Coopération transfrontalière en Afrique de l'ouest: Enjeux et perceptions des populations burkinabè( Télécharger le fichier original )par Monique Bassénewindé OUEDRAOGO Université de Ouagadougou - Master 2 de recherche en Sociologie 2012 |
ABREVIATIONS, ACRONYMES ET SIGLES
INTRODUCTIONLa mondialisation paraît surdéterminer l'évolution des sociétés sans laisser d'alternative à la différence ; une mondialisation qui a des relents positifs et négatifs. Pour Jérôme Lombard & al. (2006), les pays du Sud ne doivent pas refuser d'adopter la mondialisation, pour ne pas rater le coche de la modernisation. Cependant, si les avantages de la mondialisation sont partagés, les inconvénients le sont aussi. C'est le cas de la crise des subprimes qui, commencée aux Etats-Unis d'Amérique en 2008, a atteint l'Europe et le reste du monde, devenant ainsi une crise économique et financière mondiale. La question n'est donc pas celle de choisir ou de ne pas choisir, mais force est de reconnaître que ce contexte international, qualifié de « système-monde » par Immanuel Wallerstein1(*)(avril 1990), est favorable aux regroupements continentaux, régionaux et sous-régionaux. Ces grands ensembles semblent être le nouveau refuge pour faire face aux contraintes politiques, économiques et sociales auxquelles sont confrontés les Etats du monde. Pour ce qui est particulièrement des pays africains, l'Organisation de l'Unité Africaine (OUA), devenue Union africaine (UA), qui a fêté ses cinquante années d'existence en 2013, est un exemple de regroupement continental. Aussi, chaque 7 juin, elle célèbre la journée africaine des frontières, dont le thème en 2013 a porté sur : « Unir et intégrer l'Afrique à travers des frontières pacifiées, ouvertes et prospères ». Au plan ouest-africain, certains Etats ont opté, que ce soit à travers la Communauté des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) ou par le biais de l'Union Economique et Monétaire Ouest-Africaine (UEMOA), de mutualiser leurs efforts, dans le but de faire de la sous-région un « espace de développement partagé ». Dans cette tâche de regroupement, voire d'estompage des frontières, les Etats et leurs populations ont un rôle à jouer pour un partenariat « gagnant-gagnant ». Cela est d'autant plus nécessaire que les frontières héritées de la colonisation2(*) sont généralement artificielles, divisant des populations qui, jadis, entretenaient des liens étroits. Or, la délimitation du colonisateur n'a pas tenu compte des réalités économiques, sociales et culturelles des populations africaines ; toute chose qui a lourdement limité les efforts de développement sous-régionaux. Pour preuve, nombreux sont les Etats qui se retranchent derrière les frontières physiques pour concevoir un développement souverainiste, auto-centré. Dès lors, écrit Joseph Vincent Ntuda Ebodé (2011 : 15), « La frontière devient ainsi une ligne et un mur servant à déterminer et à protéger les richesses nationales contre les convoitises extérieures ». Dans un tel contexte, l'Afrique d'hier caractérisée par une forte solidarité familiale est devenue aujourd'hui le continent des « enclaves », dont certains, jaloux de leur privilège naturel regardent dédaigneusement les autres « enclaves » menacées de famine (John O. Igué & al. 2010). A l'évidence, la gestion unilatérale et individualiste des frontières héritées de la colonisation n'a pas apporté le développement économique, social et culturel tant souhaité. Bien au contraire, certains conflits sont nés et avaient leurs causes explicites ou implicites dans les frontières héritées de la colonisation : Burkina Faso-Mali, Bénin-Niger, Cameroun-Nigéria3(*), pour ne citer que ces exemples. Forts du constat que la frontière ne doit plus être un espace de fragmentation4(*), certains Etats africains ont commencé à envisager d'autres formes de gestion, différentes de la gestion souverainiste : une gestion capable de conduire à la paix, à la sécurité et au développement économique et social durable. Dans cette dynamique, la gestion coopérative des ressources transfrontalières est de plus en plus prônée et encouragée par les structures sous-régionales, régionales et internationales comme l'UEMOA, la CEDEAO, l'UA, l'Union européenne (UE), l'Organisation des Nations-Unies (ONU). Ce nouveau genre de coopération plus inclusive touche des domaines éclectiques : l'économie, la santé, l'eau, les transports, la défense, etc. Il se veut être une initiative endogène, une sorte de démocratie populaire. Désormais, il ne s'agit plus de privilégier seulement le chenal du supranational, à travers les traités et les instruments juridiques. Autrement dit, les avancées normatives doivent se concrétiser dans la vie de tous les jours des populations ouest-africaines5(*). C'est également dans cette dynamique qu'est né le concept de « l'intégration des peuples » ou « intégration par le bas » qui doit se faire concomitamment avec « l'intégration des Etats ». Somme toute, quels sont les enjeux de la coopération transfrontalière et sa perception par les populations du Burkina Faso ? C'est l'intérêt pour cette dualité - enjeux et perceptions- qui nous a conduit au choix du thème : « La coopération transfrontalière en Afrique de l'Ouest : Enjeux et perceptions des populations burkinabè ». Ainsi, le présent mémoire s'articule autour de deux chapitres : · le premier chapitre, consacré au cadre théorique de la recherche, présente l'état de la question sur la coopération transfrontalière ; · le second chapitre qui traite du cadre méthodologique présente les méthodes, les outils, l'orientation théorique, conceptuelle et les perspectives de la recherche. * 1 Immanuel Wallerstein, « L'Occident, le capitalisme et le système-monde moderne », in Sociologie et sociétés, vol.22, n°1, avril 1990, pp.15-52. * 2 La plupart des frontières africaines sont le résultat de la Conférence de Berlin, qui s'est tenue du 15 novembre 1884 au 26 février 1885. Elle a conduit au partage du continent africain ; toute chose qui a abouti à sa balkanisation. * 3 Enda Diapol (2007) * 4 Les frontières africaines sont souvent jugées comme négatives (Michel Foucher, 1988) non seulement dans leur tracé mais aussi par rapport à leur impact sur les politiques de développement (Assane Seck, « Découpage territorial et mal développement en Afrique », pp.377-384 in Tropiques, lieux et liens, Paris, ORSTOM, 1989 ; Nicolas Sosthène Boutso (1989), p.42 ; Wole Soyinka parle de tragique héritage et qualifie le colonisateur, de « tailleur fou »), auteurs cités par Bruno Stary, « Réseaux marchands et espaces transfrontaliers en Afrique de l'Ouest », in Afrique contemporaine, n°177, 1er trimestre 1996, pp.45-53 * 5 Enda Diapol (2007) |
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