il la qualité
de navire ? À cette interrogation, le doyen RODIÈRE objecte
que dès lors que la navigation maritime n'est pas l'activité
principale, mais une activité secondaire, un tel engin ne peut
être considéré comme un navire33(*). Il fonde son argumentaire sur
une jurisprudence constante qui prend en considération non les aptitudes
nautiques de l'engin, mais la réalité de son affectation34(*). En effet, selon le doyen
RODIÈRE, le navire se définit comme un engin flottant de nature
mobilière, affecté à une navigation qui l'expose
habituellement aux risques de la mer. Cette définition exclut
d'emblée du champ d'application les bateaux de rivière soumis
à une réglementation spécifique. Sont exclus par ailleurs
les engins flottant tels que les plates-formes pétrolières,
pontons fixes, challans, usines ou hôtels flottants.35(*) L'on s'est aussi
demandé si le navire doit perdre sa qualité et échapper
à son statut quand, venant de la mer, il pénètre
profondément dans les terres, ou quand celui-ci ne navigue plus
(stationné au port), ou n'est plus en état de naviguer
(épave). Pour LANGAVANT, tant que le navire conserve son aptitude
à reprendre la mer, c'est-à-dire à effectuer une
navigation maritime, celui-ci conserve aussi sa qualité de
navire36(*). De
même, l'affectation du navire à une activité quelconque n'a
aucune incidence et il peut s'agir d'un navire de commerce, de pêche, de
navigation sportive, de plaisance ou de recherche scientifique37(*).
On peut conclure que si tous les navires sont des
bâtiments de mer, tous les bâtiments de mer ne sont pas des navires
à cause du critère d'aptitude à la navigation maritime. Il
se pose donc par la suite la problématique de l'application des
règles de la saisie conservatoire des navires à la saisie des
accessoires du navire.
B- La problématique
de l'application des règles de la saisie des navires à la saisie
des accessoires du navire
Les accessoires du navire sont les éléments qui
se rattachent à celui-ci et qui fondent son existence ou son
importance ; ce sont généralement les agrès et
apparaux38(*). Leur
régime juridique ne soulève pratiquement pas de problème
majeur car il est lié au régime du navire sur lequel ils fondent
leur existence. Cependant, certains accessoires retiendront notre attention
parce qu'ayant une nature juridique douteuse par conséquent, un
régime juridique incertain ; il s'agit des soutes et des
créances de fret. En vertu du principe de l'accession découlant
de l'adage latin « accessorium sequitur
principale »39(*), le bien principal doit communiquer sa condition
juridique au bien qui s'agglomère à lui. C'est donc dire que la
saisie des soutes et des créances de fret en tant qu'accessoires du
navire devrait vraisemblablement obéir au régime juridique du
navire auquel elles se rattachent. Cependant, en la matière, en
l'absence de dispositions juridiques et consécrations jurisprudentielles
camerounaises réglementant la matière, la jurisprudence
française suppléant l'incurie des textes français en
matière de procédures civiles d'exécution40(*) peut être un appui
intéressant.
En effet, le juge suprême français dans une
décision du 13 Janvier 1998 sur la saisie conservatoire des soutes et
des créances de fret du navire
« Saint-Pierre »41(*) a mis fin aux controverses doctrinales et aux
solutions adoptées par les juges de fond en matière de
règles applicables à la saisie des soutes du navire et des
créances de fret et par la suite, a adopté une solution de
principe, solution qui diffère selon qu'il s'agisse de saisie
conservatoire de l'un ou de l'autre accessoire du navire. Les faits et la
procédure sont les suivants : un litige portant sur l'avance de
frais d'escale et une mauvaise exécution du contrat avait opposé
une agence maritime havraise (Inchcape shipping Services) et un armateur
sénégalais (la Cosénam) à leur agent
général basé à Paris (la Société
Multi-Services Maritime M.S.M) ; d'une part M.S.M mit un terme au contrat
d'agence, tandis qu'elle restait redevable de sommes avancées par
Inchcape, et d'autre part la Cosénam faisait état de sommes qui
lui auraient été également dues par M.S.M. ; Inchcape
et la Cosénam ont ainsi demandé au juge l'autorisation de saisir
d'un côté le navire « Saint-Pierre »
et de l'autre ses soutes ; en outre, chacune des sociétés a
fait saisir conservatoirement des frets que la société Marfret
devait recevoir pour le compte de la société MSM ; pour ce
faire, des ordonnances en autorisation de saisie conservatoire ont
été rendues par le président du tribunal de commerce de
Rouen. Dans un arrêt rendu le 24 mai 1995, la Cour d'Appel de Rouen a
d'une part infirmé les ordonnances rendues à la requête des
sociétés Inchcape et Cosénam à l'encontre de
M.S.M autorisant la saisie des soutes et des créances de fret, et ce sur
le fondement de la loi du 9 juillet 199142(*), comme émanant d'une autorité
judiciaire incompétente et non par le juge de l'exécution ;
d'autre part, elle a ordonné la mainlevée de la saisie
conservatoire concernant le Navire
« Saint-Pierre ». Les deux créanciers
forment un pourvoi en cassation en reprochant à l'arrêt de la Cour
d'appel d'avoir jugé le président du tribunal de commerce
incompétent pour autoriser lesdites sociétés à
saisir conservatoirement pour sûreté d'une créance sur la
société française MSM.
Le juge suprême s'est donc retrouvé en face d'un
dilemme : d'une part, Il s'agissait de savoir pour la Cour de cassation si
les dispositions du décret du 27 octobre 196743(*) pouvaient être
étendues à la saisie conservatoire des créances de
fret ; d'autre part et principalement, la Cour devait connaître du
statut juridique des soutes, et dire si la saisie conservatoire des soutes
devrait obéir ou non aux mêmes règles de compétence
que la saisie conservatoire de navire déterminée par l'article 29
du décret du 27 octobre 196744(*), réglant ainsi un problème de
compétence.
Les solutions retenues par la Cour de cassation sont d'un
enjeu considérable, car réglant de façon significative et
définitive un problème longtemps tergiversé en doctrine et
doté de perplexité et de complexité devant les juges de
fond. Ceci étant, il en ressort : en ce qui concerne la saisie de
la créance de fret, les demandeurs allèguent que le juge
compétent pour autoriser la saisie conservatoire de frets liés
à l'exploitation du navire est le même que le juge
compétent pour autoriser la saisie conservatoire du navire,
c'est-à-dire le président du tribunal de commerce dans le ressort
duquel se trouve le port de saisie. Cependant, dans un attendu de principe, la
Cour réaffirme que cette procédure particulière reste
soumise aux règles de droit commun.
En effet, elle énonce que « les
dispositions du décret du 27 octobre 1967 portant statut des
navires, relatives à la saisie conservatoire desdits navires,
constituent des exceptions aux règles générales gouvernant
les saisies mobilières et désormais définies par la loi du
9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles
d'exécution ; elles ne sauraient être étendues
à la saisie conservatoire des créances de fret. En
conséquence, le juge compétent en la matière est le juge
de l'exécution du lieu où demeure le débiteur, par
application de l'article 211 du Décret du 31 juillet
1992 ». La Cour de Cassation confirme ici ce que la Cour
d'appel a retenu.
La problématique des soutes constitue l'enjeu de
l'arrêt : Les juges du fond autorisaient de plus en plus
libéralement la saisie des soutes sur le fondement des règles du
droit commun. Les soutes étaient considérées comme un bien
meuble indépendant du navire, et devenaient saisissables dans les
conditions fixées en droit commun par les textes de 1991 et 1992, ce qui
implique également la compétence du juge de l'exécution
pour autoriser la saisie; telle était précisément la
solution de la Cour d'appel de Rouen, qui, et depuis un arrêt du 25 avril
198645(*), se
prévalait de l'autonomie des soutes par rapport au navire, et leur
saisie comme mode alternatif à la saisie des navires.
Dans son arrêt, la Cour de cassation adopte une solution
inverse comme nouveau fondement et vient censurer la solution de la Cour
d'appel en énonçant que les soutes d'un navire sont un
élément de celui-ci, et relèvent par conséquent des
mêmes règles de compétence que la saisie du navire
lui-même, et qu'en conséquence, conformément à
l'article 29 du décret du 27 octobre 1967, le président du
tribunal de commerce est compétent pour l'autoriser.
Dans cet attendu, la Cour précise le statut juridique
des soutes; désormais elles se rattachent au navire comme étant
un élément de celui-ci. Pourtant, cette dernière formule
paraît contestable en ce sens qu'elle manque de précision. Comme
le souligne Monsieur Martin NDENDE dans ses observations46(*), les soutes pourraient
être rangées dans la catégorie des agrès et apparaux
en ce sens que même si les soutes ne font pas matériellement
partie intégrante du navire, elles sont néanmoins utiles à
sa navigabilité au sens nautique, et constituent avec lui une
« unité juridique ». La difficulté
réside dans leur nature fongible et consomptible. Ainsi, il serait
inopportun de les classer dans la catégorie des agrès et
apparaux. Les Professeurs RODIÈRE et Du PONTAVICE s'opposaient
déjà au rattachement des avitaillements en général.
Les soutes sont néanmoins des « accessoires
nécessaires » au bon fonctionnement du navire constituant
avec lui une « unité juridique ».
En ce qui concerne la compétence des juges
habilités à se prononcer sur la saisie conservatoire des soutes,
c'est bien le président du tribunal de commerce qui est compétent
pour autoriser la saisie.
La Cour de Cassation ajoute, sous le visa de l'article 79 du
Code de procédure Civile, qu'il résulte de ce texte que, lorsque
la Cour d'appel infirme du chef de la compétence, si elle n'est pas
juridiction d'appel relativement à la juridiction qu'elle estime
compétente, elle doit renvoyer l'affaire devant la Cour qui est
juridiction d'appel relativement à la juridiction qui eut
été compétente en première instance. La Cour de
cassation censure la Cour d'appel en ce sens qu'elle a pris l'initiative de
trancher l'affaire au fond alors même qu'elle souligne
l'incompétence des juges consulaires rouennais, donc par là
même sa propre incompétence. En effet, au regard de l'article 211
du Décret du 31 juillet 1992, la Cour d'appel de Paris aurait
été compétente.
Pour en conclure, il faut retenir tout d'abord que c'est la
première fois que la Cour de cassation affirme la compétence du
tribunal de commerce dans un contentieux relatif à la saisie des
soutes ; ensuite, l'intérêt de l'arrêt est d'exclure
désormais les exigences du droit commun issues des textes de 1991-1992
portant réforme des procédures civiles d'exécution ;
enfin, la saisie conservatoire des soutes étant soumise aux mêmes
règles que celles de la saisie des navires, celles-ci ne peuvent
recevoir application que si c'est l'ensemble du navire qui se trouve soumis
à la procédure de saisie ; cela sous-entend que les soutes
ne seront que rarement saisissables ut singuli47(*).
Étant fixé sur les accessoires du navire pouvant
être soumis à la procédure de saisie conservatoire des
navires, il faudrait se déporter sur les navires susceptibles
d'être saisis.
Paragraphe 2 :
L'étendue des navires susceptibles d'être saisis
Les textes sur la saisie conservatoire des navires sont
unanimes sur le fait que ladite saisie peut être pratiquée soit
sur le navire auquel se rapporte la créance (A), soit sur tout autre
navire appartenant à celui qui était au moment où est
née la créance maritime, propriétaire du navire auquel se
rapporte la créance (B)48(*).
A- Le navire auquel la
créance se rapporte
Sur le plan interne, avec le droit CEMAC et en
considération du CCMM, l'article 114 dispose : « La
saisie peut être pratiquée soit sur le navire auquel la
créance se rapporte... ». Cette formule rejoint
également celle retenue sur le plan international. C'est ainsi que la
convention actuellement applicable sur la sphère internationale à
savoir la convention de Bruxelles du 10 mai 1952 pour l'unification de
certaines règles sur la saisie conservatoire des navires de
mer,49(*) dispose que le
demandeur peut saisir tout navire auquel la créance maritime se
rapporte. Cette faculté accordée au créancier constitue un
exemple typique d'application directe de l'action in rem puisqu'elle
exclut toute référence au propriétaire du navire et
élude par la même occasion la question de l'obligation du
propriétaire à la dette à l'origine de la demande de
saisie, question qui aurait été un préalable
nécessaire à la saisie du droit interne OHADA. Selon la
convention, le navire seul
est « débiteur » de la créance
maritime puisque sa naissance est liée au navire ou à son
exploitation, ce qui justifie sa saisie50(*).
Cet état de choses se perçoit nettement
lorsqu'il convient d'examiner la particularité de l'exploitation d'un
navire c'est-à-dire l'affrètement. La convention de Bruxelles du
10 mai 1952 dispose en son article 3 paragraphe 1 que « Tout
demandeur peut saisir (...) le navire auquel la créance se
rapporte ». Dès lors, il importe peu, lorsque la saisie
est pratiquée sur le navire qui se rapporte à la créance,
que la dette ait été contractée par une personne autre que
le propriétaire, en l'occurrence l'affréteur. Ainsi, par l'effet
de cette disposition, le créancier bénéficie en principe
d'un droit personnel contre le navire, qualifié de
« maritime lien »51(*). La convention précise en outre en son article
3 paragraphe 4 alinéa 1er que le créancier de
l'affréteur coque nue du navire « peut saisir ce
navire »52(*), et l'article 3 paragraphe 4 alinéa 2 ajoute
que cette règle « s'applique également à
tous les cas où une personne autre que le propriétaire est tenue
d'une créance maritime ».
La position du problème est simple.
L'affrètement est le mode de transfert d'exploitation consacré du
navire. Son économie est très variable selon que l'on est en
présence d'un contrat d'affrètement coque nue qui est un contrat
de location, d'un contrat d'affrètement à temps ou d'un contrat
d'affrètement au voyage. Très souvent, le véritable
exploitant du navire, ou armateur non-propriétaire, est un
affréteur soit coque nue, soit à temps, l'affréteur coque
nue pouvant d'ailleurs lui-même fréter à temps ou au voyage
le navire à un sous-affréteur. En sa qualité d'exploitant,
l'affréteur conclut des contrats de transport pour son compte. Pour le
chargeur, le débiteur est alors le transporteur contractuel,
affréteur du navire.
La convention de Bruxelles, en mentionnant les litiges
nés de contrats de transport et d'affrètement dans la liste des
créances maritimes et en précisant que « tout
demandeur peut saisir (...) le navire auquel la créance se
rapporte », a ainsi voulu permettre au créancier de
saisir l'instrument d'exploitation de son débiteur, peu importe que
celui-ci en soit propriétaire.
S'agissant des dettes contractées par
l'affréteur, la convention établit une distinction
importante ; son article 3 paragraphe 4 prévoit la
possibilité de saisir un navire donné en affrètement avec
remise de la gestion nautique lorsque l'affréteur répond seul
d'une créance maritime relative à ce navire, quel que soit son
propriétaire. Cette limite ne concerne que les contrats
d'affrètement coque nue, dont l'économie est celle d'un contrat
de location. Cette précision est importante en ce que toutes les
créances visées à l'article 1 paragraphe 1 de cette
convention à l'exception des alinéas (e) et (f) qui concernent la
gestion commerciale, se réfèrent à la gestion nautique du
navire que conserve le fréteur dans les contrats d'affrètement au
voyage et à temps, mais qu'il cède lorsqu'il frète son
navire coque nue. Ainsi, lorsque la dette a été contractée
par l'affréteur coque nue, le créancier pourra saisir le navire
objet de la créance, propriété d'un tiers, mais dont
l'affréteur supporte seul le risque de l'exploitation. Aussi, le
créancier peut saisir un autre navire appartenant à
l'affréteur coque nue, ce qui est conforme aussi bien à la
théorie du patrimoine du droit français qu'à l'article 3
paragraphe 1 de la convention du 10 mai 1952. En revanche, le créancier
ne pourra pas saisir un autre navire appartenant au propriétaire du
navire, celui-ci étant totalement étranger à la
créance.
L'article 3 paragraphe 4 de ladite convention dispose en
outre que la règle selon laquelle le demandeur peut saisir le navire
frété coque nue pour une dette de l'affréteur relative
à « ce navire », « s'applique
également à tous les cas où une personne autre que le
propriétaire est tenue d'une créance maritime ».
Cette disposition concerne principalement les autres modes de transfert
d'exploitation du navire, notamment les autres formes d'affrètement. La
saisie du navire affrété pour une dette de l'affréteur
à temps ou de l'affréteur au voyage est donc possible53(*), mais à la condition
que la créance soit maritime et relative au navire saisi. La
jurisprudence précise que la saisie peut être obtenue quand bien
même le contrat d'affrètement aurait pris fin54(*).
L'article 3 paragraphe 1 précise par ailleurs que seul
peut être saisi le navire auquel se rapportent les créances
relatives à la propriété contestée du
navire55(*), à la
copropriété contestée d'un navire, à sa possession,
son exploitation, ou les droits aux produits d'exploitation d'un navire en
copropriété56(*) ainsi qu'aux hypothèques maritimes57(*). A contrario, s'il
allègue une autre créance maritime, le demandeur peut saisir un
navire qui n'a aucun lien avec la créance à garantir ;
l'unique élément de rattachement tient à la personne du
propriétaire du navire auquel la créance se rapporte.
B- Les autres navires
appartenant au propriétaire du navire auquel la créance se
rapporte
La question qui se pose est celle de savoir si le
créancier peut saisir un navire autre que celui auquel la créance
se rapporte. La réponse affirmative est donnée tant par le droit
interne que par celui international58(*).
Sur le plan interne, le CCMM, en son article 114 dispose
que : « La saisie peut être pratiquée (...) sur
tout autre navire appartenant à celui qui était, au moment
où est née la créance maritime, propriétaire du
navire auquel cette créance se rapporte ».
Emboîtant le pas du CCMM, la Convention de Bruxelles dispose :
« ... tout demandeur peut saisir (...) tout autre navire
appartenant à celui qui était, au moment où est née
la créance maritime, propriétaire du navire auquel cette
créance se rapporte alors même que le navire saisi est prêt
à faire voile »59(*). Dans l'un comme dans l'autre cas, il s'agit des
formules identiques qui dérogeraient en quelque sorte à la
conception de l'action in rem telle que ci-dessus consacrée et
rejoindrait la conception in personam ; ce qui permettrait au
créancier de l'obligation de ne plus s'attaquer uniquement au navire
débiteur à travers la possibilité à lui
offerte de saisir les autres navires qui appartenaient au débiteur au
moment où la créance maritime est née. La formulation
ainsi exprimée est à relativiser dans la mesure où dans
certains cas, on ne devrait saisir que le navire auquel la créance se
rapporte ; c'est dans cette hypothèse que la convention
prévoit qu'aucun navire ne pourra être saisi pour une
créance prévue aux alinéas o, p ou q de l'article premier
à l'exception du navire même que concerne la
réclamation60(*).
Sur un tout autre terrain, l'existence de navires
d'État et de sociétés d'un seul navire donne lieu à
une certaine effervescence. Dans le premier cas, la théorie de
l'émanation a voulu signifier que l'on pouvait saisir tout navire
relevant du pavillon national parce que, a-t-on dit, les sociétés
armateurs de navires d'État ne possèdent pas d'autonomie
patrimoniale, voire même d'autonomie de gestion. La tentative qui a connu
un certain succès semble avoir fait long feu61(*). Dans le second cas, il s'est
agi de lutter contre la dispersion des patrimoines de mer résultant de
la constitution des sociétés d'un seul navire62(*). Il a paru injuste que ceux
qui contrôlent la gestion d'un ensemble de navires ne soient pas
poursuivis sur l'un où l'autre de ceux-ci sous prétexte qu'ils
ont constitué des sociétés indépendantes63(*). C'est ainsi qu'il a
été fait recours à la théorie des
« navires apparentés » pour soutenir que
ces sociétés n'en faisaient la plupart du temps qu'une seule,
afin de pouvoir saisir les navires autres que celui auquel la créance se
rapporte, lorsque c'est possible64(*). Aujourd'hui, la jurisprudence française se
montre extrêmement exigeante quant à la preuve de ce qui n'est
rien d'autre que la fictivité de ces sociétés. Il ne
suffit pas d'établir que les dirigeants ou les associés sont les
mêmes, ou encore que les sociétés en cause font partie du
même groupe, pour démontrer cette fictivité65(*). Cette jurisprudence, plus
empreinte de droit des sociétés que de droit maritime, est
directement inspirée de celle ayant cours en matière d'extension
d'une procédure collective ouverte à l'encontre d'une
société, à une autre société.
Afin de faciliter l'établissement de la
fictivité d'une société, la convention de Bruxelles a
prévu en son article 3 alinéa 2 une présomption
d'apparentement en disposant que « des navires seront
réputés avoir le même propriétaire, lorsque toutes
les parts de propriété appartiendront à une même ou
aux mêmes personnes ». Mais ce texte est en pratique de
peu d'utilité, la Cour de cassation, faisant une application
littérale extrêmement restrictive66(*). Elle considère en effet, qu'il faut s'en
tenir strictement à la question de savoir qui est associé dans
les sociétés en cause, sans que l'on puisse rechercher qui se
trouve exactement derrière les associés apparents, ce qui
conduirait à une appréciation indirecte de la
propriété des navires. On ne saurait donc, dans le but de
bénéficier de la présomption de l'article 3 alinéa
2 de la convention, rechercher qui est l'associé majoritaire de la
société elle-même associée de la
société en présence. Mais cette recherche demeure utile
pour établir la fictivité d'une société sans
recourir à la présomption de l'article 3.
Pour conclure avec la question des navires susceptibles
d'être saisis, une faculté bien qu'encadrée est
laissée au créancier saisissant tant par le CCMM sur le plan
interne CEMAC que par la convention de Bruxelles sur le plan international. De
ce fait le créancier pourra à son choix saisir soit le navire
auquel se rattache la créance maritime, soit tout autre navire
appartenant à celui qui était au moment où est née
la créance maritime, propriétaire du navire auquel se rattache
cette créance. Il convient toutefois de signaler que cette formule
consacrée par ces différents textes ne pose guère de
difficultés lorsque le navire se trouve entre les mains du
débiteur, mais elle devient d'application difficile lorsque ledit navire
a quitté les mains du débiteur et se trouve actuellement entre
d'autres mains. La question sera ainsi celle de savoir si le créancier
peut saisir le navire passé en d'autres mains que celles du
débiteur. Aussi bien en droit interne CEMAC qu'en droit international et
par suite de la consécration de l'obligation in rem, nous
pensons que la solution affirmative fait moins de difficulté67(*). Elle ne conduit pas à
une impasse contrairement à ce que l'on pourrait penser, parce que s'il
est vrai que celui contre lequel la saisie est poursuivie n'est pas
débiteur et ne le devient pas du fait de la saisie, la garantie
donnée par le propriétaire non débiteur du navire saisi
englobera l'armateur débiteur. C'est alors en tant que souscripteur de
cette garantie donnée pour le compte de ce débiteur que celui qui
est propriétaire du navire sera assigné et condamné.
L'on constate en fin de compte une originalité
frappante des règles de la saisie conservatoire des navires par rapport
à celles de la saisie de droit commun des biens meubles surtout
lorsqu'on se rend compte qu'en principe, seul le navire fautif devrait
répondre de cette dette, ce qui a donc donné lieu à la
conception de navire-débiteur et à la
consécration de l'action in rem en matière de saisie
conservatoire des navires. Cette originalité ne s'arrête pas
là ; elle se prolonge aussi dans les conditions d'ouverture de
ladite saisie liées à la créance à garantir.
SECTION II :
L'ORIGINALITÉ QUANT À LA CRÉANCE SUSCEPTIBLE D'OUVERTURE
DE LA SAISIE CONSERVATOIRE DES NAVIRES
Comme il a déjà été
signalé, l'ouverture d'une saisie conservatoire de droit commun sur les
biens mobiliers nécessite tout simplement l'allégation d'une
créance paraissant fondée dans son principe sans que le
créancier ait à justifier de circonstance de nature à en
menacer le recouvrement. La réalité est toute autre en ce qui
concerne la saisie conservatoire des navires où il existe des exigences
liées à la créance à garantir (Paragraphe 1) et
où la créance à alléguer est soumise à un
double régime d'apparence fondée en son principe ou non en
fonction de la législation applicable (Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Les
conditions relatives à la créance à garantir
Les deux ordres juridiques (international et communautaire
CEMAC) applicables en matière de saisie conservatoire de navires sont
unanimes sur le fait que le créancier qui nécessiterait
l'ouverture d'une telle saisie devrait justifier d'une créance maritime
(A) dont la liste est dressée par ces ordres au point où l'on
s'interroge sur le caractère exhaustif ou non de cette liste au regard
de son insuffisance manifeste (B). Cependant, pour se convaincre sur
l'originalité de la saisie conservatoire des navires quant aux
conditions relatives à la créance à garantir qui doit
être forcément maritime, nous allons examiner la portée de
cette exigence (C).
A- L'allégation
d'une créance maritime
L'une des très grandes particularités
liées à la saisie conservatoire du navire en droit interne CEMAC
et en droit international tient à la créance à
alléguer pour y parvenir. C'est ainsi que dans ces deux espaces, il
faudra pour ce faire, exciper l'existence d'une créance maritime contre
le débiteur que tant les conventions internationales relatives à
la saisie conservatoire des navires (1) que le CCMM (2) mettent en
évidence. Dans nos propos introductifs, il a été
signalé qu'un problème pourrait en appeler d'autres et c'est
ainsi qu'en traitant le problème des créances maritimes telles
qu'énoncées par chacun de ces différents cadres
juridiques, un problème sera abordé et résolu, celui des
conditions d'application de chacun de ces textes.
1- Les créances
maritimes au sens des conventions internationales sur la saisie conservatoire
des navires
En droit international de la saisie conservatoire des
navires, la convention de Bruxelles du 10 mai 1952 qui est celle actuellement
applicable nous dresse une liste de créances maritimes (a). Cependant,
au regard des insuffisances constatées par l'application de cette liste,
la future convention de Genève du 12 mars 1999 est venue, nous
semble-t-il, combler le vide de son futur prédécesseur (b).
a) La convention de
Bruxelles du 10 mai 195268(*)
Cette Convention conclue en Belgique n'envisage que l'aspect
conservatoire de la saisie des navires car elle est littéralement
intitulée « Convention internationale pour l'unification
de certaines règles sur la saisie conservatoire des navires de mer du 10
mai 1952 » et ne traite pas pour une raison ou pour une autre de
son aspect exécutoire. C'est ainsi que dans son corpus, elle
définit la saisie uniquement dans son sens conservatoire car son article
2 alinéa 2 l'envisage comme étant:
« l'immobilisation d'un navire avec l'autorisation de
l'autorité judiciaire compétente pour garantie d'une
créance maritime, mais ne comprend pas la saisie d'un navire pour
l'exécution d'un titre ».
Pour que cette Convention soit applicable, il faut d'abord que
la saisie soit pratiquée dans un des États contractants69(*). Tout État peut y
adhérer en notifiant son adhésion au Ministère des
affaires étrangères de Belgique. L'adhésion engage
l'État adhérent à l'expiration d'un délai de 6 mois
(article 15)70(*). Pour sa
part, le Cameroun est partie à la Convention de Bruxelles en vertu du
principe de succession législative prévu par sa
Constitution71(*), la
France ayant rendu cette Convention applicable à ses colonies (parmi
lesquelles le Cameroun), territoires d'Outre-mer entre autres, depuis le 23
avril 1958, conformément à l'article 18 paragraphe (a) de ladite
Convention72(*).
Si le navire en cause bat pavillon d'un État
étranger partie à la convention de Bruxelles, on fera application
de cette convention. S'il bat pavillon d'un État étranger non
partie à la convention de Bruxelles, on considérait auparavant
que le créancier saisissant et à défaut de choix de sa
part, le juge du for, pouvait faire application à son choix, de son
propre droit ou de la convention de Bruxelles73(*). En France, cette solution n'a semble-t-il plus cours
depuis un arrêt du 30 octobre 200074(*). Pour comprendre la portée de cette importante
décision, il convient de rappeler qu'aux termes de l'article 8
alinéa 3 de la Convention de Bruxelles du 10 mai 1952,
« ...chaque État contractant peut refuser tout ou partie
des avantages de la présente Convention à tout État non
Contractant et à toute personne qui n'a pas, au jour de la saisie, sa
résidence habituelle ou son principal établissement dans un
État contractant ». C'est par l'application
littérale de ce texte que la Cour de cassation française
considère désormais, que la convention de Bruxelles soit
applicable à la saisie conservatoire pratiquée en France
même sur un navire d'un État non contractant, en l'espèce
« Le Panama », dès lors que cette saisie
est au moins pratiquée pour recouvrer une créance maritime. Seul
l'État et non pas le juge ou le créancier peut priver un
État non contractant du bénéfice de tout ou partie des
dispositions de la convention de Bruxelles, dans l'exercice de son pouvoir
normatif réglementaire ou législatif.
Lorsque la convention de Bruxelles est applicable, la saisie
ne peut être effectuée que pour le recouvrement d'une
créance maritime, c'est-à-dire pour l'une des créances
restrictivement énumérées par cette convention75(*), en son article 1. Selon cet
article, la créance maritime signifie l'allégation d'un droit ou
d'une créance ayant l'une des causes suivantes : dommages
causés par un navire soit par abordage, soit autrement; pertes de vies
humaines ou dommages corporels causés par un navire ou provenant de
l'exploitation d'un navire; assistance et sauvetage; contrats relatifs à
l'utilisation ou la location d'un navire par charte-partie ou autrement;
contrats relatifs au transport des marchandises par un navire en vertu d'une
charte-partie, d'un connaissement ou autrement; pertes ou dommages aux
marchandises et bagages transportés par un navire; avarie commune;
prêt à la grosse; remorquage; pilotage; fournitures, quel qu'en
soit le lieu, de produits ou de matériel faites à un navire en
vue de son exploitation ou de son entretien; construction, réparations,
équipement d'un navire ou frais de cale; salaires des capitaines,
officiers ou hommes d'équipage; débours du capitaine et ceux
effectués par les chargeurs, les affréteurs ou les agents pour le
compte du navire ou de son propriétaire; la propriété
contestée d'un navire; la copropriété contestée
d'un navire ou sa possession, ou son exploitation, ou les droits aux produits
d'exploitation d'un navire en copropriété; toute
hypothèque maritime et tout mort-gage.
La future convention de Genève, sur la même
question apporte plus de précisions, ce qui rendra forcément son
application moins malaisée.
b) La convention de
Genève du 12 mars 199976(*)
La convention du 12 mars 1999, adoptée à
Genève en Suisse qui a elle aussi pour objet la saisie conservatoire des
navires, était ouverte à la signature du 1er septembre
1999 au 31 août 2000. Elle est la future nouvelle convention
internationale applicable à la saisie conservatoire des navires car elle
est destinée à remplacer la convention de Bruxelles du 10 mai
1952. Ceci ne deviendra effectif que lors de son entrée en vigueur,
laquelle entrée n'est possible que six mois après sa
10ème ratification77(*). À ce jour, n'ont ratifié la convention
de Genève que cinq États78(*). Ce texte ne modifie pas fondamentalement le
droit issu de la convention de Bruxelles ; elle ne fait
qu'éclaircir certains points.
Lorsqu'elle entrera en vigueur, la convention de Genève
du 12 mars 1999 devra obligatoirement être appliquée à la
saisie de tous les navires stationnés dans l'un des États
contractants, quel que soit son pavillon79(*). Il ne serait pas abusif de remarquer que
contrairement à la convention de Bruxelles qui retient comme
critère principal et décisif d'application de ce texte, la
nationalité du pavillon du navire en cause qui doit être celle
d'un État contractant (article 8 de la convention de Bruxelles), celle
de Genève retient le lieu de l'appréhension du navire (article 8
précité). À ce principe, il n'existera que deux
exceptions : premièrement, la saisie conservatoire d'un navire
stationné dans le port d'un État dont il bat pavillon, par un
créancier établi dans cet État, relève du droit du
for c'est-à-dire du droit interne de ce même État80(*) ; deuxièmement,
chaque État signataire peut préciser lors de son adhésion
à la convention, que celle-ci ne s'appliquera qu'aux navires battant
pavillon de l'un des États signataires81(*).
En ce qui concerne le droit substantiel de la convention de
Genève, il en résulte que tout comme sa devancière (la
convention de Bruxelles), la saisie conservatoire d'un navire ne pourra
être effectuée que pour le recouvrement d'une créance
maritime au sens des dispositions de ladite convention (article 2 alinéa
2)82(*). La créance
maritime est d'ailleurs un élément de définition du
créancier saisissant, la convention de Genève disposant en son
article 1 alinéa 4, que par créancier, « il faut
entendre toute personne alléguant une créance
maritime ». Il s'agit des créances suivantes :
pertes ou dommages causés par l'exploitation du navire; mort ou
lésions corporelles survenant, sur terre ou sur eau, en relation directe
avec l'exploitation du navire; opérations de sauvetage ou d'assistance
ainsi que tout contrat de sauvetage ou d'assistance, y compris, le cas
échéant, une indemnité spéciale concernant des
opérations de sauvetage ou d'assistance à l'égard d'un
navire qui par lui-même ou par sa cargaison menaçait de causer des
dommages à l'environnement; dommages causés ou risquant
d'être causés par le navire au milieu, au littoral ou à des
intérêts connexes; mesures prises pour prévenir,
réduire ou éliminer ces dommages; indemnisation de ces dommages;
coût des mesures raisonnables de remise en état du milieu qui ont
été effectivement prises ou qui le seront; pertes subies ou
risquant d'être subies par des tiers en rapport avec ces dommages; et
dommages, coûts ou pertes de nature similaire à ceux qui sont
ci-dessus cités ; frais et dépenses relatifs au
relèvement, à l'enlèvement, à la
récupération, à la destruction ou à la
neutralisation d'un navire coulé, naufragé, échoué
ou abandonné, y compris tout ce qui se trouve ou se trouvait à
bord de ce navire, et frais et dépenses relatifs à la
conservation d'un navire abandonné et à l'entretien de son
équipage; tout contrat relatif à l'utilisation ou à la
location du navire par affrètement ou autrement; tout contrat relatif au
transport de marchandises ou de passagers par le navire, par affrètement
ou autrement; pertes ou dommages subis par les biens, ou en relation avec ces
biens (y compris les bagages) transportés par le navire; avarie commune;
remorquage; pilotage; marchandises, matériels, approvisionnement,
soutes, équipements (y compris conteneurs) fournis ou services rendus au
navire pour son exploitation, sa gestion, sa conservation ou son entretien;
construction, reconstruction, réparation, transformation ou
équipement du navire; droits et redevances de port, de canal, de bassin,
de mouillage et d'autres voies navigables; gages et autres sommes dus au
capitaine, aux officiers et autres membres du personnel de bord, en vertu de
leur engagement à bord du navire, y compris les frais de rapatriement et
les cotisations d'assurance sociale payables pour leur compte; paiements
effectués pour le compte du navire ou de ses propriétaires;
primes d'assurance (y compris cotisations d'assurance mutuelle) en relation
avec le navire, payables par le propriétaire du navire ou par
l'affréteur en dévolution ou pour leur compte; frais d'agence ou
commissions de courtage ou autres en relation avec le navire, payables par le
propriétaire du navire ou par l'affréteur en dévolution ou
pour leur compte; tout litige quant à la propriété ou
à la possession du navire; tout litige entre les copropriétaires
du navire au sujet de l'exploitation ou des droits aux produits d'exploitation
de ce navire; hypothèque, « mortgage » ou
droit de même nature sur le navire; tout litige découlant d'un
contrat de vente du navire.
Les créances maritimes telles qu'il en ressort dans le
cadre de cette convention, sans être totalement identiques à
celles ci-dessus exposées dans le cadre de la convention de Bruxelles
s'en rapprochent véritablement. Cependant, certaines créances
visiblement maritimes, à l'instar des primes d'assurances83(*) et des frais d'agence ou
commission de courtage en relation avec le navire84(*)qui n'avaient pas
été mentionnées, sont désormais admises. De
même, de nouveaux types de créances consécutives au
progrès de la technologie telles que les créances du chef des
dommages à l'environnement85(*), ont fait leur apparition.
Les créances maritimes découlant de cette
convention ont été pour ainsi dire, pour la plupart reprises dans
le contexte CEMAC par le CCMM qui a d'ailleurs fait un renvoi exprès
à cette convention.
2- Le CCMM
En Afrique centrale, le fait le plus marquant en droit
maritime, ces dernières décennies, est l'adoption du Code de la
marine marchande de la CEMAC. Il s'agit d'un évènement
historique, en ce que le Code régente désormais le droit maritime
dans toute l'Afrique centrale et, a même vocation à s'appliquer
dans un avenir proche, au-delà de cette sphère
géographique86(*).
Pourtant, parmi les nombreuses matières maritimes que
ce Code régit, plusieurs d'entre elles coexistent avec d'autres
dispositifs juridiques nationaux ou internationaux. Il s'agit par exemple de la
saisie des navires qu'il régit dans ses articles 114 à 133. Pour
ne pas tomber en conflit avec les conventions internationales qui
régissent la question, il faudrait examiner le champ d'application de ce
code.
En comparaison avec les conventions internationales sur la
saisie des navires, il s'en suit que le Code CEMAC ne devrait s'appliquer que
de façon résiduelle, c'est-à-dire notamment à
l'occasion de la saisie, par un créancier ayant sa résidence ou
son établissement principal en Afrique centrale, d'un navire battant
pavillon d'un État de la CEMAC et pour autant qu'il ne s'agisse pas d'un
rapport de droit international ; car même dans ce cas, la convention
internationale devrait s'appliquer dans la mesure où la
quasi-totalité des États de la CEMAC y sont contractants. La
seule hypothèse où l'application du code CEMAC ne fait
guère de difficulté est, dans notre opinion, celle
précisément du créancier, ayant sa résidence
habituelle ou son principal établissement au Cameroun, qui saisit au
Cameroun un navire immatriculé au Cameroun87(*). Aussi bien, notre analyse se
trouve confortée par l'article 8 alinéa 4 de la convention
internationale de 1952, texte qui énonce qu'aucune de ses dispositions
ne modifie ou n'affecte la loi interne des États contractants en ce qui
concerne la saisie d'un navire dans le ressort de l'État dont il bat
pavillon, par une personne ayant sa résidence habituelle ou son
principal établissement dans cet État. En effet, l'application de
la convention internationale suppose l'existence d'un élément
d'extranéité.
En ce qui concerne le droit substantiel du Code CEMAC, la
saisie conservatoire d'un navire, dans l'un des ports de l'Afrique centrale,
est possible dès lors qu'il est justifié d'une créance
maritime88(*). Le CCMM
donne lui aussi la liste des créances maritimes susceptibles d'ouvrir
une saisie conservatoire dans son espace, bien qu'en faisant allusion à
la convention de Genève du 12 mars 1999 sur la question. Ces
créances maritimes résultent des causes suivantes : dommages
matériels ou corporels, y compris perte de vies humaines sur terre ou
sur mer, causés par un navire ou provenant de son exploitation ;
assistance et sauvetage, contrats relatifs à l'affrètement ou
à l'utilisation d'un navire ; contrats relatifs au transport des
marchandises par un navire ; pertes ou dommages aux marchandises et
bagages transportés par un navire ; avarie commune ;
remorquage ou pilotage d'un navire ; fournitures de produits, de
matériels ou de services à un navire en vue de son exploitation
ou de son entretien ; construction, réparation, équipement
d'un navire ou frais de cale ; salaires du capitaine et de
l'équipage ; débours du capitaine, des affréteurs,
des chargeurs ou des agents maritimes, effectués pour le compte du
navire ou de son propriétaire ; commissions des agents du
navire ; propriété contestée du navire ; droits
de copropriété d'un navire ou droits à l'exploitation d'un
navire, ou aux produits d'exploitation d'un navire en
copropriété ; indemnité ou autre
rémunération due au titre de toute mesure ou tentative visant
à prévenir, écarter ou limiter un dommage imputable au
navire y compris un dommage de pollution en vertu ou non d'une Convention
internationale, d'un texte législatif ou réglementaire, ou d'un
contrat ; frais et dépenses relatifs à l'enlèvement
de l'épave du navire ou de sa cargaison ; toutes primes
d'assurances relatives au navire, tout litige découlant d'un contrat de
vente du navire89(*).
Le CCMM bien que faisant allusion à la convention de
Genève sur l'énumération des causes de créances
maritimes pouvant donner lieu à ouverture d'une saisie conservatoire,
n'en conserve pas moins une certaine autonomie, car de
l'énumération de ces causes telles qu'elles ressortent de ce
Code, l'on constate l'absence de certaines causes qui figurent pourtant dans le
texte de référence à savoir la convention de Genève
de 199990(*) ; cet
état de choses pose le problème du caractère exhaustif ou
non des causes des créances maritimes.
B- Le caractère
exhaustif ou non des créances maritimes ?
Au premier abord, le caractère exhaustif
s'appréhende comme ce qui épuise à fond un sujet91(*) ; ce qui revient à
employer également le terme limitatif ; dans le cas contraire, il
est plutôt indicatif. Cet antagonisme s'observe lorsqu'il est aussi
question de parler de la liste des créances maritimes.
Il convient d'emblée de relever que le débat
sur le caractère exhaustif ou indicatif de la liste des créances
maritimes est depuis longtemps une préoccupation constante sur la
scène internationale. Il oppose les partisans d'une liste ouverte
à ceux d'une « closed list ». Tandis qu'une
liste restrictive a pour inconvénient d'exclure certaines
créances ayant un caractère maritime et de
méconnaître le caractère évolutif des
activités maritimes, une liste ouverte serait à craindre en
raison des incertitudes qu'elle pourrait causer en laissant aux tribunaux une
liberté excessive92(*).
Pourtant, l'énumération des causes de
créances maritimes telles que contenues dans la convention de Bruxelles
de 1952 n'est pas sujet à ambiguïté quant à son
caractère exhaustif ou indicatif ; de tout temps, cette liste a
été considérée comme étant exhaustive et
d'interprétation restrictive93(*) d'où la dénomination de
« closed list » employée dans le jargon des
maritimistes, même si le juge camerounais s'est quelque fois
montré peu rigoureux dans l'appréciation de cette
exigence94(*).
