I.3.2- Le manque des innovations financières:
Une autre caractéristique actuelle du système
bancaire camerounais est le manque d'innovations financières.
Il se traduit par une quasi-absence des services financiers.
Alors que partout ailleurs et notamment dans les pays occidentaux et
Européens, se développe l'innovation financière, dont le
rythme tend à s'accélérer avec comme corollaire,
l'expansion et la densification des marchés et pour conséquence,
une plus grande capacité à répondre aux besoins et
à offrir des opportunités d'investissement,
(Bekolo-Ebé, 2002). L'intermédiation
financière au Cameroun se caractérise par une pauvreté des
instruments, souvent d'ailleurs inadaptés aux besoins, tant pour
l'épargnant que pour l'emprunteur. Et lorsque ces instruments existent,
ils sont très peu diversifiés et de qualité
médiocre. Les conditions pour y accéder sont extrêmement
malthusiennes et l'assurance de financement du fait de la
fidélité des relations est pratiquement nulle
(Bekolo-Ebé, 1998). La faiblesse de l'innovation
explique ainsi pour une large part les difficultés des entreprises
à trouver les financements adaptés au cycle de production, et la
tendance des agents à agir en marge du système. C'est pourquoi
les marchés y sont aussi peu développés, et
l'intermédiation informelle y prend une telle ampleur, posant ainsi
à l'intermédiation financière un problème
d'adaptation.
Le système bancaire demeure fragmenté et
élitiste, avec une exclusion du financement bancaire, d'une frange
importante de la population, qui, pour résoudre ses besoins, recourt
à la
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 94 ~
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
MEFO'O NGO'O Yves Lionel ~ 95 ~
microfinance. En plus, il manque de souplesse, les
démarches administratives sont toujours longues et fastidieuses pour
l'ouverture des comptes, la réalisation des opérations de
dépôts et de demandes de crédits (compte tenu des
conditions exigées) (Avom, 2004). Bien plus, les rares
services disponibles ne sont pas accessibles à tous les clients. Par
exemple, l'existence des cartes bancaires et des guichets de distribution
automatique de billet devenu depuis de nombreuses années des services
ordinaires dans les pays développés et certains pays au Sud du
Sahara comme l'Afrique du Sud et les pays d'Afrique du Nord demeure
paradoxalement un grand luxe. Ainsi que l'a relevé Avom
(2004), la SGBC et la BICEC ont été les premières
à expérimenter le service de paiement par carte bancaire. Plus
récemment, Afriland First Bank vient de mettre à la disposition
du public un porte-monnaie électronique (i-card) qui permet de
réaliser les paiements sur l'ensemble du territoire, dans les surfaces
disposant d'un terminal agréé. Elles ont mis à la
disposition de leurs clients des cartes de retrait. Cependant, les
distributeurs associés à ce service n'ont pas un fonctionnement
permanent. Ils sont régulièrement en panne et de nombreux
désagréments sont régulièrement signalés La
monnaie demeure le seul actif financier le plus utilisé. Le
chèque dont l'obtention nécessite une procédure longue
(plus d'un mois) n'est pas totalement accepté comme moyen de
mobilisation de la monnaie et de paiement. Au total, la banque apparaît
depuis plusieurs décennies après l'indépendance et ce
malgré les nombreuses restructurations et mutations, culturellement en
déphase avec les réalités économiques et sociales.
Les taux d'intermédiation bancaire c'est-à-dire le rapport entre
le nombre de population pour un guichet de banque reste faible et se situe
à environ un guichet pour 200000 habitants (COBAC, 2000) c'est ce qui
explique par ailleurs sa très forte concentration. Aussi
l'émergence de la micro finance qui est plus adaptée aux besoins
des populations en majorité pauvre, trouve là son explication.
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