1. Arrangement en vue de la reconnaissance mutuelle des
qualifications professionnelles des infirmières
Signé en juin 2010 par les autorités
compétentes21, l'arrangement en vue de la reconnaissance
mutuelle des qualifications professionnelles des infirmières et
infirmiers est entré en vigueur en juin 2011. Avant tout, l'ARM exclut
à l'article 5 les infirmières québécoises
diplômées d'un DEC en soins infirmiers « étant
donné que le programme français comporte au moins 1395 heures
d'enseignement théorique et clinique de plus que le DEC
québécois » (ARM infirmière, 2010 : 5). Pour
les autres infirmières québécoises inscrites au Tableau de
l'Ordre et possédant un permis d'infirmière, il faut
réussir « un stage d'adaptation en milieu clinique d'une
durée de 75 jours, dont le contenu et les modalités sont
agréés par l'Ordre national des infirmiers de France »
(ibid, 6). Le demandeur qui satisfait au stage se voit autoriser par le
ministère de la Santé à exercer sur le territoire
français la profession d'infirmière sans distinction avec
personne diplômée en France.
Pour une infirmière française, la
démarche est similaire puisqu'elle doit aussi réussir un stage
d'adaptation de 75 jours en milieu clinique afin d'être inscrite au
Tableau de l'Ordre22. Si en théorie la situation semble
claire dans les faits les infirmières françaises immigrantes au
Québec ont eu la surprise de pas être considérées
comme des infirmières cliniciennes (baccalauréat), mais comme des
infirmières techniciennes (DEC). La situation a depuis
évolués puisque les cohortes françaises
diplômées après 2009 sont reconnues comme des
infirmières cliniciennes. Par conséquent, le Québec a
créé une démarcation entre les infirmières
françaises en fonction de leurs années de diplomation,
distinction qui n'existe pourtant pas en France23.
21 Pour le Québec : l'Ordre des
infirmières et infirmiers du Québec ; pour la France : la
ministre de la santé et des sports et l'Ordre national des infirmiers de
France
22 Les infirmières doivent aussi être
à jours dans leurs cotisations à leurs Ordres professionnels.
Québec (2012-2013) : 411,03$ ; France (2013) : 30 € pour les
infirmiers salariés (secteurs public et privé), les infirmiers
inscrits à l'Ordre exerçant à l'étranger et les
infirmiers inscrits pour exercer uniquement à titre
bénévole (retraités ou non, hors réserve sanitaire)
; 75 € pour les infirmiers libéraux.
23 Code de la santé publique
française
22
Comme pour les avocats il n'existe pas d'obligation de rester
membre de son Ordre d'origine. Pour les infirmières dans les deux
territoires la reconnaissance est une reconnaissance conditionnelle
puisque les demandeurs se voient imposés des « mesures de
compensation significatives pour combler les différences substantielles
dans la formation professionnelle reçue dans le territoire d'origine
» ici sous la forme d'un stage de 75 jours (Côté, 2008 :
370). Si les démarches demandées se classent au niveau le plus
exigeant de l'échelle de Côté, elles ne semblent pas pour
autant arrêter les infirmières françaises, puisqu'au 31
décembre 2012, 373 ont obtenu l'autorisation légale d'exercer sur
le sol québécois, alors qu'elles ne sont que 6 a avoir fait le
chemin inverse.
Afin de pouvoir comparer l'avant et l'après-ARM, nous
allons revenir sur les démarches demandées aux infirmières
diplômées hors du Canada puis aux infirmières hors UE.
Premièrement, l'infirmière doit constituer son dossier de demande
de reconnaissance afin d'obtenir la reconnaissance d'équivalence. Le
comité d'admission par équivalence de l'OIIQ analyse le dossier
et établit si l'infirmière doit ou non repasser des formations
complémentaires. Deuxièmement, l'infirmière doit
réussir un programme d'intégration professionnelle, même si
l'OIIQ a établi une équivalence parfaite. Cette formation varie
de « quelques semaines à quelques mois selon le profil de chaque
infirmière » (OIIQ, 2013). Troisièmement,
l'infirmière doit passer et réussir l'examen professionnel de
l'Ordre, indépendamment de son expérience et de son lieu de
provenance (ibid, 2013).
En France les démarches ne sont pas plus simples
puisqu'il faut réussir les épreuves de sélection pour les
infirmiers ayant un diplôme hors Union européenne d'un Institut de
Formation en Soins infirmiers (IFSI) qui déterminera si le candidat peut
ou non bénéficier « d'une dispense de scolarité pour
l'obtention du diplôme d'État d'infirmier ». Si l'IFSI
décide que non, le demandeur doit suivre la totalité où
une partie de la formation initiale. (CRIPP, 2013)
En conclusion, l'ARM est venue transformer les
démarches demandées aux candidats par rapport à ce qui
était exigé avant l'entrée en application de
l'arrangement. Ces modifications qui facilitent les démarches expliquent
en partie pourquoi les infirmières
23
françaises viennent en grand nombre travailler au
Québec. Toutefois, malgré la réciprocité des
démarches pour les infirmières québécoises il
semble que cela n'est pas suffisant pour entrainer une immigration vers la
France. Par conséquent, l'ARM des infirmières confirme que plus
les barrières institutionnelles sont réduites, plus le volume du
flux est important, ce qui confirme notre hypothèse H1. Il est essentiel
de tester notre hypothèse H2 afin de vérifier si celle-ci peut
expliquer l'asymétrie très forte entre le flux des
infirmières françaises et le flux des infirmières
québécoises.
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