Pour éviter les inconvénients liés au
système de la « closed list » et de la
liste ouverte, un compromis devrait s'avérer nécessaire. C'est ce
qu'a tenté de faire la convention de Genève du 12 mars 1999 qui a
procédé à ce qu'on a appelé une
« open list partial »95(*). Une liste des créances
maritimes est en effet adoptée, mais celle-ci intègre des
créances nouvelles et formule toutes les créances dans les termes
assez généraux, ceci dans le respect de l'attachement à la
conception de la créance maritime comme créance résultant
de l'exploitation du navire. Schématiquement, la convention de
Genève dans son élaboration96(*) était partagée sur le point de savoir
si cette convention devait s'inspirer de la convention de Bruxelles de 1952 et
prévoir ainsi une liste exhaustive de créances maritimes,
évitant ainsi que des créances maritimes authentiques ne puissent
donner lieu à un droit de saisie. Après de longs débats et
examens de diverses propositions, il a été adopté un
compromis délicat consistant à établir une liste
exhaustive de créances donnant lieu à un droit de saisie, tout en
prévoyant une certaine flexibilité pour certaines
catégories de créances maritimes97(*).
En droit interne CEMAC tout comme en droit international, le
problème du caractère exhaustif ou non de la liste des causes des
créances maritimes se pose aussi ; car comme il a été
signalé, le CCMM fait, pour l'énumération de la liste des
créances maritimes, allusion à la convention de Genève de
1999, mais néanmoins donne une énumération dans laquelle
l'on ne retrouve pas certaines créances pourtant contenues dans ladite
convention. De ce fait, est-ce qu'au regard de cette absence, l'on peut
considérer la liste du CCMM comme étant indicative et inclure par
là même les créances manquantes ? Un cas devrait
forcément attirer notre attention ; il s'agit de
l'hypothèque qui figure à l'article 1er paragraphe
1(u) de la convention de Genève mais qui est pourtant absente dans le
CCMM. Ce qui peut paraître dangereux pour la garantie
hypothécaire, compte tenu du risque de distraction du bien pendant la
longue procédure de saisie-exécution98(*). La solution que l'on pourrait
apporter à cette incurie est que, sans promouvoir le caractère
indicatif de l'article 119 du CCMM sur la liste des causes des créances
maritimes, il est souhaitable de considérer la créance
hypothécaire comme une créance maritime, sans que
l'intérêt de l'activité maritime en soit affecté.
Ceci renforcerait les garanties du créancier dans un domaine où
la saisie-exécution n'est pas très utilisée, et son
application largement dépassée dans la pratique par le recours
à la saisie conservatoire99(*).
En tout état de cause, et pour éviter les
débats autour de l'exhaustivité ou non de liste des
créances maritimes telle qu'élaborée par les textes
spéciaux, il faudrait que le créancier allègue une
créance qui figure expressément sur cette liste. Ainsi dit, on ne
peut pas saisir conservatoirement un navire en garantie de n'importe quelle
créance. Ce principe constitue véritablement une
singularité par rapport au reste du droit de l'exécution
forcée, ce qui ne serait pas sans causes ni conséquences,
d'où l'intérêt d'examiner la portée de l'obligation
d'allégation d'une créance maritime.
C- La portée de
l'obligation d'allégation d'une créance maritime
L'obligation d'allégation d'une créance
maritime par le créancier pour l'exercice d'une saisie conservatoire est
donc clairement exprimée par les textes applicables dans notre contexte
en la matière à savoir en droit interne le CCMM et en droit
international la convention de Bruxelles100(*). Ceci est une originalité qui déroge
fondamentalement au droit commun de la saisie conservatoire
mobilière101(*)
qui exige pour ce faire, tout simplement une créance paraissant
fondée dans son principe102(*). Cette exigence nous fait nécessairement
ressortir quelques remarques.
D'une part, la limitation du droit de saisie au seul
créancier maritime est fondée sur une raison évidente et
pertinente : la protection de l'activité maritime. L'immobilisation
qui résulte de la saisie cause un préjudice très grave
à l'armateur, lequel est privé des bénéfices
d'exploitation du navire alors que ses coûts continuent à courir.
C'est pour protéger la liberté du commerce maritime que les
législations limitent ce droit de saisie conservatoire au seul
créancier maritime, défini par rapport à la créance
maritime ; ce dernier est tout simplement le bénéficiaire
d'une créance maritime.
D'autre part, la notion de créance maritime
témoigne de l'affectation du patrimoine de mer à la garantie de
tous les créanciers maritimes103(*). Ainsi, et à la différence des
créanciers terrestres, ceux maritimes ne pourront se contenter que de la
tranche du patrimoine de leurs débiteur affectée à
l'aventure maritime, application manifeste de la théorie du
« patrimoine d'affectation »104(*). Ce constat emporte une
conséquence très particulière en raison de la
situation très fréquente en droit maritime de la dissociation de
la propriété et de l'exploitation du navire: l'acceptation par
les deux droits applicables en la matière du principe d'une obligation
de nature particulière, l'obligation in rem, obligation dont
l'existence est rapportée à une chose à un point tel qu'on
peut dire que la chose, plutôt que la personne de son propriétaire
ou de son exploitant en répond105(*). Ceci permet donc au navire fautif de
répondre de ces dettes, indépendamment du droit de
propriété. Le navire n'appartenant pas au débiteur
à titre de navire causal peut être saisi ; on parle ainsi
d'action in rem fondée sur le principe qui veut que la saisie
conservatoire du navire soit en priorité dirigée contre le navire
dont l'exploitation est cause de créance, en toute indépendance
de la qualité juridique de son exploitant. Le véritable
propriétaire ne peut s'opposer à la saisie au motif qu'il n'est
pas le véritable débiteur106(*). Cette conception résulte de l'influence du
droit anglais, où seul le navire ayant provoqué la dette, peut
être conservatoirement saisi. Par ce biais, l'absence de lien personnel
entre l'obligation et le propriétaire n'empêche pas la saisie du
navire générateur de la créance. Ceci permet donc de
saisir conservatoirement les navires du propriétaire pour les dettes
nées du fait de l'affréteur ou de l'armateur exploitant,
même si celui-ci n'est plus propriétaire du navire causal au
moment où s'exerce l'action. Il suffit qu'il l'ait été au
moment où est née la créance privilégiée.
La jurisprudence camerounaise ne conteste pas l'exercice d'une
telle action comme on peut le voir dans l'affaire du navire
« Salam 4 »107(*). À la faveur de l'escale du navire
« Salam 4 » au port de Douala le 16 février
2007, la société A/S Dan Bunkering a pratiqué une
saisie conservatoire sur ledit navire pour
sûreté, conservation et paiement de la somme de 122
927 660 F CFA en règlement d'une
créance d'avitaillement (fourniture d'eau et de soutes) se rapportant
audit navire, créance qui serait née alors que le navire
était affrété à temps par les
sociétés Crossworld Shipping Ltd et Crossworld Middle East Ltd.
De même, la conception du
navire-débiteur a permis de conclure, face au silence de la
loi, qu'un navire affrété peut être saisi par un
créancier de l'affréteur après la fin de
l'affrètement ; ce qui fonde le droit à la saisie, c'est le
fait que le créancier a un privilège sur le navire108(*). Sur la même
lancée, et comme il a déjà été
signalé, tant en droit communautaire CEMAC qu'en droit international, le
droit de saisie pourrait être exercé quand bien même le
navire causal ou encore navire-débiteur aura changé de
propriétaire109(*).
En somme, la condition principale tenant à la
créance à garantir est que celle-ci doit être
forcément une créance maritime, mais le problème se pose
de savoir si elle doit comme en droit commun de la saisie conservatoire
mobilière, paraître fondée dans son principe.
Paragraphe 2 : La
problématique de l'exigence d'une créance maritime paraissant
fondée dans son principe
Pour cette circonstance, le droit international et le droit
communautaire CEMAC se sont déployés chacun en ce qui le
concerne. Pendant que le principe de l'exigence d'une créance maritime
paraissant fondée dans son principe est formellement affirmé dans
le CCMM (A), le droit international à travers ses conventions, n'en a
pas fait mention (B).
A- L'affirmation dans le
CCMM
Le droit interne CEMAC dispose à travers son
CCMM : « Elle (la saisie conservatoire des navires) peut
être accordée dès lors qu'il est justifié d'une
créance maritime paraissant fondée dans son
principe »110(*). Contrairement à ce qu'on aurait pu penser
à travers nos analyses précédemment exprimées, le
CCMM ne se contente pas uniquement de mentionner pour l'ouverture d'une saisie
conservatoire des navires, l'existence d'une créance maritime car
il requiert la justification d'une « créance
maritime paraissant fondée dans son principe ». Au
regard de cette formulation, l'on constate la souplesse du législateur
communautaire et par là même la flexibilité et
l'accessibilité de la saisie conservatoire des navires dans l'espace
CEMAC. Ainsi, comme le droit commun de la saisie des biens meubles, la
créance doit paraître fondée dans son principe111(*) mais à la
différence du droit commun, l'existence de circonstances de nature
à menacer le recouvrement de cette créance n'est pas
requise.112(*). Une
simple apparence de créance maritime répond à l'exigence
requise.
Ainsi pour l'exercice d'une saisie conservatoire de navire
dans l'espace CEMAC, le juge ne doit se préoccuper ni de
l'exigibilité, ni de la liquidité, ni de la certitude la
créance ; il doit vérifier si la créance est
apparemment fondée. Une créance fondée dans son principe
est une créance dont l'existence est vraisemblable ; il peut s'agir
d'une créance conditionnelle ou d'une créance à
terme ; il se peut aussi que le montant de la créance ne soit pas
encore déterminé en argent. L'essentiel est que la personne qui a
recours à la saisie puisse légitimement se prétendre
créancière étant donné que le créancier n'a
pas besoin d'attendre que sa créance soit certaine, liquide et exigible.
Cependant, l'exigence d'une créance paraissant fondée dans son
principe ne devrait pas être prise pour une exigence exclusive car
même si une créance fondée en son principe suffit pour
pratiquer une saisie conservatoire, a fortiori une créance
certaine, liquide et exigible peut également constituer la cause d'une
saisie conservatoire113(*).
Pour résumer, lorsque c'est le CCMM qui s'applique
à l'exercice d'une saisie conservatoire, l'exigence classique
d'existence d'une créance maritime est requise, mais
édulcorée par le fait qu'il pourrait s'agir tout simplement d'une
créance maritime paraissant fondée dans son principe. Cette
tolérance législative sur le plan communautaire est aussi
observée en droit interne français114(*) où à l'image
du droit commun de la saisie conservatoire des miens meubles, il est
exigé une créance (compte non tenu de son caractère
maritime) paraissant fondée dans son principe115(*).
A priori, il ne serait pas incongru de dire
qu'à ce niveau, dans l'espace CEMAC, outre le caractère maritime
de la créance, il n'y a pas de différence notable avec le droit
commun de la saisie des biens meubles corporels incarné par l'AUPSRVE.
Cependant l'originalité de la saisie conservatoire des navires
résulte du fait qu'il n'est pas nécessaire de prouver par exemple
l'imminence de l'insolvabilité du débiteur comme en droit commun,
laquelle insolvabilité imminente découle nécessairement de
l'exigence de circonstances de nature à menacer le recouvrement de la
créance.
Si jusqu'à présent la conviction sur
l'originalité de la saisie conservatoire des navires par rapport au
droit commun de la saisie des biens meubles corporels n'est pas emportée
quant au fait que la créance doit paraître fondée dans son
principe, cette originalité est fortement perceptible en droit
international où cette exigence n'a point été
formulée dans les textes régissant la saisie conservatoire des
navires.
B- L'absence de l'exigence
d'une créance maritime paraissant fondée dans son principe dans
les conventions internationales
Fières de son attachement à l'obligation in
rem découlant du droit anglo-saxon, la convention internationale de
1952 et son futur successeur, celle de 1999 exigent pour l'exercice d'une
saisie conservatoire, l'allégation d'une créance maritime
purement et simplement. Point n'est donc besoin que celle-ci puisse
revêtir d'autres caractères notamment ceux découlant du
droit interne de la saisie conservatoire des navires et résultant du
CCMM et aussi et surtout ceux issus du droit commun de la saisie conservatoire
des biens meubles corporels, lequel devrait a priori régir la
saisie conservatoire des navires.
La simple référence à une
allégation de créance maritime démontre le
caractère libéral des conventions puisqu'elles n'exigent
même pas une apparence de créance dont se satisfait le droit
interne. Dès lors, le juge ne peut exiger de celui qui se prévaut
des dispositions de la convention de 1952 et de celle de 1999 qu'il
établisse le caractère certain et sérieux de sa
créance. En droit français, la Cour de cassation sanctionne
inévitablement les juridictions du fond qui accordent mainlevée
de la saisie pratiquée sur le fondement de la convention au motif que la
créance devrait présenter un caractère certain et
sérieux116(*). La
Cour d'appel d'Aix-en-Provence a en outre jugé que le juge n'avait pas
à rechercher si la créance maritime est ou non frappée
d'une éventuelle prescription117(*).
Gage de simplicité et de rapidité, cette
exigence est particulièrement adaptée au domaine maritime
puisqu'elle permet à celui qui se prétend créancier, de
saisir un navire sans avoir à justifier de sa qualité. Ainsi, le
créancier évitera de perdre un temps précieux durant
lequel le navire à saisir pourrait quitter le port. Selon la formule du
Doyen RODIÈRE, le juge de la saisie n'a pas à requérir du
créancier quelque preuve que ce soit sinon celle d'être titulaire
d'une créance entrant dans l'énumération faite dans
lesdites conventions 118(*).
Ceci étant, et contrairement à ce que l'on
observe dans le droit de saisie contenu dans le CCMM et dans l'AUPSRVE, les
deux conventions internationales ne mentionnant pas l'allégation
d'une « créance paraissant fondée dans son
principe », il suffit donc que la créance
alléguée figure sur la liste limitative des causes des
créances maritimes figurant dans lesdites conventions pour que la saisie
puisse être valablement pratiquée119(*), et les pouvoirs du juge se
trouvent en même temps diminués étant donné qu'il
n'aura plus qu'à vérifier l'appartenance de la créance
alléguée à celles figurant dans ladite liste.
Étant donné que l'allégation d'une
créance paraissant fondée dans son principe découlant du
droit interne permet de rendre moins aisée la saisie des navires en
Afrique centrale, nous pourrons insinuer a contrario que l'absence
d'une telle formulation dans les conventions internationales rend plutôt
souple l'exercice d'une telle saisie car le créancier saisissant n'a pas
forcément à démontrer qu'il est un créancier
inéluctable.
CONCLUSION DU CHAPITRE
I
Au terme du premier chapitre de cette partie, l'on se rend
compte d'une originalité remarquable de la saisie conservatoire des
navires par rapport à la saisie conservatoire des biens meubles à
laquelle le navire aurait pu être soumis. Tout d'abord, la saisie
conservatoire des navires dans le contexte camerounais est soumise à un
double régime législatif : le droit international
incarné par les conventions internationales, et le droit communautaire
CEMAC incarné par le CCMM. Au regard du corpus de ces textes, l'on se
rend compte que la saisie conservatoire des navires conserve une
originalité dans l'ouverture de la saisie conservatoire liée
à cet objet.
Ainsi, il a été observé d'une part, que
le navire est un objet mobilier « pluriel » car
derrière le navire, se cachent plusieurs autres objets qui participent
à sa raison d'être au point où il eut été
nécessaire que nous analysassions les objets susceptibles d'être
soumis au régime de la saisie conservatoire des navires. Ceci dit, nous
avons constaté qu'outre le navire qui est d'emblée admis à
cette saisie, d'autres accessoires, bien que détachables, mais qui
participent à son existence et à son fonctionnement tels les
soutes se voient aussi appliquer ce régime mais à l'occasion
d'une saisie globale du navire. D'autre part, le principe est que seul le
navire qui est à l'origine de la créance maritime devrait seul
souffrir de l'ouverture d'une saisie conservatoire, ce qui a donné lieu
à la conception de
« navire-débiteur » même s'il
n'appartient plus au véritable débiteur personne physique ;
à coté de ce navire, d'autres navires sont également
saisissables, il s'agit des navires appartenant au propriétaire du
navire auquel la créance se rapporte.
Contrairement à ce qui a cours en matière
de saisie conservatoire mobilière de droit commun où toute
créance peut donner lieu à saisie conservatoire, l'ouverture
d'une saisie conservatoire des navires n'est possible que pour la garantie
d'une créance maritime, qui doit paraître fondée en son
principe, ou pas forcément, selon que le texte à appliquer est le
CCMM ou les conventions internationales.
Les rédacteurs des textes sur la saisie conservatoire
ne se sont pas contentés de particulariser la saisie conservatoire des
navires uniquement dans son ouverture, ils ont prolongé cette
particularisation dans la mise en oeuvre de ladite saisie.
CHAPITRE II :
L'ORIGINALITÉ TIRÉE DE LA MISE EN OEUVRE DE LA SAISIE
CONSERVATOIRE DES NAVIRES
En droit commun, le déroulement de la saisie
conservatoire des biens meubles nécessite par principe l'intervention
d'un juge qui devrait donner son autorisation120(*), et d'un huissier ou d'un agent d'exécution
qui sera chargé du déroulement de la procédure121(*). En saisie conservatoire des
navires, les législateurs attitrés en la matière ont pris
en compte la particularité que révèle le droit
maritime ; certes, ils ne se sont pas trop démarqués de
leurs homologues du droit commun des saisies, mais ils ont permis aux
autorités typiquement maritimes d'avoir une certaine mainmise sur la
procédure, ce qui sera observé lorsqu'il sera question pour nous
d'étudier les personnes comprises dans les opérations de saisie
conservatoire des navires (SECTION I).
Tout aussi, la mise en oeuvre de la saisie conservatoire de
droit commun permet dans son déroulement de rendre indisponibles les
biens qui en sont l'objet122(*) ; or dans la saisie conservatoire des navires,
son déroulement permet l'immobilisation du navire qui en est
l'objet ; il s'agit là d'une originalité remarquable de la
saisie conservatoire des navires que l'on analysera dans le déroulement
de ladite saisie (SECTION II).
SECTION I :
L'ORIGINALITÉ DES PERSONNES IMPLIQUÉES DANS LES OPÉRATIONS
DE SAISIE CONSERVATOIRE DES NAVIRES
Pour l'exercice d'une saisie conservatoire des navires, les
textes tant internationaux que communautaires sont unanimes sur le fait qu'il
faudrait forcément l'intervention de l'autorité judiciaire
compétente (Paragraphe 1) qui devrait rendre pour la circonstance une
ordonnance après avis de l'autorité maritime compétente
(Paragraphe 2).
Paragraphe 1 :
L'intervention de l'autorité judiciaire compétente
Il faudrait tout d'abord procéder à
l'identification de cette autorité judiciaire compétente (A)
avant de voir par quel moyen le créancier devrait le saisir (B).
A- L'identification de
l'autorité judiciaire compétente
À la suite du débat houleux sur la juridiction
compétente en matière de droit commun de la saisie des biens
meubles123(*), un autre,
certes moins alléchant se pose en ce qui concerne celle
compétente pour l'ouverture de la procédure spéciale de la
saisie conservatoire du navire. En la matière, des imprécisions
sont observées car pour l'identification de cette juridiction, le CCMM
dispose : « La saisie conservatoire est autorisée par
ordonnance rendue sur requête par l'autorité judiciaire
compétente... »124(*). Cette même exigence ressort dans les deux
conventions internationales. Ainsi, la convention internationale de 1952
dispose : « Un navire ne peut être saisi qu'avec
l'autorisation d'un tribunal ou de toute autre autorité judiciaire
compétente de l'État Contractant dans lequel la saisie est
pratiquée »125(*). Celle de 1999 dispose quant à elle
qu' « Un navire ne peut être saisi (...) que par
décision d'un tribunal de l'État partie dans lequel la saisie est
pratiquée »126(*), étant donné que le tribunal au sens
de cette convention est l'autorité judiciaire compétente de
l'État127(*).
Ainsi, qu'il s'agisse du droit interne ou du droit
international, pour autoriser une saisie conservatoire, seule est
qualifiée l'« autorité judiciaire compétente
dans l'État partie dans lequel la saisie est
pratiquée ». Ces différents textes ne donnant pas
plus de précisions sur cette autorité judiciaire, le soin est
donc laissé à chaque loi nationale de déterminer cette
dernière qui sera donc habilitée à autoriser les saisies
conservatoires des navires sur leurs territoires.
Au Cameroun particulièrement, et dans ces conditions,
on aurait pu logiquement penser qu'il s'agirait du juge de l'exécution
tel que déterminé par la loi n°2007/001128(*) étant donné
qu'il statue lui aussi sur requête129(*). À la lumière de quelques
décisions récentes130(*), il apparaît que l'autorisation des saisies
conservatoires des navires continue de ressortir à la compétence
du juge des requêtes, ce qui justifie l'exercice des recours contentieux
devant le juge des référés131(*). Ainsi, au Cameroun,
l'autorité judiciaire compétente en matière d'autorisation
des saisies conservatoires des navires est le juge des requêtes, lequel
n'est rien d'autre que le PTPI ou le magistrat par lui
délégué à cet effet132(*).
Une fois l'identification de cette autorité judiciaire
compétente faite, il faudrait dès lors examiner le moyen par
lequel il est saisi.
B- Le mode de
saisine
Généralement, il est reconnu à toute
personne qui se prétend être titulaire d'un droit méconnu,
de saisir le juge afin que celui-ci se prononce sur la légitimité
de ce droit ; ce fait est appelé l'action en justice que l'on
pourrait définir comme le droit pour l'auteur d'une prétention
d'être entendu sur le fond de celle-ci afin que le juge la dise bien ou
mal fondée133(*).
Pour intenter donc cette action, le requérant devrait procéder
par la demande en justice, car l'action est le droit de saisir le juge, la
demande en justice est la manière dont s'exerce ce droit ; elle est
donc l'acte de procédure134(*) par lequel une personne exerce ce droit, se fait
entendre sur le fond de la prétention dont elle saisit le juge pour
qu'il la dise bien ou mal fondée135(*).
Appliquée en voies d'exécution et notamment en
ce qui concerne la saisie conservatoire des navires, cette demande n'est rien
d'autre qu'une requête que l'on peut définir comme étant
une demande écrite adressée directement à un magistrat,
sans mise en cause d'un adversaire, dans les cas où la situation
à régler est urgente et où la nécessité
commande qu'il soit procédé non contradictoirement ; il y
est répondu par une ordonnance de caractère provisoire,
exécutoire sur minute et susceptible de rétractation.
L'exigence d'une requête pour déclencher le
processus de saisie conservatoire des navires résulte des dispositions
expresses des textes applicables en la matière. En droit interne, le
CCMM dispose s'agissant des navires que « La saisie conservatoire
est autorisée par ordonnance rendue sur
requête... »136(*). En droit international, la formule serait la
même, étant donné que les conventions internationales sur
la saisie conservatoire laissent en ce qui concerne la procédure de
saisie le soin aux législateurs nationaux137(*) ; cela revient donc
à l'application dans notre espace du CCMM et donc de la
consécration tant interne qu'internationale de la requête comme
mode de saisine du juge pour l'ouverture d'une saisie conservatoire des
navires. Cette forme de demande engendre plusieurs conséquences ;
d'abord, la procédure est non contradictoire, ce qui signifie a
priori que le débiteur de la créance maritime en cause n'a
ni à être appelé, ni à être entendu ;
ensuite, la décision rendue doit prendre la forme d'une ordonnance et
plus précisément d'une ordonnance sur requête qui,
théoriquement n'a pas besoin d'être motivée, doit
être datée et signée par le président du tribunal,
lequel n'a pas besoin d'être assisté d'un greffier; enfin, le
débiteur maritime ne peut attaquer cette ordonnance que par la voie de
la clause de référé généralement introduite
dans les ordonnances sur requête, étant donné que
l'opposition et l'appel ne lui sont pas propices car l'exercice de ces voies de
recours ordinaires suppose que la personne qui les intente ait
été partie ou représentée en instance138(*).
Comme il a été ci-dessus signalé,
l'autorité judiciaire compétente devrait rendre une ordonnance
sur requête après avis de l'autorité maritime
compétente. Ceci dit, cette dernière autorité est une
institution propre au droit maritime au point où il serait
nécessaire d'y consacrer une analyse profonde.
Paragraphe 2 :
L'intervention d'une véritable institution propre au droit
maritime : l'autorité maritime compétente
Nous l'avons dit, et nous le rappelons, en droit
international de la saisie conservatoire des navires, les conventions y
relatives laissent en ce qui concerne les questions de procédures de
saisie, le soin aux législateurs nationaux. C'est ainsi que dans notre
contexte, c'est le CCMM qui est la règle par excellence en la
matière. Se démarquant du droit commun de la saisie conservatoire
des biens meubles et prenant en considération le particularisme
lié à la saisie conservatoire des navires, le CCMM a
créé une institution somme toute originale :
l'autorité maritime compétente qu'il convient d'identifier (A) et
ensuite de discuter de l'opportunité de l'intervention d'une telle
institution (B).
A- L'identification de
l'autorité maritime compétente
Le CCMM dispose que : « La saisie
conservatoire est autorisée (...) après avis de l'autorité
maritime compétente »139(*) ; en parlant d'autorité maritime
compétente, il essaie de donner une identification en disant que c'est
« le ministre chargé de la marine marchande et les
fonctionnaires d'autorité auxquels il a délégué
tout ou partie de ses pouvoirs. À l'étranger, l'autorité
maritime compétente désigne l'ambassade ou l'autorité
consulaire ; cependant, dans les ports étrangers où les
États membres n'ont ni ambassade, ni consulat, l'autorité
maritime compétente de chaque État peut déléguer
ses pouvoirs selon la volonté nationale »140(*).
Pour ce qui est du cas du Cameroun, et en l'absence d'un
véritable ministre chargé de la marine marchande,
l'autorité maritime compétente est en principe le ministre des
transports, lequel peut cependant déléguer ses pouvoirs au
directeur des affaires maritimes et des voies navigables à Douala,
anciennement directeur de la marine marchande141(*).
Au regard des inconvénients que peut susciter
l'intervention de l'autorité maritime compétente dans la
procédure de saisie conservatoire des navires tels l'allongement de la
procédure de saisie dans un domaine qui requiert pourtant
célérité, l'on devrait logiquement s'interroger sur
l'opportunité de l'intervention d'une telle autorité.
B- L'opportunité ou
non de l'intervention de l'autorité maritime compétente dans la
saisie conservatoire des navires
Le CCMM fait pratiquement de l'autorité maritime la
plaque tournante en matière de saisie conservatoire des navires. En
effet, d'une part, pour pratiquer une telle saisie, on l'a vu,
l'autorité maritime doit émettre son avis ; dès lors,
se pose la question de savoir si c'est le juge ou le créancier qui
sollicite cet avis. En pratique, c'est le créancier qui sollicite ledit
avis, y ayant intérêt, soit au bas de sa requête sur un
emplacement prévu à cet effet, soit sous la forme d'une sommation
interpellative, par l'entremise d'un huissier de justice142(*). D'autre part, lorsqu'elle
reçoit notification de la saisie d'un navire en vertu d'une
décision judiciaire, cette autorité interdit au navire de quitter
le port et veille à la mise en oeuvre de cette mesure143(*). Outre ces dispositions, le
CCMM prévoit à plusieurs reprises l'intervention de
l'autorité maritime compétente au point où l'on peut
légitimement s'interroger sur l'opportunité d'une telle
institution qui vient à notre sens alourdir inutilement la
procédure de saisie conservatoire des navires et dont on peut
sérieusement douter du bien-fondé.
Étant donné que nous sommes ici dans une
matière qui requiert discrétion et célérité,
si d'aventure, l'armateur était informé de ce qu'une saisie
était projetée, le navire risquerait certainement de filer entre
les mailles des rets du créancier saisissant et de prendre le large, le
navire étant par définition « un objet
particulièrement vagabond doué d'une faculté poussé
d'évanouissement dans la nature »144(*). Il faut donc agir vite et
par surprise ; c'est pourquoi, sous peine de manquer son but, la saisie
conservatoire doit obéir à des règles plus souples.
Pour justifier l'intervention de l'autorité maritime
compétente, les rédacteurs du CCMM font valoir qu'il s'agissait
de limiter les abus en matière de saisie, car avant la réforme,
on saisissait pour toutes sortes de créances, y compris des
créances non maritimes. L'argument est assez fallacieux dès lors
qu'il appartient au juge d'apprécier l'opportunité de la saisie
et notamment la nature maritime de la créance d'une part, et que comme
nous le verrons, le saisissant engage nécessairement sa
responsabilité si la saisie s'avère abusive, s'il a agi avec une
légèreté blâmable, dans un but vexatoire ou s'il a
fait preuve de malignité d'autre part.
L'intervention d'une telle autorité est davantage
remise en cause car imbue de cette prérogative que lui confère le
CCMM, l'autorité maritime s'érige désormais en
véritable juridiction. En effet sur le plan pratique, n'étant pas
juriste le plus souvent, et encore moins un maritimiste, il n'est pas certain
qu'elle perçoive les arcanes du droit en la matière. C'est ainsi
qu'il n'est pas rare qu'elle refuse d'émettre son avis pour des raisons
qui ne sont pas toujours juridiquement fondées, pour ne pas dire
avouables. Sur le plan économique, l'attitude de l'autorité
maritime est susceptible d'emporter des conséquences d'une extrême
gravité ; il y a un risque de délocalisation du contentieux
au profit des juridictions et avocats étrangers.
Ceci étant, et malgré tous les reproches qui
sont apportés à cette véritable institution originale de
droit maritime liée à la saisie conservatoire des navires, il n'y
a pas lieu de s'alarmer outre mesure car il existe des leviers pour
désamorcer l'institution. L'on peut arguer par exemple que
l'autorité maritime n'émet qu'un avis et non une
autorisation145(*),
lequel avis par hypothèse ne lie pas le juge qui reste libre d'y passer
outre. Aussi bien, le texte n'indique même pas dans quel sens cet avis
doit être donné146(*), ce qui prouve que le juge n'est pas lié par
celui-ci. Cet avis n'aurait pu s'imposer au juge que s'il était
mentionné au Code que la saisie est subordonnée à
l'avis « favorable » de l'autorité
maritime compétente, ce qui serait pis encore, puisque le juge serait
pratiquement à la dévotion de l'autorité maritime
compétente147(*)
qui deviendrait par conséquent le véritable maître de la
saisie conservatoire des navires.
En tout état de cause, et à notre sens, cette
autorité participe de l'authenticité de la saisie conservatoire
des navires et répond au souci de rendre typique ladite saisie ;
les règles applicables au déroulement de cette saisie
répondent aussi à ce souci.
SECTION II :
L'ORIGINALITÉ DANS LE DÉROULEMENT DE LA SAISIE CONSERVATOIRE DES
NAVIRES
Le déroulement de la saisie conservatoire des navires
constitue une originalité toute aussi importante, autant que celle qui a
été observée dans les personnes impliquées dans la
procédure de saisie. Dans sa phase consacrée au
déroulement, l'originalité pourrait se concevoir tant dans le
déroulement normal de la saisie conservatoire des navires (Paragraphe 1)
que dans le déroulement émaillé d'incidents de ladite
saisie (Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Le
déroulement normal de la saisie conservatoire des navires
La procédure de saisie conservatoire des navires se
déroule normalement lorsqu'elle n'est émaillée d'aucun
incident qui puisse en affecter le cours et permettre que ladite saisie ne
puisse pas arriver à son terme. Ceci dit, lorsqu'un créancier
exerce une saisie conservatoire des navires, il espère le plus souvent
d'une part que son débiteur, après un rapide calcul
coût/avantage, s'acquittera de sa dette afin de pouvoir faire repartir le
navire, que l'immobilisation ne lui ait coûté d'autres frais que
l'acquittement de sa dette envers ledit créancier ; d'autre part
que son débiteur mette en place une garantie personnelle émise
par un tiers ; ainsi, au navire, élément mobile et soumis
aux péril de la mer, se substitue ainsi une banque ou un
P§I Club148(*) tenu personnellement envers le créancier
saisissant en vertu d'une lettre de garantie exécutoire à
première demande. Tels sont les effets recherchés par le
créancier saisissant à titre conservatoire un navire. Toutefois
l'effet principal et c'est là que demeure l'originalité la plus
remarquable de ce type de saisie, est l'immobilisation du navire au port de
saisie (A) qui nécessitera l'accomplissement de certaines diligences par
les différents protagonistes à la saisie (B).
A- L'originalité de
l'effet de la saisie conservatoire des navires : l'immobilisation du
navire saisi
La saisie conservatoire des navires telle qu'elle est
organisée par les différents textes se démarque
très nettement de la saisie conservatoire des biens meubles telle
qu'elle est organisée par l'AUPSRVE ; ceci se manifeste à
plusieurs égards dont l'un des plus révélateurs se situe
dans les effets de ces différentes saisies conservatoires. Pendant que
l'AUPSRVE reconnaît comme effet à la saisie conservatoire des
biens meubles, l'indisponibilité149(*), les textes particuliers réglementant la
saisie conservatoire des navires lui reconnaissent plutôt comme effet
l'immobilisation (1) ; cependant, au regard des effets liés
à cette immobilisation, surtout aux rondelets coûts que ladite
immobilisation est susceptible d'engendrer au port d'immobilisation, l'on se
doit d'examiner les effets nocifs que cette inactivité est susceptible
de susciter au port victime de la saisie (2). Toutefois, cette immobilisation
n'a pas forcément un caractère définitif car étant
dans une situation de précarité, certaines circonstances
pourraient permettre au juge d'accorder une autorisation de départ dudit
navire (3). Aussi convient-il d'examiner la problématique de la garde du
navire qui aurait été immobilisé du fait de la saisie (4).
1- L'immobilisation du
navire au port de saisie
Parmi les particularités liées à la
saisie des navires, se situe en très bonne place l'effet de la saisie
conservatoire qui en résulte ; cet effet est l'immobilisation du
navire saisi, consacrée tant par les conventions internationales que par
le CCMM150(*),
contrairement au droit commun qui prévoit l'indisponibilité.
En effet, l'indisponibilité qui résulte du
droit commun de la saisie conservatoire des biens meubles énoncée
par l'article 36 alinéa 2 de l'AUPSRVE a pour conséquence
d'interdire au débiteur saisi tout acte de disposition portant sur les
biens saisis dès l'établissement du procès-verbal de
saisie. Le débiteur saisi demeure cependant le propriétaire des
biens saisis puisque la saisie n'a pas pour effet d'entraîner un
transfert de propriété des biens saisis du débiteur au
créancier saisissant151(*). Par conséquent, les risques demeurent
à la charge du débiteur saisi jusqu'à l'adjudication
éventuelle ou la mainlevée de la saisie. Mais tout en demeurant
propriétaire des biens saisis, le débiteur saisi ne peut ni les
aliéner à titre gratuit ou onéreux, ni les constituer en
gage ou les prêter152(*).
Cependant, en matière de saisie conservatoire des
navires, l'effet d'immobilisation qui en résulte ne semble pas de nature
à empêcher son propriétaire d'en disposer, le CCMM
précisant que la saisie « ne porte aucune atteinte aux
droits du propriétaire »153(*) ; cette solution
malgré son absence dans les conventions internationales devrait
être la même. De ce fait, le propriétaire du navire saisi
conserve tous les attributs du droit de propriété notamment son
pouvoir de disposition du navire saisi ; il peut aussi le fréter,
l'hypothéquer. Cette affirmation ne devrait pas nous leurrer car
l'immobilisation de la saisie empêche toute utilisation du navire,
puisque la saisie doit être dénoncée à
l'autorité maritime compétente afin qu'il émette
l'interdiction d'appareiller tout en assurant son application, empêchant
ainsi le navire de prendre la mer.
Observons tout de même que contrairement à
l'indisponibilité qui résulte de la saisie conservatoire des
biens meubles et qui est très souvent un prélude à la
saisie exécutoire du bien en question, l'immobilisation qui
résulte de la saisie conservatoire des navires a tout simplement un
effet comminatoire car destinée à faire pression au
débiteur du navire saisi.
Pour en conclure, nous dirons que la saisie conservatoire des
navires, compte tenu des coûts du navire et de son immobilisation
(paralysie de l'outil essentiel de l'entreprise d'armement), est un moyen de
pression extrêmement puissant qui pourrait néanmoins
préjudicier à l'armateur-exploitant du navire sur le plan
économique. En effet, celui-ci est dans l'impossibilité
d'exploiter le navire alors qu'il reste tenu de tous les frais liés au
navire saisi, notamment pour son entretien surtout si ultérieurement, la
saisie conservatoire dudit navire se serait avérée abusive.
Cependant l'immobilisation du navire a un revers de la
médaille surtout lorsqu'on sait que très souvent, le navire est
immobilisé pour une durée très longue au port de saisie,
ce qui pourrait créer des effets nocifs à ce port de saisie,
d'où la notion de port victime de la saisie154(*). En effet, l'immobilisation
des navires saisis dans les ports représente pour les gestionnaires
publics de ces ports, un encombrant poids, voire un handicap dans leur gestion
commerciale des outillages publics d'autant plus que l'on constate une
utilisation de plus en plus fréquente des saisies. Donc il
apparaît très vite que la saisie va à l'encontre de la
finalité même du service public portuaire qui est la mise à
disposition de l'usager d'infrastructures permettant le chargement et le
déchargement des navires à partir des quais, le fonctionnement
normal de ce service nécessitant une optimisation de cette
finalité155(*).
L'immobilisation des navires par une saisie handicape donc tout le service et
nécessiterait logiquement l'intervention de la police
portuaire156(*).
C'est pour cette raison parmi tant d'autres que, dans
certaines conditions, le navire immobilisé pourrait être
autorisé à partir.
2- La possibilité
d'autorisation de départ du navire
La possibilité d'autorisation de départ du
navire ne devrait pas être confondue avec la mainlevée de la
saisie. Malgré l'immobilisation, dans certaines circonstances, le navire
immobilisé pourra être autorisé à effectuer un ou
plusieurs voyages. Ceci ne résulte pas clairement des conventions
internationales mais plutôt du CCMM.
En effet, le CCMM dispose que :
« Nonobstant toute saisie et à tout moment, le tribunal
compétent peut après l'avis de l'autorité maritime
autoriser le départ du navire pour un ou plusieurs voyages
déterminés. Pour obtenir cette autorisation, le requérant
doit fournir une garantie suffisante »157(*). C'est donc dire que le
saisi, propriétaire ou non du navire, et son propriétaire,
débiteur personnel ou non peuvent demander l'autorisation de
départ du navire saisi et immobilisé pour un ou plusieurs voyages
déterminés contre constitution d'une garantie suffisante. Il
appartient donc au tribunal compétent qui, à défaut de
précision par le CCMM, serait logiquement le juge des
référés158(*), après avis de l'autorité maritime
compétente de fixer le délai dans lequel le navire devra regagner
le port de saisie, étant donné qu'il peut ultérieurement
modifier ce délai pour tenir compte des circonstances et, le cas
échéant, autoriser le navire à faire des voyages159(*). Si à l'expiration du
délai fixé, le navire n'a pas rejoint son port, la somme
déposée en garantie est acquise aux créanciers, sauf le
jeu de l'assurance en cas de sinistres couverts par la police160(*).
En droit international, et en l'absence de dispositions
réglementant l'autorisation de départ du navire saisi,
l'autorisation de départ est la seule possibilité offerte lorsque
la créance a pour cause la propriété contestée d'un
navire, la copropriété contestée d'un navire ou sa
possession, ou son exploitation, ou les droits aux produits d'exploitation d'un
navire en copropriété car les deux conventions disposent que dans
ces cas exclus de la mainlevée, le juge peut permettre l'exploitation du
navire par le possesseur, lorsque celui-ci aura fourni des garanties
suffisantes, ou régler la gestion du navire pendant la durée de
la saisie161(*). Pour le
reste des questions non réglées par ces conventions, compte tenu
du caractère supplétif du CCMM, ce dernier recevra
application.
Lorsque les conditions d'autorisation de départ du
navire n'auront pas été respectées, le navire restera
immobilisé et ladite immobilisation pose le problème de la garde
du navire en cause.
3- La problématique
de la garde du navire saisi
La question de la garde des navires saisis répond
à celle de la détermination de la personne responsable des
dommages causés par le navire saisi. Cette question se pose avec une
grande acuité lorsque le navire fait l'objet d'une saisie conservatoire
au sein des zones cycloniques et qui occasionne des dommages aux installations
portuaires au cours de son immobilisation qui peut parfois s'étendre sur
une période de plusieurs mois.
En droit international, les conventions n'ont pas
résolu le problème de la garde du navire soumis à saisie
conservatoire. Pour ce faire, et de part le régime supplétif du
droit interne, la question devrait être régie dans notre contexte
par le CCMM.
De ce fait, tant en droit interne qu'en droit international,
la problématique de la garde du navire sera régie par le CCMM.
Ceci étant, ce texte dispose : « L'autorité
maritime compétente est constituée gardien du navire
saisi »162(*). C'est donc dire qu'au Cameroun, et en vertu des
analyses qui ont été ci-dessus faites à propos de
l'autorité maritime compétente, la garde du navire saisi au
Cameroun est l'apanage du ministre des transports qui l'exerce par
l'intermédiaire du directeur des affaires maritimes et des voies
navigables à Douala, anciennement directeur de la marine
marchande163(*).
Cette solution retenue par le CCMM diffère
radicalement du droit commun de la saisie conservatoire des biens meubles
corporels. En effet, selon l'AUPSRVE, « Si la saisie porte sur
des biens corporels, le débiteur saisi ou le tiers détenteur
entre les mains de qui la saisie a été effectuée est
réputé gardien des objets saisis... »164(*). Ceci démontre une
nouvelle fois comment le droit spécial de la saisie conservatoire des
navires se démarque radicalement sur certains aspects, du droit commun
de la saisie des biens meubles corporels.
