Partie II : limites du PIB et les nouveaux
instruments de mesure.
Si le PIB demeure le principal agrégat de la
comptabilité nationale et un indicateur économique pertinent pour
mesurer la croissance de l'économie d'un pays, il présente aussi
des limites qui sont largement reconnues, qui en font un indicateur
inadapté pour mesurer le bien-être et le développement
d'une nation. L'économiste et statisticien américain Simon
Kuznets, l'inventeur du produit intérieur brut (PIB), lançait en
1934 devant le congrès américain l'avertissement
suivante : « La mesure du revenu national peut difficilement
servir à évaluer le bien-être d'une nation ».Simon
Kuznets était conscient de cette situation, il avait donc
présenté le PIB comme un indicateur de l'activité
productive, et rien de plus. En outre, après la seconde guerre mondiale
les économies des pays développés connaissent une forte
croissance économique, dont les conséquences sur le niveau de vie
sont extraordinaires, ce qui fait du PIB par habitant l'indicateur fondamental
du bien-être et du développement dans cette époque.
Cependant, cette façon pour mesurer cet indicateur qui concentre
uniquement sur la production c'est-à-dire tout ce qui a une valeur
monétaire, pouvaient être liée à des
activités considérées comme nuisibles pour le
bien-être des individus et l'environnement, cela donne naissance a
plusieurs recherches en 1970 sur la relation entre l'augmentation du PIB et le
bien-être ou le progrès des sociétés.
Dans les chapitres suivants, nous allons voir les principales
limites du PIB et défauts dans sa détermination, ainsi que leurs
indices alternatifs et sectoriels mis au point dans le monde entier afin
d'évaluer le bien-être social et environnemental.
Chapitre 1 : limites du PIB.
Paragraphe1 : PIB/Développement
durable :
La notion de développement durable (sustainability en
anglais), émerge dans les années 1980, afin de lier le
développement économique avec le maintien des équilibres
écologiques. Cette notion a été précisée
dans le rapport de la Commission Brundtland des Nations Unies en 1987, qui
défini le développement durable comme
« celui qui répond aux besoins du présent sans
compromettre la capacité des générations futures à
répondre à leurs propres besoins ».
Le développement pour être durable (ou soutenable)
il doit concilier trois axes fondamentaux : la croissance
économique, respect des équilibres naturels de la planète
et la cohésion sociale. Donc, il est nécessaire de disposer d'une
information quantitative pour mesurer les progrès des
sociétés vers la voie de la durabilité.
Malgré que le PIB est un indicateur principale pour
mesurer la croissance économique d'un pays, il reste insuffisant pour
mesurer le développement durable dans les autres dimensions, car il ne
tient pas compte du respect ou non des principes de développement
durable ni de ses effets sur l'environnement. Or, le taux de croissance du PIB
par habitant est le premier indicateur parmi les 11 indicateurs
« clés » de la stratégie de l'Union
Européen pour le développement durable révisée en
2006. Le PIB ne nous donne toutefois pas des informations sur le
bien-être de la société ou le degré de la
durabilité de son développement. Donc quelles sont les limites du
PIB qui en font un indicateur incapable de mesurer le développement
durable ?
Tout d'abord, la production qui contribue à la pollution
et la production nécessaire à la dépollution ou les
produits destiner à la lutte contre la pollution, sont
comptabilisés et font augmenter le PIB, même que le tout
est pour un résultat nul. Pour cela certains économistes
préfèrent de mesurer la croissance par le PIN en retranchant du
PIB lesdites productions.
D'autres parts, les dimensions social et économique du
développement durable doivent permettre à chaque individu une vie
exempte de la pauvreté, mais la relation entre le taux de la
pauvreté et celui de la croissance économique n'est pas toujours
positif. On peut avoir une augmentation du PIB mais cela ne signifier pas
forcement une diminution de la pauvreté, à cause des
inégalités dans la distribution des richesses. De nombreuses
économies africaines ont enregistré une croissance
économique émouvante sans diminuer pour autant le taux de
pauvreté en Afrique, qui est le taux le plus élevé dans le
monde avec 47.5% de la population vivant avec moins d'1.25 dollar EU par jour.
Car ces économies africaines dépendent largement du
pétrole et du gaz et de l'extraction minière, qui créent
peu d'emplois pour les jeunes. Le Maroc a enregistré en 2000 une
tendance à la hausse du PIB par habitant. En effet, il est passé
de 13819 à 24864 dirhams en 2010 c'est-à-dire une augmentation de
près de 93%. Cependant, il faut noter que cette augmentation ne prend
pas en compte les disparités entre les milieux urbain et rural et, que
le taux de pauvreté même s'il a connu une baisse constante, il
reste relativement élevé, notamment en milieu rural (14.2% en
milieu rural, par contre 4.7% en milieu urbain).
De plus la croissance économique est destructrice des
richesses naturelles non renouvelables, les prélèvements sur ces
ressources naturelles sont considérés comme des créations
des richesses, tandis que leurs dégradations ne sont pas inclues dans le
PIB. Donc le PIB ne mesure que des flux et non pas des stocks ou de patrimoine,
ce qui ne permet pas d'évaluer le caractère soutenable ou non de
la croissance. Ainsi que PIB ne prend pas en compte la pollution et les
externalités négatives (eaux de rivière polluées,
rejets atmosphériques, forêts détruites, etc.) liées
aux activités de production parce qu'elles sont des couts sans
contrepartie monétaire.
Malgré que l'IDH permet de mieux évaluer le
développement parce qu'il base sur d'autres dimensions que
l'économie comme la santé et l'éducation, il reste encore
un indicateur qui n'a pas été conçu pour évaluer la
soutenabilité du développement. En effet pour mesurer la
soutenabilité du développement selon un indicateur patrimonial du
stock total de richesse est un jeu très difficile, car il pose de
nombreuses difficultés en ce qui concerne l'évaluation de
certains capitaux naturels que le capital physique qui peut être
considéré comme le plus facile. De cette approche qui concentre
sur la comptabilité du patrimoine, et depuis des années des
indicateurs de développement durable ont vu le jour, à titre
d'exemple le PIB vers du PNUE, et de plus en plus d'autres indicateurs
apparaissent pour construire non pas seulement un indicateur de
développement durable mais un tableau de bord du développement
durable comprenant plusieurs indicateurs mesurant l'évolution du
développement durable dans tous ses domaines : économique,
social et environnementale.
Le Maroc a élaboré des indicateurs de
développement durable dans le cadre du Comité National des
Indicateurs du Développement Durable (CNIDD), qui sont au nombre de 65
répartis sous la forme suivante :
« - 27 IDD de Forces motrices qui renseignent sur
l'activité économique et sociale ;
- 7 IDD de Pressions qui présentent les données
relatives aux pressions de la société et des différents
secteurs d'activité sur l'environnement ;
- 14 IDD d'Etats qui permettent d'évaluer l'état de
l'environnement;
- 5 IDD d'Impacts qui traduisent les conséquences de
l'état de l'environnement sur la santé humaine;
- 12 IDD de Réponses qui mettent en exergue l'action des
pouvoirs publics face aux pressions et aux impacts. » (Rapport
national 2011 des Indicateurs du Développement Durable du Maroc).
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