III-2-2 Les conditions psychosociales et cognitives
Très vite, lors de nos premières observations,
nous avons constaté que les groupes n'étaient pas
organisés suivant des rôles spécifiques. Mais cela
apparemment, n'enlevait en rien la bonne collaboration entre les pairs. Ce sont
des élèves qui semblent évoluer ensemble avec une
volonté de travailler franchement entre eux et dans la
spontanéité. Dans les groupes, chacun réfléchissait
et s'exprimait individuellement puis présentait aux autres ses propres
résultats qui seront critiqués ainsi que les productions des
autres.
Nous avions également observé que la parole
était bien distribuée dans la plupart des groupes. L'animateur
semblait être écouté des autres. Cependant, certains
groupes étaient dirigés par des leaders qui prenaient souvent en
charge le contenu même de l'activité et d'autres leaders
s'effaçaient facilement au détriment d'autres membres du groupe
si leur résultat du moment ne portait pas l'assentiment de tous. Nous
avons rencontré cela dans la classe de M3. Facilement, le chef de groupe
a laissé sa place d'animateur principal à un autre membre qui a
expliqué et écrit leur réponse sur l'ardoise
géante. Pourquoi ? Que reproche-t-on au chef ? Est-ce sa timidité
ou son incompétence intellectuelle ? Ou est-ce sa simplicité ou
son physique qui n'impressionne pas ? Vraisemblablement, le chef semble
physiquement faible, il est aussi peu dynamique. Nous avons, après la
leçon, approché M3 pour mieux comprendre. Il se trouve que c'est
un groupe qui s'est déjà plaint et les membres ont
désiré changer de chef. C'est M3 qui les a sensibilisés et
ils ont accepté poursuivre avec ce chef de groupe. Bref, le groupe tente
de s'accommoder à la situation. Malgré tout, il a des productions
acceptables au vu des images filmées.
Dans le domaine cognitif, le travail de groupe oblige les
élèves à s'exprimer verbalement. Ce qui permet de cerner
les forces et faiblesses du groupe ou de la classe entière. Lors de nos
passages dans les classes et avec surtout les visionnements des
séquences filmées, il nous est apparu que certains groupes sont
très animés et d'autres très calmes avec très peu
d'échanges verbaux. Quelques fois, nous avons surpris des
élèves s'exprimant dans leur langue maternelle afin de se faire
mieux comprendre.
68
Suite à ces constats, nous avons déduit que les
groupes dans leur dynamique diffèrent et chaque groupe évolue
suivant ses propres ambitions.
III-2-3 La pédagogie utilisée par chaque
maîtresse
L'échantillon retenu pour notre étude est
constitué des classes de CP2 tenues respectivement par M4 en zone
urbaine et M3 en zone rurale. La leçon observée concerne les
décompositions additives du nombre 60. Comment chaque enseignante s'y
est-elle prise pour transmettre les connaissances aux élèves en
suivant la technique du travail en groupe ? Nous allons exposer la
méthodologie suivie par chacune d'elle en deux points essentiels : les
phases identiques et celles spécifiques.
Comme toute leçon de calcul, elles ont toutes
commencé par le calcul mental puis le rappel des pré requis.
Après la motivation, vient la phase concrète. C'est le moment des
manipulations du matériel disponible. Chacune a d'abord effectué
avec les élèves une manipulation collective et ensuite une
manipulation individuelle. Après vérification de la
maîtresse des manipulations faites par les uns et les autres, des
répétitions orales et à haute voix des
décompositions trouvées, est intervenue la phase
semi-concrète. Elle consiste en la manipulation des symboles, des
figurines ou des objets dessinés et découpés sur un
support afin de représenter les décompositions possibles du
nombre 60. A cette phase, la manipulation a été encore faite de
manière collective avant de passer à celle individuelle. Les
résultats obtenus sont lus à haute voix par les
élèves. C'est en ce moment que chacune est entrée dans la
phase abstraite celle qui amène les élèves à
manipuler les chiffres, les nombres. Toutes les décompositions additives
trouvées sont transcrites en chiffres suivant l'opération qui
convient. Dans chaque groupe, on lit les résultats obtenus. Enfin, c'est
la phase des exercices d'application pendant laquelle les interactions doivent
plus se faire voir car il s'agit de faire un travail individuel, puis mettre en
commun les résultats et aboutir à un consensus dans le groupe.
Pour les exercices, la plupart des groupes des deux classes s'en sont sortis,
mais de manière différente.
Quelles ont été les aspects de la
méthodologie qui font que les leçons n'ont pas réussi ou
ont réussi de part et d'autre suivant le travail en groupe pour lequel
les interactions sont très importantes ? Premièrement, la classe
de M4 dispose d'un matériel pour la manipulation collective
adressée à la classe entière. Il s'agit de l'ardoise
à points mobiles. C'est un matériel
69
qui permet de faire la manipulation collective et elle est
observable par tous les élèves de la classe y compris ceux qui
sont assis aux dernières places.
A cette phase, M3 fait une manipulation collective avec des
bâtonnets en main et elle invite deux élèves à faire
la décomposition devant leurs camarades. M3 ne dispose donc pas de
l'ardoise à points mobiles. Puis, chaque groupe procède à
son tour à la manipulation. Au vu des résultats trouvés,
chaque chef de groupe interroge les membres de son groupe afin que ceux-ci
répètent oralement une des décompositions
trouvées.
Après cette phase, M4 permet à chaque groupe
constitué de quatre (04) élèves à savoir les
élèves d'une même table de procéder à une
autre manipulation collective. Dans le film, nous pouvons voir comment les
élèves discutent déjà pour obtenir les bonnes
réponses possibles. Cette phase se termine par les
représentations symboliques des décompositions du groupe par le
guide. Notons que le chef des groupes de quatre est appelé `guide'.
Après cette manipulation, pendant que M4 envoie les
groupes de dix hors de la classe, M3 continue la leçon en classe. La
même manipulation se fait maintenant avec les groupes de dix et hors de
la classe. Le temps imparti pour cette activité est de cinq (05)
minutes. Puis, tous les élèves retournent en classe. Chaque
groupe présente une de ses productions au tableau et la classe
apprécie. Ce moment correspond chez M3 à la restitution
collective des résultats obtenus. Cette restitution qui se fait
oralement et dans chaque groupe, est dirigée par le chef de groupe.
Puis vient la phase abstraite qui comporte les mêmes
actions que la phase semi-concrète. Le moment des exercices
d'application venu, M4 écrit les exercices au tableau et pendant que les
élèves se dirigent hors de la classe une fois encore, les chefs
de groupe recopient les exercices et rejoignent les autres. Dans les groupes,
on constate les contradictions et les accords de positions. Les
élèves discutent beaucoup en ce moment puis naissent les
consensus. Le chef de groupe est chargé d'écrire, sur l'ardoise
géante, les résultats consensuels issus des discussions en
groupe. Avec les images filmées, nous avons clairement vu des consensus
se construire dans quelques groupes. Dans la classe de M3, ce moment est aussi
animé. Chaque élève traite les exercices puis vient la
mise en commun des travaux par groupe. Chaque élève montre son
résultat aux autres membres qui apprécient. Le chef de groupe
joue en ce moment le rôle de secrétaire. Il reprend les exercices
en tenant compte des résultats obtenus par consensus sur l'ardoise
géante.
70
|