Quant au régime de la garde du navire saisi, celui-ci
est expressément prévu par le même CCMM. Celui-ci
dispose : « Dans l'accomplissement de son mandat, le gardien
n'assure qu'une obligation de moyens »165(*). On peut définir
l'obligation de moyens comme une obligation en vertu de laquelle le
débiteur n'est pas tenu d'un résultat précis ; le
créancier d'une telle obligation ne peut mettre en jeu la
responsabilité de son débiteur que s'il prouve que ce dernier a
commis une faute ou n'a pas utilisé tous les moyens promis166(*). Plus
précisément, l'autorité maritime compétente ne
verra sa responsabilité engagée qu'en cas de faute ou lorsqu'il
n'a pas fait loyalement ce qu'il avait promis de faire.
Une fois l'effet principal ainsi que les contours de la
saisie conservatoire des navires précisés, il reste à
déterminer les précautions à prendre par les
différentes personnes intéressées par ladite saisie.
B- Les différentes
diligences à observer
Toujours en vertu de la subsidiarité du droit interne
de la saisie conservatoire des navires telle qu'énoncée par les
conventions internationales dans les matières qu'elles n'ont rien
prévu et qu'elles laissent aux empires des différents droits
internes, le CCMM fera office de repère tant en droit interne qu'en
droit international en matière de diligences à observer pour la
suite de la saisie conservatoire puisque justement, elles n'ont rien
prévu à ce propos. Deux personnes sont particulièrement
impliquées dans la suite de la procédure de saisie conservatoire
des navires, et chacun tenant un rôle bien précis ; il s'agit
de l'huissier de justice et du créancier saisissant.
En ce qui concerne l'huissier de justice, la saisie
conservatoire est pratiquée entre les mains du capitaine du navire par
un huissier de justice qui dresse un procès-verbal. Copie du
procès-verbal est adressée au commandant du port, à
l'autorité maritime compétente ainsi qu'au consul de
l'État du pavillon. L'huissier énonce dans son
procès-verbal : les noms, profession et domicile du
créancier pour qui il agit ; la décision judiciaire
autorisant la saisie ; le montant de la créance justifiant la
saisie ; la date du commandement de payer ; l'élection de
domicile faite par le créancier dans le lieu où siège
l'autorité judiciaire compétente, et dans le lieu où le
navire est amarré ; les noms et adresse du propriétaire du
navire ; les nom, catégorie, tonnage et nationalité du
navire. Il est fait énonciation et description dans le
procès-verbal, des chaloupes, agrès et apparaux du navire, ainsi
que ses provisions et soutes. Si le navire saisi bat pavillon d'un État
membre de la CEMAC, le procès-verbal de saisie est inscrit sur le
registre tenu par l'autorité maritime compétente et sur lequel le
navire est immatriculé. Cette inscription est requise dans un
délai de sept jours à compter de la date du procès-verbal.
Ce délai est augmenté de vingt jours si le lieu de la saisie et
le lieu où le registre des immatriculations est tenu, ne sont pas
situés dans le même État de la CEMAC167(*). Il est à noter que
les mentions contenues dans le procès-verbal de saisie conservatoire des
navires, sans être totalement différentes de celles contenues dans
le procès-verbal de saisie conservatoire des biens meubles
corporels168(*) s'en
rapprochent néanmoins ; les particularités des mentions de
la première saisie tenant forcément à la
singularité du navire.
Pour ce qui est du créancier saisissant, à
compter de la notification du procès-verbal de saisie conservatoire, et
à peine de caducité, le saisissant doit dans un délai d'un
mois, introduire une procédure ou accomplir les formalités
nécessaires à l'obtention du titre exécutoire169(*). Telle est à quelques
différences près la même formulation que celle
découlant de la saisie conservatoire des biens meubles
corporels170(*).
Cependant, contrairement au droit commun de la saisie
conservatoire des biens qui prévoit un délai pour mettre en
oeuvre la mesure accordée par l'autorisation judiciaire171(*), le droit spécial de
la saisie conservatoire des navires incarné par le CCMM est muet sur la
question. À notre avis, il aurait été opportun pour le
législateur CEMAC de mentionner explicitement cette obligation comme il
l'a fait pour ce qui est de l'obtention du titre exécutoire. En
l'absence donc de cette disposition, nous pouvons dans le cadre de la
procédure de saisie conservatoire des navires soumettre le
créancier saisissant à cette obligation ; et la
défaillance du créancier à cette obligation tout comme
à l'obligation d'introduire une procédure ou d'accomplir les
formalités nécessaires à l'obtention du titre
exécutoire aurait pour sanction immédiate la caducité,
laquelle caducité devra entraîner la mainlevée de la
saisie, signe du déroulement défectueux de la saisie
conservatoire des navires.
Paragraphe 2 : Les
incidents de la saisie conservatoire des navires
La saisie conservatoire des navires n'est pas toujours une
procédure normale de saisie. Très souvent, elle est
émaillée d'incidents qui viennent en affecter le cours normal.
Parmi ces incidents, les plus retenus sont la mainlevée de la saisie et
l'autorisation de départ du navire ; ce dernier cas pourrait
néanmoins être compris dans le cadre du déroulement normal
de la procédure de saisie conservatoire des navires résultant de
l'immobilisation du navire que nous avons déjà
examinée172(*),
raison pour laquelle dans le cadre de nos développements, nous nous
affranchirons de l'autorisation de départ du navire pour ne nous
consacrer que sur la mainlevée de la saisie (A) qui devrait normalement
et logiquement produire des effets plus ou moins énergiques (B).
A- La mainlevée de
la saisie
Dans notre contexte, l'on entend par mainlevée, l'acte
par lequel le juge ou une partie arrête les effets de la saisie
conservatoire des navires ; c'est donc dire que la mainlevée peut
être aussi bien amiable (1) que judiciaire (2).
1- La mainlevée
amiable
En pratique, le créancier saisissant exige souvent une
lettre de garantie173(*)
émanant d'un organisme bancaire, du club du propriétaire du
navire ou encore du transporteur maritime, aux termes de laquelle l'auteur de
ladite lettre s'engage à régler la créance cause de la
saisie. Or ces lettres de garantie auxquelles ne font
généralement pas partie les débiteurs, comportent souvent
une clause attributive de compétence à une juridiction pour
statuer sur le fond de la créance.174(*)
Lorsque la mainlevée n'a pas pu être obtenue
à l'amiable entre le saisi et le saisissant, la voie judiciaire peut
s'avérer propice.
2- La mainlevée
judiciaire
La mainlevée de la saisie conservatoire des navires
consécutive à une décision judiciaire peut résulter
de l'offre par le saisi d'une garantie ou d'une caution, de la caducité
de la procédure de saisie et de l'abus dans la saisie. Le juge
compétent est le même que celui ayant autorisé la saisie,
cette fois saisi en référé. Ce qui revient à dire
dans le contexte camerounais que le juge compétent en la matière
est le PTPI ou le magistrat qu'il délègue à cet effet
statuant en matière de référé. Analysons ces
différentes causes de mainlevée judiciaire.
Premièrement, la mainlevée de la saisie
consécutive à l'offre par le saisi d'une caution ou d'une
garantie résulte des dispositions internationales et internes sur la
saisie conservatoire des navires. Cette possibilité de mainlevée
de la saisie moyennant caution ou garantie est prévue par la convention
de Bruxelles175(*), par
celle de Genève176(*) et aussi sur le plan interne par le CCMM177(*).
Les deux conventions admettent cette possibilité de
mainlevée mais l'excluent lorsque la créance a pour cause la
propriété contestée d'un navire, la
copropriété contestée d'un navire ou sa possession, ou son
exploitation, ou les droits aux produits d'exploitation d'un navire en
copropriété ; dans ces cas, seule une autorisation de
départ du navire est possible.
En vertu de la convention de Bruxelles actuellement
applicable sur le plan international, à défaut d'accord des
parties sur le montant de la garantie, il appartiendra au juge de le fixer.
Cependant lorsque la créance n'est que partiellement maritime, il a
été considéré que le montant de la garantie de
substitution ne soit équivalent dans sa valeur, qu'à la partie
maritime de la créance ; lorsque la garantie de substitution
nécessite pour sa mise en oeuvre, une décision de justice
prononcée contre le débiteur, il a été admis qu'une
décision définitive n'était pas nécessaire, mais
qu'une décision simplement exécutoire suffirait. Des solutions
équivalentes ont été prévues par la convention de
Genève qui rappelons-le, n'est pas encore entrée en vigueur,
laquelle convention dissipe au passage les incertitudes en la
matière.178(*)
Deuxièmement, La mainlevée de la saisie pourrait
aussi résulter de la caducité de la procédure notamment
lorsque le saisissant n'aura pas comme il a été ci-dessus
signalé, dans le délai d'un mois à compter de la
notification du procès-verbal de saisie conservatoire, introduit une
procédure ou accomplir les formalités en vue de l'obtention d'un
titre exécutoire. Telle est la cause de mainlevée de saisie
résultant de l'affaire « Salam
4 »179(*).
Troisièmement, la mainlevée judiciaire peut
être consécutive à une saisie conservatoire
injustifiée du navire. Tant en droit international qu'en droit interne
CEMAC, la mainlevée consécutive à une saisie conservatoire
injustifiée des navires peut résulter de plusieurs facteurs. Pour
mieux cerner la réalité de ces facteurs, nous ferons appel
à une décision rendue sur le territoire camerounais et mettant la
lumière sur la saisie conservatoire injustifiée des
navires ; il s'agit de l'affaire du navire « Tim
Buck »180(*) dont les faits et les résolutions prises par
le juge de l'espèce sont les suivants :
Courant mai 2007, de passage au port de Douala, le navire
« Tim Buck », propriété de la
société NB Shipping Ltd, a fait l'objet d'une saisie
conservatoire à l'initiative de la Société Cameroun
Continental Merchants Ltd, laquelle prétendait avoir subi un
préjudice évalué à environ 250 000 000 F CFA,
en raison des avaries constatées sur sa cargaison de 3 125 tonnes de
blé transportée par le navire « African
Sky », lors du déchargement de ce navire au Port
Autonome de Douala (PAD) le 8 octobre 2005. La Société Cameroun
Continental Merchants Ltd s'est alors fondée sur les prévisions
de l'article 114 du CCMM, texte qui, à l'instar de l'article 3
paragraphe 1er de la Convention internationale de Bruxelles du 10
mai 1952 sur la saisie conservatoire de navires, dispose que :
« La saisie peut être pratiquée soit sur le navire
auquel la créance se rapporte, soit sur tout autre navire
appartenant à celui qui était, au moment où est née
la créance maritime, propriétaire du navire auquel la
créance se rapporte ». En effet, dans l'opinion de la
Société Cameroun Continental Merchants Ltd, le navire
« Tim Buck » n'était guère qu'un
navire apparenté, un « sister ship » du
navire « African Sky » et, par suite, pouvait
être saisi pour des dettes consécutives à l'exploitation de
celui-ci. Le créancier saisissant affirmait par ailleurs que, pour
sécuriser sa créance, il avait déjà saisi, le 10
novembre 2005, le navire « African Sky » à
la suite de quoi, une lettre de garantie avait été émise
par le P & I181(*) club de l'armateur, « The Japan Ship
Owners Mutual Protection and Indemnity », pour un montant de 285
428 euros, en libération du navire. La Société Cameroun
Continental Merchants Ltd faisait assurément fausse route par cela seul
que le navire « Tim Buck » n'avait aucun lien de
droit avec le navire débiteur ou causal qu'était le navire
« African Sky », pas plus qu'il n'en avait avec la
créance alléguée. D'autre part, et cela a
déjà été relevé ci-dessus, la saisie
conservatoire du navire « Tim Buck » est
intervenue après qu'une garantie suffisante ait déjà
été fournie, pour la même créance, à
l'occasion d'une précédente saisie. Dans ces conditions, la
seconde saisie devenait assurément abusive. Aussi, se fondant sur les
dispositions de l'article 3 paragraphe 1er, mais surtout sur celles
du paragraphe 3 de la Convention de Bruxelles susvisée, le
Capitaine-commandant et l'armateur du navire « Tim
Buck », défendus par le Cabinet NGAMKAN, se sont pourvus
devant le juge des référés en rétractation de
l'ordonnance ayant autorisé la saisie et en mainlevée de cette
saisie. En effet, l'article 3 paragraphe 3 de la Convention prescrit que :
« Un navire ne peut être saisi et caution ou garantie ne
sera donnée plus d'une fois dans la juridiction d'un ou
plusieurs des États contractants, pour la même créance
et par le même demandeur ; et, un navire est saisi dans une
desdites juridictions et une caution ou une garantie a
été fournie, soit pour obtenir la mainlevée de la saisie,
soit pour éviter toute saisie ultérieure de ce navire,
ou de n'importe quel autre navire appartenant au même
propriétaire, par le demandeur et pour la même créance
maritime, sera levée et le navire sera libéré par le
tribunal ou toute autre juridiction compétente dudit
État, à moins que le demandeur ne prouve, à la
satisfaction du tribunal ou de toute autre autorité judiciaire
compétente, que la garantie ou la caution a été
définitivement libérée avant que la saisie
subséquente n'ait été pratiquée ou qu'il
n'y ait une autre raison valable pour la maintenir ». Le juge
des référés a accédé aux demandes du
capitaine et de l'armateur sur la base des considérations
ci-après : « En l'espèce, de part leur
dénomination, le navire auquel la créance se rapporte et
celui sur lequel la saisie est pratiquée sont différents et
aucune preuve n'a été rapportée
établissant que celui à qui il appartient, en l'occurrence NB
Shipping Ltd, était propriétaire de celui auquel la
créance se rattache au moment où cette créance est
née ; selon toute apparence, au regard des pièces produites
par le demandeur, le navire « Tim Buck »
appartient à la société NB Shipping Ltd et n'a jamais
changé de propriétaire depuis 1994 ; une garantie
avait déjà été donnée au même
saisissant pour la même créance... »182(*).
On comprend bien à l'analyse de ces décisions
que la saisie peut paraître abusive dès lors qu'une caution
jugée suffisante a déjà été donnée
pour la garantie de la créance cause de la saisie ; dans ce cas, la
deuxième saisie sera injustifiée ; il peut en être
aussi lorsque l'immobilisation consécutive à la saisie
conservatoire d'un navire aurait causé un préjudice au
propriétaire dudit navire alors que le navire saisi n'est point un
navire apparenté au navire causal ; Dans ces
circonstances, la mainlevée du navire saisi qui découlera de la
décision du juge produira forcément des effets.
B- Les effets de la
mainlevée
L'effet principal de toute mainlevée de saisie
conservatoire du navire est tout logiquement la libération du navire.
Cet effet s'applique pleinement et sans autre effet lorsqu'il
s'agit de la mainlevée amiable et de la mainlevée suite à
l'offre d'une caution ou d'une garantie.
Pour ce qui est de la mainlevée consécutive
à la caducité de la saisie, en plus de la libération du
navire, le débiteur saisi pourra réclamer devant le juge des
référés le remboursement des sommes avancées pour
la libération dudit navire. Telle est la solution retenue par le PTPI de
Bonanjo dans l'affaire « Salam 4 » ci-dessus. En
effet, le créancier saisissant n'ayant pas à temps
enrôlé son assignation pour l'obtention du titre exécutoire
devant le TGI du Wouri, la partie saisie, nantie d'un certificat de non
enrôlement délivré par le greffier en chef dudit TGI a
assigné la partie saisissante en restitution de la garantie devant le
PTPI de Bonanjo statuant en matière de référé
d'heure à heure, lequel PTPI a ordonné la restitution
immédiate et sans condition de la garantie faisant ainsi suite
favorablement aux desiderata de la partie saisie.
La mainlevée produira des effets beaucoup plus
énergiques lorsque la saisie dont la mainlevée est
demandée et obtenue aurait été abusive ou
injustifiée. Dans ce cas, le CCMM s'est prononcé et
dispose : « Tout propriétaire de navire, qui aura
obtenu la mainlevée ou la rétractation de la saisie
pourra assigner le saisissant en réparation du préjudice subi du
fait de l'immobilisation du navire, s'il est avéré que
la saisie était injustifiée »183(*). Toujours dans le contexte
camerounais, les suites de l'affaire « Tim Buck »
ci-dessus analysée en sont très significatives.
CONCLUSION DU CHAPITRE
II
La saisie conservatoire des navires a été
distinctement prévue pour tenir compte des particularités
découlant du droit maritime ; ceci s'observe aussi dans sa phase de
déroulement à travers l'instauration d'une véritable
notion propre au droit maritime à savoir la notion
d' « autorité maritime
compétente » prévue par le CCMM. Cette observation
se poursuit lorsque l'on regarde l'effet principal que l'on attache à la
saisie conservatoire d'un navire à savoir son immobilisation au port de
saisie, contrairement à l'indisponibilité du meuble frappé
de saisie conservatoire ordinaire. Cet effet attaché à la saisie
conservatoire des navires se comprend aisément : tout d'abord, le
navire est un meuble « particulièrement vagabond et
doué d'une faculté d'évanouissement dans la
nature » ; ensuite en prenant en compte les exigences du
domaine maritime, il ne faut pas déposséder le
propriétaire de son navire, ce qui compromettrait fortement la
continuité de l'exploitation maritime et qui engendrerait par
conséquent d'énormes pertes.
CONCLUSION DE LA
PREMIÈRE PARTIE
En conclusion de cette première partie, force est de
constater que le navire étant un meuble, possède des
caractéristiques qui le distinguent des autres meubles ordinaires,
raison pour laquelle le régime de sa saisie déroge très
fortement à celui qui est en vigueur pour les meubles ordinaires. La
réaction du droit OHADA n'est pas en elle-même
étonnante.
Ceci étant, tout au long de cette première
partie, nous nous sommes attelés à déceler les
particularités de la saisie conservatoire des navires par rapport
à la saisie conservatoire de droit commun des biens meubles. Ces
particularités se manifestent tant en ce qui concerne l'ouverture de la
saisie conservatoire des navires qu'en ce qui concerne la mise en oeuvre de
ladite saisie.
Nonobstant ces singularités, il est des cas où
d'une part, l'on observe des rapprochements entre les règles de la
saisie des navires en particulier et celles de la saisie de droit commun en
général, et où d'autre part l'on se verra pour une raison
ou pour une autre, appliquer les règles découlant du droit commun
des procédures civiles d'exécution, ce qui pose le
problème de l'adaptation des règles de la saisie de droit commun
à la saisie des navires.
PARTIE II : L'ADAPTATION DES RÈGLES DE
SAISIE DE DROIT COMMUN À LA SAISIE DES NAVIRES
Comme il a déjà été dit, sans
toutefois se démarquer fondamentalement du droit commun de la saisie en
général184(*), la saisie des navires conserve certaines
singularités avec les règles découlant de l'AUPSRVE ;
ces singularités étant observées soit à l'analyse
comparative des règles de la saisie des navires185(*) avec celles de la saisie de
droit commun, soit par renvoi des textes régissant la saisie des navires
à ceux régissant le droit commun, soit tout simplement en cas de
silence des textes sur la saisie des navires en ce qui concerne une question
bien précise des procédures civiles d'exécution dont
l'éclaircissement mérite d'être fait. Ces
singularités sont observées dans les deux facettes de la saisie
des navires, c'est-à-dire dans la saisie conservatoire et dans la
saisie-exécution desdits navires.
C'est ainsi que dans un premier temps, le navire,
étant considéré comme ayant une nature juridique
mobilière corporelle, il sera soumis au régime de la saisie
conservatoire dont l'adaptation des règles qui en découlent sera
faite avec celles découlant de la saisie conservatoire des biens meubles
corporels (CHAPITRE I).
Dans un second temps, le navire, ayant un régime
s'apparentant à celui d'un immeuble, il sera soumis plutôt
à la saisie-exécution186(*), c'est-à-dire la phase exécutoire de
la saisie ; ceci étant, l'adaptation des règles de cette
phase exécutoire sera faite avec celles ayant cours à la saisie
immobilière (CHAPITRE II).
CHAPITRE I :
L'ADAPTATION DES RÈGLES DE LA SAISIE CONSERVATOIRE DES BIENS MEUBLES
CORPORELS À LA SAISIE CONSERVATOIRE DES NAVIRES
À la lecture des textes régissant la saisie des
navires, l'on se rend compte que certaines conditions permettant l'ouverture de
ladite saisie sont celles que l'on retrouve in extenso dans les textes
régissant les procédures civiles d'exécution de droit
commun au point où l'on pourrait affirmer sans ambages que les
législateurs spéciaux de la saisie des navires en ont fait une
pure et simple adaptation.
En tout état de cause, l'adaptation des règles
de la saisie conservatoire des biens meubles corporels à la saisie des
navires concerne à notre sens les conditions de saisie et il nous
incombe dès lors de les analyser tant en ce qui concerne les conditions
objectives (SECTION I) qu'en ce qui concerne les conditions subjectives
(SECTION II) de saisie du bien.
SECTION I :
L'ADAPTATION QUANT AUX CONDITIONS OBJECTIVES DE SAISIE DU BIEN
Certaines de ces conditions objectives sont
extrinsèques au bien qui fait l'objet de la saisie conservatoire, et
concernent tout simplement la formalité à accomplir pour
l'ouverture de toute saisie conservatoire de biens meubles, il s'agit de
l'obtention d'une autorisation judiciaire de saisie (Paragraphe 1) ;
d'autres par contre sont intrinsèques parce qu'elles tiennent au bien
lui-même, il s'agit dès lors de conditions relatives au bien,
objet de la saisie (Paragraphe 2).
Paragraphe 1 :
L'exigence d'une autorisation judiciaire
En saisie des navires, et plus qu'en saisie conservatoire
mobilière de droit commun, elle est rendue nécessaire et
obligatoire (A) et le refus par le juge d'octroyer cette autorisation, pourrait
déboucher à une suite qui n'est pas autre chose que le recours
reconnu au saisissant contre ladite décision de refus (B).
A- La
nécessité d'une autorisation judiciaire
Pour l'exercice d'une saisie conservatoire corporelle de
droit commun, l'AUPSRVE exige que soit donné l'accord d'une
autorité judiciaire ; cet accord est appréhendé sous
la forme d'une autorisation, laquelle autorisation ressort clairement du
dispositif de l'article 54 dudit Acte uniforme : « Toute
personne dont la créance parait fondée dans son principe peut,
par requête solliciter de la juridiction compétente (...)
l'autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur les biens mobiliers
corporels ou incorporels de son débiteur ».
Ce principe d'exigence d'une autorisation judiciaire pour
saisir conservatoirement un bien meuble n'est pas dérogé lorsque
le bien meuble en question est un navire. Pour ce faire, tant le droit
international que le droit interne CEMAC exigent une autorisation judiciaire
pour pratiquer une saisie conservatoire de navire. Dans cette optique,
l'article 4 de la convention de Bruxelles187(*) ainsi que le deuxième alinéa de
l'article 6 et l'article 120 du CCMM188(*) exigent une autorisation délivrée par
l'autorité judiciaire compétente dont description a
déjà été faite.
Conséquemment, la saisie conservatoire de navire
pratiquée sans autorisation délivrée par l'autorité
judiciaire compétente devrait tout comme en droit commun de la saisie
conservatoire mobilière donner lieu à la
mainlevée189(*)
qui s'analyserait dans ce cas comme une nullité. C'est en tout cas la
solution retenue en droit français dont à titre d'exemple de ce
principe, on peut citer un arrêt où les juges de la Cour de
cassation ont jugé qu' « en vertu de l'article 4 de
la convention de Bruxelles du 10 mai 1952 comme de l'article 29 du
décret du 27 octobre 196190(*)7, il ne peut être pratiqué de
saisie conservatoire d'un navire sans l'autorisation préalable du juge
et qu'à défaut, la saisie est nulle »191(*). Dans la présente
espèce, la société Recofi était
créancière de la société de droit angolais
Importang en vertu d'un jugement du tribunal de commerce de Paris rendu le 13
octobre 1992. Afin de contraindre la débitrice de payer la somme due,
elle a fait saisir conservatoirement le navire « Secil
Angola », appartenant à la société de droit
angolais Secil Maritima. Dans la présente espèce, la saisie
était pratiquée sans l'autorisation préalable du juge, sur
le seul vu du jugement de condamnation et elle était valide selon les
juges du fond. La Cour de cassation a jugé qu'une autorisation du juge
était nécessaire, l'absence de celle-ci entraîne
l'annulation de la saisie. Cette solution semble logique pour plusieurs
arguments : en premier lieu, il s'agit d'une condition qui ressort du
texte même du décret interne français de 1967 :
« La saisie conservatoire est autorisée par
ordonnance... ». Ensuite, on peut souligner que le rôle du
juge en matière de saisie conservatoire consiste d'une part à
vérifier que le saisissant a une apparence de créance et d'autre
part, que le navire à saisir répond à la dette
invoquée. Il paraît nécessaire, avant de prendre une mesure
immédiatement préjudiciable sur le plan économique, telle
que la saisie conservatoire d'un navire, que le juge puisse s'assurer de la
réalité des faits afin d'éviter les saisies
abusives192(*).
Force est alors de constater qu'une autorisation
préalable à la saisie accordée par le juge doit avoir
lieu, ne serait-ce que pour ne pas laisser le créancier opérer
sans contrôle.
En vertu de son pouvoir souverain d'appréciation, le
président du tribunal peut rejeter la requête du saisissant ou
faire droit à celle-ci en autorisant la saisie. La décision
autorisant la saisie doit à peine de nullité préciser le
montant des sommes pour la garantie desquelles la saisie est autorisée
et préciser les caractéristiques du navire sur lequel porte la
saisie193(*). Dans la
pratique, la décision du juge autorisant la saisie figure en bas de la
requête sollicitant cette mesure.
Au regard de ces analyses, on comprend bien qu'une
autorisation judiciaire s'avère obligatoirement nécessaire pour
contourner les éventuels abus du créancier véreux
nonobstant les dispositions de l'article 55 de l'AUPSRVE194(*).En cas de refus par le juge
d'autoriser ladite saisie, le créancier pourra en vertu du droit commun,
intenter un recours.
B- Le recours contre la
décision judiciaire de refus d'autorisation de saisie
En l'absence de précisions des textes sur la saisie
des navires en ce qui concerne le recours contre la décision judiciaire
de refus d'autorisation de saisie conservatoire des navires, il est important
de faire un important détour aux règles qui ont cours en droit
commun. Ceci étant, l'article 49 de l'AUPSRVE est le siège de
cette institution contentieuse.
L'alinéa 1er de cet article dispose que la
juridiction compétente pour statuer sur tout litige ou sur toute demande
relative à une mesure d'exécution forcée ou à une
saisie conservatoire est le président de la juridiction statuant en
matière d'urgence ou le magistrat délégué par
lui195(*).
Son alinéa 2 exige comme voie de recours contre ce
refus d'autorisation judiciaire de saisie, l'appel qui doit être
exercé dans un délai de quinze jours à compter du
prononcé de cette décision de refus. Le délai d'appel,
comme l'exercice de cette voie de recours, précise l'alinéa 3,
n'ont pas un caractère suspensif, sauf décision contraire
spécialement motivée du président de la juridiction
compétente.
Si à l'issue de ce contentieux, le créancier
obtient gain de cause, la saisie conservatoire intentée par lui pourrait
éventuellement être neutralisée par l'effet d'une
mainlevée lorsque les conditions relatives au bien qui forme l'objet de
la saisie, n'ont pas été observées.
Paragraphe 2 : Les
conditions relatives au bien, objet de la saisie
Suivant le droit commun de la saisie conservatoire
mobilière, le principe de la saisissabilité des navires peut
être dégagé (A) ; et comme tout principe, des
exceptions lui sont logiquement reconnues (B).
A- Le principe de la
saisissabilité des navires
Il est de principe en droit commun de la saisie conservatoire
mobilière que tous les biens appartenant au débiteur peuvent
être saisis sauf s'ils ont été déclarés
insaisissables par la loi nationale de chaque État partie196(*). Ce principe
communément admis trouve aussi toute sa légitimité
lorsqu'il s'agit de procéder conservatoirement à la saisie de
navire. Ceci dit, et par analogie, tous les navires appartenant au
débiteur sont saisissables à moins qu'ils n'aient
été déclarés insaisissables par la loi nationale ou
par un ordre juridique international étant donné la dimension
particulièrement planétaire du navire.
Cependant, la problématique des navires prêts
à faire voile197(*) a été soulevée en France.
Traditionnellement, en droit français, le législateur a voulu
faciliter la liberté de navigation. Par conséquent, les navires
prêts à faire voile ne pouvaient faire l'objet d'une saisie
puisque leur immobilisation entraînait des pertes financières.
L'article 215 du Code de Commerce interdisait la saisie des navires prêts
à faire voile. Cette règle a été
écartée expressément par la Convention de 1952198(*). Elle ne figure pas non plus
dans la loi de 1967. Désormais, la saisie des navires prêts
à faire voile tend à devenir la règle. Toutefois,
étant donné l'importance des préjudices occasionnés
par cette saisie, le juge se livre à un contrôle en tenant compte
de la valeur des intérêts en jeu. Dans cette affaire, les juges de
la Cour d'appel d'Aix en Provence ont estimé que la saisie
pratiquée sciemment et sans nécessité un vendredi en fin
de matinée, sur un navire en partance et en charge de ses passagers et
véhicules, dépassait la fin légitime d'une saisie
conservatoire et exerçait une pression quasi intolérable sur le
débiteur199(*).
Selon l'article 50 de l'AUPSRVE, « Les saisies
peuvent porter sur tous les biens appartenant au débiteur alors
même qu'ils seraient détenus par des tiers ... ».
La saisie du navire et comme il a déjà été dit, ne
tient pas compte en principe de son affectation au commerce, à la
pêche, à la plaisance. Tous les navires sont saisissables dans les
mêmes conditions. Cependant, ce principe souffre d'exceptions
tirées pour la plupart du droit commun.
B- Les exceptions :
les insaisissabilités
Ces insaisissabilités peuvent résulter du
principe selon lequel, « saisie sur saisie ne
vaut » (1), et de la règle établie par l'article
51 de l'AUPSRVE200(*)
(2).
1- Le principe
général « saisie sur saisie ne
vaut »
Il est de règle générale que lorsque les
biens du débiteur ont déjà fait l'objet d'une
première saisie, d'autres saisies ultérieures ne peuvent plus
être pratiquées sur ces mêmes biens ; la
première saisie ayant déjà rendu ces biens indisponibles.
Telle est la signification de la règle selon laquelle,
« saisie sur saisie ne vaut ». Cette règle
interdisait au second créancier de saisir une seconde fois les
mêmes biens. Toutefois, il lui était loisible de se joindre aux
poursuites déjà engagées en établissant un
procès-verbal de récolement201(*).
Cette règle découlant du régime
général des saisies n'est pas dérogée en
matière de saisie conservatoire des navires ; d'ailleurs, elle y
reçoit même une adaptation nettement perceptible dans les textes
afférents dont la jurisprudence en a fait application.
En effet, en droit international de la saisie des navires, la
convention de Bruxelles donne une appréhension particulière
à la règle « saisie sur saisie ne
vaut » dans son article 3 paragraphe 3 dont la teneur est :
« Un navire ne peut être saisi et caution ou garantie ne
sera donnée, plus d'une fois dans la juridiction d'un ou plusieurs des
États contractants, pour la même créance et par le
même demandeur; et si un navire est saisi dans une desdites juridictions
et une caution ou une garantie a été donnée, soit pour
obtenir la mainlevée de la saisie, soit pour éviter celle-ci,
toute saisie ultérieure de ce navire, ou de n'importe quel autre navire,
appartenant au même propriétaire, par le demandeur et pour la
même créance maritime, sera levée et le navire sera
libéré par le tribunal ou toute autre juridiction
compétente dudit État, à moins que le demandeur ne prouve,
à la satisfaction du tribunal ou de toute autre autorité
judiciaire compétente, que la garantie ou la caution a été
définitivement libérée avant que la saisie
subséquente n'ait été pratiquée ou qu'il n'y ait
une autre raison valable pour la maintenir »202(*). La jurisprudence203(*) a eu l'occasion de faire une
application littérale de ce principe. En effet, la Cour de cassation en
2011 a prononcé un arrêt de rejet confirmant en quelque sorte
l'adage « saisie sur saisie ne vaut ». Cet
arrêt de rejet a pour point de départ un contrat de
réparation navale qui a donné lieu à un contentieux entre
les parties, le propriétaire du navire reprochant, entre autres, au
réparateur des surfacturations204(*). Par ordonnance de référé, le
réparateur obtient la condamnation du propriétaire à lui
verser une provision, ordonnance sur le fondement de laquelle le premier fait
pratiquer une saisie conservatoire sur le navire, situé à
Malte205(*). Par la
suite, la mainlevée de cette saisie a été ordonnée,
mais moyennant la consignation d'une certaine somme d'argent. Puis
la société de réparation obtient la
condamnation du propriétaire du navire sur le fond, à la suite de
quoi il fait à nouveau pratiquer, sur ordonnance, une saisie
conservatoire sur le même navire, cette fois en France, et
également avec succès. La mainlevée de cette seconde
saisie est également ordonnée, cette fois après remise
d'une caution bancaire. Le propriétaire du navire a alors
demandé la rétractation de l'ordonnance autorisant la seconde
saisie, ce qui lui est refusé. Ce refus est confirmé par la Cour
de cassation, au vu de l'article 3 paragraphe 3 de la Convention de Bruxelles
du 10 mai 1952 pour l'unification de certaines règles sur la saisie
conservatoire des navires de mer, selon lequel un navire ne peut être
saisi plus d'une fois dans la juridiction d'un ou plusieurs des États
contractants, pour la même créance et par le même demandeur.
Ce texte ne fait en réalité que reprendre un vieil adage du droit
des procédures d'exécution : « saisie sur saisie ne
vaut ». Or, la saisie ayant été pratiquée
à Malte, État non signataire de la convention de 1952, le texte
en cause ne pouvait recevoir application. La Cour de cassation approuve
d'ailleurs pleinement la Cour d'appel d'avoir limité la portée de
l'interdiction posée par ce texte aux saisies pratiquées dans
les États contractants et d'en avoir déduit que la saisie
pratiquée en France ne pouvait être rétractée au
regard de ladite convention. Seule la violation de cette dernière ayant,
semble-t-il, été invoquée par le propriétaire du
navire, il ne pouvait être reproché aux juges d'avoir
invalidé la seconde saisie, cette fois sur le fondement du droit commun
français des procédures civiles d'exécution.
En résumé l'adage « saisie sur
saisie ne vaut » dégagé en vertu du dispositif de
l'article 3 paragraphe 3 de la convention de Bruxelles ne s'appliquerait que si
le navire qui avait déjà été saisi dans un
État signataire de ladite convention vient une fois de plus à
être l'objet d'une nouvelle saisie par le même demandeur et pour la
même créance maritime. Cette règle est en vertu du
même texte étendue à tous les navires appartenant au
débiteur.
Cependant, en droit interne, étant donné le
caractère subsidiaire du CCMM en matière de saisie de navire, et
vu le fait que la quasi-totalité des États membres de la CEMAC
sont parties à la convention de Bruxelles, cette règle devrait y
recevoir pleine application en matière de saisie ultérieure.
Toutefois, pour que ce principe reçoive cette pleine
application, il ne faudrait pas que le navire en cause soit
déclaré insaisissable en vertu de l'article 51 de l'AUPSRVE.
2- Les
insaisissabilités en vertu de l'article 51 de l'AUPSRVE
L'article 51 de l'AUPSRVE dispose : « Les
biens et droits insaisissables sont définis par chacun des États
parties ». L'Acte uniforme renvoie ainsi à la loi
nationale de chaque État partie pour fixer la liste des biens et droits
insaisissables. Généralement, plusieurs cas
d'insaisissabilités sont prévus. Premièrement, il y a ceux
qui sont édictés dans l'intérêt du débiteur.
Ainsi, sont insaisissables, les objets mobiliers corporels indispensables
à la vie du débiteur, les créances ayant un
caractère alimentaire, les pensions civiles et militaires, les
indemnités ou rentes perçues en vertu de la réglementation
sur les accidents de travail, les prestations familiales et les salaires pour
la fraction fixée par la loi. Deuxièmement, il y a des cas
d'insaisissabilités édictés pour des raisons
sociales ; ainsi, certaines législations prévoient que les
immeubles et les objets mobiliers nécessaires aux réunions des
syndicats, à leur bibliothèque et à leur cours
d'instruction professionnelle sont insaisissables. Troisièmement et
enfin, il y a le cas d'insaisissabilité édicté dans
l'intérêt du commerce ; dans beaucoup de législations,
les effets de commerce sont insaisissables.
Tels sont les cas d'insaisissabilités que l'on
retrouve en matière de saisie conservatoire mobilière de droit
commun et qui sont dans le contexte camerounais contenus dans les articles 327
et suivants du CPCC. Ces insaisissabilités devraient à notre sens
recevoir application en matière de saisie particulière de
navire ; mais, étant donné le caractère
particulièrement général de ces insaisissabilités,
seuls quelques cas seulement méritent une adaptation à la saisie
conservatoire des navires, les autres cas s'avérant inappropriés
à l'objet que constitue le navire.
Ceci étant, l'insaisissabilité la plus
marquante du navire et découlant du droit commun est
l'insaisissabilité qui est édictée dans
l'intérêt du commerce et par adaptation, dans
l'intérêt du commerce maritime. Ceci tient particulièrement
aux navires qui sont les instruments indispensables de travail du
débiteur ; il s'agit là de l'insaisissabilité de
principe dont les arguments qui la corroborent seront puisés dans le
droit français.
En France, la loi protège efficacement les navires,
instruments de travail par une insaisissabilité de principe, pour autant
que sont réunies deux conditions : l'exercice d'une activité
professionnelle (le travail) et l'utilisation du navire allégué
(l'instrument nécessaire et indispensable à l'exercice de cette
activité). Le principe a été appliqué par les
tribunaux français aux navires de pêche206(*). Ce principe subit des
dérogations selon l'article 14 alinéa 4 de la loi du 9 juillet
1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution.
D'après cet article, les navires sont susceptibles d'être saisis
s' « ils se trouvent dans un lieu autre que celui où
le saisi demeure ou travaille habituellement » et
s' « ils sont des biens de valeur, en raison notamment de
leur importance, de leur matière, de leur rareté, de leur
ancienneté ou de leur caractère luxueux ».
Cependant, il faut noter que cette circonstance reste sans effet si le navire
est l'unique instrument de travail de l'artisan que la loi
protège207(*).
L'on se rend donc compte que, relativement aux conditions
objectives de la saisie conservatoire des navires, certaines adaptations ont
mérité d'être faites avec les règles issues du droit
commun de la saisie conservatoire mobilière, ce travail intellectuel se
prolongera également au niveau des conditions subjectives.
SECTION II :
L'ADAPTATION QUANT AUX CONDITIONS SUBJECTIVES DE SAISIE DU BIEN
La saisie conservatoire des navires fait intervenir
généralement deux principaux personnages que l'on retrouve
également dans les saisies conservatoires de droit commun d'où
l'adaptation a été faite ; cette adaptation se fera tout
d'abord en ce qui concerne la personne du saisissant (Paragraphe 1) et ensuite
en ce qui concerne celle du saisi (Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Quant
au saisissant
Le créancier saisissant est celui qui est titulaire du
droit de saisir ; mais en réalité, il n'exerce pas toujours
ce droit lui-même. C'est donc dire que la qualité de saisissant,
si elle est principalement réservée au créancier originel
(A), il est des cas où celui-ci ne peut agir et par conséquent,
d'autres personnes auront cette qualité (B).
A- Le créancier
originel
La définition lapidaire qui est donnée au terme
« créancier » est qu'il est un
« titulaire d'un droit de
créance »208(*). C'est cette qualité qui confère
à toute personne le droit de saisir en matière de droit commun de
la saisie puisque l'AUPSRVE dispose que : « À
défaut d'exécution volontaire, tout créancier peut (...)
pratiquer une mesure conservatoire pour assurer la sauvegarde de son
droit »209(*). Il s'agit là en quelque sorte du fondement
de la qualité pour agir en saisie conservatoire. C'est donc en principe
le créancier originel qui a qualité pour agir ; il s'agit du
créancier qui est personnellement en relation avec le
débiteur.
En matière de saisie conservatoire de navire, les
textes actuellement applicables n'utilisent pas expressément le vocable
« créancier » en ce qui concerne le droit
d'agir. Ils se contentent d'employer le terme
« demandeur » pour ce qui est de la convention
internationale de Bruxelles210(*) et aucun terme subjectif pour ce qui est du
CCMM211(*). Mais dans
l'un et dans l'autre cas, il faudra exciper la qualité de
créancier pour pouvoir parvenir à la saisie conservatoire du
navire.
Étant donné la vacuité des textes
particuliers sur la saisie des navires, le créancier, à l'image
du droit commun peut être un créancier chirographaire ou
privilégié. Dans la même logique, et dans la même
lancée d'adaptation de la saisie conservatoire de droit commun à
la saisie conservatoire des navires, si la créance
alléguée par le créancier n'est pas hypothécaire ou
privilégiée, l'exécution doit être poursuivie en
premier lieu sur les biens meubles et en cas d'insuffisance, sur les
immeubles212(*).
Pratiquement, il s'agit de dire qu'étant donné la nature
juridique mobilière conférée au navire213(*), celui qui allègue
une créance maritime chirographaire ne pourra saisir un immeuble du
débiteur qu'en cas d'insuffisance des navires et des autres meubles pour
régler la totalité de la créance214(*). Il en est de même si
le créancier a une hypothèque ou un privilège sur le
navire, auquel cas il ne pourra saisir un immeuble du débiteur que si le
navire couvert par l'hypothèque ou par le privilège s'est
avéré insuffisant.
De toutes les façons, il devra se poser un
problème de capacité du créancier pour l'exercice de la
saisie conservatoire du navire. Ce problème se pose lorsque le
créancier saisissant est frappé d'une incapacité. Cet
état de choses concerne les mineurs non émancipés et les
majeurs incapables. Tout comme en droit commun de la saisie conservatoire des
biens, la véritable difficulté est celle de déterminer si
la saisie conservatoire mobilière est un acte d'administration, un acte
de disposition ou un acte judiciaire. Contrairement à la loi
française215(*)
dont il s'inspire, l'AUPSRVE n'a pas expressément
déterminé la nature juridique de la saisie. Mais si l'on se
réfère à la définition de la saisie qu'il donne,
cette lacune peut être comblée ; la saisie étant une
procédure de recouvrement de créance, elle doit à ce titre
être qualifiée d'acte d'administration, c'est-à-dire un
acte de gestion courante d'un patrimoine. Ayant la capacité requise pour
effectuer un acte d'administration si la loi l'y autorise, le mineur non
émancipé peut pratiquer les saisies mobilières et par
conséquent les saisies conservatoires de navire, lesquelles seront donc
par nature, et comme toutes les saisies mobilières, des actes
d'administration.
