La lutte contre la criminalité financière au Cameroun( Télécharger le fichier original )par Arsène Gérard ESSONO EDOU Université de Yaoundé II - Diplôme dà¢â‚¬â„¢Etudes Approfondies 2012 |
B- Les lenteurs dans les réactions des autoritésSelon Jean DE MAILLARD103(*), l'exploitation de toutes les failles de la Loi a entrainé la prolifération des criminels. Aussi affirme-t-il que « le marché de la loi rend les criminels prospères ». Au Cameroun, nombreux sont ceux qui partagent cette opinion. En effet, devant la prolifération des crimes financiers, l'on est amené à se poser des questions quant à la fiabilité des autorités, du système mis en place. Mais, à l'étude de ce système et des garanties qu'il offre, l'on se demande plutôt si cette persistance de criminels n'est pas due à la lenteur ou à l'inaction des autorités chargées de mettre ce système en oeuvre. En effet, devant une organisation assez bien élaborée de la lutte contre la criminalité financière et semblant répondre à plusieurs attentes, l'on s'attendrait à voir ce type de criminalité en général baisser de façon exponentielle. Or, si tel n'est pas le cas, on est forcé de se tourner vers les autorités chargées de l'exécution des dispositions mises en place. D'où l'impression de lenteur, voire même d'inaction des autorités, ressentie par des populations du triangle national. Cette même lenteur s'observe, on l'a dit, dans la pauvreté de l'actualité jurisprudentielle des opérations de grande envergure telles l' « opération épervier » engagée par les autorités étatiques contre les auteurs d'atteintes à la fortune publique. Une autre idée partagée, est celle selon laquelle la criminalité financière aurait atteint un degré de gravité extrêmement difficile à contrôler pour les autorités camerounaises. Les actions entreprises ne seraient alors que des moyens pour faire croire à la maîtrise d'un phénomène qui dépasse même le système judiciaire. Selon le syndicat de la Magistrature ATTAC104(*), les « responsables politiques et économiques parlent à leur aise de lutter contre ces phénomènes, mais les mesures envisagées ne visent habituellement qu'à corriger les abus les plus gênants, voire à simplement amuser l'opinion. Cela revient à accepter de pérenniser le système, à le valider en prétendant corriger ses dérives, alors que c'est son principe même qu'il faut condamner. » C'est dire que, telle qu'elle est mise en oeuvre, la lutte contre la criminalité financière ne produit que des résultats écrans, qui masquent à peine la réalité, celle d'une criminalité de plus en plus florissante. Pour terminer, un autre élément permettant de ressentir l'impression de lenteur des autorités, est le retard dans la mise en place de certaines institutions et actions. En effet, plusieurs institutions censées faciliter la lutte contre la criminalité financière sont prévues depuis quelques années, mais ne sont pas encore mises en place. C'est le cas par exemple des Juridictions inférieures des comptes, qui devraient faciliter l'activité de la Chambre des Comptes de la Cour Suprême. Prévues dans l'alinéa 2 de l'article 41 de la Loi constitutionnelle du 18 Janvier 1996, leur mise en place n'est pas encore effective à ce jour, ce qui ne facilite pas le contrôle des comptes publics et ceux des services publics. Ainsi donc, le système camerounais de lutte contre la criminalité financière est confronté à plusieurs difficultés d'ordre social. Cependant, plusieurs autres difficultés de types différents font obstacle à la lutte contre la criminalité financière au Cameroun. Paragraphe 2 : LES AUTRES DIFFICULTES RENCONTREES PAR LE SYSTEME DE LUTTE CONTRE LA CRIMINALITE FINANCIERE AU CAMEROUNLa mise en oeuvre de la lutte contre la criminalité financière est rendue difficile à cause du nombre élevé d'obstacles qui jalonnent sa voie. Ces difficultés sont aussi bien d'ordre personnel (A) que d'ordre institutionnel (B). * 103 In Le Monde diplomatique, Avril 2000, « Dans l'archipel planétaire de la criminalité financière : le marché de la Loi rend les criminels prospères » * 104 Syndicat de la Magistrature ATTAC, En finir avec la criminalité économique et financière, Ed. Mille et Une nuits, Nov. 2002, p.119 |
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