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La lutte contre la criminalité financière au Cameroun( Télécharger le fichier original )par Arsène Gérard ESSONO EDOU Université de Yaoundé II - Diplôme dà¢â‚¬â„¢Etudes Approfondies 2012 |
A- Les méfaits sociaux de la criminalité financièreSouvent négligées, les conséquences de la criminalité financière sur la société camerounaise sont considérables. Toutefois, leur importance varie selon le type d'infractions. En effet, alors que certaines infractions financières, plus anciennes, causent d'énormes dégâtsau sein de la société camerounaise, d'autres au contraire sont nouvelles et même spéciales. En ce qui concerne les infractions dites anciennes, la pratique courante d'infractions financières s'est tellement ancrée dans les mentalités des populations que celles-ci sont à présent considérées comme des habitudes de vie. Selon Patrick CHABAL et Jean Pascal DALOZ93(*), « la corruption en Afrique n'est pas seulement le fait de quelques brebis galeuses, mais il s'agit d'un comportement habituel, attendu à toutes les transactions. » C'est dire que, dans la société camerounaise, les pratiques de corruption, de trafic d'influence et autres sont tellement ancrées dans la mentalité des populations que le fait d'y déroger semble constituer plutôt une exception. En effet, dans l'attribution des marchés publics par exemple, plusieurs camerounais ont développé le reflexe de rechercher d'abord « quelqu'un », soit un membre de la famille, soit un ami, soit une personne monnayable. De même le sens de la méritocratie et des autres valeurs nobles, essentielles à l'avancée de l'Etat, est en train de disparaître. Même dans le domaine éducatif, où les valeurs essentielles du citoyen sont enseignées, la pratique de l'achat des notes ou des concours est si courante dans la mentalité camerounaise que dans certains cas, celui qui essaye de s'en sortir par son mérite se trouve recalé. Pour ce qui est des cas de détournements et fraudes à la législation fiscale, leur impact, bien que légèrement atténué par rapport à la corruption, se fait assez ressentir. En effet, le contrôle exercé par les agents du fisc est souvent assez serré, ne permettant pas souvent d'évasions fiscales. Cependant, dans certains cas, des experts sont utilisés pour établir de faux bilans, dans d'autres, l'on s'assure simplement de la coopération des agents du fisc. Les cas de détournements sont aussi répandus dans la mentalité camerounaise, avec l'adage selon lequel « la chèvre broute là où elle est attachée. » cependant, du fait que cette infraction nécessite un lien avec un organisme étatique ou dans lequel l'Etat est intéressé, tout le monde ne saurait la pratiquer. De manière générale, la criminalité financière entraine plusieurs autres conséquences sociales. D'abord, elle entraine une négation totale des droits humains. Toute personne ayant les mêmes droits et les ressources publiques devant être distribuées équitablement, le fait de s'approprier une part de ces ressources porte atteinte aux droits de plusieurs camerounais. Cela entraine des discriminations énormes, ceux qui s'enrichissent malhonnêtement aux dépens des populations ayant une richesse insolente devant ceux qui le font honnêtement. Face à cette frustration, certaines personnes peuvent se lancer dans la commission de crimes divers, afin d'accéder aussi au statut de personne possédant plusieurs ressources financières. Ce qi a pour conséquence de faire hausser le taux de criminalité dans le pays. Enfin, pour ce qui est des infractions nouvelles ou spéciales, telles que les infractions d'affaires, du fait de leur nouveauté pour la majorité des camerounais, il est encore difficile de dire qu'elles influencent gravement la société camerounaise. En effet, du fait que, pour leur réalisation et même très souvent pour en être victime, il soit nécessaire de prendre part à la vie des affaires, tout le monde ne saurait facilement les pratiquer ni les subir. Considérées pour le moment comme des infractions dévolues à un type de personnes particulier, elles n'ont pas encore pu jouer un grand rôle dans la société camerounaise. Cependant, leurs conséquences sur l'économie du pays sont énormes. * 93 CHABAL et DALOZ, « l'Afrique est partie : du désordre comme instrument politique » ; Economica, Paris, 1999 |
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