C'est donc dire que dans les cas où la loi ne l'y
autorise pas, la mineur non émancipé ne serait pas fondé
à intenter par lui-même des saisies mobilières. Tout de
même, si les saisies mobilières étaient
considérées purement et simplement comme des actes de
disposition, le mineur non émancipé ne serait pas admis auxdites
saisies ; dans ces deux cas comme dans bien d'autres, d'autres personnes
seront appelées à agir.
B- Les autres personnes
pouvant saisir
La question des autres personnes pouvant saisir se pose
lorsqu'il est question de parler du pouvoir de saisie ; celui-ci est
soulevé lorsque la saisie est pratiquée au nom d'une personne
autre que le créancier saisissant lui-même. Il peut s'agir soit
d'un ayant cause du créancier saisissant (1), soit du
représentant de celui-ci (2).
1- Les ayants cause du
créancier originel
En application du droit commun, le droit de saisir du
créancier originel, en cas de décès, est transmis par voie
successorale à ses héritiers appelés ayants cause
universels, à titre universel et ayants cause particuliers216(*). Le fondement de la
transmission du droit de saisir aux ayants cause est la fiction juridique selon
laquelle les héritiers continuent la personnalité juridique du
créancier originel décédé. Mais quel que soit le
cas, les ayants cause ne peuvent procéder à la saisie à la
place du créancier originel décédé que s'ils
justifient de leur droit de saisir. Ils doivent, à cette fin, notifier
au débiteur le titre en vertu duquel ils commencent ou poursuivent la
saisie en lieu et place du créancier défunt. Aussi,
l'héritier légal devra notifier au débiteur l'acte de
décès de son auteur et un acte notarié attestant qu'il est
héritier. Quant au légataire universel ou à titre
universel, il doit notifier au débiteur le testament qui lui a
conféré cette qualité. Contrairement aux ayants cause
universel et à titre universel, le droit de saisir transmis à
l'ayant cause particulier est beaucoup plus limité. Il ne peut exercer
le droit de saisir que pour le recouvrement de la créance qui lui a
été cédée par le créancier originel
défunt. Mais comme les autres ayants cause, les ayants cause
particuliers doivent, également, par une notification préalable
au débiteur, fournir une justification de leur qualité. Ils
doivent par exemple, notifier au débiteur la disposition du testament
contenant le legs particulier. S'il s'agit d'un cessionnaire de
créances, il devra établir la cession de créance à
son profit conformément aux conditions prévues par la loi
applicable à la cession de créances.
Conformément aux règles ci-dessus
établies et qui sont communément admises en droit commun des
saisies, ces successeurs peuvent poursuivre le débiteur et intenter une
saisie conservatoire de navire en vertu d'une créance maritime
née du chef de celui par qui ils tiennent la dénomination de
successeurs.
En dehors du décès, le droit de saisir peut
être transmis par la volonté même du créancier
à un représentant.
2- Les représentants
du créancier
En droit commun de la saisie, il est des situations dans
lesquelles le créancier confie son pouvoir de saisie à d'autres
personnes par le mécanisme du mandat ; ces personnes seront alors
considérées comme ses représentants.
Une distinction doit être faite entre les
représentants légaux et les représentants conventionnels.
Les pouvoirs des représentants légaux pour effectuer une saisie,
dépendent de la nature de la saisie. En tant que mandataires, les
représentants légaux peuvent accomplir les actes
d'administration. Par conséquent, ils peuvent pratiquer des saisies
mobilières, lesquelles sont par nature des actes d'administration. En
revanche, les représentants légaux du créancier saisissant
ne peuvent pratiquer une saisie immobilière, acte virtuel de
disposition, sans pouvoir spécial. Toute saisie nécessite le
recours à un représentant conventionnel. Le créancier
saisissant, quelle que soit sa profession, ne peut pratiquer lui-même la
saisie ; ce représentant conventionnel, selon l'AUPSRVE, sera soit
un huissier de justice217(*), soit un agent d'exécution218(*) dans les États
parties où la profession d'huissier n'est pas
réglementée.
Le problème de la représentation du
créancier, n'ayant pas été résolu dans les
différents textes sur la saisie conservatoire des navires, dans une
optique d'harmonisation des différentes règles sur les saisies,
il serait loisible en vertu du caractère supplétif de l'AUPSRVE
que l'on puisse avoir recours à ce texte dans ses dispositions sur la
saisie conservatoire des biens meubles et par conséquent, l'appliquer au
cas du navire.
Cet état de choses nous conduira certainement à
étendre le caractère supplétif de l'AUPSRVE au sujet
passif de la saisie que constitue le saisi.
Paragraphe 2 : Quant
au saisi
Tout comme l'AUPSRVE, les textes sur la saisie conservatoire
des navires posent en la matière le principe selon lequel tout
débiteur peut être saisi. Ceci étant, nous analyserons les
personnes susceptibles d'être saisies (A) dont les dérogations
sont pour la plupart tirées du droit commun et desquelles la principale
concerne les immunités d'exécution (B).
A- Les personnes
susceptibles d'être saisies
Deux catégories de personnes peuvent être
saisies : le propriétaire du navire à l'origine de la
créance (1) et le tiers détenteur du navire (2).
1- Le propriétaire
du navire à l'origine de la créance
Le propriétaire du navire à l'origine de la
créance est en quelque sorte le sujet passif de la saisie. Tout comme en
droit commun, le principe est celui selon lequel toute personne ayant la
qualité de débiteur peut être saisie et uniquement cette
personne.
Cette hypothèse est manifestement la seule
envisagée par les textes. Elle nécessite l'accomplissement des
deux formalités suivantes : la signification au débiteur
d'un procès verbal de saisie et la dénonciation au commandement
du port, ceci en vertu des dispositions du droit interne CEMAC219(*). Le saisi n'aura
connaissance de l'ordonnance de saisie qu'au moment de l'exécution,
c'est-à-dire lorsque l'huissier de justice mandaté par le
créancier procédera à la signification du
procès-verbal de saisie au débiteur, cet acte étant le
premier de la saisie conservatoire. Les actes de saisie
représentés en pratique par le procès-verbal et
l'ordonnance, devront être simultanément dénoncés en
copie au commandement du port afin que celui-ci refuse l'autorisation de
départ du navire. Lorsque la saisie est faite pour recouvrement d'une
créance contre l'affréteur, elle devra aussi être
dénoncée au fréteur propriétaire du navire par
signification au capitaine de celui-ci. Lorsque le navire est
hypothéqué, la pratique recommande pour l'opposabilité aux
tiers, que la saisie soit également dénoncée à la
conservation des hypothèques maritimes220(*).
La situation n'est pas forcément la même lorsque
la saisie a été pratiquée entre les mains d'un tiers.
2- La saisie du navire
entre les mains d'un tiers
Cette situation n'a pas été organisée
par les textes particuliers régissant la saisie des navires car les
conventions internationales sur la saisie des navires et le CCMM n'ont
manifestement et techniquement envisagé qu'un seul cas de figure :
la saisie pratiquée directement entre les mains du propriétaire
du navire. Or il n'est pas inconcevable qu'au moment où le
créancier désire faire saisir le navire, celui-ci soit entre les
mains d'un tiers221(*).
Les principales hypothèses sont celle du contrat d'affrètement
dans lequel le navire est mis à la disposition d'un affréteur et
celle du chantier naval à qui tel navire est confié pour
entretien et réparation. Ces tiers ont en commun de ne pas être
propriétaires du navire ; cette détention du navire par un
tiers induit-elle des modalités spécifiques de saisie ? On
sait en effet que dans toutes les autres procédures, en pareil cas, la
saisie est pratiquée entre les mains du tiers puis
dénoncée au propriétaire du bien ; doit-il en
être de même concernant la saisie conservatoire de navires ?
La solution la plus simple à notre avis serait de faire recours aux
règles supplétives posées par le droit commun des saisies
conservatoires. À cet effet, l'article 50 de l'AUPSRVE dispose :
« Les saisies peuvent porter sur tous les biens appartenant au
débiteur alors même qu'il seraient détenus par des
tiers... ». Conséquemment, cette situation
nécessitera l'accomplissement des trois formalités
suivantes : la signification au débiteur d'un procès-verbal
de saisie222(*), la
dénonciation de la saisie au débiteur et la dénonciation
au commandement du port223(*).
Toutes ces différentes procédures ne pourront
être mises en exécution lorsque le sujet passif de la saisie en
cause, bénéficie des faveurs l'immunisant contre toute
exécution sur ses biens.
B- Les immunités
d'exécution
C'est une faveur exceptionnelle de la loi en vertu de
laquelle certains débiteurs ne peuvent faire l'objet d'une
exécution forcée. Bien que relevant de la même inspiration
que l'insaisissabilité, elle s'en sépare par son caractère
personnel puis qu'elle est orientée vers les personnes et non pas vers
les biens comme l'insaisissabilité. Par définition, tous les
biens d'une personne bénéficiaire de l'immunité
d'exécution sont insaisissables. La règle ainsi posée
découle de l'article 30 de l'AUPSRVE selon lequel :
« L'exécution forcée et les mesures conservatoires
ne sont pas applicables aux personnes qui bénéficient d'une
immunité d'exécution ».
Prenant la suite de cette disposition, le droit
spécial de la saisie des navires, à l'image du droit commun de la
saisie a tenu à apporter quelques éclaircissements sur les
personnes bénéficiaires de l'immunité
d'exécution.
Sur le plan interne, le CCMM dispose à cet effet que,
« Les navires appartenant à un État, ou
exploités par lui, ne peuvent être saisis si, au moment où
la créance est née, ils étaient affectés
exclusivement à un service gouvernemental et non
commercial »224(*).
Sur le plan international, et tout comme le droit interne
CEMAC, conformément aux exigences de la convention de Bruxelles du 10
avril 1926 sur l'immunité des navires d'État, les navires
d'État affectés exclusivement à une activité
gouvernementale et non commerciale ne sont pas saisissables, en vertu des
immunités d'exécution et de juridiction qu'on doit leur
reconnaître.
En définitive, selon ces deux ordres juridiques,
l'immunité d'exécution est une véritable immunité
personnelle, c'est-à-dire en raison de la qualité de leurs
propriétaires. En matière de saisie de navires, l'immunité
personnelle la plus fréquente sera celle conférée par le
droit international public concernant les navires appartenant à un
État ou souverain étranger. Cette immunité a donné
lieu à la théorie des navires apparentés. On sait
qu'en règle générale, l'immunité d'exécution
devra être écartée chaque fois qu'il s'agit de recouvrer
une dette contractée dans le cadre de l'exercice, par un État
étranger, d'une activité économique ou commerciale,
c'est-à-dire sans rapport avec sa souveraineté, et que ne seront
alors saisissables que les biens affectés à cette
activité. La solution est la même lorsque les biens d'un organisme
public distinct d'un État étranger, donc notamment une compagnie
maritime, ont été affectés par celui-ci à une
activité économique ou commerciale, ledit organisme, en raison de
son caractère public, étant considéré comme une
émanation de l'État lui-même225(*). Or, pour échapper
à la saisie de leurs biens, la tentation est grande pour certains
États, ayant traditionnellement un secteur privé réduit
voire inexistant, de multiplier les établissements publics ou les
sociétés de droit privé à la personnalité
juridique soi-disant distincte, propriétaires de biens tels des navires.
Dans ce cas, pour faire échec à cette fraude et saisir les biens
de cet organisme public, les créanciers auront l'obligation de
démontrer en quoi celui-ci ne dispose pas véritablement d'un
patrimoine distinct de celui de l'État étranger dont on dit alors
qu'il n'est qu'une émanation ; cette solution n'a pas cours lorsque
ce sont les biens d'un organisme de droit privé qui ont ainsi
été affectés à cette activité, même si
l'État étranger y dispose de la plus forte participation, il
n'est pas alors vu comme une émanation de l'État
étranger226(*).
Dans le même ordre d'idées, toujours à propos de la
constitution d'une société de droit privé, la Cour de
cassation française estime que « l'allégation selon
laquelle un État a eu pour but, dans la création de
sociétés d'armement, de limiter le gage de ses créanciers
maritimes ne démontre pas, par elle-même, que ces
sociétés seraient fictives et ne constitueraient que des
émanations de cet État, dès lors qu'elles possèdent
un patrimoine propre »227(*).
Enfin, notons que la convention de Genève du 12 mars
1999, non encore en vigueur, dispose en son article 8 paragraphe 2, qu'elle
« n'est pas applicable aux navires de guerre, navires de guerre
auxiliaires et autres navires appartenant à un État ou
exploités par lui et exclusivement affectés, jusqu'à
nouvel ordre, à un service public non commercial ».
CONCLUSION DU CHAPITRE
I
À l'épilogue du premier chapitre de cette
deuxième partie, l'on se rend compte que la saisie conservatoire de
navire n'a de spécial que le nom, car à l'analyse de certaine
conditions de ladite saisie, il est remarqué d'une part que les textes
sur la saisie conservatoire des navires adaptent certaines de leurs
dispositions à celles qui sont issues du droit commun de la saisie
conservatoire mobilière de droit commun découlant de
l'AUPSRVE ; et d'autre part, l'on aperçoit la vacuité
juridique dont ces textes sont coupables sur certains sujets intéressant
fondamentalement les procédures civiles d'exécution ; fort
heureusement, en vertu du caractère supplétif de l'AUPSRVE, une
adaptation s'est imposée et a nécessité un travail
d'ajustement, chose qui a été faite.
Cependant, l'on ne s'arrêtera pas là ; la
faute revient soit au renvoi exprès des textes sur la saisie, soit au
vide juridique constaté sur une question cruciale des voies
d'exécution. Tel sera le cas lorsqu'on prendra la deuxième
facette possible en voies d'exécution des navires à savoir la
saisie-exécution dont le sort est plus ou moins lié aux
règles de la saisie immobilière de droit commun dont une
nécessaire adaptation mérite d'être faite.
CHAPITRE II :
L'ADAPTATION DES RÈGLES DE LA SAISIE IMMOBILIÈRE À LA
SAISIE-EXÉCUTION DES NAVIRES
Comme en droit commun, deux types de saisies peuvent
être pratiquées sur un navire : la saisie conservatoire et la
saisie-exécution. La saisie-exécution228(*) permet au titulaire d'un
titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible, de
faire procéder à la saisie et à la vente du navire de son
débiteur.
Il est important de souligner que les textes internationaux
ne règlent guère la procédure de saisie-exécution
des navires ; ils ne se contentent que de son aspect conservatoire. Seul
le CCMM prévoit la saisie-exécution des navires229(*). La saisie-exécution
y est une notion plurielle et regroupe deux variétés : la
saisie-exécution des navires précédée d'une
saisie-conservatoire dudit navire, et la saisie-exécution des navires
non précédée d'une saisie-conservatoire sur le même
navire230(*). Tout en
réglant certains aspects particuliers de la saisie-exécution des
navires dans son corpus, le CCMM renvoie pour la plupart aux dispositions sur
la saisie immobilière car son article 128 dispose :
« Lorsqu'elle n'est pas précédée d'une
saisie conservatoire, la saisie-exécution est demandée au juge du
fond dans les conditions et selon la procédure en vigueur pour les
saisies immobilières. Un procès-verbal est dressé et un
gardien est désigné dans les mêmes conditions qu'en
matière de saisie conservatoire ». On pourrait comprendre
dès lors la raison pour laquelle ce texte ne s'arrête que sur la
saisie-exécution non précédée d'une saisie
conservatoire, car celle précédée d'une saisie
conservatoire devrait originellement satisfaire aux conditions liées
à la saisie conservatoire notamment celle de l'allégation d'une
créance maritime paraissant fondée dans son principe231(*) et intenter une
procédure au fond afin d'obtenir un titre exécutoire232(*) qui lui permettra de
convertir la saisie conservatoire en saisie-exécution des navires. Or si
au départ, le créancier détient déjà le
titre exécutoire233(*), il pourra, sans passer par la saisie conservatoire,
intenter directement une saisie-exécution du navire.
Quoi qu'il en soit, l'analyse des dispositions du CCMM sur la
saisie-exécution des navires, nous indique une certaine adaptation des
règles de la saisie immobilière de droit commun à la
saisie-exécution des navires, ceci à deux niveaux : au
niveau des conditions de saisie (SECTION I) et au niveau de la procédure
de saisie (SECTION II).
SECTION I :
L'ADAPTATION QUANT AUX CONDITIONS DE SAISIE
Ces conditions sont diverses. Cependant, malgré cette
diversité, on peut tenter de les classer en mettant en relief les
intérêts que les rédacteurs de l'Acte uniforme ont voulu
protéger. On se rend compte alors qu'il y a deux séries de
conditions : d'une part, les conditions destinées d'abord à
éviter l'utilisation arbitraire de cette procédure et ensuite,
à éviter le recours à cette procédure pour saisir
et faire vendre les biens qui échappent au droit de poursuite des
créanciers ; ce sont les conditions objectives (Paragraphe
1) ; d'autre part, les conditions qui sont destinées à
éviter une procédure initiée par une personne qui ne
justifie pas d'un droit de créance ou dirigée contre une personne
qui n'est pas tenue envers le créancier ; ce sont les conditions
subjectives liées à la saisie des navires (Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Quant
aux conditions objectives
Pour exercer sa saisie-exécution en toute
légitimité, le demandeur devra exciper l'existence d'un titre
exécutoire (A) auquel d'autres conditions liées au bien
saisissable sont requises (B).
A- L'exigence d'un titre
exécutoire
Pour permettre l'exécution forcée, la
créance qui la justifie doit être constatée dans un titre
exécutoire ; telle est en quelque sorte l'exigence de l'article 127
du CCMM qui cite les divers titres exécutoires et de l'article 128 du
même code qui renvoie à la saisie-exécution des navires aux
conditions et à la procédure en vigueur dans la saisie
immobilière classique234(*). Ainsi, pour la détermination des titres
exécutoires, nous pouvons interpeler deux articles : l'article 127
du CCMM et l'article 33 de l'AUPSRVE déterminant les types de titres
exécutoires en matière de saisie de droit commun. Quoi qu'il en
soit, ces articles sont similaires, ce qui ne poserait donc par
conséquent aucun souci de cohésion ou d'harmonie. Ils disposent
en effet : « Constituent des titres exécutoires :
les décisions juridictionnelles revêtues de la formule
exécutoire et celles qui sont exécutoires sur minutes ; les actes
et décisions juridictionnels étrangers ainsi que les sentences
arbitrales déclarées exécutoires par une décision
juridictionnelle non susceptible de recours suspensif d'exécution de
l'État dans lequel ce titre est invoqué ; les
procès-verbaux de conciliation signés par le juge et les parties
; les actes notariés revêtus de la formule exécutoire ; les
décisions auxquelles la loi nationale de chaque État partie
attache les effets d'une décision judiciaire ».
Différents titres ont donc la nature de titre
exécutoire. Il en est ainsi des actes judiciaires des juridictions
nationales et ceux émanant de juridictions étrangères.
Seules les décisions des juridictions nationales revêtues de la
formule exécutoire sont considérées comme des titres
exécutoires. Cette formule ordonne aux huissiers de justice de mettre
à exécution l'acte contenant ladite formule et à la force
publique de leur prêter main forte lorsqu'elle en sera légalement
requise. Cette formule contient généralement les termes
suivants : « en conséquence, la République
mande et ordonne à tous les huissiers de justice, à ce requis, de
mettre ledit jugement ou arrêt à exécution, aux procureurs
généraux, d'y tenir la main, à tous les commandants et
officiers de la force publique de prêter main forte lorsqu'ils en seront
légalement requis ». En plus de la formule
exécutoire, la décision juridictionnelle nationale doit contenir
la condamnation du débiteur, avoir été
régulièrement signifiée et être passée en
force de chose jugée235(*). Par les termes « décision
juridictionnelle nationale revêtue de la formule
exécutoire », aussi bien l'Acte uniforme que le CCMM
visent également les décisions qui sont exécutoires sur
minute.
Quant aux actes et décisions juridictionnelles
étrangers ainsi que les sentences arbitrales étrangères,
ils ne sont, en principe, exécutoires dans l'État du for
que s'ils ont préalablement obtenu l'exéquatur ;
l'exéquatur est la décision juridictionnelle nationale
déclarant la décision étrangère exécutoire
sur le territoire du for ; ce jugement d'exéquatur doit
être revêtu de l'autorité de la chose jugée
c'est-à-dire qu'il ne doit pas être susceptible d'un recours
suspensif d'exécution.
Les textes ci-dessus cités assimilent aux actes
judiciaires les procès-verbaux de conciliation signés par le juge
et les parties. Ces procès-verbaux sont des actes judiciaires mais ils
ne sont pas pour autant des décisions de justice. Il en est ainsi du
procès-verbal de conciliation dressé par la juridiction saisie
sur opposition au cours de la procédure d'injonction236(*).
En dehors des procès-verbaux de conciliation, ces
textes assimilent également aux actes judiciaires les décisions
auxquelles la loi nationale de chaque État partie attache les effets
d'une décision judiciaire. L'on peut citer à titre d'illustration
le certificat de non paiement délivré par l'huissier en cas de
non paiement d'un chèque pour défaut de provision suffisante. Ce
certificat de non paiement doit être signifié au tireur. Dans les
quinze jours de la notification, l'huissier de justice qui n'a pas reçu
justification du paiement délivre un titre exécutoire.
Consacrant une solution classique, ces dispositions, dans leur
énumération des titres exécutoires, citent les actes
notariés revêtus de la formule exécutoire. En effet, dans
sa qualité d'officier public, le notaire peut délivrer des
expéditions des actes authentiques qu'il établit et les
revêtir de la formule exécutoire. Il faut assimiler à ces
actes notariés les actes sous seing privé qui sont reconnus
sincères par les parties devant notaire et déposés en son
étude. Cette force exécutoire de l'acte notarié est
suspendue lorsqu'une procédure d'inscription en faux237(*) est engagée contre
cet acte.
Cependant, ces dispositions ne comportant aucune formule
limitative, l'on doit inclure dans son énumération des titres
exécutoires des actes omis. Il en est ainsi des titres
délivrés par des personnes morales de droit public et
déclarés exécutoires par la loi nationale de l'État
partie. Bien que ces titres ne soient pas revêtus de la formule
exécutoire, ils constituent incontestablement des titres
exécutoires. Il s'agit des actes administratifs. Ces actes sont
définis comme des titres émis par l'administration et qui sont
exécutoires par eux-mêmes. Tel est le cas des marchés de
fourniture qui sont des actes contractuels de l'administration. On peut encore
citer les états de perception ou avis de mise en recouvrement qui sont
des actes unilatéraux de l'administration. Ce pouvoir de
l'administration de se créer elle-même des titres
exécutoires s'explique par les prérogatives de puissance publique
qu'elle détient238(*).
In fine, nous dirons qu'en principe, le
créancier doit détenir un titre exécutoire, mais une
difficulté peut se poser s'agissant des titres constitués de
jugement assorti de l'exécution provisoire. Le titre exécutoire
par provision peut-il fonder une poursuite par voie de saisie
immobilière-saisie de navire ? Le CCMM ne dit mot ; l'AUPSRVE
pourrait combler cette lacune. En effet, l'article 247 alinéa 2 de
l'AUPSRVE répond par l'affirmative. Aux termes de ce texte,
« ... la poursuite peut également avoir lieu en vertu d'un
titre exécutoire par provision, ou pour une créance en
espèces non liquidée ; mais l'adjudication ne peut
être effectuée que sur un titre définitivement
exécutoire et après liquidation ». Il en
résulte que si la poursuite peut commencer sur le fondement d'un titre
provisoirement exécutoire, l'adjudication quant à elle est
subordonnée à l'obtention d'un titre définitivement
exécutoire. Sur ce point l'article 247 rejoint les dispositions de
l'article 32 du même Acte uniforme239(*). Le législateur de l'OHADA, en exigeant un
titre définitivement exécutoire pour les adjudications est
soucieux de l'importance de l'immeuble (en l'espèce il s'agit du navire)
dans le patrimoine de l'individu. Le danger n'est cependant pas
écarté. Le titre exécutoire sur la base duquel une vente
de navire a été initiée et poursuivie jusqu'à son
terme peut être annulé pour des vices intrinsèques à
ce titre ; quel sera donc le sort de la vente intervenue240(*) ?
En tout état de cause, pour y parvenir, il faudrait que
le navire soit d'abord saisissable.
B- Les conditions
liées aux navires saisissables
Le principe est que tous les navires sont saisissables (1)
mais il y a des restrictions à ce principe (2).
1- Le principe de la
saisissabilité des navires
En principe tous les navires sont saisissables ainsi que
leurs accessoires appartenant au débiteur. Contrairement à ce qui
a cours en matière de saisie-conservatoire de navire241(*), le créancier qui
voudrait saisir-exécuter le navire devra s'attaquer au navire
appartenant au véritable débiteur.
Ces navires doivent faire l'objet d'une immatriculation
préalable. Selon l'article 253 de l'AUPSRVE, si les navires devant faire
l'objet de la poursuite ne sont pas immatriculés, le créancier
est tenu de requérir l'immatriculation à la conservation des
hypothèques maritimes après y avoir été
autorisé par décision du président de la juridiction
compétente de la situation des biens, rendue sur requête non
susceptible de recours. À peine de nullité, le commandement ne
peut être signifié qu'après le dépôt de la
réquisition d'immatriculation et la vente ne peut y avoir lieu
qu'après la délivrance du numéro d'immatriculation.
Cependant, cette étape ne pourrait être atteinte
si à la base, le navire est soumis à une restriction de
saisie.
2- Les restrictions au
principe de la saisissabilité des navires
Elles sont de deux ordres : les restrictions
générales et les restrictions particulières.
En ce qui concerne les restrictions d'ordre
général, en plus du droit d'usage et d'habitation, de
l'hypothèque, ne peuvent être saisies les valeurs
immobilières. Cependant la problématique de la
saisie-exécution des droits indivis sur les navires méritent une
attention particulière. À ce sujet, deux situations doivent
être distinguées. Premièrement, si le débiteur
détient des parts minoritaires, la saisie ne peut porter que sur les
parts et non sur le navire lui-même. Deuxièmement, si la saisie
porte sur des parts représentant plus de la moitié du navire, la
vente sera étendue à tout le navire, sauf opposition des autres
copropriétaires pour des motifs reconnus sérieux et
légitimes242(*).
Autrement dit, en cas d'opposition, il ne sera procédé
qu'à la saisie et à la vente de la partie affectée
à la garantie. Mais il est inimaginable de procéder à une
saisie morcelée d'un même corps du navire. Dès lors, seules
les parts du quirataire, et non pas le navire, sont saisies. Il s'agit d'une
véritable subrogation réelle. On peut dès lors se demander
suivant quelle procédure cette saisie sera ordonnée. La
copropriété n'étant pas une société, les
quirataires n'étant pas des associés, on a de la peine à
imaginer qu'il puisse s'agir d'une saisie des droits d'associés. On
songerait plutôt à une saisie des valeurs mobilières. En
faisant reposer l'hypothèse de saisie du navire sur le nombre de parts
du quirataire en cas d'opposition des autres quirataires, le CCMM n'en a pas
mesuré la portée sur la nature et la procédure de saisie.
Il s'est contenté d'évoquer cette alternative, pour ne
réglementer que les seules saisies du bâtiment de mer tout
entier.
Pour ce qui est des restrictions d'ordre
particulier :
Premièrement, les navires appartenant à un
incapable ne peuvent être saisis que si les biens mobiliers de
l'incapable l'ont été ou se sont révélés
insuffisants pour faire face au paiement de sa créance.
Deuxièmement, il s'agit du cas où la
créance est inférieure ou égale au revenu biannuel du
navire243(*). Autrement
dit, les procédures de saisie de navire sont suspendues si les
conditions suivantes sont réunies : d'abord les revenus des deux
années du navire sont suffisants pour régler la créance en
capital, intérêts et frais ; ensuite, le débiteur
offre la délégation de ces revenus au créancier. La
suspension des poursuites est provisoire et peut être reprise sur
décision du juge.
Troisièmement et enfin, l'hypothèque portant
sur plusieurs navires ; deus cas de figure peuvent se
présenter : premier cas de figure : aux termes de l'article
251 de l'AUPSRVE, le créancier ne peut poursuivre la vente des navires
qui ne lui sont pas hypothéqués que dans le cas d'insuffisance
des navires qui lui sont hypothéqués pour garantir le paiement
sauf si l'ensemble de ces biens constituent une seule et même
exploitation et si le débiteur le requiert. Deuxième cas de
figure : selon l'article 252 de l'AUPSRVE, la vente forcée des
navires situés dans les ressorts des juridictions différentes ne
peut être poursuivie que successivement. Toutefois, poursuit l'article
252, et sans préjudice de l'article 251, elle peut être poursuivie
simultanément lorsque les navires font partie d'une seule et
exploitation, et après autorisation du président de la
juridiction lorsque la valeur des navires situés dans un même
ressort est inférieure au total des sommes dues tant au créancier
saisissant qu'aux créanciers inscrits ; l'autorisation peut
concerner tout ou partie des biens.
Paragraphe 2 : Quant
aux conditions subjectives
À l'image de ce qui a cours à la saisie
immobilière, deux catégories de personnes interviennent dans la
saisie des navires que l'on peut analyser en termes de sujets actifs (A) et de
sujets passifs (B).
A- Les sujets actifs de la
saisie
Il s'agit des demandeurs à la saisie, et que l'on
appelle encore créanciers saisissants.
Il convient d'observer que, d'emblée tous les
créanciers peuvent déclencher une procédure de saisie de
navire. Il n'y a pas lieu de faire une distinction entre créanciers
hypothécaires et créanciers chirographaires. Le caractère
chirographaire d'une créance n'enlève pas à son titulaire
le droit de poursuivre l'expropriation forcée d'un navire de son
débiteur. Cela s'explique aisément : les causes de
préférence entre créanciers n'intéressent pas le
droit de saisir ; elles n'interviennent que dans la distribution des
deniers. Le droit des créanciers chirographaires est cependant
limité par les dispositions de l'article 28 alinéa 2 de l'Acte
uniforme ; il résulte de ce texte que ces créanciers ne
peuvent poursuivre l'expropriation forcée des navires qu'après la
réalisation des autres meubles et si les deniers provenant de cette
réalisation sont insuffisants. À la lecture de ce texte, on a
l'impression que le législateur veut obliger le créancier
à prouver, avant toute saisie de navire, qu'il a effectué une
saisie des autres biens meubles du débiteur et que le produit de la
vente n'a pas permis à le désintéresser totalement. Cela
reviendrait à mettre concrètement à sa charge l'obligation
de produire un procès-verbal de carence avant toute procédure de
saisie-exécution de navire.
Au vu de ce qui précède, nous pensons qu'il
appartient au débiteur d'opposer un moyen de défense tiré
de ce qu'il dispose de biens meubles dont la vente permettrait de
désintéresser le créancier saisissant et d'apporter, en
cas de contestation, la preuve de ses allégations.
Relevons tout de même qu'il ne suffit pas d'être
créancier pour pouvoir pratiquer une saisie-exécution de
navire ; il faut aussi avoir la capacité d'ester en justice. En
effet, la possibilité d'une intervention du tribunal ne doit jamais
être écartée, compte tenu des incidents qui peuvent
être soulevés. L'éventualité de l'intervention du
tribunal fait que, même si l'Acte uniforme ne l'a pas expressément
prévue, le créancier saisissant doit avoir la capacité
d'ester en justice. Par conséquent, ne peuvent pratiquer
elles-mêmes une saisie-exécution de navire, les personnes
frappées d'incapacité d'exercice, c'est-à-dire les
personnes auxquelles la loi a enlevé le droit de participer au commerce
juridique pour les protéger, soit contre leur inexpérience (les
mineurs), soit contre la défaillance de leurs facultés mentales
ou incorporelles (majeurs incapables).
Quoi qu'il en soit, les poursuites sont dirigées
contre une personne bien précise.
B- Les sujets passifs de la
saisie
Ce sont les défendeurs à la saisie que l'on
appelle encore les saisis.
Le défendeur à la procédure est, dans la
plupart des cas, le débiteur propriétaire du navire, mais il
arrive qu'elle soit dirigée contre une personne autre que le
débiteur.
L'hypothèse de la saisie dirigée contre le
débiteur ne soulève pas de difficulté particulière.
Le débiteur est celui qui est tenu personnellement ou solidairement de
la dette ; et à ce propos, il y a juste lieu de rappeler les
règles contenues dans les articles 249 et 250 de l'Acte uniforme. Le
premier prévoit que, lorsque le débiteur est dans une indivision,
les créanciers ne peuvent mettre en vente sa part avant le partage ou la
liquidation qu'ils peuvent cependant provoquer. Ce texte vise seulement les
créanciers personnels. On doit en déduire que les
créanciers dont le droit est antérieur à l'indivision et
ceux dont la créance résulte de la conservation et de la gestion
des biens indivis peuvent poursuivre la saisie des navires indivis. Le second
texte vise la vente des biens communs ; il prévoit qu'elle peut
être poursuivie contre les deux époux. Notons qu'en cas de
décès du débiteur, la poursuite sera dirigée
à l'encontre des héritiers au moins huit jours après
signification du titre exécutoire à ceux-ci conformément
à l'article 877 du code civil244(*). Il en serait logiquement de même si le
débiteur décède en cours de procédure ; dans
ce dernier cas, les formalités ne seront valablement continuées
qu'après notification préalable aux héritiers du titre
exécutoire.
L'autre hypothèse est celle de la saisie
dirigée contre une personne autre que le débiteur.
Premièrement la saisie peut être dirigée contre le tiers
acquéreur d'un navire hypothéqué ; en effet, en
raison du droit de suite attaché aux sûretés réelles
immobilières, la saisie-exécution de navire peut être
pratiquée contre l'acquéreur. On justifie cette règle par
le fait que le tiers acquéreur a commis une faute par imprudence ou
négligence en ne purgeant pas les hypothèques grevant le navire
acquis. L'Acte uniforme donne trois possibilités à
l'acquéreur obligé de supporter la procédure :
d'abord, il peut payer l'intégralité de la dette en capital,
intérêts et frais ; en désintéressant le
créancier poursuivant, il est subrogé dans ses droits ;
ensuite, il peut délaisser le navire hypothéqué ; le
délaissement se fait au tribunal du lieu de la situation du bien ;
lorsque l'acquéreur choisit de délaisser le navire, il lui en est
donné acte ; enfin, il peut subir la procédure ; dans
une telle hypothèse, il devrait pouvoir exercer un recours en garantie
contre son vendeur mais ce recours est souvent illusoire car celui-ci est, par
hypothèse, insolvable. Deuxièmement, la procédure de
saisie-exécution de navire peut aussi être dirigée contre
la caution réelle, c'est-à-dire la caution qui garantit par son
engagement en consentant une sûreté réelle sur son
navire245(*). La caution
réelle est comme le tiers détenteur, tenu propter
rem ; mais elle est engagée de manière plus rigoureuse
que celui-ci, car elle est partie à l'acte constitutif
d'hypothèque, c'est pourquoi on considère
généralement qu'elle ne peut purger l'hypothèque.
L'examen des conditions relatives à la
saisie-exécution non précédée de
saisie-conservatoire des navires permet de constater que les formalités
prescrites par l'Acte uniforme sont telles que l'exercice de cette voie
d'exécution que constitue la saisie immobilière-saisie
exécution des navires apparaît comme un parcours difficile ;
cette situation est toute aussi remarquable lorsqu'il s'agit de parler de
l'adaptation des règles de procédure de saisie immobilière
à celle de la saisie-exécution des navires.
SECTION II :
L'ADAPTATION QUANT À LA PROCÉDURE DE SAISIE
Tout comme en matière de saisie conservatoire des
navires, la saisie-exécution des navires peut se dérouler
normalement (Paragraphe 1), de même qu'elle pourrait être
émaillée d'incidents qui remettraient en cause sa
légitimité (Paragraphe 2) ; toujours est-il que les deux
procédures sont dominées par les règles en vigueur en
matière de saisie immobilière de droit commun.
Paragraphe 1 : La
procédure normale de saisie
La procédure normale de saisie-exécution des
navires comporte des étapes préalables (A) qui pourraient aboutir
à l'adjudication du navire (B).
A- Les étapes
préalables à l'adjudication du navire
Pour préparer l'adjudication du navire, l'Acte
uniforme exige l'établissement d'un commandement valant saisie (1), la
rédaction d'un cahier de charges (2) qui pourrait éventuellement
donner lieu à contestations et susciter une audience (3) ;
après ces étapes, une publicité en vue de la vente
s'avère nécessaire pour porter les enchères au meilleur
prix (4).
1- L'établissement
du commandement valant saisie
Dans sa première phase, la procédure se
déroule pratiquement en dehors du tribunal, le commandement est
l'élément fondamental et tout est lié dans cette phase
à cet acte dont le régime est fixé par les articles 254 et
suivants de l'Acte uniforme. Ces textes indiquent les modalités de
rédaction, de signification et de publication du commandement.
D'abord, en ce qui concerne les modalités de
rédaction, le mot commandement renvoie à l'idée d'exploit
d'huissier. On peut donc être tenté de penser que le commandement
est nécessairement établi par huissier. Ce n'est pourtant pas le
cas ; en effet, l'Acte uniforme a supprimé le monopole des
huissiers en la matière en permettant aussi aux agents
d'exécution de l'établir. Le pouvoir d'établir le
commandement est donc partagé entre les huissiers et les agents
d'exécution. Cette option se justifie certainement par la volonté
de tenir compte de la situation de certains pays où la profession
d'huissier n'est pas bien organisée.
Si le commandement peut être établi par un
huissier, il prend la forme d'un exploit et, en tant que tel, il doit comporter
toutes les mentions requises pour la validité des exploits. Il doit en
outre contenir les mentions propres prévues par l'article 254 de
l'AUPSRVE. Selon ce texte, le commandement doit contenir un certain nombre
d'indications dont l'absence peut entraîner une sanction grave : la
nullité.
En ce qui concerne les mentions exigées, il y a
premièrement la reproduction ou la copie du titre exécutoire et
le montant de la dette ainsi que les noms, prénoms et adresses des
personnes impliquées246(*). Deuxièmement, la copie du pouvoir
spécial de saisie donnée à l'huissier ; la saisie des
navires est un acte aux conséquences graves, il ne faut donc pas que
l'huissier la déclenche de sa propre initiative. Troisièmement,
l'avertissement que faute de payer dans les 20 jours, le commandement pourra
être transmis au registre des hypothèques maritimes et vaudra
saisie à compter de sa publication247(*). Quatrièmement, l'indication de la
juridiction où l'expropriation sera poursuivie ; c'est l'article
248 de l'AUPSRVE qui fixe les règles de compétence en la
matière248(*) ; ce texte, en parlant de plénitude de
juridiction, pense probablement aux tribunaux de droit commun, ce qui serait
dans le contexte camerounais le Tribunal de Grande Instance.
Cinquièmement, le numéro d'immatriculation du navire.
Sixièmement et enfin, la constitution d'avocat ; le
créancier poursuivant doit élire domicile chez l'avocat
constitué et c'est là que devront lui être notifiés
les actes d'opposition au commandement, offres réelles et toutes
significations relatives à la saisie.
Les énonciations figurant dans l'article 254 sont
exigées à peine de nullité du commandement. Cette
nullité ne s'attache pas automatiquement à l'absence d'une
mention ; il est nécessaire que celui qui se prévaut de
l'irrégularité apporte la preuve d'un grief conformément
à l'article 297 alinéa 2 de l'AUPSRVE249(*).
Ensuite, pour ce qui est de la signification du commandement
au débiteur, l'article 254 de l'AUPSRVE prévoit que le
commandement est signifié au débiteur sans autre
précision. Le CCMM comble cette lacune en matière de
saisie-exécution des navires. Ce texte dispose en effet en son
article 129: « Le saisissant doit, dans un délai de trois
jours, notifier au propriétaire copie du procès-verbal de saisie
et le faire citer devant le tribunal du lieu de la saisie, pour s'entendre dire
qu'il sera procédé à la vente du navire saisi. Si le
propriétaire n'est pas domicilié dans le ressort du tribunal, les
signification et citations lui sont données en la personne du capitaine
du bâtiment saisi, ou, en son absence, en la personne de celui qui
représente le propriétaire ou le capitaine. Le délai de
trois jours est augmenté de trente jours si le destinataire demeure hors
du territoire de la C.E.M.A.C. S'il est étranger, hors du territoire
C.E.M.A.C. et non représenté, les citations et significations
sont données selon les voies de droit commun ».
Enfin, il s'agit de la publication du commandement. Pour ce
faire, il convient d'examiner successivement les modalités de la
publication du commandement et ses suites.
Premièrement, s'agissant des modalités de
publication, en application de l'article 259 alinéa 1 de l'AUPSRVE, on
dira que c'est l'huissier qui fait viser l'original du commandement par le
conservateur des hypothèques ; l'article 130 du CCMM prenant en
considération le particularisme de la saisie des navires et la
célérité que requiert le domaine maritime, dispose que le
commandement, tenant lieu de procès verbal, est inscrit sur le registre
des hypothèques maritimes tenu par l'autorité administrative
compétente ; cette inscription est requise dans le délai de
sept jours à compter de la date de signification du
procès-verbal, augmentés de vingt jours si le lieu de la saisie
et le lieu où le registre est tenu, ne sont pas situés dans le
même port.; passé ce délai, le créancier ne peut
plus publier le commandement ; il ne peut reprendre les poursuites qu'en
les réitérant.
