II.B.2 - Sémantique temporelle :
granularité, intervalle, événement, changement
Figure 18 : Illustration des principaux concepts de
modélisation temporelle (Source : travail personnel).
Le temps est un phénomène continu du monde
réel. Pour être introduit dans un système informatique, il
doit d'abord être discrétisé en instants, classés de
manière ordinale sur une ligne continue représentant le temps
(Paque, 2004 ; Plumejeaud, 2011, pp. 31-32) (Figure 18).
La discrétisation du temps repose sur un
découpage en unités temporelles élémentaires
appelées « chronon ». La granularité
est la durée d'un chronon, soit le temps
minimal possible entre deux dates, ou instants, enregistrés dans la base
de données (Ott et Swiaczny, p. 59). La granularité
détermine la fréquence d'observation du phénomène
et donc la résolution temporelle, autrement dit la
précision avec laquelle les évolutions sont perçues au
cours du temps dans la base de données (Paque, 2004 ; Plumjeaud, 2011,
p. 32.).
Tout comme pour l'espace, la granularité est une
question d'échelle. Son degré de précision dépend
des besoins de l'utilisateur des données (Plumejeaud, 2011, p. 33). La
granularité pertinente en géologie est de l'ordre du millier
d'années, alors que la météorologie nécessite des
mesures toutes les heures. Il est important également d'adapter la
granularité à l'échelle spatiale, un
phénomène apparemment immobile à une certaine
échelle peut connaître des évolutions à une autre
échelle
50
(Ott et Swiaczny, 2001, pp. 59-60). Elle
détermine l'appréciation de la dynamique des changements (Yeh et
al., 1996).
Échelle
|
Phénomène observé
|
Granularité
|
Intervalle de 30 ans
|
Moyenne
|
Évolution du massif forestier
|
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1 chronon
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Grande
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Évolution du peuplement
|
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Très grande
|
Croissance de l'arbre
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|
Figure 19 : Différents niveaux de
résolution temporelle et spatiale (Source : Plumejeaud, 2011, p.
32).
Une fois le temps discrétisé, sa mesure est
possible dans un système informatique par l'ajout aux données
d'attributs temporels, ou estampilles. Elles se
présentent généralement sous la forme d'un
intervalle. L'intervalle est une durée
délimitée par deux dates. Il sert de base à la
topologie temporelle fondée sur l'algèbre
d'Allen (Ott et Swiaczny, 2001, pp. 137-139 ; Plumejeaud, 2011, p.
31)
Les travaux d'Allen (Allen, 1983) définissent treize
relations topologiques binaires entres des objets datés par un
intervalle (Tableau 3).
L'intervalle de validité d'un objet
est l'équivalent de sa durée de vie, soit la période
pendant laquelle l'existence d'un état, ou version,
d'un objet a été mesurée. Les dates d'un intervalle de
validité correspondent à des événements
(Pelekis et al., 2004 ; Plumejeaud, 2011, p. 32).
L'évènement est l'instant du
changement marquant la transition entre deux états (Langran, 1992 p.
36). Cette transition peut être modélisée sous la forme
d'une relation cardinale. Il existe six types d'évènements,
divisés en deux catégories pour les données
géographiques surfaciques (Tableau 4).
Nous employons les termes « changement
», « évolution » et «
mutation » comme des synonymes désignant la
différence et le processus de différenciation entre deux
états d'une entité ou deux versions d'un objet au cours du
temps.
51
Tableau 3 : Topologie temporelle selon l'algèbre
d'Allen (Source : Ott et Swiaczny, 2001 ; Plumejeaud,
2011)
Soit x et y deux intervalles [a;b] [c;d]
|
Topologie temporelle
|
Opérateur booléen
|
Exemple
|
Équivalent spatial
|
before
|
x avant y
|
b<c
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|
disjoint
|
|
|
|
x après y
|
a>d
|
|
|
|
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x rencontré par y x précède y
|
b=c
|
|
joint
|
|
|
|
x rencontre y x suit y
|
a=d
|
|
|
|
|
x est égal à y
|
a=c ET b=d
|
|
superposition
|
|
|
|
x chevauche y
|
a<c ET b>c
|
|
|
|
|
x chevauché par y
|
c<a ET d<a
|
|
|
|
x débute y
|
a=c ET b<d
|
|
recouvre
|
|
|
x débuté par y
|
a=c ET d<b
|
|
|
x termine y
|
b=d ET a>c
|
|
|
|
x terminé par y
|
b=d ET c>a
|
|
|
x pendant y
|
a>c ET b<d
|
|
inclus
|
|
|
x contient y
|
a<c ET b>d
|
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Tableau 4 : Événements de vie et
territoriaux (Source : Plumejeaud, 2011).
Événements
|
Relations
|
De vie
|
Création
|
0,1
|
|
Modification
|
1,1
|
|
Destruction
|
1,0
|
Territoriaux
|
Fusion
|
n,1
|
|
Morcellement
|
1,n
|
|
Déplacement
|
1,1
|
|
Les données géographiques peuvent connaître
des changements de formes et de tailles, de position et de description. Les
données géographiques peuvent connaître huit types de
changements au cours du temps (Pelekis et al., 2004) :
- Géométrie (formes, tailles et position),
- Topologie (position relative),
- Attribut (description, composante sémantique), -
Géométrie et topologie,
- Géométrie et attribut,
- Topologie et attribut,
- Géométrie, topologie et attribut.
52
Il existe deux catégories d'évolution mesurables
dans une base de données en fonction de la temporalité (Paque,
2004 ; Medici et al., 2011) :
- L'évolution discrète : dont
l'intervalle est inférieur à la granularité.
Observé à un moment
précis. Modification brusque, souvent qualifié
d'événement.
- L'évolution continue : dont
l'intervalle est supérieur à la granularité.
Observé à plusieurs moments. Changement permanent, ou
durée longue dans le temps.
Exemples :
- Feux de quelques heures à plusieurs jours ; RGFor,
granularité trois ans : évolution discrète.
- Succession végétale : de l'ordre de la
décennie : évolution continue.
Il faut distinguer les évolutions
vraies, des corrections, ou fausses
évolutions. Les premières sont des différences entre
versions d'objets dues aux évolutions réelles des entités
observées dans le temps. Les corrections sont des différences
entre versions d'objets dues à une erreur.
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