Deuxièmement, en ce qui concerne les suites de la
publication, à partir de l'inscription, la suite de la procédure
va dépendre de l'attitude du débiteur : le paiement va
mettre un terme à la procédure, alors que le défaut de
paiement marque le point de départ d'une nouvelle étape. Si le
débiteur paie dans les vingt jours, l'inscription du commandement est
radiée par le conservateur ou l'autorité administrative sur
mainlevée donnée par le créancier. Il est possible que la
radiation ne soit pas opérée malgré le paiement ;
dans une telle hypothèse, le débiteur ou tout
intéressé pourra provoquer la radiation en saisissant la
juridiction compétente en matière d'urgence250(*). Si le débiteur ne
paie pas, le commandement vaudra saisie à compter de son inscription.
À partir de ce moment, les prérogatives qui s'attachent au droit
de propriété vont être restreintes. Des effets importants
s'attachent à cette situation. On peut les regrouper autour de trois
idées : d'abord, l'interdiction des actes de disposition ;
à compter de son inscription, le débiteur, bien qu'étant
toujours propriétaire de son navire, ne peut plus l'aliéner ou le
grever de droit réel ou charge. Que se passera-t-il si le
débiteur accomplit des actes de disposition en violation de cette
règle ? L'Acte uniforme ne prévoit pas expressément
de sanction. On peut cependant déduire celle-ci de la rédaction
de l'article 262 alinéa 4. Ce texte commence par poser le principe de
l'interdiction des aliénations et constitutions de droit réels
ainsi que l'obligation pour le conservateur de refuser toute nouvelle
inscription. Il prévoit ensuite une exception au principe en
considérant comme valables les aliénations et constitutions de
droits réels dans l'hypothèse où l'acquéreur ou le
créancier (bénéficiaire de l'acte) consigne une somme
suffisante pour acquitter en principal, intérêts et frais ce qui
est dû aux créanciers inscrits et au saisissant. Cela veut dire
a contrario, qu'à défaut de consignation, les actes
d'aliénation et les constitutions de droits réels ne sont pas
valables. La nullité des actes de disposition s'explique
aisément : les tiers ont été informés ou
devaient être informés de la saisie pratiquée ; il n'y
a donc aucune raison de leur accorder une protection spéciale. Ensuite,
la limitation au droit d'administration et de jouissance. Certes, le
débiteur reste jusqu'à l'adjudication, en possession du navire si
celui-ci n'est pas affrété, mais c'est en qualité de
séquestre judiciaire ; cela signifie qu'il devra gérer le
navire en bon père de famille, qu'il sera comptable des fruits et qu'il
devra rendre compte de sa gestion. L'article 263 alinéa 2 in
fine prévoit sur ce point qu'il peut en être
décidé autrement, à la demande du ou des
créanciers, par le président de la juridiction compétente.
Enfin, l'immobilisation des fruits ; à compter du commandement, les
fruits sont immobilisés pour être distribués avec le prix
du navire et il n'y a pas lieu de distinguer selon qu'il s'agit de fruits
industriels ou civils. Les fruits recueillis sont déposés
à la caisse des dépôts et consignations ou entre les mains
d'un séquestre désigné par le président de la
juridiction compétente.
Il convient toutefois de noter que lorsque la saisie porte
sur un navire détenu par un tiers, il faut accomplir une
formalité supplémentaire : c'est la signification avec
sommation à tiers détenteur. Sur ce point, l'Acte uniforme
lève toute incertitude en indiquant clairement qu'à peine de
nullité, le commandement est signifié au tiers détenteur
avec sommation, soit de payer l'intégralité de la dette en
principal et intérêts, soit de délaisser le navire
hypothéqué, soit enfin de subir l'expropriation. Le
caractère obligatoire de la sommation préalable est pleinement
justifié : le tiers détenteur n'est pas le
débiteur ; il est seulement tenu en raison de la détention
du navire; il faut dès lors lui permettre d'exercer l'option que la loi
lui reconnaît avant de procéder à la réalisation du
navire. Ce qui donne lieu forcément à l'établissement d'un
cahier des charges.
2- L'établissement
du cahier de charges
Le cahier des charges est rédigé par l'avocat
poursuivant. L'Acte uniforme indique les mentions qui doivent figurer dans le
cahier des charges à peine de nullité. L'article 267, fixant le
contenu du cahier des charges, vise neuf mentions251(*). Le cahier des charges
auquel est annexé l'état des droits réels doit être
déposé dans les conditions prévues par l'article
266252(*). Le
dépôt donne lieu à l'établissement d'un acte
appelé acte de dépôt qui indique la date de la vente ;
celle-ci doit se situer entre le quarante-cinquième jour et le
quatre-vingt-dixième jour après le dépôt.
Jusqu'au dépôt du cahier des charges, la
procédure est conduite unilatéralement par le poursuivant.
Pourtant, d'autres personnes peuvent être
intéressées ; c'est pourquoi, les rédacteurs de
l'Acte uniforme font obligation au poursuivant de faire sommation aux personnes
qui peuvent être intéressées de prendre communication du
cahier des charges et d'y insérer leurs dires.
L'article 267 de l'AUPSRVE vise deux catégories de
personnes sommées de prendre communication du cahier des charges :
le saisi et les créanciers inscrits. Il s'en suit que ni les
créanciers chirographaires ni les créanciers hypothécaires
non inscrits n'ont à recevoir la sommation. L'obligation de signifier la
sommation au saisi s'explique aisément : c'est son navire qui doit
être vendu ; il est normal qu'il soit invité à prendre
connaissance du cahier des charges pour connaître les conditions de la
vente. La signification au saisi se fait à personne ou à
domicile. L'obligation de signifier la sommation aux créanciers inscrits
se justifie tout autant : en effet, compte tenu de l'effet de purge qui
s'attache à l'adjudication, il est normal qu'ils soient invités
à prendre connaissance du cahier des charges pour y insérer leurs
dires et observations ; la signification est faite pour ces
créanciers, à domicile élu. Il convient de préciser
qu'en parlant de créanciers inscrits, les rédacteurs de l'Acte
uniforme visent non seulement les créanciers qui ont obtenu une
hypothèque pour garantie d'un prêt, et qu'ils l'ont faite
inscrire, mais aussi le vendeur, le copartageant et l'échangiste.
Le contenu de la sommation de prendre communication du cahier
des charges est fixé par l'article 270 de l'AUPSRVE. Cette sommation
doit indiquer à peine de nullité : premièrement, les
jour et heure de l'audience éventuelle ; deuxièmement, les
jour et heure prévus pour l'audience d'adjudication ;
troisièmement et enfin, l'avertissement que les dires et observations
seront reçus, à peine de déchéance, jusqu'au
cinquième jour précédent l'audience éventuelle et
qu'à défaut de former et de faire mentionner à la suite du
cahier des charges, dans ce même délai, la demande en
résolution d'une vente antérieure ou la poursuite de folle
enchère d'une réalisation forcée antérieure, il y
aura déchéance du droit d'exercer ces actions.
Le délai pour faire la sommation est de huit jours, et
il a pour point de départ le jour du dépôt du cahier des
charges. Ce délai est prescrit à peine de
déchéance253(*).
La sommation est non seulement destinée à
informer les personnes intéressées mais aussi à provoquer
leurs dires et observations. Ces dires et observations doivent être
déposés, à peine de déchéance, au plus tard
le cinquième jour précédent l'audience
éventuelle ; c'est au cours de cette audience que ces dires seront
jugés.
3- L'audience
éventuelle
Cette audience éventuelle ne peut avoir lieu moins de
trente jours après la dernière sommation. Ce délai de
trente jours est fixé pour permettre aux créanciers inscrits et
au saisi de disposer du temps nécessaire pour préparer leurs
argumentations. Il faut rappeler que la sommation doit indiquer la date retenue
pour la tenue de cette audience. Cette date ne peut en principe être
modifiée. Toutefois, il peut y avoir remise de l'audience
éventuelle dans deux cas : premièrement, s'il y a des causes
graves et dûment justifiées ; deuxièmement, si la
juridiction saisie exerce d'office son contrôle sur le cahier des charges
dans les conditions prévues par la loi254(*).
Lors de l'audience éventuelle, les principes
directeurs du procès doivent être respectés. L'un des
principes consacrés est le principe dispositif. C'est ce qui explique
que le tribunal ne puisse se prononcer que sur les questions soulevées
dans les dires et observations. Il peut cependant prendre d'office certaines
mesures : il peut tout d'abord ordonner d'office la distraction de
certains biens, lorsque la valeur apparaît disproportionnée par
rapport au montant des créances à recouvrer ; il peut aussi
modifier d'office, le montant de la mise à prix si celle-ci est
fixée en violation des dispositions de l'article 267 sur la mise
à prix fixée par le poursuivant. En plus du principe du
dispositif, le juge doit veiller au respect du principe du contradictoire.
Ainsi, les dires et observations sont jugés après échange
de conclusions motivées255(*). Le juge doit lui-même respecter ce
principe ; c'est pourquoi le tribunal doit, lorsqu'il est amené
à modifier le cahier des charges, inviter les parties à
présenter leurs observations dans un délai de cinq
jours256(*).
La décision judiciaire rendue à l'occasion de
l'audience éventuelle est transcrite par les soins du greffier sur le
cahier des charges ; elle est levée et signifiée à la
demande de la partie la plus diligente.
Pour que le concours de nombreux acheteurs porte les
enchères au meilleur prix, il est de l'intérêt du
poursuivant de donner à la réalisation du navire la plus large
publicité possible.
4- La publicité en
vue de la vente
Il faut informer ceux qui pourraient être
intéressés par l'adjudication de telle sorte que, la concurrence
aidant, la vente puisse se faire au meilleur prix. L'article 276
détermine soigneusement les modalités et les délais de
cette publicité.
En ce qui concerne les modalités, selon l'article 276,
un extrait du cahier des charges doit être publié sous la
signature de l'avocat poursuivant, par insertion dans un journal d'annonces
légales et par apposition de placards. L'extrait doit à peine de
nullité, contenir les indications prévues par l'article
277257(*). Ceci dit, les
placards sont apposés à la porte du domicile du saisi, de la
juridiction compétente ou de l'étude du notaire convenu ainsi que
dans les lieux officiels d'affichage. Prenant en compte la particularité
du navire, l'apposition devrait aussi se faire sur la partie apparente du
navire saisi, sur le quai du port où le navire est amarré,
à la chambre de commerce, au bureau de la douane et au siège de
la circonscription maritime du lieu de la saisie. La publicité
prévue par l'article 276 de l'AUPSRVE peut être augmentée
ou restreinte par ordonnance (sur requête) du président du
tribunal. Celui-ci rend son ordonnance en tenant compte de la nature et de la
valeur du navire saisi.
Pour ce qui est des délais, la publicité ne
doit avoir lieu ni trop tôt258(*) ni trop tard259(*). C'est ce qui explique les délais
fixés par l'article 276. Ce texte prévoit que la publicité
doit avoir lieu trente jours au plus tôt et quinze jours au plus tard
avant l'adjudication260(*).
B- L'adjudication du
navire
C'est le dénouement normal de la procédure de
saisie des navires. Elle a lieu à la barre du tribunal ou en
l'étude du notaire convenu. L'AUPSRVE ne donne aucune indication sur la
convention désignant le notaire. Il règle en revanche trois
problèmes : le moment (1), le déroulement (2) et les effets
(3) de l'adjudication.
1- Le moment de
l'adjudication
La date d'adjudication qui figure dans les sommations doit se
situer entre le trentième et le soixantième jour après
l'audience éventuelle. Il peut arriver cependant que la date
fixée ne soit pas celle où l'adjudication aura effectivement
lieu. Il en est ainsi dans trois cas : le premier est visé par
l'article 271 alinéa 1er de l'AUPSRVE. Il résulte de
ce texte que s'il a été régulièrement introduit une
demande en résolution d'une vente antérieure ou une poursuite sur
folle enchère d'une réalisation forcée antérieure,
il est sursis aux poursuites. Ce sursis s'explique par le fait que de la
décision rendue à propos de ces demandes, dépend la
validité de l'adjudication. Le second est visé par l'article 274
de l'AUPSRVE. Pour comprendre la situation envisagée par ces textes, il
faut partir de l'idée que les dires et observations peuvent rendre
nécessairement la tenue d'une audience éventuelle. Si le tribunal
est dans l'impossibilité de statuer immédiatement, il ne sera pas
possible de tenir l'audience d'adjudication à la date prévue.
C'est pourquoi l'article 274 alinéa 2 de l'AUPSRVE prévoit que la
juridiction compétente fixe une nouvelle date si celle qui était
antérieurement fixée ne peut être maintenue. Le
troisième cas est fixé par l'article 281 de l'AUPSRVE. Ce texte
prévoit que l'adjudication peut être remise pour causes graves et
légitimes. La remise prévue par ce texte doit être
demandée par requête au moins cinq jours avant la date
fixée pour la vente. Elle fait l'objet d'une décision
motivée qui doit fixer le jour du déroulement de l'adjudication
qui ne peut être éloigné de plus de soixante jours.
2- Le déroulement de
l'adjudication
Le déroulement de l'adjudication comporte trois
étapes : la réquisition, les enchères et la
décision.
Pour ce qui est premièrement de la réquisition,
le tribunal ne peut procéder à l'adjudication sans en être
requis par le poursuivant ; c'est le sens de l'article 280 de l'AUPSRVE
selon lequel « au jour indiqué pour l'adjudication,
il est procédé à la vente sur réquisition,
même verbale, de l'avocat du poursuivant ». Toutefois,
à défaut pour le poursuivant de requérir l'adjudication,
il peut y être procédé sur demande de l'un des
créanciers inscrits.
En ce qui concerne deuxièmement les enchères,
elles sont définies par l'article 282 alinéa 2 comme des offres
successives et de plus en plus élevées présentées
par des personnes qui désirent acquérir le navire. En principe,
tout intéressé peut enchérir mais il y a cependant des
limites. En effet, ne peuvent enchérir ceux qui sont frappés
d'incapacité de droit commun ; par conséquent, une personne
incapable soumise à un régime de représentation ne peut
enchérir dans une adjudication sur saisie des navires que par
l'intermédiaire de son représentant légal ; un majeur
en curatelle doit se faire représenter. Ne peuvent non plus
enchérir, les personnes visées par l'article 284 de l'AUPSRVE. Ce
texte parle des membres du tribunal ou de l'étude du notaire, de
l'avocat poursuivant qui ne peut enchérir pour lui-même, du saisi
et des personnes notoirement insolvables261(*). La transgression de ces règles portant
incapacité d'enchérir est sanctionnée par la
nullité de l'enchère. L'article 284 qui édicte cette
sanction ne se prononce pas, toutefois, sur le caractère de cette
nullité. On pourrait penser que s'il s'agit d'incapacité de droit
commun, la nullité sera relative et que dans les autres cas, la
nullité sera absolue. La nullité n'est cependant pas la seule
sanction encourue ; l'article 284 prévoit, par ailleurs, que
l'avocat qui a présenté une enchère pour une personne
frappée d'incapacité spéciale peut être
condamné au paiement des dommages et intérêts.
Avant l'entrée en vigueur de l'Acte uniforme, ceux qui
voulaient enchérir devaient s'attacher les services d'un avocat, car les
enchères étaient nécessairement portées par
ministère d'avocat. On justifiait l'assistance obligatoire de l'avocat
en soutenant qu'elle limitait les risques d'incidents entre
enchérisseurs et qu'elle garantissait le sérieux des
enchères. Aujourd'hui, l'article 282 alinéa 3262(*) de l'AUPSRVE donne aussi aux
enchérisseurs le droit de porter eux-mêmes leurs
enchères.
L'article 283, consacré au déroulement de la
procédure d'adjudication, prévoit qu'avant l'ouverture des
enchères, il est préparé des bougies de manière que
chacune d'elles ait une durée d'une minute. Aussitôt les
enchères ouvertes, il est allumé une bougie et le montant de la
mise à prix est annoncé. Deux cas de figures peuvent alors se
présenter : il se peut tout d'abord qu'il n'y ait pas
d'enchère après l'extinction de trois bougies ; dans ce cas,
le poursuivant est déclaré adjudicataire à moins qu'il ne
demande la remise de l'adjudication à une autre audience pour une
nouvelle mise à prix. En cas de remise263(*), si aucune enchère n'est portée, lors
de la nouvelle adjudication, le poursuivant est déclaré
adjudicataire pour la première mise à prix264(*) ; il se peut ensuite
que plusieurs enchères soient portées, dans ce cas, les
règles suivantes sont applicables : si, avant l'extinction d'une
bougie, il survient une enchère, celle-ci ne devient définitive
et n'entraîne l'adjudication que s'il n'en survient pas une nouvelle
avant l'extinction de deux bougies. Toute enchère portée pendant
cette période couvre automatiquement l'enchère
précédente et libère l'enchérisseur
précédent, même si la nouvelle enchère est nulle.
Lorsque la dernière enchère est portée par
ministère d'avocat, l'avocat dernier enchérisseur a trois jours
pour faire connaître le nom de l'adjudicataire et fournir son acceptation
ou représenter son pouvoir265(*). À défaut, il est réputé
adjudicataire en son nom266(*).
Troisièmement et enfin, les biens sont adjugés
à celui qui a porté l'enchère la plus élevée
par décision judiciaire267(*) ou procès-verbal du notaire porté en
minute à la suite du cahier des charges. Selon l'article 293 de
l'AUPSRVE, la décision judiciaire ou le procès-verbal
d'adjudication ne peut faire l'objet d'aucune voie de recours. Cette
décision peut cependant être attaquée par la voie d'action
principale en nullité portée devant la juridiction
compétente268(*) ; cela résulte de l'article 313 de
l'AUPSRVE. Même si ce texte ne parle que d'action principale en
nullité, rien ne devrait s'opposer à ce que la demande en
nullité soit présentée sous forme d'exception au cours
d'un procès contentieux où la décision d'adjudication est
invoquée.
Une fois le déroulement de l'adjudication
achevé, l'on assiste à une véritable modification des
droits et obligations du principal protagoniste à l'adjudication
à savoir l'adjudicataire, ce qui est nettement perceptible dans les
effets de l'adjudication.
3- Les effets de
l'adjudication
L'adjudication donne des droits à l'adjudicataire et
fait naître des obligations à sa charge.
En ce qui concerne les droits de l'adjudicataire, ce dernier
acquiert la propriété du débiteur saisi mais seulement
cela. C'est ce qui résulte de l'article 296 aux termes duquel,
l'adjudication même publiée au bureau de la conservation des
hypothèques maritimes, ne transmet à l'adjudicataire d'autres
droits réels que ceux appartenant au saisi. Il s'en suit que si le saisi
n'était pas propriétaire, l'adjudicataire n'acquiert pas la
propriété du navire. Dans le même ordre d'idées, si
la propriété du saisi était menacée par une action
en annulation, en résolution ou en révocation, celle de
l'adjudicataire serait menacée de la même manière. Il y a
cependant une dérogation à ce principe. Elle apparaît
lorsque le navire était grevé d'hypothèque ou de
privilège. En effet, lorsque l'expédition est
déposée à la conservation, le conservateur procède
à la radiation de tous les privilèges et hypothèques
inscrits qui se trouvent purgés par la vente. Les créanciers
n'auront alors plus d'action que sur le prix.
Pour ce qui est des obligations de l'adjudicataire, il est
tenu de toutes les obligations stipulées dans le cahier des
charges269(*) et
spécialement l'obligation de payer le prix. L'inexécution de ces
obligations entraîne un certain nombre de conséquences : tout
d'abord les créanciers colloqués pourront recourir aux voies
d'exécution. Ensuite, le greffier ou le notaire pourra refuser de
délivrer l'expédition de la décision ou du
procès-verbal270(*). Cela résulte de l'article 290 alinéa
2 de l'AUPSRVE selon lequel le greffier ou le notaire délivre
l'expédition après paiement du prix d'adjudication et des frais
de poursuite et après l'accomplissement des obligations du cahier des
charges. Cela veut dire que la délivrance ne pourra intervenir avant
l'exécution de telles obligations. Enfin, la revente sur folle
enchère pourra être poursuivie. En effet, l'article 290, dernier
alinéa de l'AUPSRVE indique clairement que le défaut de
production dans les vingt jours de l'adjudication, de la quittance de paiement
et des pièces justificatives, peut entraîner des poursuites pour
folle enchère.
Si l'adjudicataire exécute ses obligations, il peut
s'attendre légitimement à un transfert de propriété
à son profit. Toutefois, ce transfert ne s'opère pas toujours, il
peut être remis en cause par un incident survenu en cours de
procédure.
Paragraphe 2 : Les
incidents de la saisie des navires
En adaptation des règles de la saisie
immobilière, il existe deux types de règles ayant vocation
à régir les incidents de la saisie-exécution des
navires : les règles propres à chaque incident (A) et les
règles communes à tous les incidents (B).
A- Les règles
propres à chaque type d'incident
L'AUPSRVE envisage quatre types d'incidents : les
incidents nés de la pluralité des saisies (1), les demandes en
distraction (2), les demandes en annulation (3) et la folle enchère
(4) ; on devrait leur embrasser un cinquième prévu par
l'AUPCAP : l'ouverture d'une procédure collective (5).
1- Les incidents nés
de la pluralité des saisies : les oppositions
Lorsque plusieurs créanciers poursuivent le même
débiteur, il y a, le plus souvent jonction, les poursuites étant
menées pour le compte de tous par le premier saisissant. Mais il y a des
hypothèses où un autre créancier demande à
être subrogé dans les poursuites.
En ce qui concerne premièrement la jonction des
poursuites, il faut observer tout d'abord que lorsqu'un créancier entend
saisie-exécuter un navire ayant déjà fait l'objet d'une
saisie, il ne peut mener une poursuite indépendante de la
première. C'est une application de la règle
« saisie sur saisie ne vaut »271(*). Il résulte de la
combinaison des alinéas 2 et 3 de l'article 260 que le conservateur,
dans une telle hypothèse, ne peut publier le second commandement. Il se
borne à le mentionner en marge de la première
transcription ; il doit également constater, en marge et à
la suite de ce second commandement, son refus de transcription ; ce
système permet à tous les créanciers de se
connaître ; la procédure est poursuivie par le saisissant,
mais la radiation ne peut être opérée sans le consentement
des créanciers postérieurs révélés272(*). Il faut dire que cette
situation ne constitue pas véritablement un incident ; en effet,
non seulement, elle n'implique pas l'intervention d'un tribunal, mais en plus,
elle n'est pas traitée dans les dispositions consacrées aux
incidents. En matière de pluralité de saisies, l'Acte uniforme
n'envisage que deux situations consécutives d'incidents : la
première correspond à celle où deux ou plusieurs
créanciers ont fait publier des commandements relatifs à des
navires différents appartenant au même débiteur et dont la
saisie est poursuivie devant la même juridiction273(*) ; dans une telle
hypothèse, les poursuites sont réunies à la requête
de la partie la plus diligente274(*) et continuées par le premier
saisissant275(*). La
seconde situation correspond à celle où le second commandement
englobe, outre le navire de la première saisie, d'autres navires. Dans
ce cas, le deuxième saisissant est tenu de dénoncer son
commandement276(*) au
premier saisissant, et alors, de deux choses l'une : soit les deux
procédures sont au même état, alors le premier saisissant
poursuit les deux saisies ; soit elles ne sont pas au même
état ; dans ce cas, le premier saisissant sursoit à sa
saisie et poursuit la deuxième afin de la mettre au même
niveau ; les deux saisies seront alors réunies devant la
juridiction de la première saisie.
Deuxièmement et enfin, en ce qui concerne la
subrogation dans les poursuites, l'AUPSRVE a voulu que le premier saisissant
assure la direction des opérations en cas de pluralité de
saisies ; certes, les autres créanciers participent aux
opérations, mais leur rôle est négligeable. Cependant, il
faut leur permettre d'intervenir de manière plus active lorsque celui
qui conduit les opérations n'assume pas sa mission ou cesse de conduire
la procédure dans l'intérêt de tous. Aussi, l'Acte uniforme
a-t-il prévu la possibilité pour ces créanciers de se
substituer au premier saisissant : c'est ce que l'on appelle la
subrogation dans les poursuites. Deux cas de subrogation sont
réglementés par l'Acte uniforme : le premier cas est
prévu par l'article 304 qui envisage l'hypothèse où le
premier saisissant à qui une seconde saisie a été
dénoncée s'abstient de diriger les poursuites ; dans ce cas,
le second saisissant peut, par un acte écrit adressé au
conservateur, demander la subrogation. Le second cas de subrogation est
prévu par l'article 305 ; ce texte autorise la demande en
subrogation s'il y a collusion, fraude, négligence ou toute autre forme
de retard imputable au saisissant. En cas de subrogation, la poursuite est
reprise par le subrogé qui la continue à partir du dernier acte
utile ; il ne la recommence pas.
2- Les demandes en
distraction
La distraction en l'espèce est l'incident de la saisie
des navires par lequel un tiers qui se prétend propriétaire du
navire cherche à le soustraire de la saisie.
L'incident ne peut être provoqué que par un
tiers. La demande en distraction fait partie des incidents qui peuvent
être présentés après l'audience éventuelle,
mais seulement jusqu'au huitième jour avant l'adjudication. La demande
en distraction suspend les poursuites si elle porte sur la totalité des
biens. En revanche, si elle porte sur une partie des biens saisis, il pourra
être procédé à l'adjudication du surplus, mais le
tribunal peut, à la demande des parties intéressées,
ordonner le sursis pour le tout. En cas de distraction partielle, le
poursuivant est admis à changer la mise à prix portée au
cahier des charges.
Outre le cas de distraction, la procédure de
saisie-exécution des navires pourrait être phagocytée par
des demandes en annulation favorables.
3- Les demandes en
annulation
Elles devraient constituer tout comme en matière de
saisie immobilière, les incidents les plus fréquents de la saisie
des navires, car les conditions de fond et de forme sont très
nombreuses.
Il existe deux cas de nullité ; d'une part, les
nullités pour vice de fond ; d'autre part, les nullités pour
vice de forme qui sanctionnent les actes irrégulièrement
accomplis.
Il faut combiner les articles 299 et 311 alinéa
1er de l'AUPSRVE pour avoir une idée du délai dans
lequel les moyens de nullité doivent être soulevés.
Lorsqu'il s'agit d'une demande dirigée contre la
procédure qui précède l'audience éventuelle, il
faut un dire annexé au cahier des charges cinq jours au plus tard avant
la date fixée pour cette audience ; il n'en serait autrement que si
la cause de nullité était découverte
postérieurement à cette audience.
Lorsqu'il s'agit d'une demande dirigée contre la
procédure suivie à l'audience éventuelle, elle peut
être présentée après l'audience éventuelle,
mais seulement jusqu'au huitième jour avant l'adjudication.
Un cas particulier est visé par l'article 313 de
l'AUPSRVE, mais on peut se demander s'il s'agit réellement d'un
incident, car il concerne une demande introduite après
l'adjudication : c'est la demande en nullité de la décision
judiciaire ou du procès-verbal notarié d'adjudication. Une telle
demande peut être faite par voie d'action principale en nullité
portée devant la juridiction compétente dans le ressort de
laquelle l'adjudication a été faite. Cette demande doit
être présentée dans le délai de quinze jours
à compter de l'adjudication.
Les effets de la nullité de la procédure suivie
sont déterminés par l'article 311 alinéa 1er de
l'AUPSRVE. Selon ce texte, si les moyens de nullité sont admis, la
procédure peut être reprise à partir du dernier acte
valable et les délais pour accomplir les actes suivants courent à
la date de la signification de la décision judiciaire qui a
prononcé la nullité.
C'est l'article 313 de l'AUPSRVE qui est consacré
à la nullité de la décision d'adjudication ; selon ce
texte, le jugement d'annulation a pour effet d'invalider la procédure
à partir de l'audience éventuelle ou postérieurement
à celle-ci selon les causes de l'annulation277(*).
Il convient de signaler que la nullité n'est pas
nécessairement prononcée à la suite de la contestation
d'une irrégularité. Dans certains cas,
l'irrégularité n'est sanctionnée par la nullité que
si celui qui s'en prévaut justifie d'un grief. L'Acte uniforme n'a pas,
il est vrai, consacré de manière générale, la
règle « pas de nullité sans grief »,
mais il énumère dans l'article 299 de l'AUPSRVE un certain nombre
de formalités qui ne sont sanctionnées par la nullité que
si l'irrégularité a eu pour effet de causer un préjudice
aux intérêts de celui qui l'invoque. La liste dressée par
l'article 299 de l'AUPSRVE est limitative dans la mesure où la
nullité n'est pas subordonnée à un grief lorsque la
formalité en cause n'est pas visée par le texte.
Si la demande en nullité n'est pas justifiée et
que l'adjudication a eu lieu, l'adjudicataire est astreint à certaines
formalités sous peine de revente du navire par la procédure de
folle enchère.
4- la folle
enchère
On peut d'emblée se demander si la folle
enchère est un incident de la saisie des navires car, étant
dirigée contre l'adjudicataire, cette procédure intervient
après l'adjudication et l'expropriation forcée du navire. Il
s'agit donc plus d'une suite de la saisie des navires que d'un incident. Il
faut cependant nuancer une telle analyse, car il ne faut pas perdre de vue que
la saisie n'est vraiment terminée qu'au moment où les
créanciers peuvent exercer effectivement leur droit de
préférence sur un prix d'adjudication payé par un
acquéreur solvable.
Ceci étant, l'article 314 de l'AUPSRVE définit
la folle enchère comme la procédure ayant pour objet de mettre
à néant l'adjudication en raison des manquements de
l'adjudicataire à ses obligations et de provoquer une nouvelle vente aux
enchères du navire. Il y aurait donc folle enchère lorsque
l'adjudicataire n'est pas en mesure de tenir ses engagements,
généralement parce qu'il a porté les enchères
à un prix très supérieur à ses ressources. La
poursuite de la folle enchère conduira à la résolution de
l'adjudication avec remise en vente du navire.
La folle enchère est donc ouverte dans deux cas :
premièrement lorsque l'adjudicataire ne justifie pas dans les vingt
jours suivant l'adjudication qu'il a payé le prix, les frais, et
satisfait aux conditions du cahier des charges ; deuxièmement
lorsque l'adjudicataire ne fait pas publier la décision judiciaire ou le
procès-verbal notarié d'adjudication à la conservation des
hypothèques maritimes dans le délai de deux mois à compter
de la décision.
La folle enchère peut être intentée par le
saisi, le créancier poursuivant et les créanciers inscrits et
chirographaires. La procédure se déroule selon les règles
des articles 316 à 323 de l'AUPSRVE. Le fol enchérisseur est
responsable du non paiement de son prix d'adjudication. La folle enchère
n'aura un effet sur l'adjudicataire défaillant que si le navire a
été vendu à un prix plus bas que celui qu'il avait
proposé ; il devra donc payer la différence entre ces
prix.
Ces quatre cas sont prévus par l'AUPSRVE et sont
propres aux voies d'exécution. Cependant, à la lecture de
l'AUPCAP, l'on se rend compte qu'il pourrait avoir collision entre les
procédures collectives et les voies d'exécution, toutes deux
ouvertes à l'encontre d'une personne. Dans cette situation, l'AUPCAP
prévoit dans certains cas la suspension des poursuites individuelles,
donc des voies d'exécution, d'où la considération selon
laquelle l'ouverture d'une procédure collective pourrait constituer un
incident de saisie-exécution des navires.
5- l'ouverture d'une
procédure collective
Depuis l'avènement de l'OHADA, les procédures
collectives sont régies par un Acte uniforme appelé Acte uniforme
portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif.
Adopté le 10 avril 1998, cet Acte uniforme est entré en vigueur
le 1er janvier 1999.
Tout comme en matière de saisie de droit commun, la
survenance d'une procédure collective en cours de
saisie-exécution de navires devrait logiquement suspendre les poursuites
individuelles entreprises à l'occasion de cette voie d'exécution,
ceci en vertu des articles 9278(*)institué pour la procédure de
règlement préventif, et 75 de l'AUPCAP279(*) institué à
propos des procédures de redressement judiciaire et liquidation des
biens.
Le règlement préventif est une procédure
destinée à éviter la cessation des paiements ou la
cessation d'activités de l'entreprise et à permettre l'apurement
de son passif au moyen d'un concordat préventif. Pour ce faire, les
poursuites individuelles engagées contre les personnes soumises à
une telle procédure devraient être suspendues et les
créanciers devraient se soumettre à une discipline collective.
Dans le redressement judiciaire, l'objectif étant le
redressement de l'entreprise, tous les créanciers, chirographaires ou
titulaires de sûretés, subissent la suspension des poursuites
individuelles jusqu'à la résolution ou l'annulation du
concordat280(*).
Dans la liquidation des biens, comme son nom l'indique,
l'apurement du passif est obtenu à l'issue des opérations de
liquidation de l'actif mobilier et immobilier. Pour faciliter les
opérations de liquidation de l'actif mobilier et immobilier, le droit de
poursuite des créanciers gagistes, des créanciers nantis et
hypothécaires est suspendu jusqu'à l'expiration d'un délai
de trois mois suivant le jugement prononçant la liquidation des biens.
Passé ce délai, si le syndic n'a pas réalisé les
biens concernés, les créanciers peuvent reprendre l'exercice de
leur droit281(*).
Les dispositions propres à chaque incident, ayant une
portée limitée, celles communes à tous les incidents
seraient destinées à les compléter.
B- Les règles
communes à tous les incidents
Elles se rapportent à la compétence et à
la procédure d'une part, et aux voies de recours d'autre part.
Pour ce qui est de la compétence et de la
procédure, tout incident suppose une instance principale. On peut
considérer comme telle la procédure elle-même. Dans ces
conditions, le tribunal chargé de cette procédure est seul
compétent pour trancher les incidents de la saisie des navires ;
cette compétence du tribunal chargé de la procédure
d'expropriation exclut celle de toute autre juridiction. La procédure
est caractérisée par la simplicité et la rapidité.
La procédure est simple car la contestation ou la demande est
formée par simple acte d'avocat contenant les moyens et conclusions.
C'est seulement lorsqu'elle est dirigée contre une partie n'ayant pas
constitué d'avocat qu'elle est faite par « requête
avec assignation »282(*) ainsi que l'indique l'article 298 alinéa
1er de l'AUPSRVE. La procédure est rapide car l'affaire est
instruite et jugée d'urgence, mais aucun délai n'est
fixé283(*).
Le régime des voies de recours applicables aux
jugements rendus sur les incidents de la saisie des navires est fixé par
les articles 300 et 301 de l'AUPSRVE. L'article 300 exclut l'opposition qui ne
peut donc jamais être exercée contre un jugement ayant
statué sur un incident. En ce qui concerne l'appel, ce texte le soumet
à des règles très strictes. En effet, il n'admet l'appel
que lorsque la décision statue sur le principe même de la
créance ou sur des moyens de fond tirés de l'incapacité de
l'une des parties, de la propriété, de l'insaisissabilité
ou de l'inaliénabilité des biens saisis. L'appel doit donc
être déclaré irrecevable lorsque le jugement attaqué
a statué sur des incidents concernant la régularité
formelle de la procédure de saisie de navires. Dans les cas où
l'appel est recevable, l'intéressé doit respecter les
règles du droit commun ; c'est ce qui résulte de l'article
300 alinéa 4 de l'AUPSRVE selon lequel l'appel est exercé selon
les conditions du droit commun284(*). Quelques règles particulières
résultent de l'article 301. Ce texte fait obligation à l'appelant
de notifier l'acte d'appel à toutes les parties en cause à leur
domicile réel ou élu et au greffier de la juridiction
compétente. La juridiction d'appel, lorsqu'elle est
régulièrement saisie, doit statuer dans la quinzaine de
l'appel.
CONCLUSION DU CHAPITRE
II
La saisie-exécution des navires n'a point
été prévue par les textes internationaux, ceci est
dû à notre avis à la disette d'une telle saisie. Seul le
CCMM dans notre contexte en parle et en distingue deux types : la
saisie-exécution du navire précédé d'une saisie
conservatoire dudit navire, et la saisie-exécution du navire non
précédée d'une saisie conservatoire de ce navire. En ce
qui concerne le régime d'une telle saisie, ce texte renvoie pour la
plupart aux règles issues du droit commun de la saisie
immobilière telles que prévues par l'AUPSRVE. Ce renvoi concerne
aussi bien les conditions d'ouverture que la procédure de cette saisie
d'où l'adaptation au droit maritime qui a nécessité un
travail d'envergure.
CONCLUSION DE LA
DEUXIÈME PARTIE
À la fin de cette partie, l'on peut constater une
certaine dépendance du régime de la saisie des navires à
celui des saisies de droit commun tant en ce qui concerne la saisie
conservatoire des biens meubles corporels qu'en ce qui concerne la saisie
immobilière. Chacune de ces saisies voit certains éléments
de leur régime, empruntés, adaptés et appliqués
à la saisie des navires, soit par renvoi des textes particuliers sur la
saisie des navires, soit tout simplement par vide juridique de ces textes. Ceci
a donc contribué à appliquer d'une part certaines règles
de la saisie conservatoire des biens meubles corporels à la saisie
conservatoire des navires, et d'autre part les règles de la saisie
immobilière à la saisie-exécution des navires.
CONCLUSION
GÉNÉRALE
À la péroraison de cette étude
analytique entre la saisie des navires et la saisie de droit commun, il
apparaît tout d'abord que la saisie des navires n'est pas prévue
par le texte de droit commun applicable dans le contexte camerounais en
particulier et CEMAC en général à savoir l'Acte uniforme
portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement
des créances et des voies d'exécution mais plutôt en
Afrique centrale par le code CEMAC de la marine marchande, et sur le plan
international par la convention internationale de Bruxelles sur l'unification
de certaines règles sur la saisie conservatoire des navires de mer du 10
mai 1952, destinée à être remplacée par la
convention internationale de Genève sur la saisie conservatoire des
navires du 12 mars 1999. Le premier texte est applicable quand le navire
battant pavillon d'un État CEMAC est saisi par un créancier ayant
sa résidence ou son principal établissement dans un État
CEMAC, dans un port situé dans un État CEMAC, et pour autant
qu'il ne s'agisse pas d'un rapport de droit international ; tel sera par
exemple le cas précisément d'un créancier ayant sa
résidence habituelle ou son principal établissement au Cameroun,
qui saisit au Cameroun un navire immatriculé au Cameroun. Notre analyse
se trouve confortée par l'article 8 paragraphe 4 de la convention de
Bruxelles, texte qui énonce : « Aucune disposition de
la présente Convention ne modifiera ou n'affectera la loi interne des
États Contractants en ce qui concerne la saisie d'un navire dans le
ressort de l'État dont il bat pavillon par une personne ayant sa
résidence habituelle ou son principal établissement dans cet
État ». Il faudrait donc pour que le CCMM soit applicable
qu'il n'y ait aucun élément d'extranéité, auquel
cas les conventions internationales seront applicables. Il reste donc que le
CCMM devrait s'appliquer de façon résiduelle. Ces explications ne
concernent que l'une des facettes de la saisie des navires, à savoir la
saisie conservatoire. En ce qui concerne la phase exécutoire, seul le
CCMM en parle, à l'exclusion des conventions internationales, et
prévoit une saisie-exécution des navires285(*)
Ceci étant, des particularités sont reconnues
à la saisie notamment conservatoire des navires comparativement à
la saisie observée en droit commun. Les textes font appel pour ce faire
au terme « créance maritime », laquelle
permettra d'ouvrir une saisie conservatoire sur un navire, à l'exclusion
des créances terrestres, et le fait qu'en principe, seul le navire
à l'origine de la créance devrait en supporter, a donné
lieu à la consécration des termes suivants :
« navire-débiteur »,
« patrimoine d'affectation »,
« action in rem », ce qui est une
particularité remarquable dans l'ouverture d'une telle saisie que sa
mise en oeuvre l'est toute aussi.
Cependant les particularités relevées ne
devraient pas flagorner ; en effet, la saisie des navires obéit
dans certains cas aux règles issues du droit commun de la saisie, ce qui
permettra de prendre en considération le régime hybride d'une
telle saisie, et adapter d'une part les règles de droit commun de la
saisie conservatoire des biens meubles corporels à la saisie
conservatoire des navires d'une part, et d'autre part, d'adapter les
règles de droit commun de la saisie immobilière à la
saisie-exécution des navires.
Ceci permet d'arriver tout logiquement à la conclusion
selon laquelle « le spécial déroge au
général » ; c'est dans le cas donc où
le spécial ne prévoit rien, que le général devrait
recevoir application ; il en est de même en cas de renvoi explicite
ou implicite du spécial au général. C'est donc dire que
l'AUPSRVE devrait s'appliquer de façon supplétive à la
saisie des navires lorsque le CCMM ou les conventions ont sur une question
précise des voies d'exécution fait l'impasse en renvoyant
à cet Acte uniforme ou tout simplement lorsqu'ils n'ont rien
prévu.
ANNEXES
ANNEXE I : Convention internationale
pour l'unification de certaines règles sur la saisie conservatoire des
navires de mer conclue à Bruxelles, le 10 mai 1952 ;
ANNEXE II : Convention internationale de
1999 sur la saisie conservatoire des navires ;
ANNEXE III : Code communautaire de la
marine marchande CEMAC (dispositions sur la saisie des navires) ;
ANNEXE IV : PTPI-Bonanjo, ordonnance de
référé n°299 du 12 Avril 2007, affaire Salam
international transport and trading Co. Ltd contre A/S Dan Bunkery Ltd, navire
« Salam 4 » (inédit);
ANNEXE V: PTPI-Bonanjo, ordonnance de
référé n°285 du 18 Mai 2007, affaire
capitaine-commandant du navire « Tim Bunk »,
Société NB shipping Ltd contre Société Cameroun
Continental Merchants Ltd, navire « Tim Bunk »
(inédit) ;
ANNEXE VI : PTPI-Bonanjo, ordonnance de
référé n°480 du 05 Octobre 2007, affaire Salam
international transport and trading Co. Ltd contre A/S Dan Bunkering, Ecobank
S.A. et le greffier en chef du tribunal de première instance de
Douala-Bonanjo, navire « Salam 4 » (inédit).
ANNEXE I
CONVENTION INTERNATIONALE POUR L'UNIFICATION DE
CERTAINES RÈGLES SUR LA SAISIE CONSERVATOIRE DES NAVIRES DE MER CONCLUE
À BRUXELLES, LE 10 MAI 1952MAI
Les Hautes Parties Contractantes,
Ayant reconnu l'utilité de fixer de commun accord
certaines règles uniformes sur la saisie conservatoire de navires de
mer, ont décidé de conclure une convention à cet effet et
ont convenu de ce qui suit:
Article 1
Dans la présente Convention, les expressions suivantes
sont employées, avec les significations indiquées ci-dessous:
1. «Créance Maritime» signifie
allégation d'un droit ou d'une créance ayant l'une des causes
suivantes:
a. Dommages causés par un navire soit par abordage,
soit autrement;
b. Pertes de vies humaines ou dommages corporels causés
par un navire ou provenant de l'exploitation d'un navire;
c. Assistance et sauvetage;
d. Contrats relatifs à l'utilisation ou la location
d'un navire par charte-partie ou autrement;
e. Contrats relatifs au transport des marchandises par un
navire en vertu d'une charte-partie, d'un connaissement or autrement;
f. Pertes ou dommages aux marchandises et bagages
transportés par un navire;
g. Avarie commune;
h. Prêt à la grosse;
i. Remorquage;
j. Pilotage;
k. Fournitures, quel qu'en soit le lieu, de produits ou de
matériel faites à un navire en vue de son exploitation ou de son
entretien;
l. Construction, réparations, équipement d'un
navire ou frais de cale;
m. Salaires des capitaine, officiers ou hommes
d'équipage;
n. Débours du capitaine et ceux effectués par
les chargeurs, les affréteurs ou les agents pour le compte du navire ou
de son propriétaire;
o. La propriété contestée d'un navire;
p. La copropriété contestée d'un navire
ou sa possession, ou son exploitation, ou les droits aux produits
d'exploitation d'un navire en copropriété;
q. Toute hypothèque maritime et tout mort-gage.
2. «Saisie» signifie l'immobilisation d'un navire
avec l'autorisation de l'autorité judiciaire compétente pour
garantie d'une créance maritime, mais ne comprend pas la saisie d'un
navire pour l'exécution d'un titre.
3. «Personne» comprend toute personne physique ou
morale, société de personnes ou de capitaux ainsi que les
États, les Administrations et Établissements publics.
4. «Demandeur» signifie une personne, invoquant
à son profit, l'existence d'une créance maritime.
Article 2
Un navire battant pavillon d'un des États contractants
ne pourra être saisie dans le ressort d'un État Contractant qu'en
vertu d'une créance maritime, mais rien dans les dispositions de la
présente Convention ne pourra être considéré comme
une extension ou une restriction des droits et pouvoirs que les États,
Autorités publiques ou Autorités portuaires tiennent de leur loi
interne ou de leurs règlements, de saisir, détenir ou autrement
empêcher un navire de prendre la mer dans leur ressort.
Article 3
1. Sans préjudice des dispositions du par. 4 et de
l'art. 10, tout Demandeur peut saisir soit le navire auquel la créance
se rapporte, soit tout autre navire appartenant à celui qui
était, au moment où est née la créance maritime,
propriétaire du navire auquel cette créance se rapporte alors
même que le navire saisie est prêt à faire voile, mais aucun
navire ne pourra être saisi pour une créance prévue aux
alinéas o, p ou q de l'article premier à l'exception du navire
même que concerne la réclamation.
2. Des navires seront réputés avoir le
même propriétaire lorsque toutes les parts de
propriété appartiendront à une même ou aux
mêmes personnes.
3. Un navire ne peut être saisi et caution ou garantie
ne sera donnée, plus d'une fois dans la juridiction d'un ou plusieurs
des États contractants, pour la même créance et par le
même Demandeur; et si un navire est saisi dans une des dites juridictions
et une caution ou une garantie a été donnée, soit pour
obtenir la mainlevée de la saisie, soit pour éviter celle-ci,
toute saisie ultérieure de ce navire, ou de n'importe quel autre navire,
appartenant au même propriétaire, par le Demandeur et pour la
même créance maritime, sera levée et le navire sera
libéré par le Tribunal ou toute autre juridiction
compétente dudit État, à moins que le Demandeur ne prouve,
à la satisfaction du Tribunal ou de toute autre Autorité
Judiciaire compétente, que la garantie ou la caution a été
définitivement libérée avant que la saisie
subséquente n'ait été pratiquée ou qu'il n'y ait
une autre raison valable pour la maintenir.
4. Dans le cas d'un affrètement d'un navire avec remise
de la gestion nautique, lorsque l'affréteur répond, seul, d'une
créance maritime relative à ce navire, le Demandeur peut saisir
ce navire ou tel autre appartenant à l'affréteur, en observant
les dispositions de la présente Convention, mais nul autre navire
appartenant au propriétaire ne peut être saisi en vertu de cette
créance maritime.
L'alinéa qui précède s'applique
également à tous les cas où une personne autre que le
propriétaire est tenue d'une créance maritime.
Article 4
Un navire ne peut être saisi qu'avec l'autorisation d'un
Tribunal ou de toute autre Autorité Judiciaire compétente de
l'État Contractant dans lequel la saisie est pratiquée.
Article 5
Le Tribunal ou toute autre Autorité Judiciaire
compétente dans le ressort duquel le navire a été saisi,
accordera la mainlevée de la saisie lorsqu'une caution ou une garantie
suffisantes auront été fournies, sauf dans le cas où la
saisie est pratiquée en raison des créances maritimes
énumérées à l'article premier ci-dessus, sous les
lettres o et p; en ce cas, le juge peut permettre l'exploitation du navire par
le Possesseur, lorsque celui-ci aura fourni des garanties suffisantes, ou
régler la gestion du navire pendant la durée de la saisie.
Faute d'accord entre les Parties sur l'importance de la
caution ou de la garantie, le Tribunal ou l'Autorité Judiciaire
compétente en fixera la nature et le montant.
La demande de mainlevée de la saisie moyennant une
telle garantie, ne pourra être interprétée ni comme une
reconnaissance de responsabilité, ni comme une renonciation au
bénéfice de la limitation légale de la
responsabilité du propriétaire du navire.
Article 6
Toutes contestations relatives à la
responsabilité du Demandeur, pour dommages causés à la
suite de la saisie du navire ou pour frais de caution ou de garantie fournies
en vue de le libérer ou d'en empêcher la saisie seront
réglées par la loi de l'État Contractant dans le ressort
duquel la saisie a été pratiquée ou demandée.
Les règles de procédure relatives à la
saisie d'un navire, à l'obtention de l'autorisation visée
à l'art. 4 et à tous autres incidents de procédure qu'une
saisie peut soulever sont régies par la loi de l'État Contractant
dans lequel la saisie a été pratiquée ou demandée.
Article 7
1. Les Tribunaux de l'État dans lequel la saisie a
été opérée seront compétents pour statuer
sur le fond du procès:
- soit si ces Tribunaux sont compétents en vertu de la
loi interne de l'État dans lequel la saisie est pratiquée;
- soit dans les cas suivants, nommément
définis:
a. Si le Demandeur a sa résidence habituelle ou son
principal établissement dans l'État où la saisie a
été pratiquée;
b. Si la créance maritime est elle-même
née dans l'État Contractant dont dépend le lieu de la
saisie;
c. Si la créance maritime est née au cours d'un
voyage pendant lequel la saisie a été faite;
d. Si la créance provient d'un abordage ou de
circonstances visées par l'art. 13 de la Convention Internationale pour
l'unification de certaines règles en matière d'abordage,
signée à Bruxelles, le 23 septembre 1910;
e. Si la créance est née d'une assistance ou
d'un sauvetage;
f. Si la créance est garantie par une hypothèque
maritime ou un mort-gage sur le navire saisi.
2. Si le Tribunal, dans le ressort duquel le navire a
été saisi n'a pas compétence pour statuer sur le fond, la
caution ou la garantie à fournir conformément à l'art. 5
pour obtenir la mainlevée de la saisie, devra garantir
l'exécution de toutes les condamnations qui seraient
ultérieurement prononcées par le Tribunal compétent de
statuer sur le fond, et le Tribunal ou toute autre Autorité Judiciaire
du lieu de la saisie, fixera le délai dans lequel le Demandeur devra
introduire une action devant le Tribunal compétent.
3. Si les conventions des parties contiennent soit une clause
attributive de compétence à une autre juridiction, soit une
clause arbitrale, le Tribunal pourra fixer un délai dans lequel le
saisissant devra engager son action au fond.
4. Dans les cas prévus aux deux alinéas
précédents, si l'action n'est pas introduite dans le délai
imparti, le Défendeur pourra demander la mainlevée de la saisie
ou la libération de la caution fournie.
5. Cet article ne s'appliquera pas aux cas visés par
les dispositions de la convention révisée sur la navigation du
Rhin du 17 octobre 1868.
Article 8
1. Les dispositions de la présente Convention sont
applicables dans tout État contractant à tout navire battant
pavillon d'un État contractant.
2. Un navire battant pavillon d'un État non contractant
peut être saisi dans l'un des États contractants, en vertu d'une
des créances énumérées à l'art. 1, ou de
toute autre créance permettant la saisie d'après la loi de cet
État.
3. Toutefois, chaque État contractant peut refuser tout
ou partie des avantages de la présente Convention à tout
État non contractant et à toute personne qui n'a pas, au jour de
la saisie, sa résidence habituelle ou son principal établissement
dans un État contractant.
4. Aucune disposition de la présente Convention ne
modifiera ou n'affectera la loi interne des États contractants en ce qui
concerne la saisie d'un navire dans le ressort de l'État dont il bat
pavillon par une personne ayant sa résidence habituelle ou son principal
établissement dans cet État.
5. Tout tiers, autre que le Demandeur originaire qui excipe
d'une créance maritime par l'effet d'une subrogation, d'une cession ou
autrement, sera réputé, pour l'application de la présente
Convention, avoir la même résidence habituelle ou le même
établissement principal que le créancier originaire.
Article 9
Rien dans cette Convention ne doit être
considéré comme créant un droit à une action qui,
en dehors des stipulations de cette Convention, n'existerait pas d'après
la loi à appliquer par le Tribunal saisi du litige.
La présente Convention ne confère aux Demandeurs
aucun droit de suite, autre que celui accordé par cette dernière
loi ou par la Convention Internationale pour l'unification de certaines
règles relatives aux privilèges et hypothèques maritimes
si celle-ci est applicable.
Article 10
Les Hautes Parties Contractantes peuvent au moment de la
signature du dépôt des ratifications ou lors de leur
adhésion à la Convention, se réserver
a. Le droit de ne pas appliquer les dispositions de la
présente Convention à la saisie d'un navire pratiquée en
raison d'une des créances maritimes visées aux o et p de
l'article premier et d'appliquer à cette saisie leur loi nationale;
b. Le droit de ne pas appliquer les dispositions du premier
paragraphe de l'art. 3 à la saisie pratiquée sur leur territoire
en raison des créances prévues à l'al. q de l'art. 1.
Article 11
Les Hautes Parties Contractantes s'engagent à soumettre
à arbitrage tous différends entre États pouvant
résulter de l'interprétation ou l'application de la
présente
Convention, sans préjudice toutefois des obligations
des Hautes Parties Contractantes qui ont convenu de soumettre leurs
différends à la Cour Internationale de Justice.
Article 12
La présente Convention est ouverte à la
signature des États représentés à la
neuvième Conférence diplomatique de Droit Maritime. Le
procès-verbal de signature sera dressé par les soins du
Ministère des Affaires étrangères de Belgique.
Article 13
La présente Convention sera ratifiée et les
instruments de ratification seront déposés auprès du
Ministère des Affaires étrangères de Belgique qui en
notifiera le dépôt à tous les États signataires et
adhérents.
Article 14
a. La présente Convention entrera en vigueur entre les
deux premiers États qui l'auront ratifiée, six mois après
la date du dépôt du deuxième instrument de ratification.
b. Pour chaque État signataire ratifiant la Convention
après le deuxième dépôt, celle-ci entrera en vigueur
six mois après la date du dépôt de son instrument de
ratification.
Article 15
Tout État non représenté à la
neuvième Conférence diplomatique de Droit Maritime pourra
adhérer à la présente Convention.
Les adhésions seront notifiées au
Ministère des Affaires étrangères de Belgique qui en
avisera par la voie diplomatique tous les États signataires et
adhérents.
La Convention entrera en vigueur pour l'État
adhérent six mois après la date de réception de cette
notification, mais pas avant la date de son entrée en vigueur telle
qu'elle est fixée à l'art. 14a.
Article 16
Toute Haute Partie Contractante pourra à l'expiration
du délai de trois ans qui suivra l'entrée en vigueur à son
égard de la présente Convention, demander la réunion d'une
Conférence chargée de statuer sur toutes les propositions tendant
à la révision de la Convention. Toute Haute Partie
Contractante qui désirerait faire usage de cette faculté en
avisera le Gouvernement belge qui se chargera de convoquer la conférence
dans les six mois.
Article 17
Chacune des Hautes Parties Contractantes aura le droit de
dénoncer la présente Convention à tout moment après
son entrée en vigueur à son égard. Toutefois, cette
dénonciation ne prendra effet qu'un an après la date de
réception de la notification de dénonciation au Gouvernement
belge qui en avisera les autres Parties Contractantes par la voie
diplomatique.
Article 18
a. Toute Haute Partie Contractante peut, au moment de la
ratification, de l'adhésion, ou à tout moment ultérieur,
notifier par écrit au Gouvernement belge que la présente
Convention s'applique aux territoires ou à certains des territoires dont
elle assure les relations internationales. La Convention sera applicable aux
dits territoires six mois après la date de réception de cette
notification par le Ministère des Affaires étrangères de
Belgique, mais pas avant la date d'entrée en vigueur de la
présente Convention à l'égard de cette Haute Partie
Contractante.
b. Toute Haute Partie Contractante qui a souscrit une
déclaration au titre du par. a de cet article pourra à tout
moment aviser le Ministère des Affaires étrangères de
Belgique que la Convention cesse de s'appliquer au Territoire en question.
Cette dénonciation prendra effet dans le délai d'un an
prévu à l'art. 17.
c. Le Ministère des Affaires étrangères
de Belgique avisera par la voie diplomatique tous les États signataires
et adhérents de toute notification reçue par lui au titre du
présent article.
Fait à Bruxelles, le 10 mai 1952, en langues
française et anglaise, les deux textes faisant également foi.
ANNEXE II
CONVENTION INTERNATIONALE DE 1999 SUR LA SAISIE
CONSERVATOIRE DES NAVIRES
Les États parties à la présente
Convention,
Considérant qu'il est souhaitable de faciliter le
développement harmonieux et ordonné du commerce maritime
mondial,
Convaincus de la nécessité d'un instrument
juridique établissant une uniformité internationale dans le
domaine de la saisie conservatoire des navires, qui tienne compte de
l'évolution récente dans les domaines connexes,
Sont convenus de ce qui suit :
Article premier
Définitions
Aux fins de la présente Convention :
1. Par "créance maritime", il faut entendre une
créance découlant d'une ou plusieurs des causes suivantes :
a) Pertes ou dommages causés par l'exploitation du
navire;
b) Mort ou lésions corporelles survenant, sur terre ou
sur eau, en relation directe avec l'exploitation du navire;
c) Opérations de sauvetage ou d'assistance ainsi que
tout contrat de sauvetage ou d'assistance, y compris, le cas
échéant, une indemnité spéciale concernant des
opérations de sauvetage ou d'assistance à l'égard d'un
navire qui par lui-même ou par sa cargaison menaçait de causer des
dommages à l'environnement;
d) Dommages causés ou risquant d'être
causés par le navire au milieu, au littoral ou à des
intérêts connexes; mesures prises pour prévenir,
réduire ou éliminer ces dommages; indemnisation de ces dommages;
coût des mesures raisonnables de remise en état du milieu qui ont
été effectivement prises ou qui le seront; pertes subies ou
risquant d'être subies par des tiers en rapport avec ces dommages; et
dommages, coûts ou pertes de nature similaire à ceux qui sont
indiqués dans le présent alinéa d);
e) Frais et dépenses relatifs au relèvement,
à l'enlèvement, à la récupération, à
la destruction ou à la neutralisation d'un navire coulé,
naufragé, échoué ou abandonné, y compris tout ce
qui se trouve ou se trouvait à bord de ce navire, et frais et
dépenses relatifs à la conservation d'un navire abandonné
et à l'entretien de son équipage;
f) Tout contrat relatif à l'utilisation ou à la
location du navire par affrètement ou autrement;
g) Tout contrat relatif au transport de marchandises ou de
passagers par le navire, par affrètement ou autrement;
h) Pertes ou dommages subis par, ou en relation avec, les
biens (y compris les bagages) transportés par le navire;
i) Avarie commune;
j) Remorquage;
k) Pilotage;
l) Marchandises, matériels, approvisionnement, soutes,
équipements (y compris conteneurs) fournis ou services rendus au navire
pour son exploitation, sa gestion, sa conservation ou son entretien;
m) Construction, reconstruction, réparation,
transformation ou équipement du navire;
n) Droits et redevances de port, de canal, de bassin, de
mouillage et d'autres voies navigables;
o) Gages et autres sommes dus au capitaine, aux officiers et
autres membres du personnel de bord, en vertu de leur engagement à bord
du navire, y compris les frais de rapatriement et les cotisations d'assurance
sociale payables pour leur compte;
p) Paiements effectués pour le compte du navire ou de
ses propriétaires;
q) Primes d'assurance (y compris cotisations d'assurance
mutuelle) en relation avec le navire, payables par le propriétaire du
navire ou par l'affréteur en dévolution ou pour leur compte;
r) Frais d'agence ou commissions de courtage ou autres en
relation avec le navire, payables par le propriétaire du navire ou par
l'affréteur en dévolution ou pour leur compte;
s) Tout litige quant à la propriété ou
à la possession du navire;
t) Tout litige entre les copropriétaires du navire au
sujet de l'exploitation ou des droits aux produits d'exploitation de ce
navire;
u) Hypothèque, "mortgage" ou droit de même nature
sur le navire;
v) Tout litige découlant d'un contrat de vente du
navire.
2. Par "saisie", il faut entendre toute immobilisation ou
restriction au départ d'un navire en vertu d'une décision
judiciaire pour garantir une créance maritime, mais non la saisie d'un
navire pour l'exécution d'un jugement ou d'un autre instrument
exécutoire.
3. Par "personne", il faut entendre toute personne physique ou
morale ou toute société de personnes, de droit public ou de droit
privé, y compris un État et ses subdivisions politiques.
4. Par "créancier", il faut entendre toute personne
alléguant une créance maritime.
5. Par "tribunal", il faut entendre toute autorité
judiciaire compétente d'un État.
Article 2
Pouvoirs de saisie
1. Un navire ne peut être saisi, ou libéré
de cette saisie, que par décision d'un tribunal de l'État partie
dans lequel la saisie est pratiquée.
2. Un navire ne peut être saisi qu'en vertu d'une
créance maritime, à l'exclusion de toute autre créance.
3. Un navire peut être saisi aux fins d'obtenir une
sûreté, malgré l'existence, dans tout contrat
considéré, d'une clause attributive de compétence
judiciaire ou arbitrale, ou de toute autre disposition, prévoyant de
soumettre la créance maritime à l'origine de la saisie à
l'examen au fond du tribunal d'un État autre que celui dans lequel la
saisie est pratiquée, ou d'un tribunal arbitral, ou d'une clause
prévoyant l'application de la loi d'un autre État à ce
contrat.
4. Sous réserve des dispositions de la présente
Convention, la procédure relative à la saisie d'un navire ou
à sa mainlevée est régie par la loi de l'État dans
lequel la saisie a été pratiquée ou demandée.
Article 3
Exercice du droit de saisie
1. La saisie de tout navire au sujet duquel une créance
maritime est alléguée peut être pratiquée si :
a) La personne qui était propriétaire du navire
au moment où la créance maritime est née est
obligée à raison de cette créance et est
propriétaire du navire au moment où la saisie est
pratiquée; ou
b) L'affréteur en dévolution du navire au moment
où la créance maritime est née est obligé à
raison de cette créance et est affréteur en dévolution ou
propriétaire du navire au moment où la saisie est
pratiquée; ou
c) La créance repose sur une hypothèque, un
"mortgage" ou un droit de même nature sur le navire; ou
d) La créance est relative à la
propriété ou à la possession du navire; ou
e) Il s'agit d'une créance sur le propriétaire,
l'affréteur en dévolution, l'armateur gérant ou
l'exploitant du navire, garantie par un privilège maritime qui est
accordé ou applicable en vertu de la législation de l'État
dans lequel la saisie est demandée.
2. Peut également être pratiquée la saisie
de tout autre navire ou de tous autres navires qui, au moment où la
saisie est pratiquée, est ou sont propriété de la personne
qui est obligée à raison de la créance maritime et qui, au
moment où la créance est née, était :
a) Propriétaire du navire auquel la créance
maritime se rapporte; ou
b) Affréteur en dévolution, affréteur
à temps ou affréteur au voyage de ce navire.
Cette disposition ne s'applique pas aux créances
relatives à la propriété ou à la possession d'un
navire.
3. Nonobstant les dispositions des paragraphes 1 et 2 du
présent article, la saisie d'un navire qui n'est pas
propriété d'une personne prétendument obligée
à raison de la créance ne peut être autorisée que
si, selon la loi de l'État où la saisie est demandée, un
jugement rendu en vertu de cette créance peut être
exécuté contre ce navire par une vente judiciaire ou
forcée de ce navire.
Article 4
Mainlevée de la saisie
1. Un navire qui a été saisi doit être
libéré lorsqu'une sûreté d'un montant suffisant et
sous une forme satisfaisante a été constituée, sauf dans
le cas où la saisie est pratiquée en raison des créances
maritimes énumérées aux alinéas s) et t) du
paragraphe 1 de l'article premier. En ce cas, le tribunal peut permettre
l'exploitation du navire par la personne qui en a la possession, lorsque
celle-ci aura constitué une sûreté d'un montant suffisant,
ou régler de toute autre façon la question de la gestion du
navire pendant la durée de la saisie.
2. Si les parties intéressées ne parviennent pas
à un accord sur l'importance et la forme de la sûreté, le
tribunal en détermine la nature et le montant, qui ne peut
excéder la valeur du navire saisi.
3. Aucune demande tendant à la libération du
navire contre la constitution d'une sûreté ne peut être
interprétée comme une reconnaissance de responsabilité ni
comme une renonciation à toute défense ou tout droit de limiter
la responsabilité.
4. Si un navire a été saisi dans un État
non partie et n'est pas libéré malgré la constitution
d'une sûreté concernant ce navire dans un État partie
relativement à la même créance, la mainlevée de
cette sûreté est autorisée par le tribunal de l'État
partie, par ordonnance rendue sur requête;
5. Si, dans un État non partie, le navire est
libéré contre la constitution d'une sûreté
suffisante concernant ce navire, la mainlevée de toute
sûreté constituée dans un État partie relativement
à la même créance est autorisée par ordonnance si le
montant total de la sûreté constituée dans les deux
États dépasse :
a) Soit le montant de la créance au titre de laquelle
la saisie a été pratiquée;
b) Soit la valeur du navire; la moins élevée des
deux devant prévaloir. Cette mainlevée n'est toutefois
autorisée par ordonnance que si la sûreté constituée
est effectivement disponible dans l'État non partie et librement
transférable au profit du créancier.
6. Toute personne qui a constitué une
sûreté en vertu des dispositions du paragraphe 1 du présent
article peut, à tout moment, demander au tribunal de réduire,
modifier ou annuler cette sûreté.
Article 5
Droit de nouvelle saisie et saisies multiples
1. Lorsque, dans un État, un navire a
déjà été saisi et libéré ou qu'une
sûreté a déjà été constituée
pour garantir une créance maritime, ce navire ne peut ensuite faire
l'objet d'aucune saisie fondée sur la même créance
maritime, à moins que :
a) La nature ou le montant de la sûreté
concernant ce navire déjà constituée en vertu de la
même créance ne soit pas suffisant, à condition que le
montant total des sûretés ne dépasse pas la valeur du
navire; ou
b) La personne qui a déjà constitué la
sûreté ne soit ou ne paraisse pas capable d'exécuter tout
ou partie de ses obligations; ou
c) La mainlevée de la saisie ou la libération de
la sûreté ne soit intervenue :
i) soit à la demande ou avec le consentement du
créancier agissant pour des motifs raisonnables,
ii) soit parce que le créancier n'a pu par des mesures
raisonnables empêcher cette mainlevée ou cette
libération.
2. Tout autre navire qui serait autrement susceptible
d'être saisi en vertu de la même créance maritime ne peut
être saisi à moins que :
a) La nature ou le montant de la sûreté
déjà constituée en vertu de la même créance
ne soit pas suffisant; ou
b) Les dispositions du paragraphe 1 b) ou c) du présent
article ne soient applicables.
3. La "mainlevée" aux fins du présent article
exclut tout départ ou toute libération du navire de nature
illégale.
Article 6
Protection des propriétaires et affréteurs en
dévolution de navires saisis
1. Le tribunal peut, comme condition à l'autorisation
de saisir un navire ou de maintenir une saisie déjà
pratiquée, imposer au créancier saisissant ou ayant fait saisir
le navire l'obligation de constituer une sûreté sous une forme,
pour un montant et selon des conditions fixées par ce tribunal, à
raison de toute perte causée par la saisie susceptible d'être
subie par le défendeur et dans laquelle la responsabilité du
créancier peut être prouvée, notamment mais non
exclusivement, à raison de la perte ou du dommage éventuels subis
par le défendeur par suite :
a) D'une saisie abusive ou injustifiée; ou
b) D'une sûreté excessive demandée et
constituée.
2. Les tribunaux de l'État dans lequel une saisie a
été pratiquée sont compétents pour
déterminer l'étendue de la responsabilité
éventuelle du créancier à raison de pertes ou dommages
causés par la saisie d'un navire, notamment mais non exclusivement, de
ceux qui seraient subis par suite :
a) D'une saisie abusive ou injustifiée; ou
b) D'une sûreté excessive demandée et
constituée.
3. La responsabilité éventuelle du
créancier, visée au paragraphe 2 du présent article, est
déterminée par application de la loi de l'État où
la saisie a été pratiquée.
4. Au cas où le litige est, conformément aux
dispositions de l'article 7, soumis à l'examen au fond d'un tribunal
d'un autre État ou d'un tribunal arbitral, la procédure relative
à la responsabilité du créancier prévue au
paragraphe 2 du présent article peut être suspendue dans l'attente
de la décision au fond.
5. Toute personne qui a constitué une
sûreté en vertu des dispositions du paragraphe 1 du présent
article peut à tout moment demander au tribunal de réduire,
modifier ou annuler cette sûreté.
Article 7
Compétence sur le fond du litige
1. Les tribunaux de l'État dans lequel une saisie a
été pratiquée ou une sûreté constituée
pour obtenir la libération du navire sont compétents pour juger
le litige au fond, à moins que les parties, de façon valable, ne
conviennent ou ne soient convenues de soumettre le litige au tribunal d'un
autre État se déclarant compétent, ou à
l'arbitrage.
2. Nonobstant les dispositions du paragraphe 1 du
présent article, les tribunaux de l'État dans lequel une saisie a
été pratiquée, ou une sûreté
constituée pour obtenir la libération du navire, peuvent
décliner leur compétence si le droit de cet État le leur
permet et si le tribunal d'un autre État se reconnaît
compétent.
3. Lorsqu'un tribunal de l'État dans lequel une saisie
a été pratiquée ou une sûreté
constituée pour obtenir la libération du navire :
a) N'est pas compétent pour statuer au fond sur le
litige, ou
b) A décliné sa compétence en vertu des
dispositions du paragraphe 2 du présent article, ce tribunal peut et,
sur requête, doit fixer au créancier un délai pour engager
la procédure au fond devant un tribunal compétent ou une
juridiction arbitrale.
4. Si, au terme du délai fixé
conformément au paragraphe 3 du présent article, la
procédure au fond n'a pas été engagée, la
mainlevée de la saisie ou de la sûreté constituée
est, sur requête, autorisée par ordonnance.
5. Si la procédure est engagée avant le terme du
délai fixé conformément au paragraphe 3 du présent
article, ou si la procédure devant un tribunal compétent ou un
tribunal arbitral d'un autre État est engagée en l'absence de
fixation d'un délai, toute décision définitive
prononcée à l'issue de cette procédure est reconnue et
prend effet à l'égard du navire saisi ou de la
sûreté constituée pour prévenir la saisie du navire
ou obtenir sa libération, à condition que :
a) Le défendeur ait été averti de cette
procédure dans des délais raisonnables et mis en mesure de
présenter sa défense;
b) Cette reconnaissance ne soit pas contraire à l'ordre
public.
6. Aucune des dispositions du paragraphe 5 du présent
article ne limite la portée d'un jugement ou d'une sentence arbitrale
étrangers rendus selon la loi de l'État où la saisie du
navire a été pratiquée ou une sûreté
constituée pour en obtenir la libération.
Article 8
Application
1. La présente Convention est applicable à tout
navire relevant de la juridiction d'un État partie, quel qu'il soit, et
battant ou non pavillon d'un État partie.
2. La présente Convention n'est pas applicable aux
navires de guerre, navires de guerre auxiliaires et autres navires appartenant
à un État ou exploités par lui et exclusivement
affectés, jusqu'à nouvel ordre, à un service public non
commercial.
3. La présente Convention ne porte atteinte à
aucun des droits ou pouvoirs, dévolus par une convention internationale,
une loi ou réglementation interne à un État ou à
ses administrations, à un établissement public ou à une
autorité portuaire, de retenir un navire ou d'en interdire le
départ dans le ressort de leur juridiction.
4. La présente Convention ne porte pas atteinte au
pouvoir d'un État ou tribunal de rendre des ordonnances applicables
à la totalité du patrimoine d'un débiteur.
5. Aucune disposition de la présente Convention ne
porte atteinte à l'application de conventions internationales ni
d'aucune loi interne leur donnant effet, autorisant la limitation de
responsabilité dans l'État où une saisie est
pratiquée.
6. Aucune disposition de la présente Convention ne
modifie ou ne concerne les textes de loi en vigueur dans les États
parties relativement à la saisie d'un navire dans la juridiction de
l'État dont il bat pavillon, obtenue par une personne ayant sa
résidence habituelle ou son principal établissement dans cet
État, ou par toute autre personne qui a acquis une créance de
ladite personne par voie de subrogation, de cession, ou par tout autre
moyen.
Article 9
Non-création de privilèges maritimes
Aucune disposition de la présente Convention ne peut
être interprétée comme créant un privilège
maritime.
Article 10
Réserves
1. Un État peut, au moment de la signature, de la
ratification, de l'acceptation, de l'approbation ou de l'adhésion, ou
à tout moment par la suite, se réserver le droit d'exclure du
champ d'application de la présente Convention :
a) Les bâtiments autres que les navires de mer;
b) Les navires ne battant pas le pavillon d'un État
partie;
c) Les créances visées à l'alinéa
s) du paragraphe 1 de l'article premier.
2. Un État qui est aussi partie à un
traité sur la navigation intérieure, peut déclarer, au
moment de la signature, de la ratification, de l'acceptation ou de
l'approbation de la présente Convention ou de l'adhésion à
celle-ci, que les dispositions de ce traité concernant la
compétence des tribunaux et la reconnaissance et l'exécution de
leurs décisions prévalent sur les dispositions de l'article 7 de
la présente Convention.
Article 11
Dépositaire
La présente Convention est déposée
auprès du Secrétaire général de l'Organisation des
Nations Unies.
Article 12
Signature, ratification, acceptation, approbation et
adhésion
1. La présente Convention est ouverte à la
signature des États au Siège de l'Organisation des Nations Unies,
à New York, du 1er septembre 1999 au 31 août 2000. Elle
reste ensuite ouverte à l'adhésion.
2. Les États peuvent exprimer leur consentement
à être liés par la présente Convention par :
a) Signature sans réserve quant à la
ratification, l'acceptation ou l'approbation; ou
b) Signature sous réserve de ratification,
d'acceptation ou d'approbation, suivie de ratification, d'acceptation ou
d'approbation; ou
c) Adhésion.
3. La ratification, l'acceptation, l'approbation ou
l'adhésion s'effectuent par le dépôt d'un instrument
à cet effet auprès du dépositaire.
Article 13
États ayant plus d'un régime juridique
1. S'il possède deux ou plusieurs unités
territoriales dans lesquelles des régimes juridiques différents
sont applicables pour ce qui est des matières traitées dans la
présente Convention, un État peut, au moment de la signature, de
la ratification, de l'acceptation, de l'approbation ou de l'adhésion,
déclarer que la présente Convention s'applique à
l'ensemble de ses unités territoriales ou seulement à une ou
plusieurs d'entre elles, et il peut modifier cette déclaration en
présentant une autre déclaration à tout moment.
2. La déclaration est notifiée au
dépositaire et précise expressément les unités
territoriales auxquelles s'applique la Convention.
3. Dans le cas d'un État partie qui possède deux
ou plusieurs régimes juridiques concernant la saisie conservatoire des
navires applicables dans différentes unités territoriales, les
références dans la présente Convention au tribunal d'un
État et à la loi ou au droit d'un État sont
considérées comme renvoyant, respectivement, au tribunal et
à la loi ou au droit de l'unité territoriale pertinente de cet
État.
Article 14
Entrée en vigueur
1. La présente Convention entre en vigueur six mois
après la date à laquelle 10 États ont exprimé leur
consentement à être liés par elle.
2. Pour un État qui exprime son consentement à
être lié par la présente Convention après que les
conditions de son entrée en vigueur ont été remplies, ce
consentement prend effet trois mois après la date à laquelle il a
été exprimé.
Article 15
Révision et amendement
1. Le Secrétaire général de
l'Organisation des Nations Unies convoque une conférence des
États parties pour réviser ou modifier la présente
Convention, à la demande d'un tiers des États parties.
2. Tout consentement à être lié par la
présente Convention exprimé après la date d'entrée
en vigueur d'un amendement à la présente Convention est
réputé s'appliquer à la Convention telle que
modifiée.
Article 16
Dénonciation
1. La présente Convention peut être
dénoncée par l'un quelconque des États parties à
tout moment à compter de la date à laquelle elle entre en vigueur
à l'égard de cet État.
2. La dénonciation s'effectue au moyen du
dépôt d'un instrument de dénonciation auprès du
dépositaire.
3. La dénonciation prend effet un an après la
date à laquelle le dépositaire a reçu l'instrument de
dénonciation ou à l'expiration de tout délai plus long
énoncé dans cet instrument.
Article 17
Langues
La présente Convention est établie en un seul
exemplaire original en langues anglaise, arabe, chinoise, espagnole,
française et russe, chaque texte faisant également foi.
FAIT à Genève, le douze mars mil neuf cent
quatre-vingt-dix-neuf.
EN FOI DE QUOI les soussignés, dûment
autorisés à cet effet par leurs gouvernements respectifs, ont
apposé leur signature à la présente Convention.
ANNEXE III
CODE COMMUNAUTAIRE DE LA MARINE MARCHANDE CEMAC
(DISPOSITIONS SUR LA SAISIE DES NAVIRES)
TITRE VI LA SAISIE DES NAVIRES
Chapitre I Saisie conservatoire
ARTICLE 114 : La saisie peut être pratiquée soit
sur le navire auquel la créance se rapporte, soit sur tout autre navire
appartenant à celui qui était, au moment où est née
la créance maritime, propriétaire du navire auquel cette
créance se rapporte.
Les navires appartenant à un État, ou
exploités par lui, ne peuvent être saisis si, au moment où
la créance est née, ils étaient affectés
exclusivement à un service gouvernemental et non commercial.
ARTICLE 115 : Lorsqu'elle reçoit notification de la
décision judiciaire autorisant la saisie, l'autorité maritime
compétente émet l'interdiction d'appareiller et en assure
l'application.
ARTICLE 116 : Nonobstant toute saisie et à tout moment,
le tribunal compétent peut après l'avis de l'autorité
maritime autoriser le départ du navire pour un ou plusieurs voyages
déterminés. Pour obtenir cette autorisation, le requérant
doit fournir une garantie suffisante.
Aucune demande tendant à la libération du navire
contre la constitution d'une garantie ne peut être
interprétée comme une reconnaissance de responsabilité ni
comme une renonciation à toute défense ou tout droit de limiter
la responsabilité.
ARTICLE 117 : Le tribunal compétent, après avis
de l'autorité maritime compétente, fixe le délai dans
lequel le navire devra regagner le port de la saisie. Il peut
ultérieurement modifier ce délai pour tenir compte des
circonstances et, le cas échéant, autoriser le navire à
faire des voyages.
Si à l'expiration du délai fixé, le
navire n'a pas rejoint son port, la somme déposée en garantie est
acquise aux créanciers, sauf le jeu de l'assurance en cas de sinistres
couverts par la police.
ARTICLE 118 : L'avis de l'autorité maritime
compétente, visé aux articles 116 et 117 ci-dessus a un
caractère consultatif et ne lie pas le juge.
ARTICLE 119 : Les créances maritimes pouvant donner
lieu à la saisie d'un navire sont celles qui, conformément aux
dispositions de la Convention internationale du 12 mars 1999 sur la saisie
conservatoire des navires, résultent de l'une des causes ci-après
:
1) dommages matériels ou corporels, y compris perte de
vies humaines sur terre ou sur mer, causés par un navire ou provenant de
son exploitation,
2) assistance et sauvetage,
3) contrats relatifs à l'affrètement ou
à l'utilisation d'un navire,
4) contrats relatifs au transport des marchandises par un
navire,
5)- pertes ou dommages aux marchandises et bagages
transportés par un navire,
6) avarie commune,
7) remorquage ou pilotage d'un navire,
8) fournitures de produits, de matériels ou de
services à un navire en vue de son exploitation ou de son entretien,
9) construction, réparation, équipement d'un
navire ou frais de cale,
10) salaires du capitaine et de l'équipage,
11) débours du capitaine, des affréteurs, des
chargeurs ou des agents maritimes, effectués pour le compte du navire ou
de son propriétaire,
12) commissions des agents du navire,
13) propriété contestée du navire,
14) droits de copropriété d'un navire ou droits
à l'exploitation d'un navire, ou aux produits d'exploitation d'un navire
en copropriété,
15) indemnité ou autre rémunération due
au titre de toute mesure ou tentative visant à prévenir,
écarter ou limiter un dommage imputable au navire y compris un dommage
de pollution - en vertu ou non d'une Convention internationale, d'un texte
législatif ou réglementaire, ou d'un contrat,
16) frais et dépenses relatifs à
l'enlèvement de l'épave du navire ou de sa cargaison,
17 toutes primes d'assurances relatives au navire,
18) tout litige découlant d'un contrat de vente du
navire.
ARTICLE 120 : La saisie-conservatoire est autorisée par
ordonnance rendue sur requête par l'Autorité judiciaire
compétente après avis de l'autorité maritime
compétente.
Elle peut être accordée dès lors qu'il est
justifié d'une créance maritime paraissant fondée dans son
principe.
ARTICLE 121: La saisie conservatoire empêche le
départ du navire. Elle ne porte aucune atteinte aux droits du
propriétaire.
ARTICLE 122 : La saisie conservatoire est pratiquée
entre les mains du Capitaine du navire par un huissier de justice qui dresse
procès-verbal. Copie du procès-verbal est adressée au
Commandant du port à l'autorité maritime compétente, ainsi
qu'au Consul de l'État du pavillon.
L'huissier énonce dans son procès verbal :
- les nom, profession et domicile du créancier pour
qui il agit ;
- la décision judiciaire autorisant la saisie ;
- le montant de la créance justifiant la saisie ;
- la date du commandement de payer ;
- l'élection de domicile faite par le créancier
dans le lieu où siège l'autorité judiciaire
compétente, et dans le lieu où le navire est amarré ;
- les nom et adresse du propriétaire du navire ;
- les nom, catégorie, tonnage et nationalité du
navire.
Il est fait énonciation et description, dans le
procès-verbal, des chaloupes, agrès et apparaux du navire, ainsi
que de ses provisions et soutes.
Si le navire saisi bat pavillon d'un état membre de la
C.E.M.A.C., le procès-verbal de saisie est inscrit sur le registre tenu
par l'autorité maritime compétente et sur lequel le navire est
immatriculé. Cette inscription est requise dans un délai de sept
jours à compter de la date du procès-verbal. Ce délai est
augmenté de vingt jours si le lieu de la saisie et le lieu où le
registre des immatriculations est tenu ne sont pas situés dans le
même État de la C.E.M.A.C.
ARTICLE 123 : Le propriétaire du navire saisi ou son
représentant, peut, dans un délai d'un mois à compter de
la notification de la saisie faite au Capitaine, se pourvoir devant le juge des
référés en rétractation de l'ordonnance de saisie.
Il peut, par ailleurs, nonobstant la saisie, demander à tout moment au
tribunal compétent l'autorisation d'appareillage du navire dans les
conditions prévues aux articles 112 et 113 ci-dessus.
ARTICLE 124 : L'autorité maritime compétente est
constituée gardien du navire saisi. Dans l'accomplissement de son
mandat, le gardien n'assure qu'une obligation de moyens.
ARTICLE 125 : A compter de la notification du
procès-verbal de saisie conservatoire et à peine de
caducité, le saisissant doit, dans un délai de d'un mois,
introduire une procédure ou accomplir les formalités
nécessaires à l'obtention du titre exécutoire.
ARTICLE 126 : Tout propriétaire de navire saisi, qui
aura obtenu la mainlevée ou la rétractation de la saisie pourra
assigner le saisissant en réparation du préjudice subi du fait de
l'immobilisation du navire, s'il est avéré que la saisie
était injustifiée.
Chapitre II Saisie-exécution
ARTICLE 127 : Tout créancier muni d'un titre
exécutoire peut pratiquer une saisie exécution.
Constituent des titres exécutoires :
- les décisions juridictionnelles revêtues de la
formule exécutoire et
- celles qui sont exécutoires sur minutes ;
- les actes et décisions juridictionnels
étrangers ainsi que les sentences arbitrales déclarées
exécutoires par une décision juridictionnelle non susceptible de
recours suspensif d'exécution de l'État dans lequel ce titre est
invoqué ;
- les procès-verbaux de conciliation signés par
le juge et les parties ;
- les actes notariés revêtus de la formule
exécutoire ;
- les décisions auxquelles la loi nationale de chaque
État partie attache les effets d'une décision judiciaire.
ARTICLE 128 : Lorsqu'elle n'est pas
précédée d'une saisie conservatoire, la
saisie-exécution est demandée au juge du fond dans les conditions
et selon la procédure en vigueur pour les saisies immobilières.
Un procès-verbal est dressé et un gardien est
désigné dans les mêmes conditions qu'en matière de
saisie conservatoire.
ARTICLE 129 : Le saisissant doit, dans un délai de
trois jours, notifier au propriétaire copie du procès-verbal de
saisie et le faire citer devant le tribunal du lieu de la saisie, pour
s'entendre dire qu'il sera procédé à la vente du navire
saisi.
Si le propriétaire n'est pas domicilié dans le
ressort du tribunal, les signification et citations lui sont données en
la personne du capitaine du bâtiment saisi, ou, en son absence, en la
personne de celui qui représente le propriétaire ou le capitaine.
Le délai de trois jours est augmenté de trente
jours si le destinataire demeure hors du territoire de la C.E.M.A.C.
S'il est étranger, hors du territoire C.E.M.A.C. et non
représenté, les citations et significations sont données
selon les voies de droit commun.
ARTICLE 130 : Le procès-verbal de
saisie-exécution est inscrit sur le registre des hypothèques
maritimes tenu par l'autorité administrative compétente. Cette
inscription est requise dans le délai de sept jours à compter de
la date du procès-verbal, augmenté de vingt jours si le lieu de
la saisie et le lieu où le registre est tenu, ne sont pas situés
dans le même port.
ARTICLE 131 : Le conservateur des hypothèques maritimes
délivre au créancier saisissant un état des inscriptions
hypothécaires grevant le navire. Dans les sept jours qui suivent la
délivrance de cet état hypothécaire, la saisie est
dénoncée aux créanciers inscrits aux domiciles élus
dans leurs inscriptions. Le délai de sept jours est augmenté de
20 jours si le domicile élu n'est pas situé dans le ressort du
tribunal compétent pour connaître de la saisie.
La dénonciation aux créanciers indique la date
de la comparution de ceux-ci devant le tribunal ; ce délai ne peut
être inférieur à trente jours, à compter de la date
de la dénonciation dans le cas où le domicile élu n'est
pas situé dans le ressort du tribunal.
ARTICLE 132 : Les conditions de la mise en vente du navire
saisi sont fixées par le tribunal compétent selon la
procédure de droit commun en vigueur pour les ventes forcées
d'immeubles. L'affichage est fait sur la partie la plus apparente du navire
saisi, sur la porte principale du tribunal devant lequel on procèdera,
en place publique ou sur le quai du port où le navire est amarré,
à la Chambre de Commerce, au Bureau de la douane et au siège de
la circonscription maritime du lieu.
ARTICLE 133 : Les demandes en distraction, les oppositions, le
paiement et la consignation du prix de la vente, la collocation des
créanciers et la distribution des deniers sont effectués selon
les règles et procédures de droit commun en vigueur pour les
ventes forcées d'immeubles.
BIBLIOGRAPHIE
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SPÉCIAUX
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- TCHOU-BAYO (J.-P.), Cours magistral des voies
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II- THÈSES ET MÉMOIRES
- ABDOURAHMAN SALL, la préservation des recours de
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DESS droit des assurances 2006.
- ASSONTSA (R), le juge et les voies d'exécution depuis
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- KODJO GNINTEDEM (M.-D.), L'hypothèque maritime dans
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- KODJO GNINTEDEM (M.-D.), L'efficacité des
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Yaoundé II, 2011, 428p.
- TOPORKOVA (A.), Les sûretés maritimes et la
saisie conservatoire du navire en droit russe, Mémoire pour le Master 2
« Droit Maritime et des Transports », Université de
droit, d'économie et des sciences d'Aix-Marseille, 2006,83 P.
- GEORGIEVA (R.), La saisie conservatoire des navires
(Étude comparative en Droit Français et en Droit International),
Mémoire pour le Master 2 « Droit Maritime et des
Transports », Université PAUL CÉZANNE d'Aix-Marseille
III, année universitaire 2010-2011, 110 P.
III- ARTICLES ET CHRONIQUES
- CADIET (H.) et BRAJEUX (G.), La procédure de saisie
conservatoire de navire entre droit commun et règles spéciales,
DMF 1998, n° 587, P.995 et ss.
- Du PONTAVICE (E.), Le nouveau statut des navires et autres
bâtiments de mer, JCP, n° 38, 1969, 2270.
- JAMBU-MERLIN (R.), Le navire, hybride de meuble et
d'immeuble ?, Etudes offertes à Jacques FLOUR, Paris,
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conservatoire de navires, CDMT, 1995.
- NDZUENKEU (A.), L'OHADA et la réforme des
procédures civiles d'exécution en droit africain : l'exemple
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- NGAMKAN (G.), Saisie conservatoire de navires en Afrique
centrale : l'avis de l'autorité maritime compétente :
une exigence superflue ? Juridis Périodique n° 42,
Avril-Mai-Juin 2000, P.111 et ss.
- REMERY (J.P.), La saisie des navires dans la jurisprudence
actuelle de la Cour de cassation, in Rapport de la Cour de Cassation pour
l'année 1995.
- ROHART, Faut-il se méfier de l'apparence ? La saisie
conservatoire des navires apparentés, DMF 1988. 499.
- TASSEL (Y.), Saisie conservatoire du navire: art. 3(1), 3(4)
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- VIALARD (A.), La saisie conservatoire des navires
affrétés, conférence prononcée à l'AFDM le
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- VIALARD (A.), La saisie conservatoire du navire pour dettes
de l'affréteur à temps, DMF 1985, p. 579.
- VIALARD (R.), Le projet de Convention sur la saisie
conservatoire des navires, DMF 1997, n° 572, p. 563.
IV- CODES ET LOIS
- Acte uniforme sur les procédures simplifiées
de recouvrement et les voies d'exécution.
- Traité OHADA.
- Code communautaire de la marine marchande CEMAC signé
à Bangui en Mai 2001.
- Code de procédure civile et commerciale
français de 1806 rendu applicable au Cameroun par l'arrêté
du 16 décembre 1954 portant codification et réglant la
procédure en matière civile et commerciale devant les tribunaux
français du Cameroun.
- Convention internationale pour l'unification de certaines
règles sur la saisie conservatoire des navires de mer du 10 Mai 1952
(Bruxelles).
- Convention internationale sur la saisie conservatoire de
navires du 12 Mars 1999 (Genève).
- Convention de Montego Bay du 10 décembres 1982 sur le
droit de la mer.
- Convention du 10 Avril 1926 pour l'unification de certaines
règles concernant les immunités des navires d'États
(BRUXELLES).
- Code civil.
- Code pénal.
- Loi n° 2006/015 du 29 Décembre 2006 portant
organisation judiciaire.
- Code de commerce.
- Loi française n°91-650 du 09 Juillet 1991
portant réforme des procédures civiles d'exécution.
- Décret français n°92-755 du 31 Juillet
1992 instituant de nouvelles règles relatives aux procédures
civiles d'exécution pour l'application de la loi n° 91-650 du 9
juillet 1991 portant réforme des procédures civiles
d'exécution.
- Loi française n°67-5 du 03 Janvier 1967 portant
statut des navires et autres bâtiments de mer.
- Décret français n°67-967 du 07 Octobre
1967 portant statut des navires et autre bâtiments de mer.
V- NOTES ET OBSERVATIONS DE
JURISPRUDENCES
A- Camerounaises
- PTPI-Bonanjo, ordonnance de référé
n°299 du 12 Avril 2007, affaire Salam international transport and trading
Co. Ltd contre A/S Dan Bunkery Ltd, navire « Salam 4 »
(inédit).
- PTPI-Bonanjo, ordonnance de référé
n°285 du 18 Mai 2007, affaire capitaine-commandant du navire
« Tim Bunk », Société NB shipping Ltd contre
Société Cameroun Continental Merchants Ltd, navire
« Tim Bunk » (inédit).
- PTPI-Bonanjo, ordonnance de référé
n°480 du 05 Octobre 2007, affaire Salam international transport and
trading Co. Ltd contre A/S Dan Bunkering, Ecobank S.A. et le greffier en chef
du tribunal de première instance de Douala-Bonanjo, navire
« Salam 4 » (inédit).
B- Étrangères
- Cour de cassation française (chambre commercial),
arrêt du 13 Janvier 1998, affaire agence maritime française
(Inchcape shipping services) et un armateur sénégalais (la
Cosenam) contre la société multi-services maritime
(M.S.M.) ; La saisie conservatoire des soutes et des créances du
navire « Saint-Pierre ».
- CA de Rouen, 25 avril 1986,
navire « ASKANIA ».
- Cass.com 1er octobre 1997, Société
Secil Maritima c/ Société Recofi.
TABLE DES
MATIÈRES
DÉDICACES
ii
REMERCIEMENTS
iii
LISTE DES PRINCIPALES
ABRÉVIATIONS
iv
SOMMAIRE
v
INTRODUCTION GÉNÉRALE
1
PARTIE I: L'ÉLAN
D'ORIGINALITÉ DE LA SAISIE DES NAVIRES
11
CHAPITRE I : L'ORIGINALITÉ
TIRÉE DE L'OUVERTURE DE LA SAISIE CONSERVATOIRE DES NAVIRES
13
SECTION I : L'ORIGINALITÉ QUANT
AUX BIENS SUSCEPTIBLES D'OUVERTURE DE SAISIE DES NAVIRES
13
Paragraphe 1 : La détermination de
l'assiette de la saisie des navires
14
A-La détermination évidente de
l'assiette de la saisie : le navire, seul bien susceptible de
saisie.......
14
B-La problématique de l'application des
règles de la saisie des navires à la saisie des accessoires du
navire.................................................................................................................
18
Paragraphe 2 : L'étendue des navires
susceptibles d'être saisis
23
A- Le navire auquel la créance se
rapporte
23
B- Les autres navires appartenant au
propriétaire du navire auquel la créance se rapporte
26
SECTION II : L'ORIGINALITÉ
QUANT À LA CRÉANCE SUSCEPTIBLE D'OUVERTURE DE LA SAISIE
CONSERVATOIRE DES NAVIRES
30
Paragraphe 1 : Les conditions relatives
à la créance à garantir
30
A- L'allégation d'une créance
maritime
30
1- Les créances maritimes au sens des
conventions internationales sur la saisie conservatoire des navires
31
a) La convention de Bruxelles du 10 mai
1952
31
b) La convention de Genève du 12 mars
1999
35
2- Le CCMM
38
B- Le caractère exhaustif ou non des
créances maritimes ?
40
C- La portée de l'obligation
d'allégation d'une créance maritime
43
Paragraphe 2 : La problématique de
l'exigence d'une créance maritime paraissant fondée dans son
principe
46
A- L'affirmation dans le CCMM
47
B- L'absence de l'exigence d'une
créance maritime paraissant fondée dans son principe dans les
conventions internationales
49
CONCLUSION DU CHAPITRE I
51
CHAPITRE II : L'ORIGINALITÉ
TIRÉE DE LA MISE EN OEUVRE DE LA SAISIE CONSERVATOIRE DES NAVIRES
53
SECTION I : L'ORIGINALITÉ DES
PERSONNES IMPLIQUÉES DANS LES OPÉRATIONS DE SAISIE CONSERVATOIRE
DES NAVIRES
54
Paragraphe 1 : L'intervention de
l'autorité judiciaire compétente
54
A- L'identification de l'autorité
judiciaire compétente
54
B- Le mode de saisine
56
Paragraphe 2 : L'intervention d'une
véritable institution propre au droit maritime : l'autorité
maritime compétente
58
A- L'identification de l'autorité
maritime compétente
58
B- L'opportunité ou non de
l'intervention de l'autorité maritime compétente dans la saisie
conservatoire des navires
59
SECTION II : L'ORIGINALITÉ DANS
LE DÉROULEMENT DE LA SAISIE CONSERVATOIRE DES NAVIRES
61
Paragraphe 1 : Le déroulement normal de
la saisie conservatoire des navires
62
A- L'originalité de l'effet de la
saisie conservatoire des navires : l'immobilisation du navire
saisi...................................................................................................................
62
1- L'immobilisation du navire au port de
saisie
63
2- La possibilité d'autorisation de
départ du navire
66
3- La problématique de la garde du
navire saisi
67
B- Les différentes diligences
à observer
69
Paragraphe 2 : Les incidents de la saisie
conservatoire des navires
71
A- La mainlevée de la saisie
71
1- La mainlevée amiable
71
2- La mainlevée judiciaire
72
B- Les effets de la mainlevée
76
CONCLUSION DU CHAPITRE II
78
CONCLUSION DE LA PREMIÈRE PARTIE
79
PARTIE II : L'ADAPTATION DES
RÈGLES DE SAISIE DE DROIT COMMUN À LA SAISIE DES NAVIRES
80
CHAPITRE I : L'ADAPTATION DES
RÈGLES DE LA SAISIE CONSERVATOIRE DES BIENS MEUBLES CORPORELS À
LA SAISIE CONSERVATOIRE DES NAVIRES
82
SECTION I : L'ADAPTATION QUANT AUX
CONDITIONS OBJECTIVES DE SAISIE DU BIEN
82
Paragraphe 1 : L'exigence d'une autorisation
judiciaire
83
A- La nécessité d'une
autorisation judiciaire
83
B- Le recours contre la décision
judiciaire de refus d'autorisation de saisie
85
Paragraphe 2 : Les conditions relatives au
bien, objet de la saisie
86
A- Le principe de la saisissabilité
des navires
86
B- Les exceptions : les
insaisissabilités
88
1- Le principe général
« saisie sur saisie ne vaut »
88
2- Les insaisissabilités en vertu de
l'article 51 de l'AUPSRVE
91
SECTION II : L'ADAPTATION QUANT AUX
CONDITIONS SUBJECTIVES DE SAISIE DU BIEN
93
Paragraphe 1 : Quant au saisissant
93
A- Le créancier originel
93
B- Les autres personnes pouvant saisir
95
1- Les ayants cause du créancier
originel
96
2- Les représentants du
créancier
97
Paragraphe 2 : Quant au saisi
98
A- Les personnes susceptibles d'être
saisies
98
1- Le propriétaire du navire à
l'origine de la créance
98
2- La saisie du navire entre les mains d'un
tiers
99
B- Les immunités
d'exécution
100
CONCLUSION DU CHAPITRE I
103
CHAPITRE II : L'ADAPTATION DES
RÈGLES DE LA SAISIE IMMOBILIÈRE À LA
SAISIE-EXÉCUTION DES NAVIRES
104
SECTION I : L'ADAPTATION QUANT AUX
CONDITIONS DE SAISIE
105
Paragraphe 1 : Quant aux conditions
objectives
106
A- L'exigence d'un titre
exécutoire
106
B- Les conditions liées aux navires
saisissables
109
1- Le principe de la saisissabilité
des navires
110
2- Les restrictions au principe de la
saisissabilité des navires
110
Paragraphe 2 : Quant aux conditions
subjectives
112
A- Les sujets actifs de la saisie
112
B- Les sujets passifs de la saisie
113
SECTION II : L'ADAPTATION QUANT
À LA PROCÉDURE DE SAISIE
115
Paragraphe 1 : La procédure normale de
saisie
116
A- Les étapes préalables
à l'adjudication du navire
116
1- L'établissement du commandement
valant saisie
116
2- L'établissement du cahier de
charges
120
3- L'audience éventuelle
122
4- La publicité en vue de la
vente
124
B- L'adjudication du navire
125
1- Le moment de l'adjudication
125
2- Le déroulement de
l'adjudication
126
3- Les effets de l'adjudication
129
Paragraphe 2 : Les incidents de la saisie des
navires
130
A- Les règles propres à chaque
type d'incident
130
1- Les incidents nés de la
pluralité des saisies : les oppositions
130
2- Les demandes en distraction
132
3- Les demandes en annulation
133
4- la folle enchère
135
5- l'ouverture d'une procédure
collective
136
B- Les règles communes à tous
les incidents
137
CONCLUSION DU CHAPITRE II
139
CONCLUSION DE LA DEUXIÈME PARTIE
140
CONCLUSION GÉNÉRALE
141
ANNEXES
144
BIBLIOGRAPHIE 215
TABLE DES MATIÈRES
221
* 1 À travers le
Traité du 17 Octobre 1993 relatif à l'harmonisation du droit des
affaires en Afrique signé à Port-Louis ; il a
été révisé le 17 Octobre 2008 au Québec.
* 2 Elle comprend
actuellement 17 États à savoir : le Bénin, le Burkina
Faso, le Cameroun, la Centrafrique, la République Fédérale
Islamique des Comores, le Congo, la Côte-d'Ivoire, le Gabon, la
Guinée Bissau, la Guinée Conakry, la Guinée
équatoriale, le Mali, le Niger, la République démocratique
du Congo, le Sénégal, le Tchad et le Togo.
* 3 Il s'agit des Actes
uniformes sur : le droit commercial général, sur les
sociétés commerciales et les groupements d'intérêt
économique, sur le droit comptable, sur les sûretés, sur
les procédures simplifiées de recouvrement et voies
d'exécution, sur les procédures collectives d'apurement du
passif, sur le transport de marchandises par route et tout récemment sur
les sociétés coopératives.
* 4 C'est une
procédure destinée à faire la preuve d'une
contrefaçon. Elle se présente sous deux aspects : la saisie
réelle de l'objet contrefaisant ou la saisie description qui
décrit l'objet ou le procédé contrefaisant. Cf. GUILLEN
(R.) et VINCENT (J.), Lexique des termes juridiques, 14ème
édition Dalloz 2003. Elle est régie au Cameroun par la loi
n°2000/11 du 19 Décembre 2000 relative au droit d'auteur et aux
droits voisins.
* 5 Il ne semble pas qu'une
saisie conservatoire des créances fiscales au sens de l'AUPSRVE ait
été prévue par les lois fiscales du Cameroun ; en
effet, à la lecture du Livre des Procédures Fiscales (LFP) du
Code Général des Impôts (CGI), il ressort qu'en attendant
le prononcé du jugement, toutes mesures conservatoires sont prises par
le Receveur des Impôts (article 62 alinéa 2 LFP). Voir à ce
sujet : ASSONTSA (R.), Le juge et les voies d'exécution OHADA
depuis la réforme OHADA, Thèse pour le doctorat en droit,
Université de Strasbourg 2009, p. 107.
* 6 La loi n°98/023 du
24 Décembre 1998 portant régime de l'aviation civile commence
à poser quelques principes de base en son article 43. Elle
prévoit que les aéronefs camerounais, sous réserve de
réciprocité des aéronefs étrangers, sont exempts de
saisie conservatoire dans les conditions fixées par la Convention pour
l'unification de certaines règles relatives à la saisie
conservatoire des aéronefs, signée à Rome le 29 Mai 1933,
ou de toute convention la modifiant et applicable au Cameroun. Mais cependant,
la saisie conservatoire est possible dans 02 cas : lorsque le
propriétaire de l'aéronef n'est pas domicilié au Cameroun
ou que l'aéronef est de nationalité étrangère, et
lorsque tout aéronef étranger ou camerounais ne remplit pas les
conditions prévues par la loi n°98/023 pour se livrer à la
circulation aérienne ou dont le pilote a commis une infraction. Voir
à ce sujet, ASSONTSA (R.), op.cit. , p. 108.
* 7 ASSONTSA (R.),
op.cit., p. 107.
* 8 Et c'est là le
plus important.
* 9 NDZUENKEU (A.), L'OHADA
et la réforme des procédures civiles d'exécution en droit
africain : l'exemple du Cameroun, Juridis Périodique n° 50,
Avril-Mai-Juin 2002, P.114 et ss.
* 10 GUILLEN (R.) et VINCENT
(J.), Lexique des termes juridiques, 14ème édition
Dalloz 2003, p.518.
Lire aussi dans ce sens, KUATE TAMEGHE (S.S.), La protection
du débiteur dans les procédures individuelles d'exécution,
l'Harmattan, 2004, p.19. TCHOU-BAYO (J.P.), Voies d'exécution et
procédures de distribution, Cours 1ère année de
Master 2009-2010 (inédit). DONNIER (M.), Voies d'exécution et
procédures de distribution, Litec, Paris, 2001, pp.6 et ss.
* 11 C'est l'ensemble des
règles juridiques relatives à la navigation maritime, au
transport des voyageurs et des marchandises par mer. GUILLEN (R.) et VINCENT
(J.),op.cit.
* 12 Exposé sur
« Le navire » par ZOGBELEMOU TOGBA HILAIRE, étudiant
en 4ème année de droit privé de
l'Université générale LANSANA CONTE DE SONFONIA (U.G.L.C.)
de la République de Guinée.
* 13 CEMAC signifie
Communauté Économique et Monétaire de l'Afrique Centrale
qui a remplacé très récemment l'UDEAC (Union
Douanière et Économique de l'Afrique Centrale) et regroupe six
États : Cameroun, Centrafrique, Congo, Gabon, Guinée
Équatoriale et Tchad. Deux de ceux-ci sont enclavés : la
Centrafrique et le Tchad ; ils sont obligés, de ce fait d'utiliser
le port de Douala (Capitale économique du Cameroun) comme plateforme de
transit pour leurs importations et exportations. Dès son adoption par le
conseil des ministres, ledit Code est destiné à abroger et
à remplacer le Code de la marine marchande UDEAC adopté par le
conseil des chefs d'État de l'UDEAC réunis à
Yaoundé (Capitale politique du Cameroun), à travers l'Acte
n°6/94 UDEAC-594-CE-30 du 22 Décembre 1994 et abroge aussi toutes
les dispositions antérieures contraires (article 607 du Code CEMAC).
* 14 Immatriculation,
hypothèque.
* 15 JULIEN (P.) et TAORMINA
(G.), Voies d'exécution et procédures de distribution,
2ème édition, LGDJ, 2010, P 511.
* 16 GUINCHARD (S.) et
MOUSSA (T.), Droit et pratique des voies d'exécution, Paris, Dalloz
2001-2002, p 416.
* 17 Il s'agit de la
Convention internationale pour l'unification de certaines règles sur la
saisie conservatoire des navires de mer du 10 Mai 1952 adoptée à
Bruxelles.
* 18 Seule une personne peut
détenir un patrimoine.
* 19 On ne peut détenir
qu'un seul patrimoine.
* 20 On ne peut scinder son
patrimoine au gré des affectations des éléments qui le
composent.
* 21 Mémoire MOULET
(J.), La saisie conservatoire du navire suite à son adjudication.
* 22 Voir article 2
alinéa 37 du CCMM, l'article 531 du Code civil.
* 23 Voir article 114 et
suivants du CCMM.
* 24 Article 54 de
l'AUPSRVE.
* 25 Art. 2(37) CCMM.
* 26 Tel est le cas du Petit
Larousse illustré, qui considère comme navire tout
«bâtiment ponté, d'assez fort tonnage, et destiné
à la navigation en pleine mer ». v. Petit Larousse
illustré, 1983. Face à l'absence de définition, la Cour de
cassation française rejettera le critère de tonnage retenu par la
Cour d'appel de Grenoble pour qualifier l'engin en cause. Bien que les deux
Cours s'accordent pour refuser la qualité de navire à l'engin
considéré, la Cour de cassation se fonde plutôt sur
l'inadéquation de l'engin à la navigation maritime. v. Cass. Civ.
6 décembre 1976,
www.plevsi.com/jurisprudence.maritime,
note de Cédric GROS.
* 27 Selon l'article 531
Code civil camerounais, « les bateaux, bacs, navires, moulins et
bains sur bateaux, et généralement toutes usines non
fixées par des piliers, et ne faisant point partie de la maison sont
meubles ». Il faut remarquer que ce ne sont pas tous les
systèmes juridiques qui considèrent le navire comme un meuble.
Objet de grande valeur, facilement individualisable grâce à la
possibilité d'organiser une publicité de tous les actes
l'affectant, l'article 130 al.1 du Code civil Russe cite parmi les immeubles
les bateaux de mer.
* 28 JAMBU-MERLIN (R.), Le
navire, hybride de meuble et d'immeuble ?, Études offertes à
Jacques FLOUR, Paris, Répertoire du Notariat Défrénois,
1979, p. 305.
* 29 LANGAVANT (E.), Droit
de la mer : les moyens de la relation maritime, Paris, Cujas, tome3, 1983,
p. 10.
* 30 Art. 2(39) CCMM.
* 31 CORNU (G.), Vocabulaire
juridique, Paris, PUF, 6e éd, 2004. En France, la Cour de
cassation laisse aux juges du fond le soin d'apprécier souverainement,
cas par cas, si l'engin est exposé ou non aux risques de mer, effectue
ou non une navigation maritime. v. VIALARD (A.), La qualification juridique des
engins de servitude portuaire, Études remises en l'honneur de Michel De
JUGLART (Aspects actuels du droit privé en fin du 20e
siècle), Paris, éd LGDJ, éd Montchrestien, éd
Litec, 1986, n°3, p. 341.
* 32 Toute une
littérature est née de l'absence de définition
précise ou unanime du navire. Même les conventions internationales
ne définissent le navire qu'en fonction de leur objet; ainsi, ce qui est
navire pour une convention, peut ne pas l'être pour une autre. Cette
lacune est observable dans la législation française, au point
où, les véritables contours de la notion de navire sont
précisés par la jurisprudence. v. LANGAVANT
(E.) op.cit., pp. 11-12; - RODIERE (R.), Traité
général de droit maritime, Introduction, l'armement, Paris,
Dalloz, t1, 1976, pp. 217 et s.
* 33 RODIERE (R.),
Traité général de droit maritime, Introduction,
l'armement, Paris, Dalloz, tome 1, 1976, pp. 217 et s.
* 34 « La
destination de bâtiment de mer ne résulte pas de la destination
qu'a pu envisager à l'origine le propriétaire ou le constructeur,
ni des mesures qu'ils auraient pu prendre à ce moment ; c'est
à la nature de la navigation que sont attachés le droit de suite
et les privilèges de l'article 191 ». Req. 22 juillet
1896, D. 1896. 1. 560 ; S. 1897. 1. 81, note Blondel ; - BRUZIN (A.),
NECTOUX (J.), Jurisprudence française de 1807 à 1952, Paris,
éd techniques. C'est en application de ce critère que la Cour de
cassation qualifie de navire, parce qu'il effectuait une navigation en mer et
n'était destiné qu'à cela, un bateau de type Zodiac
malgré son très faible tonnage (Cass. Com. 27 nov. 1972, Gipsy
II, DMF, 1973, 160, note PLUREAU ; SCAPEL, 1973, 4.
* 35 Béatrice
FAVAREL-VEIDIG, La saisie conservatoire des navires en droit français,
Gazette du Palais du 28 et 29 Septembre 2005.
* 36 LANGAVANT (E.),
op.cit., p.14.
* 37 HESSE (Ph.J.), BEURRIER
(J-P), CHAUMETTE (P.), TASSEL (Y.), MESNARD (A.-H.) et REZENTHEL (R.), Droits
maritimes, mer, navire et marins, tome 1, juridis service, 1995, p. 271.
* 38 Le Petit Larousse
illustré définit les agrès comme étant :
l'«ensemble de ce qui concerne la mâture d'un navire :
poulies, manoeuvres, voiles, vergues, cordages, etc ». Les
apparaux quant à eux sont des « objets formant
l'équipement d'un navire ». Cf Petit Larousse
illustré, Paris 1983.
* 39 Cet adage signifie que
l'accessoire suit le principal.
* 40 Il s'agit des textes
suivants : la loi n°91/650 du 09 Juillet 1991 portant réforme
des procédures civiles d'exécution ; le décret
n°92/755 du 31 Juillet 1992 instituant de nouvelles règles
relatives aux procédures civiles d'exécution pour l'application
de la loi n°91/650 du 09 Juillet 1991 portant réforme des
procédures civiles d'exécution ; la loi n°67/5 du 03
Janvier 1967 portant statut des navires et autres bâtiments de mer ;
et le décret n°67/967 du 07 Octobre 1967 portant statut des navires
et autres bâtiments de mer.
* 41 Cass.com, Arrêt
du 13 Janvier 1998 relatif à la saisie conservatoire des soutes et des
créances de fret du « Navire Saint-Pierre ».
* 42 Le juge de la Cour
d'appel de Rouen en l'espèce, aurait souhaité l'application du
décret n°92/755 du 31 Juillet 1992 instituant de nouvelles
règles relatives aux procédures civiles d'exécution pour
l'application de la loi n°91/650 du 09 Juillet 1991 portant réforme
des procédures civiles d'exécution, faisant office de droit
commun des procédures civiles d'exécution. Ceci étant, au
lieu de l'intervention du président du tribunal de commerce comme cela a
été dans le cas d'espèce, il légitime plutôt
le juge de l'exécution en vertu de l'article 211 du décret de
1992 ci-dessus cité qui dispose : « Le juge
compétent pour autoriser une mesure conservatoire est le juge de
l'exécution du lieu où demeure le
débiteur ».
* 43 Le décret
français n°67/967 du 07 Octobre 1967 portant statut des navires et
autres bâtiments de mer, fait office de droit interne français de
la saisie des navires, qu'il s'agisse de saisie conservatoire ou de
saisie-exécution des navires.
* 44 L'article 29 du
décret français susdit dispose en effet : « La
saisie conservatoire est autorisée par ordonnance rendue sur
requête par le président du tribunal de commerce ou, à
défaut, par le juge d'instance », parlant ainsi de la
saisie conservatoire des navires.
* 45 CA de Rouen, 25 avril
1986, navire « ASKANIA ».
* 46 DMF 1998, p.771, Note
Martin NDENDE.
* 47 C'est-à-dire la
saisie conservatoire des soutes du navire à titre individuel ; par
opposition à la saisie ut universi qui renvoie à la
saisie conservatoire des soutes du navire concomitamment à la saisie
conservatoire du navire auquel elles renvoient.
* 48 Article 114 du CCMM,
article 3 de la convention de Bruxelles de 1958, article 3 de la convention de
Genève de 1999.
* 49 Article 3 paragraphe
1.
* 50 MOULET (J.),
op.cit., p. 17.
* 51 GUINCHARD (S.) et
MOUSSA (T.), Droit et pratique des voies d'exécution, Paris, Dalloz,
2001-2002, p. 432.
* 52 C'est-à-dire
celui auquel se rapporte sa créance.
* 53 VIALARD (A.), La saisie
conservatoire du navire pour dettes de l'affréteur à temps.
À propos d'un arrêt de la cour d'appel de Pau du 6 décembre
1984, DMF 1985, p 579 et s.
* 54 Cass. Com. 13
décembre 1994, navire "Trident Beauty", arrêt n° 377
rendu sur pourvoi n° 92-14.307.
* 55 Article 1 paragraphe
1(o) de la convention.
* 56 Article 1 paragraphe
1(p) de la convention.
* 57 Article 1 paragraphe
1(q) de la convention.
* 58 Il convient toutefois
de noter qu'en droit interne français, et avec son attachement à
la conception personnaliste en la matière, découlant de la
consécration de l'action in personam de la saisie conservatoire
du navire, le créancier peut sans aucun doute saisir tout autre navire
du débiteur autre que celui auquel la créance se rapporte,
dès lors que la créance invoquée paraît
fondée dans son principe (article 29 alinéa 2 du décret
n°67-967 du 07 Octobre 1967 portant statut des navires et autre
bâtiments de mer). Voir également HESSE (Ph.J.), BEURRIER (J.-P.),
CHAUMETTE (P.), TASSEL (Y.), MESNARD (A.-H.) et REZENTHEL (R.),
op.cit., p.273 ; également MOULET (J.), op.cit.,
p. 14.
* 59 Article 3 paragraphe 1
de la convention.
* 60 Il s'agit des cas
suivants : la propriété contestée du navire, à
la copropriété contestée d'un navire, à sa
possession, son exploitation, ou les droits aux produits d'exploitation d'un
navire en copropriété ainsi qu'aux hypothèques
maritimes.
* 61 GOUILLOUD (R.),
L'émanation maritime-pour sortir de la clandestinité, DMF 1992
p.451, cité par HESSE (Ph.J.), BEURRIER (J.-P.), CHAUMETTE (P.), TASSEL
(Y.), MESNARD (A.-H.) et REZENTHEL (R.), op.cit., p.273.
* 62 Encore
dénommées single ship companies ou one ship
companies.
* 63 HESSE (Ph.J.), BEURRIER
(J.-P.), CHAUMETTE (P.), TASSEL (Y.), MESNARD (A.-H.) et REZENTHEL (R.),
ibidem.
* 64 JULIEN (P.) et TAORMINA
(G.), op.cit. P 523.
* 65 Cass.com., 21 janvier
1997, n°94-19.585, DMF 1997, p.612 , Note VIALARD , arrêt dans
lequel le fait que la société possédant le navire et celle
débitrice appartiennent au même groupe, n'a pas été
jugé suffisant ; cité par JULIEN (P.) et TAORMINA (G.),
op.cit. P 523.
* 66 Cass.com., 23 novembre
1999, Bull. civ IV, n°204, DMF 2000, obs. MOLFESSIS.
* 67 Nous pensons cependant
qu'en droit interne français et avec sa prise en considération de
l'obligation in personam qui voudrait que le débiteur engage
ses biens, tous ses biens et rien que ses biens, le créancier ne
pourrait pas saisir le navire qui est passé en d'autres mains que celles
du débiteur. Cependant, si le créancier fait valoir une
créance privilégiée, la solution inverse pourra s'imposer,
et dans la limite de l'opposabilité aux tiers de ce privilège
maritime. Voir en ce sens, CA de Pau, 6 décembre 1984, navire
« spartan », DMF 1985, p.589 ; voir
également, VIALARD, La saisie conservatoire du navire pour dettes de
l'affréteur à temps, DMF 1985, p.579.
* 68 La convention
internationale pour l'unification de certaines règles sur la saisie
conservatoire des navires de mer conclue à Bruxelles, le 10 mai 1952.
* 69 Les dispositions de la
présente Convention sont applicables dans tout État Contractant
à tout navire battant pavillon d'un État Contractant.
* 70 Sont actuellement
parties à la convention de Bruxelles, l'Algérie, l'Allemagne,
Antigua et Barbuda, les Bahamas, la Belgique, le Belize, le Bénin, le
Burkina Faso, le Cambodge, le Cameroun, la République centrafricaine, la
Chine, les Comores, la République du Congo (Kinshasa), le Costa Rica, la
Côte d'Ivoire, la Croatie, Cuba, le Danemark, Djibouti, la
République Dominicaine, l'Égypte, l'Espagne, les Fidji, la
Finlande, la France, le Gabon, la Grèce, la Grenade, le Guyana, la
Guinée, Haïti, Hong-Kong (application maintenue sur décision
de la République populaire de Chine), l'Irlande, l'Italie, Kiribati, la
Lettonie, la Lituanie (par acte du 29 avril 2002), le Luxembourg, Macao
(territoire chinois sous administration portugaise jusqu'au 20 décembre
1999, date depuis laquelle la Chine y exerce désormais sa
souveraineté), le Maroc, Maurice, la Mauritanie, la Namibie (par acte du
14 mars 2002), le Niger, le Nigéria, la Norvège, le Paraguay, les
Pays-Bas, la Pologne, le Portugal , la Roumanie, le Royaume-Uni, la
Fédération de Russie (qui a adhéré à la
convention de Bruxelles, avec effet à compter du 29 avril 1999, en
faisant des réserves dont la possibilité a été
prévue par l'article 10 de ladite convention, et s'est en outre
réservée la possibilité de ne pas appliquer la convention
aux navires de guerre et assimilés, ainsi qu'aux navires appartenant
à ou exploités par un État à des fins non
commerciales, Revue Comité Maritime International Newsletter, n°3,
1999 et n°1, 2000), Sabah (anciennement Bornéo Septentrional,
État membre de la fédération de Malaisie), le
Saint-Siège, Saint-Kitts-Et-Nevis, Sainte-Lucie,
Saint-Vincent-et-les-Grenadines, les Iles Salomon, Sarawak (État membre
de la fédération de Malaisie), le Sénégal ,les
Seychelles, la Slovénie, le Soudan, la Suède, la Suisse, la
Syrie, le Tchad, le Togo, les Tonga, les Iles Turks-et-Caicos, et Tuvalu.
* 71 Ce principe est ainsi
énoncé : « La législation
résultant des lois et règlements applicables dans l'État
fédéral du Cameroun et dans les États
fédérés à la date de prise d'effet de la
présente Constitution reste en vigueur dans ses dispositions qui ne sont
pas contraires aux stipulations de celle-ci, tant qu'elle n'aura pas
été modifiée par voie législative ou
réglementaire ». On retrouve le même principe dans
la Constitution des autres États de l'Afrique francophone. Il s'en suit
qu'en matière de transport, les lois et décrets antérieurs
à l'indépendance de ces États et qui n'ont pas
été remplacés par de nouveaux textes sont toujours
applicables dans ceux-ci ; c'est le cas de la convention de Bruxelles de
1952 en matière de saisie conservatoire de navires. L'article 68 de la
récente Constitution camerounaise du 18 janvier 1996 reprend ce
principe.
* 72 Cet article
énonce : « Toute Haute Partie Contractante peut,
au moment de la ratification, de l'adhésion, ou à tout moment
ultérieur, notifier par écrit au Gouvernement belge que la
présente Convention s'applique aux territoires ou à
certains des territoires dont elle assure les relations internationales. La
Convention sera applicable auxdits territoires six mois après la date de
réception de cette notification par le Ministère des Affaires
étrangères de Belgique, mais pas avant la date d'entrée en
vigueur de la présente convention à l'égard de cette Haute
Partie Contractante ».
* 73 Article 8 alinéa
2 de la Convention de Bruxelles : « Un navire battant
pavillon d'un État non Contractant peut être saisi dans l'un des
États Contractants, en vertu d'une des créances
énumérées à l'art. 1, ou de toute autre
créance permettant la saisie d'après la loi de cet
État ».
* 74 Cass. Com., 30 octobre
2000, Bull. civ. IV, n° 168, DMF décembre 2000, p. 1012, obs. J.-P.
Rémery, et sur renvoi après cassation, CA Montpellier,
1ère ch., sect. AS, 1er décembre 2003,
n° 01 /00384, DK Line c /Petredec Ltd, navire
« Sargasso ».
* 75 Rappelons cependant que
cette définition restrictive de la notion de créance maritime
n'avait pas cours, lorsque le juge, avant l'arrêt du 30 octobre 2000,
pouvait faire application de la convention de Bruxelles ou du droit du for
à son choix, c'est-à-dire, lorsque le navire bat pavillon d `un
État étranger non partie à la convention de Bruxelles.
Comme nous l'avons vu, cette solution n'aura donc désormais plus cours,
que lorsque l'État, et non plus le juge ou le créancier, aura
refusé à tout État non contractant, dans le cadre de son
pouvoir normatif réglementaire ou législatif, en application de
l'article 8 alinéa 3 de la convention de Bruxelles du 10 mai 1952, le
bénéfice de tout ou partie des dispositions de ladite convention.
Dans ce cas, et désormais dans ce cas seulement, il y a lieu de
considérer que la saisie peut être pratiquée pour toute
créance, telle que définie par le droit interne du for, solution
d'autant plus favorable au créancier saisissant que le droit interne
applicable sera moins restrictif que le droit conventionnel en matière
de définition de la créance saisissable.
* 76 La convention
internationale de 1999 sur la saisie conservatoire des navires.
* 77 Article 12 :
« La présente Convention est ouverte à la signature
des États au Siège de l'Organisation des Nations Unies, à
New York, du 1er septembre 1999 au 31 août 2000. Elle reste
ensuite ouverte à l'adhésion ».
Article 14 : « La présente
Convention entre en vigueur six mois après la date à laquelle 10
États ont exprimé leur consentement à être
liés par elle ».
v. Berlingreri, Analyse de la convention du 12 mars 1999 sur
la saisie conservatoire des navires, DMF 1999, p.403 ; CMI newsletter
n°1, 1999.
* 78 Il s'agit de
l'Estonie, la Lettonie, la Bulgarie, la Syrie et l'Espagne.
* 79 Article 8
alinéa 1 : « La présente Convention est
applicable à tout navire relevant de la juridiction d'un État
partie, quel qu'il soit, et battant ou non pavillon d'un État
partie ».
* 80 Article 8
alinéa 6 : « Aucune disposition de la présente
Convention ne modifie ou ne concerne les textes de loi en vigueur dans les
États parties relativement à la saisie d'un navire dans la
juridiction de l'État dont il bat pavillon, obtenue par une personne
ayant sa résidence habituelle ou son principal établissement dans
cet État, ou par toute autre personne qui a acquis une créance de
ladite personne par voie de subrogation, de cession, ou par tout autre
moyen ».
* 81 Article 10
alinéa 1 b : « Un État peut, au moment de la
signature, de la ratification, de l'acceptation, de l'approbation ou de
l'adhésion, ou à tout moment par la suite, se réserver le
droit d'exclure du champ d'application de la présente Convention (...)
les navires ne battant pas le pavillon d'un État
partie ».
* 82 Article 2
alinéa 2 : « Un navire ne peut être saisi qu'en
vertu d'une créance maritime, à l'exclusion de toute autre
créance ».
* 83 Article 1er
paragraphe 1(q) de la convention de Genève.
* 84 Article 1er
paragraphe 1(r) de la convention de Genève.
* 85 Article 1er
paragraphe 1(d) de la convention de Genève.
* 86 NGAMKAN (G.), Saisie
conservatoire de navires en Afrique centrale : l'avis de l'autorité
maritime compétente : une exigence superflue ? Juridis
Périodique n° 42, Avril-Mai-Juin 2000, P.111.
* 87 Pour une parfaite
illustration de cette règle, voir : Ord n° 2056 du 06 juillet
1998. PTPI Douala, aff. SMAC (Société de Manutention, d'Acconage
et de Consignation) c/ CNNI (Compagnie Nationale de Navigation
Intérieure), navire « La Lebombi) (inédit).
Ici, l'application du Code ne souffre d'aucune critique. La solution est la
même pour le créancier résidant au Congo ou au Gabon qui
saisit un navire battant pavillon congolais ou gabonais.
* 88 Article 120
alinéa 2 : « elle peut être accordée
dès lors qu'il est justifié d'une créance
maritime... ».
* 89 Article 119 du CCMM.
* 90 Un exemple patent est
le cas de l'hypothèque qui figure dans le texte de
référence à savoir la convention de Genève de 1999
(et même aussi dans celle de Bruxelles de 1952) mais qui ne figure
pourtant pas dans le CCMM.
* 91 Petit Larousse
illustré, 1983.
* 92 KODJO GNINTEDEM (M.D.),
L'efficacité des sûretés maritimes, Thèse pour
l'obtention du doctorat en droit, soutenue en 2011, université de
Yaoundé II p 219.
* 93 REMOND-GOUILLOUD, Droit
maritime, Pedone 1988, p 159, n°289 cité par NGAMKAN (G.),
op.cit., p 112.
* 94 Mme Lucy ASUAGBOR dans
son étude intitulée « la saisie conservatoire des
navires au regard du nouveau Code de la marine marchande » (in
Les Cahiers de l'AJMC, pp 14 et ss.) donne une liste exemplative des
créances ayant donné lieu à saisie devant les juridictions
camerounaises. Parmi celles-ci, figurent les primes impayées sur les
contrats d'assurance, or il est évident que celles-ci sont exclues par
le texte même de la convention (voir trib.com. Le Havre, 4 mars 1981,
navire « Aifanourias » in DMF 1981. 740,
« les primes d'assurances ne figurent pas dans
l'énumération de toute évidence
restrictive »). De même, dans l'ordonnance n°2056
rendue le 6 juillet 1998 par le PTPI de Douala, navire « La
Lebombi », aff. SMAC contre CNNI, la saisie est autorisée
pour l'intégralité de la créance alors que celle-ci n'est
que pour partie maritime ; en effet, la créance résultant de
la location des palettes a été admise alors qu'elle ne figure pas
au catalogue des créances maritimes prévues par la convention. Il
est à noter cependant que cette tendance latitudinaire n'est pas propre
aux juridictions camerounaises ; en effet, l'examen des décisions
rendues par les tribunaux français révèle que ceux-ci
prennent aussi beaucoup de liberté avec les textes applicables (voir
PESTEL-DEBORD (P.) et GARO (Ph.), La saisie conservatoire de navires, Pratic
Export 1994, pp 19 et s.). cf NGAMKAN (G.), op.cit., p 112.
* 95 BERLINGIERI (F.),
Analyse de la convention du 12 mars 1999 sur la saisie conservatoire des
navires, DMF 1999, p 404.
* 96 Dans le rapport de la
conférence diplomatique de l'ONU et de l'OMI sur la saisie conservatoire
des navires tenue au palais des Nations Unies à Genève du
1er au 12 mars 1999.
* 97 Par exemple, à
l'alinéa d du paragraphe 1 de l'article 1er qui couvrait les
créances relatives à l'environnement, on avait ajouté les
« dommages, coûts ou pertes de nature similaire à
ceux qui sont indiqués dans le présent alinéa
d ».
* 98 KODJO GNINTEDEM
(M.-D.), L'hypothèque maritime dans le Code CEMAC de la Marine
Marchande, mémoire pour l'obtention du master en droit,
université de Yaoundé II, février 2008, p 58.
* 99 KODJO GNINTEDEM
(M.-D.), L'efficacité des sûretés mariitmes,
op.cit., p 221.
* 100 Destinée
à être remplacée plus tard par la convention de
Genève.
* 101 Tel qu'il
résulte de l'AUPSRVE.
* 102 Article 54 de
l'AUPSRVE : « Toute personne dont la créance
paraît fondée dans son principe peut solliciter (...)
l'autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur tous les biens
mobiliers (...) si elle justifie de circonstances de nature à en menacer
le recouvrement ».
* 103 KODJO GNINTEDEM
(M.-D.), L'efficacité des sûretés maritimes,
op.cit., p 219.
* 104 C'est une
théorie selon laquelle, contrairement à la théorie
classique d'AUBRY et RAU, le patrimoine n'est pas lié à
l'idée de personne, ne constitue pas
« l'universalité juridique de tous les objets
extérieurs sur lesquels une personne a pu ou pourra avoir des droits
à exercer », mais correspondant à l'affectation
d'une masse de biens à un but, ce but pouvant être soit la
conservation des biens, soit leur liquidation, soit leur administration.
L'intérêt de cette théorie est d'admettre qu'une même
personne puisse avoir plusieurs patrimoines différenciés par la
diversité de leurs affectations. Cf GUILLEN (R.) et VINCENT (J.),
op.cit., p 423.
* 105
Ibidem ; contrairement à nos deux droits, le droit
français est gouverné par la conception personnaliste du
patrimoine. Ainsi, c'est la personne du débiteur qui répond de la
dette et non l'objet à l'origine de la créance. Ceci rejoint la
théorie classique du patrimoine telle que développée par
AUBRY et RAU et qui constitue l'ensemble des biens et des obligations d'une
personne, envisagé comme une universalité de droit,
c'est-à-dire comme une masse mouvante dont l'actif et le passif ne
peuvent être dissociés.
* 106 CA de Noumea, 14
octobre 2010, navire « King Tamatoa », obs. P.
DELEBECQUE, DMF, janvier 2011.
* 107 PTPI-Bonanjo,
ordonnance de référé n°299 du 12 Avril 2007, affaire
Salam international transport and trading Co. Ltd contre A/S Dan Bunkery Ltd,
navire « Salam 4 » (inédit).
* 108 KODJO GNINTEDEM
(M.-D.), L'efficacité des sûretés maritimes,
op.cit., p 231.
* 109 Cependant, en droit
français, et comme l'a rappelé la Cour de cassation, une telle
saisie n'est autorisée que pour les créances
privilégiées, à l'exclusion des autres créances
maritimes, et en raison du fort droit de suite attaché aux
privilèges maritimes. Cf Cass.com, 4 octobre 2005, navire
« Renaissance One », www.lexinter.net.
* 110 Article 120
alinéa 2 du CCMM.
* 111 Article 54 de
l'AUPSRVE : « Toute personne dont la créance
paraît fondée dans son principe peut, par requête,
solliciter (...) l'autorisation de pratiquer une mesure
conservatoire... ».
* 112 Article 54 in fine de
l'AUPSRVE : « ... si elle justifie des circonstances de
nature à en menacer le recouvrement ».
* 113 ASSI-ESSO (A.-M),
DIOUF (N.), OHADA, recouvrement des créances, Bruxelles, Bruylant, coll.
Droit uniforme africain, 2002, p 76.
* 114 Voir JULIEN (P.) et
TAORMINA (G.), op.cit., p 534, d'où il ressort que la
convention internationale de Bruxelles demeure inapplicable si la saisie est
effectuée dans un port français sur un navire battant pavillon
français par un créancier résidant en France. Dans ce cas
de figure, c'est la loi n°67/5 du 3 janvier 1967 et son décret
d'application n°67/967 du 27 octobre 1967 portant statut des navires et
autres bâtiments de mer qui demeurent applicables.
* 115 Article 29
alinéa 2 du décret de 1967 précité :
« L'autorisation peut être accordée dès lors
qu'il est justifié d'une créance paraissant fondée dans
son principe ».
* 116 Cass. Com. 12
janvier 1988, DMF 1992, somm. Comm. p.134.
* 117 Aix-en-Provence,
2ème ch., 6 décembre 1995, navire
« Friday Star », DMF 1996, n° 572, p. 591 et
s., obs. TASSEL (Y.).
* 118 RODIERE (R.),
Traité général de droit maritime, Tome 2, Le navire,
n° 199 ; cité par MOULET (J.), La saisie conservatoire du
navire suite à son adjudication, op.cit., p 15.
* 119 Cass.com., 3
février 1998, n°95-20.474 ; Cass.com., 30 octobre 2000,
préc., et sur renvoi après cassation, CA Montpellier,
1ère ch., sect. AS, 1èr décembre
2003, n°01/00384, DK Line c/Petredec Ltd, navire
« Sargasse ».
* 120 Article 54 de
l'AUPSRVE. Cependant, l'article 55 dresse les cas dans lesquels on pourrait
s'affranchir de cette autorisation judiciaire : « Une
autorisation préalable de la juridiction compétente n'est pas
nécessaire lorsque le créancier se prévaut d'un titre
exécutoire. Il en est de même en cas de défaut de paiement,
dûment établi, d'une lettre de change acceptée, d'un billet
à ordre, d'un chèque, ou d'un loyer impayé après
commandement dès lors que celui-ci est dû en vertu d'un contrat de
bail d'immeuble écrit ».
* 121 Article 64 de
l'AUPSRVE.
* 122 Article 36
alinéa 2 de l'AUPSRVE.
* 123 Ceci résulte
de l'imprécision de l'article 49 de l'AUPSRVE qui dispose :
« La juridiction compétente pour statuer sur tout litige
ou toute demande relative à une mesure d'exécution forcée
ou à une saisie conservatoire est le président de la juridiction
statuant en matière d'urgence ou le magistrat par lui
délégué ».
* 124 Article 120 du
CCMM.
* 125 Article 4 de la
convention de 1952.
* 126 Article 2 de la
convention de 1999.
* 127 Article
1er paragraphe 5 de la convention de 1999.
* 128 Il s'agit de la loi
n°2007/001 du 19 avril 2007 instituant le juge du contentieux de
l'exécution et fixant les conditions d'exécution au Cameroun des
décisions judiciaires et actes publics étrangers ainsi que des
sentences arbitrales étrangères.
* 129 En droit
français, la question semble être tranchée car en vertu de
l'article 29 du décret du 27 octobre 1967, la saisie conservatoire est
autorisée par ordonnance rendue sur requête par le
président du tribunal de commerce ou, à défaut, par le
juge d'instance.
* 130 PTPI-Bonanjo,
ordonnance de référé n°299 du 12 Avril 2007, Affaire
Salam international transport and trading Co. Ltd contre A/S Dan Bunkery Ltd,
navire « Salam 4 » (inédit); PTPI-Bonanjo,
ordonnance de référé n°285 du 18 Mai 2007, Affaire
capitaine-commandant du navire « Tim Bunk »,
Société NB shipping Ltd contre Société Cameroun
Continental Merchants Ltd, navire « Tim Bunk »
(inédit) ; PTPI-Bonanjo, ordonnance de référé
n°480 du 05 Octobre 2007, Affaire Salam international transport and
trading Co. Ltd contre A/S Dan Bunkering, Ecobank S.A. et le greffier en chef
du tribunal de première instance de Douala-Bonanjo, navire
« Salam 4 » (inédit).
* 131 ASSONTSA (R.),
op.cit., p 109.
* 132 Voir article 15
alinéa 2 de la loi n°2006/015 du 29 décembre 2006 portant
organisation judiciaire au Cameroun qui dispose : « Le
président du Tribunal de Première Instance ou le magistrat du
siège par lui délégué à cet effet est
compétent pour (...) rendre des ordonnances sur
requête ».
* 133 Article 30 du NCPC
français.
* 134 Il peut s'agir en
matière civile d'une assignation, requête.
* 135 TCHOU-BAYO (J.-P.),
Cour magistral des voies d'exécution, master 1, année
académique 2009-2010.
* 136 Article 120 du
CCMM.
* 137 Article 6 paragraphe
2 de la convention de Bruxelles : « Les règles de
procédure relatives à la saisie d'un navire, à l'obtention
de l'autorisation (...) sont régies par la loi de l'État
contractant dans lequel la saisie a été pratiquée ou
demandée » ; dans le même sens, l'article 2
paragraphe 4 de la convention de Genève dispose :
« Sous réserve des dispositions de la présente
convention, la procédure relative à la saisie d'un navire (...)
est régie par la loi de l'État dans lequel la saisie est
pratiquée ou demandée ».
* 138 TCHOU-BAYO (J.-P.),
Cour magistral des voies d'exécution, op.cit.
* 139 Article 120 du
CCMM.
* 140 Article 2
alinéa 11 du CCMM.
* 141 NGAMKAN (G.),
op.cit., p 113.
* 142 NGAMKAN (G),
ibidem.
* 143 Article 115 du
CCMM.
* 144 VIALARD (A.), La
saisie conservatoire des navires affrétés, conférence
prononcée à l'AFDM le 9 décembre 1993, in DMF 1994, 305,
cité par NGAMKAN (G), op.cit., p 114.
* 145 L'autorité
maritime n'émet qu'un simple avis. C'est en fait le PTPI qui autorise la
saisie conservatoire du navire.
* 146 En effet, l'article
118 du CCMM dispose que « L'avis de l'autorité maritime
compétente (...) a un caractère consultatif et ne lie pas le
juge ». Cette disposition ne doit pas nous fourvoyer car ledit
article précise qu'il s'agit des avis résultant des articles 116
et 117 sur l'autorisation de départ du navire et sur le délai
dans lequel le navire doit regagner le port, et non sur l'article 120 sur
l'autorisation de saisie.
* 147 NGAMKAN (G.),
op.cit. p 115.
* 148 Mutuelle
d'armateur.
* 149 Article 36
alinéa 2 de l'AUPSRVE : « L'acte de saisie rend
indisponibles les biens qui en sont l'objet » ; voir aussi
l'article 56 de l'AUPSRVE : « La saisie conservatoire
peut porter sur tous les biens mobiliers, corporels ou incorporels appartenant
au débiteur. Elle les rend indisponibles ».
* 150 En effet, la
convention internationale de Bruxelles qui a trait à la saisie
conservatoire des navires uniquement dispose en son article 1 paragraphe 2 que
la saisie selon elle signifie « l'immobilisation du
navire... » ; tel est l'esprit aussi de la convention
internationale de Genève (article 1 paragraphe 2). En droit interne, le
CCMM dispose en son article 121 que : « La saisie
conservatoire empêche le départ du navire. Elle ne porte aucune
atteinte aux droits du propriétaire ».
* 151 Cependant, en
matière de saisie-attribution, la créance, objet de la saisie est
attribuée au créancier saisissant dès l'exploit de
saisie.
* 152 ASSI-ESSO (A.-M.),
DIOUF (N.), OHADA, Recouvrement des créances, Bruxelles, Bruylant, Coll.
Droit uniforme africain, 2002, p 67.
* 153 Telle est la
même formulation en droit interne français de l'article 30 du
décret du 27 octobre 1967 précité.
* 154 PRINTEMS (F.),
L'immobilisation du navire dans un port suite à une décision
judiciaire de saisie conservatoire ou la notion de port victime, revue
juridique NEPTUNUS.
* 155 Par conséquent
une libération immédiate des mêmes quais à la fin
des opérations.
* 156 Cette dernière
répondant aux besoins de l'existence d'une autorité pour faire
respecter les règles découlant de l'activité du port.
* 157 Article 116 du
CCMM.
* 158 À l'instar du
droit interne français qui prévoit à l'article 27 du
décret de 1967 précité que :
« Nonobstant toute saisie, le président du tribunal de
grande instance statuant en la forme des référés peut
autoriser le départ du navire pour un ou plusieurs voyages
déterminés. Pour obtenir cette autorisation, le requérant
doit fournir une garantie suffisante ».
* 159 Article 117
alinéa 1 du CCMM.
* 160 Article 117
alinéa 2 du CCMM.
* 161 Voir l'article 5 de
la convention de Bruxelles et l'article 4 de la convention de Genève.
* 162 Article 124 du
CCMM.
* 163 Cependant en droit
interne français, la question de la garde du navire n'a pas
été résolue par les dispositions qui font office de droit
interne français de la saisie conservatoire des navires mais
plutôt par celles sur la saisie-exécution. En l'absence de telles
dispositions et à l'inverse de ce qui est observé en droit
interne CEMAC, le C.E. a exclu la possibilité pour l'autorité
portuaire d'être désignée gardien du navire saisi (C.E. 20
janvier 1989, Dalloz 1989, p 619). De ce fait, généralement, les
huissiers de justice, de leur propre initiative, dans leur procès-verbal
de saisie, désignent un gardien ; ce peut être le clerc de
l'huissier, le commandant du port (uniquement en sa qualité de personne
privée), le capitaine du navire ou encore le débiteur saisi.
* 164 Article 36
alinéa 1 de l'AUPSRVE.
* 165 Article 124 in
fine du CCMM.
* 166 Lexique des termes
juridiques, Paris, Dalloz, 14ème éd, 2003, pp
398-399.
* 167 Article 122 du
CCMM.
* 168 Apparaissant à
l'article 64 de l'AUPSRVE.
* 169 Article 125 du
CCMM.
* 170 Article 61 de
l'AUPSRVE : « Si ce n'est dans le cas où la saisie
conservatoire a été pratiquée avec un titre
exécutoire, le créancier doit, dans le mois qui suit ladite
saisie, à peine de caducité, introduire une procédure ou
accomplir les formalités nécessaires à l'obtention d'un
titre exécutoire ».
* 171 Article 60 de
l'AUPSRVE : « L'autorisation judiciaire est caduque si la
saisie conservatoire n'est pas pratiquée dans un délai de trois
mois à compter de la décision autorisant la
saisie ».
* 172 Voir supra, p 65.
* 173 La lettre de garantie
club permet la libération du navire ou encore elle empêche la
saisie conservatoire du navire en offrant au réclamant du transporteur
une garantie financière à la place du navire. Elle est
délivrée par les associations mutuelles de protection et
d'indemnisation plus communément appelées P & I
club.
* 174 JULIEN (J.) et
TAORMINA (G.), op.cit., p 546.
* 175 Article 5 de la
convention de Bruxelles : « Le tribunal ou toute autre
autorité judiciaire compétente dans le ressort duquel le navire a
été saisi, accordera la mainlevée de la saisie lorsqu'une
caution ou une garantie suffisante auront été
fournies... ».
* 176 Article 4 paragraphe
1er de la convention de Genève : « Un
navire qui a été saisi doit être libéré
lorsqu'une sûreté d'un montant suffisant a été
constituée... ».
* 177 Article 116 du
CCMM : « ... Pour obtenir cette autorisation, le
requérant doit fournir une caution suffisante ».
* 178 Ce texte dispose en
effet en son article 4 : « 1. Un navire qui a
été saisi doit être libéré lorsqu'une
sûreté d'un montant suffisant et sous une forme satisfaisante a
été constituée, sauf dans le cas où la saisie est
pratiquée en raison des créances maritimes
énumérées aux alinéas s) et t) du paragraphe 1 de
l'article premier. En ce cas, le tribunal peut permettre l'exploitation du
navire par la personne qui en a la possession, lorsque celle-ci aura
constitué une sûreté d'un montant suffisant, ou
régler de toute autre façon la question de la gestion du navire
pendant la durée de la saisie.
2. Si les parties intéressées ne parviennent
pas à un accord sur l'importance et la forme de la sûreté,
le tribunal en détermine la nature et le montant, qui ne peut
excéder la valeur du navire saisi.
3. Aucune demande tendant à la libération du
navire contre la constitution d'une sûreté ne peut être
interprétée comme une reconnaissance de responsabilité ni
comme une renonciation à toute défense ou tout droit de limiter
la responsabilité.
4. Si un navire a été saisi dans un
État non partie et n'est pas libéré malgré la
constitution d'une sûreté concernant ce navire dans un État
partie relativement à la même créance, la mainlevée
de cette sûreté est autorisée par le tribunal de
l'État partie, par ordonnance rendue sur requête;
5. Si, dans un État non partie, le navire est
libéré contre la constitution d'une sûreté
suffisante concernant ce navire, la mainlevée de toute
sûreté constituée dans un État partie relativement
à la même créance est autorisée par ordonnance si le
montant total de la sûreté constituée dans les deux
États dépasse :
a) Soit le montant de la créance au titre de
laquelle la saisie a été pratiquée;
b) Soit la valeur du navire; la moins élevée
des deux devant prévaloir. Cette mainlevée n'est toutefois
autorisée par ordonnance que si la sûreté constituée
est effectivement disponible dans l'État non partie et librement
transférable au profit du créancier ».
* 179 PTPI-Bonanjo,
ordonnance de référé n°480 du 05 Octobre 2007,
affaire Salam international transport and trading Co. Ltd contre A/S Dan
Bunkering, Ecobank S.A. et le greffier en chef du tribunal de première
instance de Douala-Bonanjo, navire « Salam 4 »
(inédit).
* 180 PTPI-Bonanjo,
ordonnance de référé n°285 du 18 Mai 2007, affaire
capitaine-commandant du navire « Tim Bunk »,
Société NB shipping Ltd contre Société Cameroun
Continental Merchants Ltd, navire « Tim Bunk »
(inédit).
* 181 Protection and
indemnity club, ce sont les associations de protection et d'indemnisation
d'armateurs qui s'assurent mutuellement contre les risques de
responsabilité qu'ils encourent vis-à-vis des tiers lors de
l'exploitation des navires et contre quelques responsabilités
contractuelles découlant de la gestion et de l'exploitation des
navires.
* 182
www.cabinet-ngamkan.com.
* 183 Article 126 du CCMM,
inspiré de l'article 6 paragraphe 2 de la convention de
Genève.
* 184 Aussi bien la saisie
des biens meubles que celle des biens immeubles.
* 185 Aussi bien la saisie
conservatoire que la saisie-exécution des navires.
* 186 Étant
donné que les immeubles ne peuvent être conservatoirement
saisis.
* 187 Article 4 de la
convention de Bruxelles : « Un navire ne peut être
saisi qu'avec l'autorisation d'un Tribunal ou de toute autre Autorité
Judiciaire compétente de l'État Contractant dans lequel la saisie
est pratiquée » ; voir aussi l'article 2 de la
convention de Genève ultérieurement applicable.
Article 6 alinéa 2 de la convention de Bruxelles :
« Les règles de procédure relatives à la
saisie d'un navire, à l'obtention de l'autorisation visée
à l'art. 4 et à tous autres incidents de procédure qu'une
saisie peut soulever sont régies par la loi de l'État Contractant
dans lequel la saisie a été pratiquée ou
demandée ».
* 188 Article 120 du
CCMM : « La saisie conservatoire est autorisée par
ordonnance rendue sur requête par l'autorité judiciaire
compétente... ».
* 189 Article 62 de
l'AUPSRVE.
* 190 Il a
déjà été dit que le décret français
de 1967 fait office de droit interne français en matière de
saisie conservatoire de navire. Son article 29 dispose :
« La saisie conservatoire est autorisée par ordonnance
rendue sur requête par le président du tribunal de commerce ou,
à défaut, par le juge d'instance ».
* 191 Cass.com
1er octobre 1997, Société Secil Maritima c/
Société Recofi.
* 192 GOUILLOUD (R.), Droit
maritime, Pédone, 2ème édition 1993,
n°289, p. 181.
* 193 Article 59 de
l'AUPSRVE.
* 194 Cet article
dispose : « Une autorisation judiciaire préalable de
la juridiction compétente n'est pas nécessaire lorsque le
créancier se prévaut d'un titre exécutoire. Il en est de
même en cas de défaut de paiement, dûment établi,
d'une lettre de change acceptée, d'un billet à ordre, d'un
chèque, ou d'un loyer impayé après commandement dès
lors que celui-ci est dû en vertu d'un contrat de bail d'immeuble
écrit ».
* 195 Dans le cas
camerounais, il s'agirait du PTPI ou du magistrat délégué
par lui, ceci en vertu de l'article 15 alinéa 2 de la loi
n°2006/015 du 29 décembre 2006 portant organisation judiciaire.
* 196 Article 50 de
l'AUPSRVE.
* 197 RODIÈRE (R.),
Droit maritime, Le navire, Paris, Dalloz, t.1 1980, n°190 : il faut
entendre par « navire prêt à faire
voile », celui qui a « reçu ses
expéditions pour le départ, congé, patente de
santé », c'est-à-dire que le navire est prêt
à appareiller.
* 198 Article 3 de la
convention de Bruxelles dont il ressort que le créancier peut saisir le
navire qui serait prêt à faire voile.
* 199 GEORGIEVA (R.), La
saisie conservatoire des navires (Étude comparative en Droit
Français et en Droit International), Mémoire pour le Master 2
« Droit Maritime et des Transports »,
Université PAUL CÉZANNE d'Aix-Marseille III, année
universitaire 2010-2011, p 30.
* 200 Cet article
dispose : « Les biens et droits insaisissables sont
définis par chacun des États parties ».
* 201 ASSI-ESSO (A.-M.),
DIOUF (N.), op.cit., p 58.
* 202 La future convention
de Genève reprend en son article 5 les exigences de la convention de
Bruxelles mais avec plus de souplesse et de tolérance puisque cet
article dispose : « 1. Lorsque, dans un État, un
navire a déjà été saisi et libéré ou
qu'une sûreté a déjà été
constituée pour garantir une créance maritime, ce navire ne peut
ensuite faire l'objet d'aucune saisie fondée sur la même
créance maritime, à moins que :
a) La nature ou le montant de la sûreté
concernant ce navire déjà constituée en vertu de la
même créance ne soit pas suffisant, à condition que le
montant total des sûretés ne dépasse pas la valeur du
navire; ou
b) La personne qui a déjà constitué
la sûreté ne soit ou ne paraisse pas capable d'exécuter
tout ou partie de ses obligations; ou
c) La mainlevée de la saisie ou la
libération de la sûreté ne soit intervenue :
i) soit à la demande ou avec le consentement du
créancier agissant pour des motifs raisonnables,
ii) soit parce que le créancier n'a pu par des
mesures raisonnables empêcher cette mainlevée ou cette
libération.
2. Tout autre navire qui serait autrement susceptible
d'être saisi en vertu de la même créance maritime ne peut
être saisi à moins que :
a) La nature ou le montant de la sûreté
déjà constituée en vertu de la même créance
ne soit pas suffisant; ou
b) Les dispositions du paragraphe 1 b) ou c) du
présent article ne soient applicables ».
* 203 Cass.com, 8 mars
2011, Société Indian Empress Limited c/ Société
Nautical Technologies, navire « Indian
Empress ».
* 204 Sur l'arrêt
d'appel, V. Aix-en-Provence, 12 nov. 2009, DMF 2010. 52, obs.
RÉMOND-GOUILLOUD.
* 205 On précisera
qu'en matière de saisie conservatoire de navire, ce n'est pas le juge de
l'exécution qui est compétent, mais le président du
tribunal de commerce ou à défaut celui du tribunal d'instance,
statuant également par voie d'ordonnance ; V. décret n°
67-967 du 27 octobre 1967, article 29 -- V. Racine, Rép. com.,
v° Navire [Saisie et vente publique], mai 2008, nos 26 s.
* 206 Trib. Com
Montpellier, 19 octobre 1978, navire « PHOEBUS »,
DMF 1979, p.336.
* 207 Ibidem.
* 208 GUILLIEN (R.) et
VINCENT (J.), op.cit., p 178.
* 209 Article 28
alinéa 1 de l'AUPSRVE.
* 210 Article 3 de la
convention de Bruxelles : « ... tout demandeur peut
saisir... ». Au sens de cette convention, le terme demandeur
renvoie à une « personne, invoquant à son profit,
l'existence d'une créance maritime » (article 1
paragraphe 4).
* 211 Le CCMM se contente
uniquement de l'allégation d'une créance maritime paraissant
fondée dans son principe, même si cela renvoie à la
qualité de créancier.
* 212 Ceci en vertu de
l'article 28 alinéa 2 de l'AUPSRVE qui dispose :
« Sauf s'il s'agit d'une créance hypothécaire ou
privilégiée, l'exécution est poursuivie en premier lieu
sur les biens meubles et, en cas d'insuffisance de ceux-ci, sur les
immeubles ».
* 213 Article 531 du Code
Civil.
* 214 Ce sont des
situations rarissimes et même inexistantes car il est illogique que le
navire, au regard de sa valeur colossale ne suffise pas à
désintéresser les créanciers maritimes.
* 215 Voy. l'article 26 de
la loi française du 9 juillet 1991, lequel prévoit
que « sauf disposition contraire, l'exercice d'une mesure
d'exécution ou d'une mesure conservatoire est considéré
comme un acte d'administration sous réserve des dispositions du Code
civil relatives à la réception des deniers ».
* 216 L'ayant cause
universel est celui qui détient la totalité des biens du de
cujus (le défunt) à cause de mort ; c'est le cas de
l'héritier légal. L'ayant cause à titre universel ne
détient qu'une quote-part seulement des biens du de cujus.
L'ayant cause à titre particulier ne détient qu'un bien ou un
droit particulier : par exemple, le cessionnaire d'une créance ou
un légataire particulier.
* 217 Les huissiers de
justice sont des officiers ministériels qui bénéficient en
principe d'un monopole en matière de saisie. Les fonctions d'huissier de
justice sont réglementées par les lois nationales de chaque
État partie. C'est par conséquent cette loi nationale qui
détermine si un huissier peut instrumenter ou non en dehors de son
ressort territorial. De manière générale, la remise
à l'huissier d'un titre en vue de la saisie emporte élection de
domicile en son étude pour toutes notifications relatives à cette
saisie. Si ce mandat général est suffisant pour les saisies
mobilières, la saisie immobilière exige la remise à
l'huissier d'un pouvoir spécial (article 254 de l'AUPSRVE).
* 218 En dehors des
huissiers de justice, l'Acte uniforme cite comme personnel de la saisie les
agents d'exécution. Cette appellation désigne à notre avis
les personnes physiques ou morales qui, d'une manière habituelle ou
occasionnelle procèdent au recouvrement des créances pour le
compte d'autrui notamment dans les États où la profession
d'huissier n'existe pas où n'est pas réglementée. Cette
dénomination pourrait concerner les agents huissier du trésor,
les agents de poursuite, les agents des douanes, les ingénieurs et
agents techniques des eaux et forêts, les commissaires priseurs.
* 219 Voy. l'article 122 du
CCMM déjà analysé plus haut dans le cadre des diligences
à observer.
* 220 JULIEN (P.) et
TAORMINA (G.), op.cit., pp 542 et 543.
* 221 Cette
possibilité a été admise en pratique : CA de Rennes,
16 juin 1968, DMF 1969, p 741, note Bokobza-Boquet ; CA d'Aix-en-Provence,
25 février 1986, DMF 1987, p 164, note Pestel-Debord.
* 222 Ce procès
verbal de saisie pourrait être vraisemblablement celui de l'article 122
du CCMM et déjà analysé.
* 223 Voir article 122 du
CCMM.
* 224 Article 114
alinéa 2 du CCMM.
* 225 JULIEN (P.) et
TAORMINA (G.), op.cit., pp 520 et 521.
* 226 JULIEN (P.) et
TAORMINA (G.), ibidem.
* 227 Cass.com, 23
novembre, Bull.civ. IV, n°204, DMF 2000, p.719, obs. N. MOLFESSIS.
* 228 Qu'il est
proposé d'appeler saisie-vente dans le projet de révision du
CCMM, initié en 2010.
* 229 Article 127 à
133 du CCMM.
* 230 Ceci peut s'analyser
à travers la lecture de l'article 128 du CCMM.
* 231 Article 120
alinéa 2 du CCMM.
* 232 Article 125 du
CCMM.
* 233 Constatant une
créance pas forcément maritime.
* 234 Cet article
énonce en effet : « Lorsqu'elle n'est pas
précédée d'une saisie conservatoire, la
saisie-exécution est demandée au juge du fond dans les conditions
et selon la procédure en vigueur pour les saisies immobilières.
Un procès-verbal est dressé et un gardien est
désigné dans les mêmes conditions qu'en matière de
saisie conservatoire ».
* 235 Article 34 AUPSRVE
(solution implicite).
* 236 Article 12
alinéa 7 et 26 de l'AUPSRVE.
* 237 Il s'agit d'une
procédure principale ou incidente dirigée contre un acte
authentique pour montrer qu'il a été altéré,
modifié, complété par de fausses indications, ou
même fabriqué. Une procédure analogue peut être
utilisée à titre principal ou incident contre un acte sous seing
privé ayant déjà fait l'objet d'une vérification
d'écriture si la partie soutient que l'acte a été
matériellement altéré ou falsifié depuis sa
vérification. GUILLIEN (R.) et VINCENT (J.), op.cit., p 270.
* 238 ASSI-ESSO (A.-M.),
DIOUF (N.), OHADA, op.cit., p 54.
* 239 L'article 32 de
l'AUPSRVE dispose en effet : « À l'exception de
l'adjudication des immeubles, l'exécution forcée peut être
poursuivie jusqu'à son terme en vertu d'un titre exécutoire par
provision... ».
* 240 POUGOUE (P.-G.) et
TEPPI KOLOKO (F.), La saisie immobilière dans l'espace OHADA. PUA 2010,
p 59.
* 241 Dans la saisie
conservatoire des navires, dans certaines circonstances déjà
examinées, l'on peut saisir le navire qui n'appartient pas ou plus au
débiteur.
* 242 Article 71 du CCMM :
« Si une saisie porte sur des parts représentant plus de
la moitié du navire, la vente sera étendue à tout le
navire, sauf opposition des autres copropriétaires pour des motifs
reconnus sérieux et légitimes. ».
* 243 Article 265 de
l'AUPSRVE.
* 244 Article 877 du Code
civil : « Le titre exécutoire contre le défunt
l'est aussi contre l'héritier, huit jours après que la
signification lui en a été faite ».
* 245 Article 22 de l'Acte
uniforme portant organisation des sûretés adopté le 15
décembre 2010 : « La caution peut garantir son
engagement en consentant une sûreté réelle sur un ou
plusieurs de ses biens ».
* 246 Cette exigence de
l'Acte uniforme est une source de frais inutiles. Une simple mention du titre
exécutoire aurait suffi pour permettre à l'acte de remplir sa
fonction.
* 247 C'est une sorte de
mise en demeure destinée à attirer l'attention du débiteur
sur les conséquences du défaut de paiement.
* 248 Selon ce texte,
« La juridiction devant laquelle la vente est poursuivie est
celle ayant plénitude de juridiction dans le ressort territorial
où se trouvent les immeubles (sous-entendus navires
saisis) ».
* 249 Ce texte
dispose : « Les formalités prévues (...) par
les articles 254, 267 et 277 ci-dessus ne sont sanctionnées par la
nullité que si l'irrégularité a eu pour effet de causer un
préjudice aux intérêts de celui qui
l'invoque ».
* 250 Au Cameroun il s'agit
principalement du Président du Tribunal de Première Instance
selon l'article 182 du CPCC.
* 251Il s'agit de :
1) l'intitulé de l'acte ;
2) l'énonciation du titre exécutoire en vertu
duquel les poursuites sont exercées contre le débiteur et du
commandement avec la mention de sa publication ainsi que des autres actes et
décisions judiciaires intervenus postérieurement au commandement
et qui ont été notifiés au créancier poursuivant
;
3) l'indication de la juridiction ou du notaire convenu entre
le poursuivant et le saisi devant qui l'adjudication est poursuivie ;
4) l'indication du lieu où se tiendra l'audience
éventuelle prévue par l'article 270 ci-après;
5) les nom, prénoms, profession, nationalité,
date de naissance et domicile du créancier poursuivant ;
6) les nom, qualité et adresse de l'avocat poursuivant
;
7) la désignation du navire saisi contenue dans le
commandement ou le procès verbal de description dressé par
l'huissier ou l'agent d'exécution ;
8) les conditions de la vente et, notamment, les droits et
obligations des vendeurs et adjudicataires, le rappel des frais de poursuite et
toute condition particulière ;
9) la mise à prix fixée par le poursuivant,
laquelle ne peut être inférieure au quart de la valeur
vénale du navire. La valeur du navire doit être
appréciée, soit au regard de l'évaluation faite par les
parties lors de la conclusion de l'hypothèque maritime, soit, à
défaut, par comparaison avec les transactions portant sur des navires de
nature et de situation semblables.
* 252 Article 266 de
l'AUPSRVE : « Le cahier des charges est le document,
rédigé et signé par l'avocat du créancier
poursuivant, qui précise les conditions et modalités de la vente
du navire saisi. Il est déposé au greffe de la juridiction dans
le ressort de laquelle se trouve le navire saisi dans un délai maximum
de cinquante jours à compter de la publication du commandement, à
peine de déchéance ».
* 253 Article 297
alinéa 1er de l'AUPSRVE.
* 254 Article 273 de
l'AUPSRVE.
* 255 L'article 272
alinéa 1er rappelle d'ailleurs expressément que cet
échange doit être fait dans le respect du principe du
contradictoire.
* 256 Article 275
alinéa 2 de l'AUPSRVE.
* 257 Il s'agit de :
1) les noms, prénoms, professions, domiciles ou demeures des parties et
de leurs avocats ;
2) la désignation des navires saisis telle qu'elle est
insérée dans le cahier des charges ;
3) la mise à prix ;
4) l'indication des jour, lieu et heure de l'adjudication, de
la juridiction compétente ou du notaire convenu devant qui elle se
fera.
* 258 Car les
intéressés peuvent oublier la vente.
* 259 Car il ne faut pas
que les intéressés soient obligés de se décider
dans la précipitation.
* 260 L'article 297 de
l'AUPSRVE prévoit que le non-respect des délais prévus par
l'article 276 est sanctionné par la déchéance. Cette
règle est curieuse. On peut en effet se demander comment sanctionner par
la déchéance celui qui a accompli plus tôt que prévu
la formalité requise. Il nous semble que celui qui a accompli les
mesures trop tôt et qui s'en rend compte peut parfaitement les
refaire.
* 261 L'interdiction
d'enchérir en ce qu'elle concerne les personnes notoirement insolvables
est sans intérêt. En effet, il y a une formule que l'on retrouve
presque dans tous les cahiers des charges et qui apparaît comme une
clause de style « nul ne peut enchérir sans versement
préalable d'une caution égale au montant de la mise à prix
sauf dispense de l'avocat poursuivant ».
* 262 Article 282
alinéa 3 de l'AUPSRVE : « Les offres sont
portées par ministère d'avocat ou par les enchérisseurs
eux-mêmes ; le même avocat peut représenter plusieurs
enchérisseurs lorsque ceux-ci désirent se porter
co-adjudicataires ».
* 263 En cas de remise, les
mesures de publicité sont réitérées.
* 264 Article 283
alinéa 6.
* 265 Cette
déclaration d'acceptation ne doit pas être confondue avec la
déclaration de command qui consiste pour l'adjudicataire à faire
savoir que ce n'est pas pour son propre compte qu'il s'est rendu
acquéreur, mais pour une autre personne dont il révèle
alors le nom. La déclaration de command doit être faite dans les
vingt-quatre heures.
* 266 Article 286
alinéa 1er de l'AUPSRVE. Cette disposition, curieusement,
revient à contredire celle de l'article 284 alinéa 2.
* 267 La décision
judiciaire d'adjudication ne tranche pas de litige ; elle se borne
à constater officiellement le déroulement des enchères et
le nom de l'adjudicataire devenu le nouveau propriétaire du
navire ; pour cette raison, elle est considérée comme une
décision gracieuse.
* 268 La possibilité
d'une action principale en nullité prouve que la décision
d'adjudication est une décision gracieuse.
* 269 Ces obligations
doivent être exécutées dans les vingt jours de
l'adjudication.
* 270 C'est une sorte
d'exception d'inexécution.
* 271 Cette règle a
déjà été observée lorsqu'il s'agissait de
parler de la saisie conservatoire des navires.
* 272 Article 260 de
l'AUPSRVE.
* 273 Article 302 de
l'AUPSRVE.
* 274 Le tribunal ne peut
ordonner d'office la jonction ; il faut nécessairement une
requête de l'une des parties.
* 275 L'alinéa 2 de
l'article 302 apporte une importante précision permettant de
déterminer le premier saisissant. Selon ce texte, « si les
commandements ont été publiés le même jour, la
poursuite appartient au créancier dont le commandement est le premier en
date et si les commandements sont de même jour, au créancier le
plus ancien ». L'expression « créancier le
plus ancien » est cependant énigmatique. En France, il
est question de l'avocat le plus ancien, cela se comprend puisque
l'ancienneté de l'inscription confère certains droits. Si on peut
s'appuyer sur les dates d'inscription pour déterminer
l'ancienneté des avocats, un tel critère ne peut manifestement
être utilisé pour des créanciers. L'Acte uniforme veut-il
se référer à la date de la créance ? Nous le
pensons.
* 276 Ce commandement est
publié pour les biens non compris dans le premier commandement.
* 277 Il serait
difficilement concevable d'invalider la procédure antérieurement
à l'audience éventuelle puisque les demandes dirigées
contre cette procédure doivent être introduites avant cette
audience et jugées au cours de celle-ci.
* 278 L'article 9 de
l'AUPCAP dispose : « La décision prévue par
l'article 8 suspend ou interdit toutes les poursuites individuelles tendant
à obtenir le paiement des créances désignées par le
débiteur et nées antérieurement à ladite
décision. La suspension concerne aussi bien les voies d'exécution
que les mesures conservatoires ».
* 279 L'article 75 de
l'AUPCAP dispose : « La décision d'ouverture suspend
ou interdit toutes les poursuites individuelles tendant à faire
reconnaître des droits et des créances ainsi que toutes les voies
d'exécution tendant à en obtenir le paiement, exercées par
les créanciers composant la masse sur les meubles et immeubles du
débiteur ».
* 280 Article 76 et suivants
de l'AUPCAP.
* 281 Article 149 et 150 de
l'AUPCAP.
* 282 L'article 298
alinéa 1er de l'AUPSRVE utilise l'expression
« requête avec assignation » ; c'est
étonnant puisque la requête et l'assignation constituent deux
modalités différentes de saisine d'une juridiction. Cette formule
ne s'explique que si l'appel est dirigé à la fois contre des
parties ayant constitué avocat et d'autres qui ne l'auraient pas
fait.
* 283 En France non plus,
aucun délai n'est fixé ; c'est ce qui explique qu'on ait pu
qualifier cette règle de simple recommandation faite au tribunal.
* 284 Voir dans le contexte
camerounais les articles 188 et suivants du CPCC.
* 285 À ne pas
confondre avec la saisie-exécution qui est l'ancienne saisie des meubles
corporels se trouvant entre les mains du débiteur, qui exigeait la
possession d'un titre exécutoire. Elle est remplacée aujourd'hui
par la saisie-vente.
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